Scène treizième
Perrichon, Daniel; puis Madame Perrichon, Henriette;puis Jean
Daniel, entrant par le fond, sa lettre à lamain. – Impossible de trouver ce domestique. (ApercevantPerrichon.) Oh!
Il cache sa lettre.
Perrichon. – Daniel!
Il cache aussi sa lettre.
Daniel. – Eh bien, monsieur Perrichon?
Perrichon. – Vous voyez… je suis calme… commele bronze! (Apercevant sa femme et sa fille.) Ma femme,silence!
Il descend.
Madame Perrichon, à son mari. – Monami, le maître de piano d’Henriette vient de nous envoyer desbillets de concert pour demain… midi…
Perrichon, à part, – Midi!
Henriette. – C’est à son bénéfice, tu nousaccompagneras?
Perrichon. – Impossible! demain, ma journée estprise!
Madame Perrichon. – Mais tu n’as rien àfaire…
Perrichon. – Si, j’ai une affaire… trèsimportante… Demande à Daniel…
Daniel. – Très importante!
Madame Perrichon. – Quel air sérieux! (Ason mari.) Tu as la figure longue d’une aune; on dirait que tuas peur.
Perrichon. – Moi? peur! On me verra sur leterrain!
Daniel, à part. – Aïe!
Madame Perrichon. – Le terrain!
Perrichon, à part. – Sapristi! ça m’aéchappé!
Henriette, courant à lui. – Un duel!papa!
Perrichon. – Eh bien, oui, mon enfant, je nevoulais pas te le dire, ça m’a échappé, ton père se bat!…
Madame Perrichon. – Mais avec qui?
Perrichon. – Avec un commandant au 2ezouaves.
Madame Perrichon et Henriette,effrayées. – Ah! grand Dieu!
Perrichon. – Demain, à midi, dans le bois de laMalmaison, à la porte du garde.
Madame Perrichon, allant à lui. – Maistu es fou… Toi! un bourgeois!
Perrichon. – Madame Perrichon, je blâme leduel… mais il y a des circonstances où l’homme se doit à sonhonneur! (A part, montrant sa lettre.) Où est doncJean?
Madame Perrichon, à part. – Non, c’estimpossible! je ne souffrirai pas… (Elle va à la table au fondet écrit à part.) « Monsieur le préfet de police… »
Jean, Paraissant. – Le dîner estservi.
Perrichon, s’approchant de Jean etbas. – Cette lettre à son adresse… c’est très pressé!
Il s’éloigne.
Daniel, bas à Jean. – Cette lettre àson adresse… c’est très pressé!
Il s’éloigne.
Madame Perrichon, bas à Jean. Cettelettre à son adresse… c’est très pressé!
Perrichon. – Allons, à table!
Henriette, à part. – Je vais faireprévenir M. Armand.
Elle entre à droite.
Madame Perrichon, à Jean avant, desortir. – Chut!
Daniel, de même. – Chut!
Perrichon, de même. – Chut!
Ils disparaissent tous les trois.
Jean, seul. – Quel est ce mystère?(Lisant l’adresse des trois lettres.) « Monsieur le préfet… » « Monsieur le préfet… » « Monsieur le préfet… » (Etonné, etavec joie.) Tiens! il n’y a qu’une course!