Jean Diable – Tome II

XXI – Révélations.

Jeanne prit le deuil de veuve. Le marquis deBelcamp l’appela sa fille, mais elle n’eut pas longtemps à luidonner ses soins, car il ne se releva jamais des coups terriblesque lui avait portés cette fatale nuit. Il s’éteignit quelquessemaines après avec le nom d’Henri sur les lèvres, et dans lescirconstances suivantes :

C’était la fin du mois de septembre. Jeanneguidait les pas chancelants du vieillard dans une allée du parc. Audétour du sentier, ils se trouvèrent face à face avec un homme quiresta tête nue devant le marquis. Ils se regardèrent longtemps ensilence : vous n’eussiez point su dire lequel des deuxressemblait le plus à un fantôme.

Le vieillard dit enfin :

– Gregory Temple, je vousreconnais ; que voulez-vous de moi ?

– Je viens vous dire, Armand de Belcamp,répondit l’ancien intendant supérieur de la police de Londres, quenotre orgueil n’est qu’humiliation, notre sagesse folie, notrelumière ténèbres. Un homme a été condamné à mort vendredi dernierpar les juges de la session. On l’a pendu mercredi. Il se nommaitTom Brown. Sur l’échafaud, il s’est déclaré coupable du meurtre deMaurice O’Brien à Prague et du meurtre de Constance Bartolozzi àLondres… Cet homme était le fils d’Hélène Brown.

Le marquis s’affaissa dans les bras de Jeanne,qui levait les yeux au ciel et qui pleurait.

– Ô Madeleine ! Madeleine !…,murmura-t-il en un suprême sanglot.

Un gémissement lui répondit. La paysanne étaitprosternée derrière lui, le visage caché sous son capuce noir etbaisant la terre à ses pieds.

On porta le marquis de Belcamp dans son lit,où il languit encore trois jours.

La mort de Tom Brown éclairait une portion dumystère. Le fils d’Hélène et de Gregory Temple prenait pour lui lemeurtre du général et celui de la comédienne.

Mais les autres meurtres qui chargeaient lecompte de Jean Diable ?

Il ne nous appartient pas d’ajouter rien à lalettre même de cette bizarre légende du dix-neuvième, siècle, quicommence dans la nuit et finit dans le mystère.

Nous ferons remarquer seulement qu’HélèneBrown et par elle son fils Tom étaient les héritiers des deuxbrasseurs Turner et Robinson. Henri de Belcamp seul les séparaitd’une fortune de neuf millions ; ils avaient intérêt évident àle perdre. Quant au double crime accompli à Paris, Noll Green etDick de Lochaber ne connaissaient qu’un maître Tom Brown.

Dans le pays où se passèrent les événementsque nous avons racontés, aucun doute ne subsiste, et la mémoire ducomte Henri de Belcamp est l’objet d’un culte pour tous ceuxqu’éblouit son rapide passage dans la vie.

Ce fut à la fin de cette même année 1817 quel’amirauté anglaise mit sur chantier le premier navire de guerre àvapeur.

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