L’Homme qui revient de loin

Chapitre 22UN SUJET INTÉRESSANT POUR LA SCIENCE

 

À la suite de ces événements exceptionnels,Fanny fut prise d’une fièvre intense qui la retint trois jours aulit, dans la chambre de son mari où on la soignait, cependant que« le mort » finissait de revenir à lui, dans la chambrede sa femme.

Les docteurs Moutier et Jaloux, quicontinuaient d’observer leur ressuscité avec une curiositéscientifique bien compréhensible, redoutère­nt que la châtelaine dela Roseraie fît une grave maladie.

Mais il n’en fut rien. Fanny était douée d’un« ressort » qu’ils ne soupçonnaient pas. La troisièmenuit, elle se retrouva assez forte et d’esprit assez lucide pourécouter avec profit la conversation des deux hommes de science qui,dans la pièce à côté, dont la porte était restée entrouverte,échangeaient leurs impressions sur l’état de santé dumort !

– Moi, il m’effraie, disait Moutier. J’ai peurqu’il ne nous soit revenu de là-bas tout à faitinsensé. Son silence obstiné, l’élargissement de ses pupilles,l’espèce d’épouvante avec laquelle il regarde les choses et lesgens autour de lui, le frisson qui le secoue au moindre bruit, aumoindre frôlement, la terreur visible qu’il éprouve devant uneporte qui s’ouvre, tout cela dénote un désordre inouï dans lesfacultés !

– Eh ! mon cher ! songez qu’ilrevient de loin. Au fond, nous ne savons pas, nous, d’où ilrevient ! Mais lui, il le sait ! Il s’en souvientcertainement ! émit, avec une grande énergie, leprofesseur Jaloux… J’ai regardé ses yeux… Ils semblentencore pleins de choses que nous ne voyons pas et qu’il a vues,lui !… Comment, dans ces conditions, n’aurait-il point besoind’un certain temps pour retrouver l’équilibre de ses sens d’hommevivant !

– Eh bien, mon cher, tant qu’il n’aura pasretrouvé cet équilibre, il faut le laisser tranquille !

– Jamais ! Ce que vous proposez estpeut-être très humain au sens étroit du mot, mais tout à faitantiscientifique ! car, sachez-le, cet équilibre de ses sensd’homme vivant, il ne l’aura reconquis tout à fait que lorsque leschoses de la mort qu’il a vues se seront effacées peu àpeu sous l’image constante et continue des choses de la viequ’il voit ! Et alors, vous saisissez qu’il ne sesouviendra plus de rien ou que son souvenir sera devenu tellementvague et lointain qu’il ne lui apparaîtra plus que comme un rêvesans consistance. Et nous, scientifiquement, nous seronsvolés !… Voilà ce qu’il faut éviter. Il faut obtenir que cethomme parle pendant que ses sensations sont toutes fraîches !…Et je ne m’en irai que lorsqu’il aura parlé !…

– Et s’il continue à ne vouloir riendire !… Il semble habité par l’épouvante !… soupiraMoutier… Vous êtes cruel…

– Ah çà ! mais, mon cher, où voulez-vousen venir ?…

– Eh ! je voudrais que nous envisagionscette affaire d’une façon pratique et sans nous embarrasserd’hypothèses et d’espoirs qui ne feront que nous gêner pour LaMédecine astrale.

– Enfin, oui ou non, croyez-vous à lacontinuité de la personnalité après la mort ?

– Oui j’y crois… J’y crois comme Crookes y acru…

– Eh bien, s’il y a continuité de lapersonnalité, il n’y a aucune raison pour que cet homme qui s’estpromené un quart d’heure dans la mort ne nous dise pas cequ’il a vu !

– Évidemment, c’est un entêté !… fitMoutier avec un semblant de raillerie…

– Mon cher, vous paraissez enchanté qu’il setaise !… C’est inimaginable !… gronda Jaloux, sans cachersa mauvaise humeur.

– Parlons sérieusement, reprit Moutier ;l’événement paraît si formidable, si inconcevable…

– Il n’est pas inconcevable, interrompitJaloux… Il est inhabituel, voilà tout !

– Inhabituel, d’accord. Eh bien !l’événement est tellement hors de nos habitudes, que le vulgumpecus scientifique aura de la peine à ajouter foi à la paroled’un monsieur vivant qui lui raconterait comment la mort estfaite ! Et je ne serai pas fâché, outre mesure, après tout,qu’il se taise ! Notre opération n’en apparaîtra que plussérieuse.

– Je me demande pourquoi, parexemple !

– Pourquoi !… parce que s’il avaitrépondu à vos questions précises sur le royaume de la mort, commevous dites, et si nous avions répété vos questions et ses réponses…nous aurions passé pour deux fumistes qui abusent de lafaiblesse mentale d’un malade. Ne suffit-il pas à notre gloired’avoir fait revivre, par le truchement de la chirurgie, unmort ?…

– Non ! cela ne me suffit pas !…D’abord c’est vous qui avez fait l’opération !… Et je prendsmaintenant la responsabilité d’en tirer tout l’enseignement qu’ellecomporte !… Je ne vous aurais jamais cru d’une pareilletimidité !… Vous faites revivre un homme et vous vouséloigneriez de lui comme si vous veniez de lui raccommoder lajambe !… Mais cet homme que nous avons rappelé à la vie, vousentendez !… cet homme nous doit le secret de lamort !…

– Vous l’avez déjà tourmenté là-dessus et ilne vous a jamais répondu… J’ai peur qu’il ne devienne fou, je vousle répète, et que l’on nous accuse de sa folie… En tout cas,puisqu’il n’a pas encore parlé et que nous ne savons même points’il se souvient de son état de mort !…

– Allons donc !… Il ne pense qu’àcela !…

– Mais laissez-moi donc finir ce que j’ai àvous dire !… En attendant qu’il parle, je voudrais vousmontrer le récit que j’ai fait, pour La Médecine astrale,de l’opération. Il nous faut préciser encore quelques points. Venezdans ma chambre…

Fanny les entendit s’éloigner.

Elle se leva tout doucement, s’enveloppa d’unpeignoir et, bien qu’elle se sentît encore bien faible, se dirigeavers la chambre de son mari.

Elle en poussa la porte, et, tout de suite,perçut une sorte de gémissement rauque qui attira son regard ducôté du lit où le mort convalescent était censé reposer.

Une faible lumière éclairait la pièce ;Fanny ne vit que les deux yeux ouverts extraordinairement sur sonapparition à elle.

L’inexprimable frayeur qui était peinte dansces yeux-là la fit hâter son pas vers le malheureux qui, à demisoulevé sur sa couche, la regardait venir.

Il la reconnut car, comme elle lui tendait lesbras, il s’y laissa glisser avec un effroyable soupir d’aise.

Il devait l’attendre depuis longtemps.

Cependant, la main de Jacques lui montrait laporte du cabinet de toilette, et Fanny se glissa jusque-là, serendant compte qu’elle obéissait à ce geste.

Le mort vivant voulait-il qu’elle fermât cetteporte à cause du drame qui s’était passé dans cette pièce ? Ouplutôt Jacques tenait-il à ce que la garde-malade qui y étaitinstallée sur un canapé ne les vînt point déranger ?

La garde dormait ; Fanny ferma la porteet revint près de son mari.

Alors, Jacques étreignit Fanny et lui soufflaà l’oreille ces mots qu’elle comprit tout de suite :

– Je l’ai vu !

Elle lui prit son pauvre visage entre sesmains douces et tendres ; elle roula cette tête criminelle,qui avait souffert pour elle, sur sa poitrine compatissante, etelle lui dit tout bas :

– Tais-toi ! Tais-toi ! Tu as ététrès malade !… Si tu pouvais pleurer !… Pleure, monchéri, pleure, cela te fera du bien !… Ne pense plus àrien !… Si tu veux guérir, il ne faut plus penser àrien !

Mais l’autre reprit, en tremblant comme unenfant dans les bras de sa mère :

– Tu sais ? Tu le sais bien ?…Pourquoi fais-tu celle qui ne le sait pas ?… Tu sais bienque j’ai été mort !

– Très malade ! Très malade !tais-toi !… si tu m’aimes, tais-toi !… Il ne faut plusécouter les docteurs !… Ce sont des niais, des imbéciles, monchéri… de vrais imbéciles… et qui sont vraiment plus malades quetoi !… Et je le leur dirai !… Et je ne veux plus qu’ilste tourmentent ! Du reste, je les ai écoutés, tout à l’heure…Ils ne croient pas une seconde sincèrement que tu étaismort !… Si tu ne veux pas mourir pour de bon, cette fois, ilfaut rejeter une pensée aussi absurde, tu entends, Jacques !…Promets-le-moi !… Nous mourrons fous tous les deux si tu ne mele promets pas… c’est simple… J’ai assisté à tout, moi !Est-ce que je crois que tu étais mort ?… Ils sont arrivésà temps ! et ont fait l’opération qu’il fallait,à temps ! Voilà tout ! Voilà tout !…Tais-toi, tais-toi !…

– Si tu savais ! si tu savais !gémissait le mort vivant… tu ne parlerais pas comme tuparles !… Surtout ne me quitte pas, ne me quitte plusjamais ! Ah ! je t’attendais ! je t’attendais !je t’attendais !… maintenant que je sais, tuentends !… je ne veux plus mourir… je ne veux plus lesrevoir ! Je ne veux plus remourir avant de m’êtrerepenti ! avant d’avoir expié ! avant qu’ilm’ait pardonné !… Je ferai tout pour cela, c’est mon seulespoir, c’est ma seule pensée ! Qu’il me dise, quand je lereverrai, qu’il me dise : « Je te pardonne ! »Si tu savais, il est terrible, il est terrible !… et il atoujours sa blessure qui saigne !

– Mon chéri ! mon chéri ! tout ceque tu voudras !… nous ferons tout ce que tu voudras !…Surtout nous partirons !… nous irons loin d’ici !loin !… si loin que tu ne le verras plus jamais !… que tun’en entendras plus jamais parler et qu’il ne te tourmenteraplus !…

– Ah ! pourvu que je ne revoie plus sablessure qui saigne ! Chaque fois qu’une porte s’ouvre… qu’unrideau remue… qu’un pas glisse sur le parquet, j’ai peur de lerevoir se dresser devant moi avec sa blessure qui saigne !…Maintenant que je l’ai vu, dans la mort, je suis sûr qu’il ne cessede rôder autour de nous, dans la vie !… Il ne quitte pas lepays !… Il ne quitte pas le château !… ou bien, il estchez Marthe !… ou auprès des enfants !… Mais nous, nousne le voyons pas !… Pour le voir, il faut avoir les yeux pursde Marthe ou les yeux purs des enfants, car les enfants l’ont vu,le petit François disait vrai : il a vraiment vu son papa, etc’est vraiment son papa qui l’a sauvé de l’asphyxie, et Marthedisait vrai !… Et ceux-là seuls voient, et nous, nous nevoyons pas !… Nous avons de pauvres yeux qui ne voient rien dutout !… Heureusement !… Heureusement !… Je veux bienqu’il soit là autour de nous !… qu’il veille sur ses enfants,comme c’est son droit, certes !… Mais qu’il ne m’apparaisseplus… non !… non !… ou alors qu’il cache sablessure !… Écoute bien ce que je vais te dire, pour tefaire connaître ces choses dont nous avons eu tort de rire, dutemps de ma vie criminelle : un mort peut encore apparaître àun vivant même si ce vivant ne l’a pas mérité, quand ce vivant vamourir !… C’est ainsi que je l’ai vu, moi, avant demourir !… juste !… juste le temps qu’il lui a fallupour prendre mon revolver dans le tiroir, devant moi et pour metuer !… Il m’a tué parce qu’il a cru que j’allais fairedu mal à ses enfants ! Ah ! je te dis comme c’estarrivé ! En même temps que j’ai aperçu la figure menaçante àla tempe saignante, j’ai entendu le coup et je suis tombéfoudroyé !… Mort !…

Fanny n’essayait même plus de retenir ladivagation de Jacques, ou ce qu’elle croyait être fermement unedivagation.

Elle retenait cette pauvre tête, ce pauvrefront embrasé contre sa joue et elle la rafraîchissait en vain deses larmes. Et elle ne douta point qu’il eût complètement perdu laraison. Son mari était fou !…

Elle tenta bien de lui faire comprendre quec’était lui qui avait tiré le coup de revolver contre lui-même pourse débarrasser de l’atroce pensée du crime qui pesait tropdouloureusement à son cerveau, et peut-être aussi de la vision dufantôme qui le poursuivait, image inventée par son remords, mais iljura sur le Christ qu’il n’avait pas voulu se tuer et que c’étaitAndré lui-même qui l’avait tué !… « Il y a descirconstances où les morts peuvent toucher, soulever, remuer desobjets comme les vivants… c’est connu ; c’est connu, même chezles vivants !… La science ne le nie plus !… WilliamCrookes, avec ses morts, en a fait biend’autres ! »

Ayant dit cela, sa tête s’appesantit et ils’endormit dans ses bras. Fanny resta ainsi plus d’une heure sansbouger. Elle n’avait jamais aimé autant cet homme que depuis qu’ilendurait de tels supplices dont elle était la cause première.

C’est pour elle qu’il avait tué. C’est à caused’elle que les tenailles du remords lui déchiraient le cœur et lecerveau.

Mais elle le guérirait ; oui, elle leguérirait par la fuite et par l’amour… Ils s’aimeraient sous descieux de joie et de lumière que ne fréquentent point les fantômesdu Nord.

Elle le sauverait de la torture psychologiqueque lui infligeaient ces deux monstres de médecins, elle lesauverait des hantises de Marthe et des tables tournantes deMlle Hélier et de tout… de tout… loin… de… lamalle !…

Au fond, elle était persuadée que c’était lamalle qui était cause de toutes ces extravagances… la malle étaittrop près… son voisinage impressionnait tout… le château… le parc…tout le pays jusqu’au bord de l’eau, jusqu’à la petite maison dubord de l’eau…

Jacques devait, si près, en subir l’influenceconstante… et mieux !… l’attirance…

S’il allait quelquefois dans le garage, s’ildescendait dans la cave sans qu’il y fût forcé par rien, par rienabsolument de la vie extérieure… c’est qu’il ne pouvait résister aubesoin de se rapprocher de la malle ? de la sentir sous sespieds, avec le cadavre…

Fanny comprenait cela, elle-même pensait biensouvent à la malle et, par instants, avait des envies surprenantes,inouïes, des envies qu’il lui fallait combattre avec acharnement,de retourner dans la cave… et de piétiner la terre, au-dessus dumort !

Eh bien ! ils s’en iraient loin de lamalle, loin des brumes à fantômes, dans les pays chauds, à Naples,à Capri, à Sorrente, sous les orangers… Et ils redeviendraientforts… Là-bas, on ne craint pas les morts… On se promène parmi destombeaux fleuris ; les morts sont les amis des vivants et leslaissent bien tranquilles… ça n’est pas comme dans le Nord où ilspassent leur temps à vous faire peur… Elle regarda Jaques. Ilparaissait plongé dans un sommeil de plomb, quand, peu à peu, sarespiration se fit rauque et irrégulière, et, enfin, il s’éveillaen sursaut, les yeux hagards, retenant de ses mains fébriles safemme effrayée.

– Fanny ! Fanny ! ah ! monDieu ! regarde… regarde derrière les rideaux de lafenêtre !… Je te dis qu’il a bougé !… Entends-tu le bruitde chaîne, derrière le rideau de la fenêtre !… Je te dis qu’ilest là !… Tiens ! tiens ! il bouge !… j’ai vusa main !… j’ai vu sa main qui soulevait le rideau !…André est derrière le rideau !…

Fanny essayait en vain de le fairetaire : il répétait en claquant des dents :

– Je te dis que j’ai vu sa main ! Je t’ensupplie, va voir !… Va voir !… soulève le rideau !…Il se cache derrière le rideau !…

Il parlait avec une telle conviction et un teleffroi qu’elle en fut elle-même ébranlée et qu’elle s’en fut aurideau autant pour elle que pour lui !… De fait, illui parut que le rideau tremblait, n’avait point son immobiliténaturelle…

Frissonnante, les bras tendus, elle s’avança…mais par une extraordinaire coïncidence, voilà que tout à coup, etd’un seul coup, la petite lampe qui éclairait leur double angoisses’éteignit comme si l’on venait de souffler dessus et ils furentplongés dans l’obscurité.

Alors, Jacques poussa un cri terrible et Fannyne sachant plus ce qu’elle faisait, ni où elle allait, se heurtaaux meubles et renversa un petit guéridon qui supportait un servicede nuit en cristal. Il s’écrasa et se brisa sur le parquet avec unbruit inouï. En même temps, la jeune femme sentit un souffle glacéqui lui passait sur le front et dans les cheveux et la fenêtres’ouvrit toute seule, d’un mouvement brutal qui rejeta la vitrecontre le mur.

Jacques râlait, la porte de la chambres’ouvrit, la garde-malade apparut épouvantée, un peu de lumièrevenue du cabinet de toilette éclaira ce désordre et les deuxdocteurs parurent.

La garde ralluma la lampe malgré le violentcourant d’air qui s’engouffrait dans la pièce.

Fanny, rendue à la réalité de ses sensationspar le souffle même de la nuit qui l’avait affolée, se renditcompte que toute cette fantasmagorie se résumait dans le fait d’unefenêtre mal fermée qui s’ouvre sous la poussée du vent, et ellealla elle-même fermer cette fenêtre.

Quant à Jacques, rejeté au fond du lit,retenant d’une main tremblante les couvertures sous sa face ravagéepar la terreur, il suppliait les docteurs de le débarrasser desmorts !

– Faites que je ne les voie plus !…gémissait-il… pourquoi m’avoir retiré de la mort si vous ne m’avezpas sauvé des morts ?… Soyez tranquilles ! Soyeztranquilles ! Il y en a ! Il y en a !…Ah ! vous voulez savoir si je les ai vus !… Ehbien ! oui, je les ai vus !… Je les ai vus comme je vousvois, et je les vois encore !… La maison en est pleine !…et la forêt !… et la vallée ! Si vous croyez que lesmorts quittent les vivants comme ça !… Ils sont derrièretoutes les portes !… Ils guettent à toutes lesfenêtres !… Ils vous attendent dans le creux deschemins !… Vous ne vous en doutez pas !… Mais je les aivus, moi, pendant que j’étais mort, je les ai vus, penchés àl’oreille des vivants et leur soufflant des conseils terribles pourle bien ou pour le mal !… et les vivants ne s’en doutentpas !… Les morts conduisent les vivants par la main et lesvivants ne s’en doutent pas !… Non ! Non !… s’ilssavaient, ils se méfieraient !… Les vivants disent qu’ils ontdes pressentiments !… Il n’y a pas de pressentiment ! ily a le souffle d’un mort dans l’oreille !… Il y a la main d’unmort qui vous conduit vers le bonheur ou vers lacatastrophe !… car les morts… je vous le dis !… Je vousle dis !… car j’ai vu cela, moi !… Les morts restentincroyablement mêlés aux vivants… pour les aimer ou leshaïr !… Il y a des morts terribles dont il est à peu prèsimpossible, pour un vivant, de se débarrasser !… Lesvivants ont tort de ne pas regarder de plus près dans leurombre !… Ils v verraient des choses que j’ai vues,moi !… et ils se méfieraient !… et les vivants seraientmoins fiers de se promener dans la vie, assurément !…Ah ! je vous en prie !… messieurs les docteurs, je vousen conjure… chassez les morts !… chassez les morts !…chassez les morts !…

– Allez-vous-en ! Allez-vous-en !Allez-vous-en !… ordonna brutale­ment Fanny aux docteurs. Vousvoyez bien qu’il délire… Vous êtes des criminels… vous l’avez renduà la vie pour le supplicier !… Vous avez torturé sa pauvreâme ! Allez-vous-en !

Et Fanny poussait les deux médecins spirites,en les jetant hors de la chambre, en les injuriant jusque dans lecorridor…

Elle revint près de Jacques qui paraissait unpeu calmé, et qui lui dit :

– Cela m’a fait du bien de me débarrasser detout ça ! de tout ça que j’avais dans ma pauvre tête !…Crois-tu que je leur en ai dit ! Ma foi je leur ai dit tout ceque j’ai vu, ni plus ni moins… J’ai eu bien soin de ne pas leurparler d’André… Ça ! je ne peux pas en parler ! Il fautgarder ça pour soi tout seul, un remords pareil, à cause du petitJacques qui n’est responsable de rien, le pauvre ange, et de toi,ma chère Fanny…

Dans sa chambre, Moutier disait au professeurJaloux :

– Mon cher ami, nous ne pouvons plus resterici. Ce malheureux est peut-être fort intéressant, mais encore deuxséances comme celles-ci et nous n’aurons plus qu’à le conduire àCharenton, sans compter que nous pourrions bien y resternous-mêmes… Du reste, on ne nous souffrira plus ici, et autant quepossible, il faut éviter un scandale que ne manquerait pas dedéchaîner Mme de la Bossière si vous insistiez… De toutefaçon, moi, je n’en suis plus. Je vous dirai même que je ne suispas exempt du remords… Enfin, songez que La Médecineastrale exige notre prompt retour à Paris…

– C’est bien, nous allons nous en aller. Maisje le regrette, fit Jaloux, pensif, car cela devenaitintéressant…

– Croyez-vous ?… croyez-vous qu’il aitréellement vu tout ce qu’il nous raconte ?…

– Mais, mon cher, cela correspond assez avecnotre système…

– C’est bien ce dont je me méfie…

– Enfin, bougonna Jaloux, vous ne croyez pasque cet homme qui revient de la mort invente pour notreplaisir…

– Oh ! il n’invente pas !… Il sesouvient…

– De ce qu’il a vu pendant qu’il étaitmort !…

– Non, de ce qu’il peut avoir lu avant samort !…

Jaloux sursauta.

– Avec votre système à vous, s’écria-t-il,nous n’avancerons jamais d’un pas !…

– Eh ! mon cher, le doute estscientifique… et croyez-moi, nous ne paraîtrons vraiment fortsqu’en ne cachant à personne que nous nous défions de nous-mêmes etdes autres… mais tout de même, même en doutant, et en nedissimulant pas notre doute, nous avons là de quoi faire avecl’opération et ce que ce mort nous a raconté un fameux fasciculepour La Médecine astrale.

– Et une belle conférence, ajouta Jaloux…Partons donc, mais nous ne pouvons laisser ces gens sans soins.

– Je réponds de Jacques, dit Moutier, maisnous passerons par Juvisy et nous lui enverrons un docteur de maconnaissance. Voici le petit jour, faisons nos valises.

Avant de partir, ils laissèrent une lettrepour Mme de la Bossière, dans laquelle ils prenaientfort dignement congé. En somme, s’ils n’avaient pas été là, M. dela Bossière serait encore mort !… Fanny avait faitdonner des ordres au chauffeur pour qu’il se mît à la dispositionde ces messieurs, dès la première heure du jour.

Comme l’auto descendait sur Juvisy et qu’ilsarrivaient près de la rive, non loin de la petite maison du bord del’eau, Moutier ordonna l’arrêt. Il venait d’apercevoir, au coin dupetit bois de trembles, la silhouette falote de MartheSaint-Firmin. Elle se tenait là comme si elle l’attendait, comme sielle était sûre qu’elle le verrait passer.

– Qui est-ce ? demanda Jaloux.

– C’est cette Marthe dont je vous ai parlé,vous savez, la Marthe au fantôme… Descendez !…

Ils s’en furent tous deux vers elle. Elle lessalua de la tête et leur dit sans émotion apparente :

– Alors, c’est vrai que vous avez réussi à lefaire revivre ? Je n’ai pas vu André depuis… je voudrais bienavoir des nouvelles !…

Les deux hommes se regardèrent.

– C’est vrai, dit le Dr Moutier, que nousavons été assez heureux pour sauver M. de la Bossière mais commentsavez-vous que nous, l’avons fait revivre ?

– C’est André qui me l’a dit…

– Vous avez donc revu votre« apparition » ?

– Oui, quelques minutes après l’accidentauquel André a assisté ! Il m’a dit que vous et leprofesseur Jaloux essayiez de faire revivre le mort.

– Vous êtes sûre que c’est André qui vous adit cela ? Demanda avec une grande douceur le Dr Moutier. Voussavez ce que je vous ai dit, mon enfant, dans votre état, il fautvous méfier de vos yeux et de vos oreilles !… Je croiraiplutôt moi que le bruit de l’opération est venu jusqu’à vous par…mon Dieu… par les domestiques qui ont certainement jasé… votrevieille servante en a peut-être entendu parler…

– Je ne parle plus à ma vieille servante… jene parle plus à mon mari… je ne parle plus qu’à André, quand Andréle veut bien… Il m’a tout dit de ce qu’il a vu et entendu… et ilest venu me voir parce qu’il savait que je l’attendais… il m’adit : « Le Dr Moutier a dit tout bas au Dr Jaloux :Si je réussis l’opération en dix minutes il y aura dubon !… » Est-ce vrai, oui ounon ?…

Et comme ils la regardaient complètementmédusés, elle leur tourna tranquillement le dos et à pas lentsrentra dans la petite maison du bord de l’eau.

Ce jeudi-là (les conférences du professeurJaloux avaient lieu tous les jeudis), la petite rue qui conduit auporche majestueux de l’École des sciences politiques et socialesfut envahie de bonne heure par toute une bande de carabins qui necessèrent de se renvoyer les lazzis les plus grossiers relatifs àla théorie probable de la suggestion des morts et auxconférences philosophiques et expérimentales sur la médecine del’âme.

L’âme, ils n’y croyaient pas, disaient-ils…pas plus, du reste, qu’ils ne croyaient à l’histoire de ressuscitédu Dr Moutier. Pour eux, le bonhomme dont il était question étaitencore vivant quand on l’avait opéré. L’examen du cœur austéthoscope ne leur suffisait pas.

Il n’y a qu’une chose qui puisse nous prouverréellement qu’un homme est mort, disaient-ils, c’est la rigiditécadavérique !… Eh bien ! cette rigidité n’a pas étéconstatée !… Bien mieux, elle ne pouvait pas l’être !…Elle ne le pouvait pas, par la raison bien simple que l’opérationne pouvait réussir que si elle était faite sur un corps encorechaud !… En somme, avec l’opération de Moutier,concluaient-ils au milieu des rires et des cris d’animaux, on nepeut ressusciter les morts que lorsqu’ils sont encorevivants !… »

Les mauvaises dispositions des étudiants àl’égard du conférencier mondain n’étaient point nouvelles. Aussi,dans la crainte d’une manifestation plus tapageuse qu’àl’ordinaire, la belle Mme de Bythinie, l’égérie duprofesseur Jaloux, avait-elle pris ses précautions.

C’était elle qui était allée trouver ledirecteur-administrateur de l’École et avait obtenu que pendant laconférence le porche de l’entrée ne fût pas ouvert.

Les élèves sérieuses, les« Jalouses », seraient averties, et pénétreraient dansl’établissement et dans la salle par un chemin inaccoutumé.

De même, Mme de Bythinie avaitprévenu quelques rares journalistes qui étaient de ses amis,chroniqueurs de salon, bonzes importants de la pressebien-pensante.

Quant aux petits reporters, ils restèrent avecles carabins à se morfondre dans la rue jusqu’au moment où ilss’aperçurent qu’ils étaient joués puisqu’ils ne voyaient apparaîtreaucune de ces belles madames à panaches, aucun de ces équipages,aucune de ces livrées qui étaient là ordinairement bien avantl’ouverture de la conférence du professeur à la mode.

Les carabins se dispersèrent dans lesbrasseries ou s’en allèrent au cours, mais les reporterscherchèrent le moyen d’entrer malgré tout, et ils le trouvèrent,naturellement.

Quand ils furent parvenus à forcer la porte dela haute tribune, le professeur Jaloux prononçait ces phrasesmémorables qu’ils n’eurent garde d’interrompre :

– Mesdames, messieurs, vous comprenez que ledocteur Moutier et moi n’avons pas attendu les objections que nouslisons depuis quelques jours dans quelques feuilles scientifiquespour nous les faire à nous-mêmes ? On nous dit que la rigiditécadavérique, la décomposi­tion sont des preuves absolues de la mortet nous ne faisons aucune difficulté d’avouer que ces preuves nousfont, dans la circonstance, défaut. Mais en avons-nous réellementbesoin ? Je dirai non !… non, avec le Dr Tuffier et avectous ceux qui pensent qu’un homme dont le cœur ne bat plus, dont lesang depuis un quart d’heure ne circule plus, est mort !… Ladécomposition, la rigidité cadavérique sont, en elles-mêmes, moinsdes preuves que des conséquences de la mort qui les aprécédées. Mesdames, messieurs, le stéthoscope en main,nous avons constaté la mort de cet homme et voilà celui qui l’afait revivre !

Disant ces mots, le professeur Jaloux, avec unde ces gestes plein d’autorité et de grâce dont il avait le secret,désigna, à sa droite, le brave Dr Moutier qui, écarlate et modeste,baissait les yeux.

Aussitôt, les Jalouses, comme si ellesn’avaient attendu que ce signal, faisaient un triomphe au rédacteuren chef de La Médecine astrale, criaient :« Bravo ! bravo ! » à tue-tête, agitaient leursaigrettes, secouaient leurs panaches et tapaient l’une contrel’autre leurs petites mains gantées et frénétiques.

– Mesdames, messieurs, continuait Jaloux enremuant, le petit doigt en l’air, sa cuiller dans le verre d’eausucrée, un sentiment d’humanité dont nous n’avons pu nous départirne nous a peut-être point permis de tirer d’un tel événement toutl’enseignement expérimental qu’il comporte. Cet homme était alléchez les morts ; qu’y avait-il vu ? Pour le savoir, ilnous fallait l’interroger. Mais l’état manifeste d’épouvante danslequel il se trouvait au retour d’un pareil voyage, et la faiblessed’un organe dont la lésion récente encore n’avait pu entièrement secicatriser, nous ordonnaient d’être prudents.

« Ce n’est qu’au bout de quelques joursque nous avons pu recueillir un témoignage d’outre-tombe qui nousa, mon confrère et moi, bouleversés.

« Sans doute, mesdames, messieurs,devons-nous, dans une circonstance aussi exceptionnelle, fairetoutes nos réserves, sans doute devons-nous être les premiers, ànous garder, si j’ose dire, scientifique­ment, contre lesconclusions trop hâtives d’une expérience qui nous émeut d’autantplus qu’elle semble corroborer d’une façon définitive des théoriesbasées en partie sur l’hypothèse.

« Tout de même, quand on saura que lesujet était le plus sceptique des hommes du monde, en même tempsqu’un scientifique et qu’un « commercial » des pluspratiques et des plus terre à terre, se riant de nos préoccupationset de nos travaux, et nous traitant facilement de vieux toqués, etvous, mesdames, de jeunes folles, j’estime que notre devoirscientifique est de prendre en considération la transformationradicale de son individu moral au sortir de l’opération, et –pourquoi ne le dirions-nous pas puisque c’est notre ardenteconviction – de la mort ?

« Les premières paroles du ressuscité,retenues longtemps sur ses lèvres par la terreur même qu’il a à lesprononcer et par l’effroi de la tombe, ses premières paroles,dis-je, ont été pour nous crier qu’il avait vu les morts !

À ces mots, un grand frisson parcourut toutela salle ; de petits cris d’effroi satisfait s’échappèrent depetites bouches. Une aussi importante nouvelle faisait se pâmertoutes ces dames. Tour à tour, elles se sentaient elles-mêmesmourir et renaître aux accents suaves et tout de même effrayants dudivin Jaloux ! Avec lui, avec lui seul, elles eussent vouluvisiter le ciel mais avec lui seul aussi elles consentaient àdescendre en enfer. Suspendues à son verbe élégant et sacré, ellesse promenaient dans le royaume des morts, en attendant l’heure desmorts.

– Oui, mesdames, continuait Jaloux (il nedisait même plus « et Messieurs » tant les messieurs quisont toujours un peu frondeurs et se plaisent à faire les« esprits forts » l’intéressaient peu en un pareil jourde triomphe), oui, mesdames, les premières paroles de l’opéré ontété pour nous tracer une fresque tragique de la vallée qu’il habiteet telle qu’elle lui est apparue dans la mort, avec ses vivants etavec ses morts ! Ceux-ci entourant ceux-là de leurstourbillons invisibles, âmes impures condamnées à faire leurpurgatoire parmi toutes ces choses qu’elles ont tant aimées et quine se souviennent même plus d’elles, esprits alourdis par les liensmatériels d’une existence précédente entièrement consacrée à lachair, et incapables, par conséquent, de s’élever jusqu’aux sphèressublimes qui se balancent sous les pieds de la Beauté !c’est-à-dire de la divinité !…

… Jaloux, d’un coup d’œil, avait mesuré toutson succès. Avec quel geste d’archange, il emportait au septièmeciel toutes ses belles proies soupirantes : « Les sphèresqui se balancent sous les pieds de la Beauté !… »Ah ! ma chère !…

– Oui, mesdames, voilà ce que le docteurMoutier et moi avons cru saisir dans la lamentation, lamalédiction, le gémissement, l’évocation terrible issus de labouche tourmentée d’un nouveau Lazare qui a vu et qui sesouvient !

« Mais, chères disciples, de ce qu’ilnous semble avoir enfin la preuve de la réalité d’un mondespirituel que nous avons osé décrire, nous, sans l’avoir vu, etdont nous avons osé mesurer l’influence dans notre théorie duPressentiment, de l’Avertissement et del’Entraînement,nous ne montrerons point un ridiculeorgueil. Nous nous rappellerons que ce n’est point avec l’aide denotre raison seule que nous sommes arrivés à la conception du mondeinvisible, mais en tenant compte des expériences spirites de nosillustres prédécesseurs, et des confidences des esprits par letruchement du médium !

« Aujourd’hui, après ce qui vient de sepasser et dont j’ai été le témoin stupéfait et enthousiaste, nuln’a plus le droit de traiter d’hallucinations et de truquages lesvisions scientifiques et photographiées d’un Crookes !

« Mesdames, messieurs, les mortsvivent !

« Le docteur Moutier et moi, nous nedésespérons pas de vous faire entendre cette grande parole parnotre mort lui-même dès qu’il sera devenu un peu plus calme, et,disons le mot, un peu plus traitable. La dernière fois que nousl’avons vu, en effet, il était comme enragé et nous vous assuronsqu’il ne nous a marqué aucune reconnaissance du service que nousvenions de lui rendre !… Mais c’est un homme du monde ;aussi je suis certain que le moment n’est pas loin ou il serappellera ce qu’il doit à la science spirite en général, et à lachirurgie astrale du docteur Moutier en particulier !

Ici, l’orateur s’était arrêté pour permettre àl’auditoire de l’applaudir ; le gentil tumulte des petitesmains gantées remplit à nouveau joyeusement la salle, cependantqu’une vieille demoiselle, que l’onécrasait littéralement dans uncoin, protestait avec force, disant qu’elle n’était point venue làpour son plaisir et demandait la parole.

Les Jalouses, outrées d’une pareilleprétention, et lui criant que la conférence n’était pointcontradictoire, voulaient la jeter à la porte, mais la vieilledemoiselle se défendait avec acharnement.

Le professeur à la mode finit par s’émouvoird’une agitation aussi insolite et le Dr Moutier demanda très haut,sur le ton le plus sévère :

– Qu’est-ce qu’il y a ?… De quois’agit-il ?

Alors, on entendit la voix aiguë, frêle etdésespérée de la vieille demoiselle que l’on écrasait dans uncoin :

– C’est moi, docteur !… Moi, mademoiselleHélier !… J’arrive de la Roseraie !… J’ai vuMme Saint-Firmin… Le mort est encore revenu !…

– Taisez-vous !… On vous dit de voustaire !…

– Non ! non ! je ne peux plus metaire ! Le mort a parlé ! Il a été assassiné !…

– Qu’on me jette à la porte cette vieillefolle !… ordonna, exaspéré, l’excellent Dr Moutier.

S’il ne s’était retenu, il se fût jeté surelle et l’eût étranglée !…

Il ne manquait plus que cette imbécile avecses histoires de revenants et de tables tournantes, pour jeter lediscrédit et le ridicule sur une opération chirurgicale qu’il avaitdéjà tant de mal à défendre contre les audacieuses fantaisies duprofesseur Jaloux lui-même.

Car le Dr Moutier n’était qu’à moitiésatisfait de la façon dont son collègue avait traité cetteaffaire.

Il avait dit au professeur : « Jevous en supplie, parlez par hypothèses, n’affirmez rien !… Lefait de l’opération en lui-même est assez intéressant pour que vousne soyez pas tenté d’en tirer vous-même d’inquiétantes conclusionsspirites. Ceux qui croient au spiritisme en tireront cesconclusions tout seuls, et ceux qui n’y croient pas encore serontamenés à y croire, ou tout au moins àréfléchir !… »

Or, il n’avait pu empêcher Jaloux de profiterd’une pareille occasion pour faire le joli cœur avec son royaumedes morts !

Enfin, heureusement que Jaloux n’avait pasfait intervenir là-dedans, comme il y était décidé tout d’abord, lefantôme qui avait assisté à l’opération et qui était venu laraconter à la dame du bord de l’eau !…

Ah ! du coup, il n’aurait plus manqué queça !… C’est que Jaloux y croyait dur comme fer, lui, à cefantôme-là !… Songez donc !… le fantôme avait répété à lapetite dame une phrase que le Dr Moutier avait prononcée àl’oreille de Jaloux et que Jaloux aurait été seul àentendre !… Qu’est-ce qu’il en savait, lui, Jaloux, qu’ilavait été le seul a l’entendre, cette phrase-là !… Est-ce queMme de la Bossière qui était là n’avait pas pul’entendre, elle aussi, et la répéter !… Et lesdomestiques ? est-ce qu’ils ne sont pas faits pour écouterderrière les portes ?…

Ah ! ce Jaloux, un orateur, oui !…ça, c’était un orateur, mais un homme de science, jamais de lavie !…

Moutier ne fut tranquille que lorsqu’il futsûr que cette grande bringue d’Hélier avait été expulsée et qu’iln’avait plus à craindre la publicité de ses contesfantastiques.

Il n’avait pas remarqué qu’en même temps quela vieille demoiselle quittait la salle, un peu plus brusquementqu’elle ne l’eût désiré, la tribune du premier étage se vidait detous ses reporters.

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