L’Héroïne

ÉPILOGUE

Huit jours plus tard, Trencavel et Annaïs quittèrent Paris pouraller s’établir dans l’Anjou, en un domaine ou Mauluys et Rosedevaient venir les rejoindre, Rascasse les accompagnait.

Le brave Montariol, devenu maître en fait d’armes, prit ladirection de l’académie des Bons-Enfants. Il y fit fortune.

La duchesse de Chevreuse fut exilée.

Le duc de Vendôme et le Grand-Prieur avaient été transférés audonjon de Vincennes, où se trouvait déjà le maréchal d’Ornano. LeGrand-Prieur y mourut d’ennui… ou d’autre chose, deux ans et demiaprès ces événements. Le duc de Vendôme, lui, en sortit, mais cefut en abandonnant son gouvernement de Bretagne. Il se retira enHollande et plus tard en Angleterre. Il ne rentra en France qu’à lamort de Richelieu.

Quant à Ornano, il mourut dans son cachot le 27 septembre decette même année 1626.

Chacun sait quelles furent par la suite les cabales et leslâchetés de Gaston d’Orléans.

Quelques jours après le départ de Trencavel pour l’Anjou, lecardinal de Richelieu et le Père Joseph, un soir, rentrèrent auLouvre. La Cour était assemblée.

Monsieur, qui avait déjà oublié la mort de l’infortuné Chalais,papillonnait. Madame était fort entourée de jeunes seigneurs quilui faisaient la cour. Le roi jouait aux cartes. C’était en sommeune fort brillante assemblée. La reine Anne d’Autriche seulesemblait triste et découragée. Le Père Joseph entra discrètement etdisparut dans la cohue élégante. Le cardinal de Richelieu alladroit au roi et s’inclina devant lui.

« Bonsoir, monsieur le cardinal, dit Louis XIII. Vous êtesle bienvenu.

– Sire, dit Richelieu, Votre Majesté a daigné assister à lamesse que j’ai dite lors de la consécration de ma chapelle. J’aimaintenant l’intention d’inaugurer le palais Cardinal par une fête,et je viens supplier Votre Majesté de l’honorer de sa présenceainsi que Sa Majesté la reine, ainsi que Leurs Altesses royalesMonsieur et Madame, ainsi que vous tous,messieurs !… »

La reine pâlit. Il se fit un lourd silence. On attendait cequ’allait dire le roi pour savoir où en était la faveur du puissantministre.

« Ma foi, monsieur le cardinal, dit le roi, votre fête estla bienvenue. On s’ennuie fort à la cour de France. J’irai. Etj’entends que tout le monde y soit.

– Certes ! » s’écria Gaston avecempressement.

Déjà le murmure d’admiration s’élevait dans la cohue descourtisans. À ce moment, la reine Anne d’Autriche se leva etprononça distinctement :

« Cela est odieux ! »

Le roi jeta violemment ses cartes, se leva, et, foudroyant lareine d’un regard :

« Rentrez chez vous, madame. »

La reine sortit en jetant un regard mortel à Richelieu. Le roiprit le cardinal par la main, et, d’une voix tremblante defureur :

« Messieurs, voici celui à qui je veux que tout le mondeobéisse !… »

Le cardinal de Richelieu se dressa dans sa robe rouge et vittoutes les têtes inclinées sous son regard. Il sentit la joiesuprême du triomphe et, tandis qu’un souffle d’épouvante balayaitla vaste salle, il songea :

« Je suis le maître. Le Père Joseph l’a dit. Mon règnecommence. »

À ce moment, il pâlit. Car au-dessus de toutes ces têtescourbées par la terreur il y en avait une qui le regardait fixementd’un regard dur et dominateur. C’était une tête d’homme aux traitsprofondément burinés.

La France avait un maître, et ce maître s’appelait le PèreJoseph !

Auteurs::

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer