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Scène IV

Amarante,Clarimond

 

Amarante

Monsieur, monsieur, un mot. L’air de votrevisage

Témoigne un déplaisir caché dans lecourage.

Vous quittez ma maîtresse un peu malsatisfait.

Clarimond

Ce que voit Amarante en est le moindreeffet.

Je porte, malheureux, après de telsoutrages,

Des douleurs sur le front, et dans le cœur desrages.

Amarante

Pour un peu de froideur, c’est tropdésespérer.

Clarimond

Que ne dis-tu plutôt que c’est tropendurer ?

Je devrais être las d’un si cruel martyre,

Briser les fers honteux où me tient sonempire,

Sans irriter mes maux avec un vain regret.

Amarante

Si je vous croyais homme à garder unsecret,

Vous pourriez sur ce point apprendre quelquechose

Que je meurs de vous dire, et toutefois jen’ose.

L’erreur où je vous vois me faitcompassion ;

Mais pourriez-vous avoir de ladiscrétion ?

Clarimond

Prends-en ma foi de gage, avec… Laisse-moifaire.

(Il veut tirer un diamant de sondoigt pour le lui donner, et elle l’en empêche.)

Amarante

Vous voulez justement m’obliger à metaire ;

Aux filles de ma sorte il suffit de lafoi :

Réservez vos présents pour quelque autre quemoi.

Clarimond

Souffre…

Amarante

Gardez-les, dis-je, ou je vous abandonne.

Daphnis a des rigueurs dont l’excès vousétonne ;

Mais vous aurez bien plus de quoi vousétonner

Quand vous saurez comment il faut lagouverner.

À force de douceurs vous la rendezcruelle,

Et vos submissions vous perdent auprèsd’elle :

Épargnez désormais tous ces passuperflus ;

Parlez-en au bonhomme, et ne la voyezplus.

Toutes ces cruautés ne sont qu’enapparence.

Du côté du vieillard tournez votreespérance ;

Quand il aura pour elle accepté quelqueamant,

Un prompt amour naîtra de soncommandement.

Elle vous fait tandis cette galanterie,

Pour s’acquérir le bruit de fille biennourrie,

Et gagner d’autant plus de réputation

Qu’on la croira forcer son inclination.

Nommez cette maxime ou prudence ousottise,

C’est la seule raison qui fait qu’on vousméprise.

Clarimond

Hélas ! et le moyen de croire tesdiscours ?

Amarante

De grâce, n’usez point si mal de monsecours :

Croyez les bons avis d’une bouche fidèle,

Et songeant seulement que je viens d’avecelle,

Derechef épargnez tous ces passuperflus ;

Parlez-en au bonhomme, et ne la voyezplus.

Clarimond

Tu ne flattes mon cœur que d’un espoirfrivole.

Amarante

Hasardez seulement deux mots sur maparole,

Et n’appréhendez point la honte d’unrefus.

Clarimond

Mais si j’en recevais, je serais bienconfus.

Un oncle pourra mieux concerter cetteaffaire.

Amarante

Ou par vous, ou par lui, ménagez bien lepère.

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