Le Voyage de Monsieur Perrichon

Scène sixième

 

Perrichon, Majorin

Majorin, à part. – Joli petitménage!

Perrichon, à Majorin. – C’est toujourscomme ça quand elle n’a pas pris son café… Ce bon Majorin! c’estbien gentil à toi d’être venu!

Majorin. – Oui, je voulais te parler d’unepetite affaire.

Perrichon, distrait. – Et mes bagagesqui sont resté là-bas sur une table… Je suis inquiet!(Haut.) Ce bon Majorin! c’est bien gentil à toi d’êtrevenu!… (A part.) Si j’y allais?…

Majorin. – J’ai un petit service à tedemander.

Perrichon. – A moi?…

Majorin. – J’ai déménagé… et, si tu voulaism’avancer un trimestre de mes appointements… six cents francs!

Perrichon. – Comment, ici?…

Majorin. – Je crois t’avoir toujours renduexactement l’argent que tu m’as prêté.

Perrichon. – Il ne s’agit pas de ça!

Majorin. – Pardon! je tiens à le constater… Jetouche mon dividende des paquebots le 8 du mois prochain; j’aidouze actions… et, si tu n’as pas confiance en moi, je te remettrailes titres en garantie.

Perrichon. – Allons donc! es-tu bête!

Majorin, sèchement. – Merci!

Perrichon. – Pourquoi diable aussi viens-tu medemander ça au moment où je pars?… j’ai pris juste l’argentnécessaire à mon voyage.

Majorin. – Après ça si ça te gêne… n’en parlonsplus. Je m’adresserai à des usuriers qui me prendront cinq pourcent par ans.. je n’en mourrai pas!

Perrichon, tirant son portefeuille. -Voyons, ne te fâche pas!… tiens, les voilà, tes six cents francs,mais n’en parle pas à ma femme.

Majorin, prenant les billets. – Jecomprends: elle est si avare!

Perrichon. – Comment! avare?

Majorin. – Je veux dire qu’elle a del’ordre!

Perrichon. – Il faut ça, mon ami!… il fautça!

Majorin, sèchement. – Allons! c’estsix cents francs que je te dois… Adieu! (A part.) Qued’histoires! pour six cents francs!… et ça va en Suisse!…Carrossier!…

Il disparaît par la droite.

Perrichon. – Eh bien, il part! il ne m’aseulement pas dit merci! mais, au fond, je crois qu’il m’aime!(Apercevant le guichet ouvert.) Ah! sapristi! on distribueles billets!…

Il se précipite vers la balustrade et bouscule cinq ou sixpersonnes qui font la queue.

Un voyageur. – Faites donc attention,monsieur!

L’Employé, à Perrichon. – Prenez votretour, vous, là-bas!

Perrichon, à part. – Et mes bagages!…et ma femme!…

Il se met à la queue.

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