En route vers le Pôle – Au pays des boeufs musqués – Voyages, explorations, aventures – Volume 12

Chapitre 4Cent-millionnaire et milliardaire

 

Mais qui est M. Drivau ?

– Il est donc bien riche, votre maître,qu’il paye de pareils déjeuners à ses invités ? demanda lepère Garnier au maître d’hôtel.

Monsieur Drivau a quatre millions dont il saitsi bien se servir qu’ils lui rapportent dans les trois cent millefrancs, bon an, mal an.

De plus, il vient de toucher quatorze millionsde dividende, pour des actions de la mine d’or du Garricks, enAustralie.

Il est certain que l’année prochaine, iltouchera une vingtaine de millions pour le moins.

– Oh là là ! fit le pèreGarnier.

En voilà une mine qui rapporte gros !

– C’est toute une histoire.

Elle a été découverte par un chercheur d’orfrançais naturalisé australien, M. d’Ussonville, ungentilhomme basque qui a l’air d’un de ces grands aigles que l’onvoit au Jardin des Plantes ; plus de deux mètres de haut.

Mon maître peut être considéré comme uncent-millionnaire à cause des revenus de cette mine ; maisM. d’Ussonville est un milliardaire.

La mine était en plein désert sans une goutted’eau.

Personne ne pouvait traverser ce grand désertaustralien.

Il parvint à faire de l’eau.

– Comment ?

– Père Garnier, quand les femmes deFontainebleau vont le matin aux champignons, vous savez que larosée trempe leurs jupes au point qu’elles les tordent et quebeaucoup d’eau en sort.

– Oui. Moi même, je tords ainsi monpantalon pour le faire sécher quand je reviens des champignons.

– Eh bien, M. d’Ussonville acheta ouse procura cent chiens métis, provenant de chiennes dingos, desbêtes indigènes, et de chiens anglais.

» Il s’enfonça dans le désert avec sameute chargée de vivres, de bagages et d’éponges.

» À cette époque, M. d’Ussonvilleétait déjà devenu millionnaire en exerçant le métier de chercheurd’or.

» Je vous dis ça en passant.

» Il avait idée que la rivière Ashburtonroulant des paillettes, comme elle traverse souterrainement ledésert, ces paillettes devaient en provenir.

» Et M. d’Ussonville trouva unemontagne d’or, c’est-à-dire de quartz aurifère.

» À la surface, il y avait des champsd’or d’une richesse fantastique.

» M. d’Ussonville chargea sa meutede pépites, revint au littoral, et il alla former une compagnieavec d’anciennes amazones de Béhanzin qui chassaient autrefois pourlui l’homme et l’éléphant et chassaient en ce moment ce dernierpour elles-mêmes.

» Puis il acheta au Congo des esclavesdont il fit des travailleurs libres ; une vraie blague cestravailleurs libres : ils sont esclaves tout de même.

» Il recruta aussi des Sénégalais afind’en faire des sapeurs et des artilleurs pour ses mitrailleuses etses canons-revolvers et le voilà parti pour sa montagne d’or avecd’anciens sous-officiers des tirailleurs sénégalais.

» M. Drivau, mon maître, unParisien.

» M. Santarelli, un Corse, un petitnoir de cheveux et de barbe qui ne rit jamais.

» M. Castarel, qui, au contraire,rit toujours. C’est un Marseillais qui ressemble à un polichinellesans bosses.

» Et c’est un farceur.

» Il m’a escamoté ma montre et monporte-monnaie avec plus d’adresse qu’un pickpocket.

» Il est épatant.

» Ainsi que mon maître, il ne peut pass’empêcher de faire des tours et il donne au château des séances deprestidigitation où il invite les paysans qui le regardent comme unsorcier.

» Voilà les trois principaux invités.

» Cent-millionnaires et un milliardaire,M. d’Ussonville.

» Voilà, père Garnier.

» Et je vous assure qu’il ne fait pasmauvais les servir.

» Pas d’anse du panier, parexemple !

» Ils ont adopté le bon système.

» Ils expliquent ce qu’ils veulent et onfixe tant par tête.

» Gagne ce que tu peux !

» On ne vole pas pour conserver leclient, car ce ne sont pas des maîtres, mais des clients.

– Drôle de système.

– Mais non.

» Excellent, au contraire.

» Voyons, père Garnier, il vous vient unclient qui désire déjeuner.

» Vous tâchez de le contenter, pasvrai ?

– Oui.

– Et vous n’osez pas l’étriller.

» Il ne reviendrait plus.

– C’est vrai.

» Moi de même avec mon patron qui, si jele traitais mal, me remercierait certainement.

– Eh bien oui, en y réfléchissant, c’estle meilleur système.

– Vous pouvez m’en croire.

» Si j’étais riche, c’est celui quej’adopterais pour le maître d’hôtel, qui aurait à s’entendre avecson cuisinier, à le payer, à le commander.

» Je suis responsable du chef de cuisineet de tout le service.

– Enfin vous avez une bonneplace !

– Excellente.

– Il y a-t-il des dames ?

– Ah ! vieux curieux, je vois qu’ilfaut que je vous parle des invitées.

» Eh bien, ce ne sont pas les premièresvenues non plus.

» Un moment, s. v. p.

» Je vais jeter un coup d’œil sur lesfourneaux.

Cent-millionnaires !

Milliardaire !

Le père Garnier n’en revenait pas et segrattait l’oreille.

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