Les Mille et une nuits

CV NUIT.

La sultane, ayant été réveillée par sa sœur,reprit ainsi la parole : Sire, pendant que le bourreau sepréparait à pendre le tailleur, le sultan de Casgar, qui ne pouvaitse passer longtemps du bossu, son bouffon, ayant demandé à le voir,un de ses officiers lui dit : « Sire, le bossu dont votremajesté est en peine, après s’être enivré hier, s’échappa dupalais, contre sa coutume, pour aller courir par la ville, et ils’est trouvé mort ce matin. On a conduit devant le juge de policeun homme accusé de l’avoir tué, et aussitôt le juge a fait dresserune potence. Comme on allait pendre l’accusé, un homme est arrivé,et après celui-là un autre, qui s’accusent eux-mêmes et sedéchargent l’un l’autre. Il y a longtemps que cela dure, et lelieutenant de police est actuellement occupé à interroger untroisième homme qui se dit le véritable assassin. »

À ce discours, le sultan de Casgar envoya unhuissier au lieu du supplice. « Allez, lui dit-il, en toutediligence, dire au juge de police qu’il m’amène incessamment lesaccusés, et qu’on m’apporte aussi le corps du pauvre bossu, que jeveux voir encore une fois. » L’huissier partit, et arrivantdans le temps que le bourreau commençait à tirer la corde pourpendre le tailleur, il cria de toute sa force que l’on eût àsuspendre l’exécution. Le bourreau ayant reconnu l’huissier, n’osapasser outre et lâcha le tailleur. Après cela, l’huissier ayantjoint le lieutenant de police, lui déclara la volonté du sultan. Lejuge obéit, prit le chemin du palais avec le tailleur, le médecinjuif, le pourvoyeur et le marchand chrétien, et fit porter parquatre de ses gens le corps du bossu.

Lorsqu’ils furent tous devant le sultan, lejuge de police se prosterna aux pieds de ce prince, et, quand ilfut relevé, lui raconta fidèlement tout ce qu’il savait del’histoire du bossu. Le sultan la trouva si singulière qu’ilordonna à son historiographe particulier de l’écrire avec toutesses circonstances ; puis, s’adressant à toutes les personnesqui étaient présentes : « Avez-vous jamais, leur dit-il,rien entendu de plus surprenant que ce qui vient d’arriver àl’occasion du bossu, mon bouffon ? » Le marchandchrétien, après s’être prosterné jusqu’à toucher la terre de sonfront, prit alors la parole : « Puissant monarque,dit-il, je sais une histoire plus étonnante que celle dont on vientde vous faire le récit ; je vais vous la raconter si votremajesté veut m’en donner la permission. Les circonstances en sonttelles qu’il n’y a personne qui puisse les entendre sans en êtretouché. » Le sultan lui permit de la dire, ce qu’il fit en cestermes :

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