L’Héroïne

Chapitre 19VICTOIRE DE RICHELIEU

Vers midi, le cardinal fit son entrée au Louvre, escorté duchevalier de Louvigni. Il se rendit tout droit au cabinet royal.Louis XIII donna l’ordre d’introduire Son Éminence. Le cardinalentra seul.

« Je vous croyais à Fleury, monsieur le duc, dit LouisXIII.

– Sire, dit Richelieu, je ne me suis pas rendu à Fleuryparce que j’ai appris qu’on devait m’y assassiner.

– Vous assassiner… vous ! fit le roi en bondissant. Aufait, ce n’est pas la première fois. Les intrigants s’attaquent àvous parce que vous êtes la colonne de mon trône. En vous frappant,c’est moi qu’on veut abattre. Je veux, monsieur, que vous me disiezla chose tout au long.

– Sire, fit Richelieu, je ne puis être juge et partie. Sile roi le trouve bon, je vais lui présenter l’homme qui est venum’informer du complot. La conspiration a eu lieu chez sa maîtresse,qui a été un peu l’âme de cette abominable entreprise. Il demandeque cette femme ne soit pas inquiétée. Je dois même ajouter qu’iln’a consenti à venir ici que sous cette condition que le nom de samaîtresse vous serait caché. Je le lui ai promis en votre nom.

– Très bien. Je ratifie cette promesse, dit Louis XIII.Quel est le nom de cette femme ? ajouta-t-il tout aussitôtavec une naïveté qui touchait au cynisme inconscient.

– La duchesse de Chevreuse, sire !

– Elle ! s’écria le roi. Elle ! L’amie de lareine ! Ah ! cette fois…

– Sire, dit Richelieu, par l’homme qui va vous parler, nouspouvons encore apprendre bien des choses. Si nous touchons à laduchesse, cet homme nous échappe.

– Faites donc entrer cet homme. Qui est-ce ?

– Le chevalier de Louvigni… un de vos courtisans. »Louvigni entra.

« Monsieur de Louvigni, dit Richelieu, Sa Majesté veut bienoublier que le complot s’est tenu chez une personne qui vousintéresse. Sa Majesté consent à ne pas savoir le nom de cettepersonne. Maintenant, parlez !

– Les noms d’abord ! » dit Louis XIII. Louvigniles désigna l’un après l’autre.

Il ne restait plus à dire que le nom de Gaston. Louvigniconsulta Richelieu du regard. Louis XIII remarqua ce coup d’œil ets’écria :

« Dites tout, monsieur, je le veux. »

Louvigni nomma Gaston d’Anjou.

« Je m’en doutais ! gronda le roi dans un éclat derire funèbre. Et, après la mort du cardinal, on m’eût meurtrimoi-même, n’est-ce pas, monsieur ? Et ce digne frère, ce bonparent eût épousé la reine Anne, n’est-ce pas, monsieur ?

– Sire, je vous en supplie », murmura Richelieu.

Louis XIII se calma. Louvigni entreprit alors un récit détailléde la scène du meurtre, telle qu’elle avait été arrêtée.

« C’est bien, monsieur, fit alors Louis XIII, allez etdites à la personne qui vous tient si fort à cœur que je l’engage àquitter Paris. C’est tout ce que je puis faire pourelle. »

Il était près de trois heures lorsque Louvigni quitta le Louvre.À ce moment même, Gaston y rentrait. Quant à Vendôme et à Bourbon,ils avaient quitté Son Altesse aux portes de Paris et avaient prisla route de Blois. Gaston avait juré de nier hardiment. Il avaitsurtout juré de ne nommer aucun des conjurés. Mais les deux fils deGabrielle, peu confiants dans cette parole, avaient préféré semettre à l’abri.

 

Gaston mit pied à terre dans la cour du Louvre. Il se trouva nezà nez avec le capitaine des mousquetaires qui lui dit :

« Monseigneur, daigne Votre Altesse me suivre jusqu’auprèsde Sa Majesté. »

Dix minutes avant Gaston, le Père Joseph était arrivé, qui avaitraconté l’intervention imprévue de Trencavel et l’inutiledéploiement des mousquetaires. Les conjurés étaient partis. Lasouricière était vide. Richelieu, qui jusqu’alors avait fait bonnecontenance, parce qu’il était sûr de prendre tous les conjurés dansun même coup de filet, Richelieu se mit à trembler.

« Je suis perdu !…

– Oui, dit le Père Joseph, si vous reculez. Non, si voustenez tête à l’orage. Voici ce qu’il faut faire : exiler laChevreuse, décapiter deux ou trois des plus compromis, emprisonnerVendôme et son frère, obtenir le mariage de Gaston avecMlle de Montpensier. Allez, monfils. »

Richelieu avait appelé le capitaine des mousquetaires, puisétait rentré dans le cabinet du roi. Gaston d’Anjou suivit donc lecapitaine jusqu’à la porte du cabinet royal. Il entra…

Tout de suite, il vit que le roi savait tout. Dans un derniereffort, il se tourna vers Richelieu et bégaya :

« Je vous félicite de votre audace, monsieur le cardinal.Lorsque le frère du roi de France condescend à vous faire l’honneurque je vous faisais, vous vous dérobez, vous ne paraissez pas audîner auquel vous aviez convié mes amis.

– Monseigneur, dit Richelieu, c’est qu’il n’y a peut-êtrepersonne qui se fût attendu comme moi à être assassiné par seshôtes… »

Gaston chancela. Richelieu, sentant qu’il jouait là la suprêmepartie de sa vie, marcha au roi.

« Sire, dit-il, j’ai la douleur d’accuser votre frère deforfaiture, félonie, entreprise contre le roi et embauchage en vuedu meurtre de votre ministre. En conséquence, je demande qu’il soitprocédé sur-le-champ à l’arrestation de Monsieur.

– C’est faux, sire, je le jure ! »

Louis XIII attendait tout autre chose, une révolte peut-être,quelque terrible riposte digne d’un fils d’Henry IV.

« Monsieur, dit-il, monsieur, les portes devaient êtregardées par quatre gentilshommes angevins, par Beuvron et parMontmorency-Bouteville ; M. de Vendôme devait seplacer près de vous avec son frère ; et vous, prenant placedans votre fauteuil, comme si vous eussiez eu le droit de rendredéjà la justice, vous deviez dire : « Monsieurle cardinal, au nom de la noblesse française que vous opprimez,j’ai décidé que vous devez mourir. » Et, alors, le cardinaldevait être frappé. »

Gaston s’écroula sur ses genoux.

« Ce n’est pas moi !… Non… Ce n’est pasmoi !… ».

Louis XIII baissa la tête. Tant de lâcheté lui causait unintolérable sentiment de honte.

« Debout ! gronda-t-il furieusement. Debout, par lesang du Christ ! Un fils, un frère de roi ne s’agenouillepas !…

– Sire, dit Richelieu, Son Altesse vient d’affirmer que cen’est pas elle qui a voulu perpétrer le forfait de Fleury. Sire, sile duc d’Anjou veut parler, je suis d’avis qu’il soit épargné. Lafamille royale ne doit pas être soupçonnée.

– Je parlerai ! Je dirai tout ! gémit Gaston.

– Et monseigneur consentira à épouserMlle de Montpensier ?

– Oui, cardinal, quand le roi voudra !…

– Eh bien, parle ! » dit Louis XIII.

Et le duc d’Anjou parla !… Tandis que, d’une voix morne, ildénonçait l’un après l’autre les malheureux qui lui avaient offertleur dévouement, le cardinal avait été à la porte. Là, il donnadeux ordres : l’un au capitaine des mousquetaires, l’autre auvalet de chambre.

Le roi écouta en silence le récit de son frère. Cependant,Richelieu écrivait rapidement sur un coin de table, et Gaston lesurveillait du coin de l’œil. Quand fut terminée l’effrayanteconfession, Richelieu aussi avait fini d’écrire.

« C’est bien, dit Louis XIII, si vous voulez que je vouspardonne, commencez par demander pardon à Son Éminence. »

Le duc d’Anjou, la rage au cœur, bredouilla :

« Monsieur le cardinal, je vous demande pardon… »

Alors se passa quelque chose d’étrange. Le cardinal alla ouvrirla porte et prit des mains du valet de chambre un lourd volume àfermoir d’argent qu’il déposa sur la table. Ce volume, il l’ouvrit.Puis il détacha la croix d’or enrichie de diamants qu’il portait aucou et la plaça sur le livre grand ouvert. Le roi, étonné,regardait. Gaston essaya de prendre un air de dignité etbalbutia :

« Monsieur, quand un prince de sang royal s’abaisse àdemander pardon…

– Il élève à sa hauteur ceux à qui s’adresse cette demandede pardon ! interrompit Richelieu. Et, alors, ceux-là ont ledroit d’agir en princes du sang et de prendre pour la sûreté de lafamille royale toutes les précautions qui leur semblent bonnes. –Sire, je viens de donner l’ordre à votre capitaine d’aller fouillerl’hôtel de Chevreuse. – Quant à vous, monseigneur, voici l’Évangilesur cette table, voici une croix qui fait Dieu présent parmi nous,voici enfin une formule que j’ai préparée. Lisez-la, monseigneur,et, la main sur l’Évangile, répétez-la !…

– Oui, oui ! » s’écria Louis XIII.

Le duc d’Anjou prit le papier, il étendit la main et, à hautevoix, répéta le serment dicté par le cardinal :

Sur Dieu et sur l’Évangile, je jure fidélité au roi et à sesconseils. Je jure d’aimer et affectionner le roi et ceux qu’aime leroi. Je jure de répéter au roi et à ses conseils tout discours quej’aurai entendu, de nature à porter atteinte à l’autorité ou à lavie ou au bonheur du roi ou de ses conseils.

Gaston, sûr désormais d’échapper à tout châtiment, avaitprononcé ces paroles d’une voix forte. Aussitôt, il se tourna versle roi et ajouta :

« Sire, c’est comme un frère que je veux désormais aimer leroi et le servir ! »

Alors, cette sombre figure de Louis XIII s’éclaira. Le roi allaà Gaston, et l’embrassa sur les deux joues en disant :

« Tout est pardonné, oublié. Si vous voulez m’aimer enfrère, je veux, moi, vous traiter comme mon propre fils… »

Louis XIII et Richelieu demeurèrent seuls. Richelieu étaitblême.

« Sire, dit-il à haute voix, j’ai l’honneur de demander moncongé à Votre Majesté.

– Quoi ! s’écria Louis XIII, après le serment que monfrère vient de vous faire ?

– Ce serment m’assure de la fidélité de Monsieur :c’est tout. Sire, songez au nombre d’ennemis qui m’entourent. Leroi, en m’accordant mon congé, me fera grâce de la vie. Si vousm’ordonnez de rester, c’est que vous me condamnez àmort !…

– Non pas, de par tous les saints !Attendez… »

Et tandis que Richelieu palpitait, le roi s’assit à la table et,rapidement, écrivit :

Monsieur le cardinal.

Je vous adresse les présentes pour vous témoigner l’horreurque j’ai des entreprises tentées contre votre personne etl’affection que j’éprouve de jour en jour plus grande pour vous. Jeveux vous faire savoir que je ratifie toutes mesures que vouscroirez devoir prendre pour votre sûreté, la mienne et celle del’État. Assurez-vous que je ne changerai jamais et que quiconquevous attaquera, vous m’aurez pour second. Et je prie Dieu, monsieurle cardinal, qu’il vous tienne en sa sainte garde.

Le roi data, signa et scella cette lettre, qu’il remit à sonministre. Le cardinal la dévora d’un ardent regard et devintpourpre de joie et d’orgueil… Cette lettre, en effet, lui conféraitune sorte de dictature ; elle lui livrait d’avance tous sesennemis pieds et poings liés.

Richelieu se courba devant le roi et murmurasimplement :

« Ma vie vous appartient, sire ;disposez-en. »

Et Richelieu sortit.

*

* *

Dans cette journée même la duchesse de Chevreuse attendait lerésultat de l’action. Elle était prête à tout événement. Dans lacour attendait un carrosse tout attelé. Toute frissonnante, elleregarda l’horloge.

« Midi ! murmura-t-elle. Mon beau lion lève sa griffed’acier sur le monstre. C’est l’heure de la délivrance, l’heure demort… »

À ce moment même, l’une des vitres vola en éclats. Une pierretomba sur le tapis. Un papier l’enveloppait. La duchesse le saisitvivement, le déroula et déchiffra ces mots :

Le cardinal de Richelieu, instruit par moi de ce qui devaits’accomplir, a envoyé à Fleury une demi-compagnie de mousquetaires.À l’instant où vous recevrez ce message, votre amant sera arrêté.Jugez de l’amour que j’avais pour vous par l’infamie où je me perdspour tuer celui que vous aimez.

Ce n’était pas signé. Mais il n’y avait pas besoin de signature.Chaque lettre de ce billet criait la passion de Louvigni.

La duchesse de Chevreuse demeura écrasée. Elle avait feintl’amour pour armer le bras de Chalais. Et maintenant elle eût toutdonné pour qu’il fût sauvé.

« Henry ! bégaya-t-elle, affolée. Ô mon Henry, si tumeurs, je mourrai avec toi !… »

Ce moment de faiblesse dura peu. Presque aussitôt elle rassemblason énergie. En quelques instants, elle eut placé dans unportemanteau de voyage tout ce qu’elle possédait dans l’hôtel en orou en bijoux précieux. Puis elle descendit rapidement, prit placedans le carrosse et dit :

« À Fleury, ventre à terre… »

Il y avait un peu plus d’une heure que la duchesse était partielorsqu’un cavalier mit pied à terre devant l’hôtel. Il portait lalivrée de Vendôme. Il demanda à être admis sur-le-champ en présencede la duchesse, disant qu’il était question de vie ou de mort. Ilétait porteur d’une dépêche pour elle. On lui répondit que laduchesse était partie. Où ? On l’ignorait. À ce moment, undeuxième cavalier couvert de sueur entra dans la cour en faisantune grimace de satisfaction. Au valet qui s’avançait vers lui, ildit :

« Prévenez seulement Mme la duchesse que jesuis envoyé ici par Mlle de Lespars ;c’est tout, brave homme.

– Comment vous appelez-vous ? fit le valet, ébahi.

– Verdure. J’appartiens à M. le comte deMauluys. »

Verdure esquissait son plus aimable sourire, lorsqu’un troisièmecavalier arriva en trombe dans la cour. C’était Chalais, livide,tremblant. Il s’élança vers l’intérieur. Le valet courut àlui :

« Ah ! monsieur le comte…

– Où est-elle ? râla Chalais.

– Partie ! Et voici un cavalier qui demandeMme la duchesse. »

Hagard, Chalais se tourna vers l’homme qu’on lui désignait et ilreconnut les armes de Vendôme. L’homme le reconnut aussi sansdoute.

« Monsieur le comte, dit-il, j’apportais cette dépêche àMme la duchesse. »

Chalais saisit la lettre et l’ouvrit. Ce geste en disait longsur ses relations avec la duchesse. Mais il ne savait ce qu’ilfaisait. Il lut :

Tout est découvert. Fuyez et venez nous rejoindre à Blois.De, là, nous marcherons sur Nantes. S’il le faut, nous irons nousenfermer à La Rochelle et nous déchaînerons la guerre civile. Venezen toute hâte.

« Où est la duchesse ? » demanda machinalementChalais.

Marine, la soubrette de la duchesse, était accourue. Elle venaitde tout entendre. Elle s’approcha de Chalais, avec sa familiaritéde confidente, et lui glissa :

« Madame est partie subitement après avoir lu un papier quilui est parvenu d’étrange façon… »

« Elle est sur la route de Blois ! songea Chalais avecun tressaillement d’indicible joie. »

« Marine, pour Dieu, pour ta maîtresse, un cheval àl’instant ! Le mien est fourbu.

– Un cheval pour Monsieur le comte ! cria Marine.

– Licencie tout le monde, ajouta Chalais à voix basse, etviens nous joindre à Blois. »

Quelques instants plus tard, Chalais s’élançait, sortait deParis sans être inquiété et prenait la route de Blois. Unedemi-heure s’écoula. Verdure, installé sur sa borne, paraissait nerien voir, ne rien entendre de ce qui se passait autour de lui.Parfois seulement, il maugréait de confuses paroles où il étaitquestion de bizarres corvées, d’accusations portées contre Mauluysqui condamnait ses gens à mourir de soif.

« C’est bien fait, grogna Verdure à un moment, il ne verrapas la lettre. Il ne voulait pas la lire, le sot ! Saint-Priaca vu la fameuse lettre. Le cardinal l’a vue et revue.M. de Mauluys ne la verra pas. Ça luiapprendra ! »

Verdure en était là de son monologue et de ses ricanements,lorsqu’un coup de marteau violent ébranla la grande porte del’hôtel que Marine avait fait refermer.

Chacun crut que c’étaient les gens du lieutenant criminel. Nuln’alla ouvrir.

« Voilà une maison bien mal tenue », maugréaVerdure.

Et, tranquillement, il alla ouvrir.

« Monsieur Trencavel ! fit-il.

– Verdure ! s’écria Trencavel. Toi ici !

– Moi-même. M. le comte m’a mis là de faction pourvous attendre. Suivez-moi, monsieur. »

Et comme Trencavel hésitait :

« Elle n’est pas ici, dit Verdure, goguenard. Sivous voulez la voir, suivez-moi. »

Et Verdure, bien certain désormais de son fait, sortit del’hôtel, traînant son cheval par la bride et sans se donner lapeine de s’assurer que Trencavel suivait. Trencavel l’eût suivijusqu’au bout du monde.

 

Depuis son entrevue avec le roi, Louvigni s’était renfermé chezlui.

Il était environ quatre heures lorsque son valet qu’il avaitappelé lui dit :

« Monsieur sait-il les bruits qui courent à propos deMme la duchesse ?

– En fuite ? fit machinalement Louvigni.

– Oui, monsieur, et, avec elle, plusieurs grands seigneursqui, paraît-il, ont entrepris contre le roi, et après lesquelscourent un grand nombre de gens d’armes ; on dit que parmi lesfugitifs se trouve aussi le grand ami de monsieur, c’est-à-direM. le comte de Chalais qui… »

Le pauvre diable n’eut pas le temps d’achever. Louvigni luiavait sauté à la gorge et rugissait :

« En fuite ! Tu dis que Chalais est en fuite !…Tu dis que Chalais est vivant ! Que Chalais n’est pasarrêté ! Voyons, raconte ! » reprit Louvigni, enreprenant à peu près possession de lui-même.

Et le valet raconta. Il n’était question que de cela dans Paris.Dans toutes les églises, on chantait le Te Deum. Desbandes de gens parcouraient les rues en criant : « ViveM. le cardinal ! qu’on a voulu meurtrir ! »Tout le monde désignait les conjurés. Et on citaitM. de Chalais. Louvigni s’affaissa.

Ainsi, sa trahison était inutile ! Chalais avait pufuir !…

« Oh ! grinça-t-il, je me tuerai peut-être, mais pasavant de lui avoir arraché le cœur. »

 

Tous les conjurés n’avaient pas fui. Deux d’entre eux, verstrois heures, étaient tranquillement rentrés dans Paris. C’étaientle comte de Montmorency-Boutteville et le marquis de Beuvron, tousdeux jeunes, aimables et brillants seigneurs à qui souriait leprintemps de leur vie. Ils se dirigeaient vers la place Royale.

« Tout est bien fini, disait Beuvron ; je crois lecardinal imprenable.

– C’est mon avis, marquis, reprenait Boutteville. Mais,puisque nous sommes résolus à le braver, puisque nous voulonsdonner un exemple à la noblesse je crois que le moment est venu dele défier et de nous battre en duel sous ses yeux. »

Ils arrivaient sur la place Royale. Lorsqu’on vit ces deuxgentilshommes dégainer, un rassemblement se forma aussitôt. Lachose avait lieu sous les fenêtres même du cardinal. Plusieursgentilshommes accoururent.

« Messieurs, messieurs, que voulez-vous faire ?

– Eh ! dit Beuvron, voici le cas que nous faisons desédits !

– Rengainez, par le Ciel ! cria l’un des gentilshommesprésents. Voici les mouches du cardinal. »

Mais déjà les deux adversaires s’attaquaient. Beuvron, lepremier, fondit sur Boutteville en disant :

« Dépêchez-vous de me tuer, mon cher, voici qu’on vientnous arrêter ! »

Des gens armés sortaient en effet de l’hôtel du cardinal.

« Holà ! cria le chef des gardes. Bas les épées,messieurs ! »

À ce moment même, Beuvron tomba et rendit le dernier soupir.

« Votre épée, monsieur de Boutteville ! » dit lechef des gardes.

Quelques instants plus tard, Boutteville avait disparu. On leconduisit à la Bastille. Il en sortit, c’est vrai, mais ce fut pourmarcher à l’échafaud.

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