Scène V
Floridan,Pymante,Dorise, troisVeneurs, portant en leurs mains les vraishabits de Pymante,Lycaste etDorise
PremierVeneur
Écoute, il est fort proche :
C’est sa voix qui résonne au creux de cetteroche,
Et c’est lui que tantôt nous avionsentendu.
Floridandésarme Pymante, et en donne l’épée à garder àDorise.
Prends ce fer en ta main.
Pymante
Ah, cieux ! je suis perdu.
SecondVeneur
Oui, je le vois. Seigneur, quelle aventureétrange,
Quel malheureux destin en cet état vousrange ?
Floridan
Garrottez ce maraud ; les couples de voschiens
Vous y pourront servir, faute d’autresliens.
Je veux qu’à mon retour une promptejustice
Lui fasse ressentir par l’éclat d’unsupplice,
Sans armer contre lui que les lois del’État,
Que m’attaquer n’est pas un légerattentat.
Sachez que s’il échappe il y va de vostêtes.
PremierVeneur
Si nous manquons, seigneur, les voilà toutesprêtes.
Admirez cependant le foudre et sesefforts,
Qui, dans cette forêt, ont consumé troiscorps :
En voici les habits, qui sans aucundommage
Semblent avoir bravé la fureur de l’orage.
Floridan
Tu montres à mes yeux de merveilleuxeffets.
Dorise
Mais des marques plutôt de merveilleuxforfaits.
Ces habits, dont n’a point approché letonnerre,
Sont aux plus criminels qui vivent sur laterre :
Connaissez-les, grand prince, et voyez devantvous
Pymante prisonnier, et Dorise à genoux.
Floridan
Que ce soit là Pymante, et que tu soisDorise !
Dorise
Quelques étonnements qu’une telle surprise
Jette dans votre esprit, que vos yeux ontdéçu,
D’autres le saisiront quand vous aurez toutsu.
La honte de paraître en un tel équipage
Coupe ici ma parole et l’étouffe aupassage ;
Souffrez que je reprenne en un coin de cebois
Avec mes vêtements l’usage de la voix,
Pour vous conter le reste en habit plussortable.
Floridan
Cette honte me plaît ; ta prièreéquitable,
En faveur de ton sexe et du secours prêté,
Suspendra jusqu’alors ma curiosité
Tandis, sans m’éloigner beaucoup de cetteplace,
Je vais sur ce coteau pour découvrir lachasse.
Tu l’y ramèneras. Vous, s’il ne veutmarcher,
Gardez-le cependant au pied de ce rocher.
(Le prince sort, et un des veneurss’en va avec Dorise, et les autres mènent Pymante d’un autrecôté.)