En route vers le Pôle – Au pays des boeufs musqués – Voyages, explorations, aventures – Volume 12

Chapitre 6Une idée de M. d’Ussonville

 

Le chef revint et dit :

– M. d’Ussonville a un tas d’idéescomme celle-là en tête.

» Il s’est dit que l’on pouvait toutaussi bien établir des hôtels-étapes pour aller de l’une à l’autreau Grand Hôtel du Pôle Nord, que ce ne serait pas plus difficilepour ces hôtels-là que pour celui récemment construit auSpitzberg.

» Et je suis tellement convaincu quec’est possible, que j’ai laissé mon fils s’engager comme gérantd’un de ces futurs hôtels polaires.

– Vous m’épatez.

– Père Garnier, nous sommes pourtant dansun siècle où I’on ne doit plus s’épater.

» L’épatement est une chose finie, usée,un mot à biffer.

» Que n’avons-nous pas vu ?

» Que ne verrons-nous pas ?

» Mais j’oubliais de vous dire queMlle de Pelhouër vous achèterait descouleuvres et des lézards.

» Pas de bêtises !

» Quand elle vous demandera le prix, n’enfaites pas.

– Compris !

» Je m’en rapporterai à sagénérosité.

– Quand vous la verrez, regardez sesyeux ; jamais vous n’en aurez vu de pareils, des yeux d’oiseaude mer.

» Du reste, elle a une tête de mouette,un oiseau que vous ne connaissez pas, mais que moi, Breton, jeconnais.

» Eh bien, ces yeux-là sontinfaillibles ; les amazones m’ont conté que leur princesselogeait toujours sa balle dans l’œil des éléphants et deslions.

» Et quand on pense qu’elle n’a que seizeans !

» Quand on pense qu’à quatorze ans, pourson coup d’essai, elle a tué une meute de six lions !

» Avec ça, pas hautaine, un peu fière,mais seulement avec ceux qui voudraient se familiariser sans que çalui convienne, mais très bonne et très gentille.

» Ne faisant jamais l’importante ;mais ne se laissant manquer par personne.

» Nous savons qu’un jour la comtesse deGernaysac lui a dit d’un ton trop protecteur : « Mapetite !

» – Madame, je ne suis la petite depersonne. »

» Les paysannes de Senoncourt l’aimentbeaucoup, parce qu’elle fait beaucoup de bien, discrètement, à despauvres gens méritants et malheureux.

» Mais elle ne se laisse pas exploiterpar les faux pauvres.

– Ce n’est pas comme le comte et lacomtesse de Labart ! dit le père Garnier.

» En voilà qui sont trompés par lesmendiants suspects.

» Quel dommage que de si braves gens nesachent pas discerner ceux qui sont honnêtes de ceux qui ne le sontpas.

– Oui, c’est toujours dommage de voirl’aumône mal faite.

» Mais croyez-vous que nos piqueurs aientdétourné des cerfs ?

– C’est leur première chasse ; je neles connais que depuis très peu de temps, puisque l’équipage esttout nouveau.

» Mais je sais que M. LaFeuille[1] est très estimé et qu’il sera très biensecondé par MM. La Rosée et La Verdure, qui ont chassé dans laforêt d’Orléans.

» La meute est très bonne, bien sous lefouet. Enfin voilà cinq chasses d’entraînement qui ont bienréussi.

» M. La Feuille m’a dit que lemaître d’équipage avait une grande qualité.

– Laquelle ?

– Il laisse faire ses piqueurs et secontente du plaisir de suivre.

» Or, beaucoup de maîtres ont le tort dese croire grands veneurs, comme Ephrussi par exemple, qui faisaitmanquer ses chasses en commandant à tort et à travers.

» Vous savez qu’avant le rapport, lespiqueurs ne disent mot à personne sur les cerfs détournés.

» Ah ! les voilà !

» Ne les questionnez pas, vous lesmettriez dans l’embarras.

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