Les Ténébreuses – Tome I – La Fin d’un monde

Chapitre 19NON ! NON ! MA PETITE ÂME ! TOUT N’EST PAS FINI !

 

Agathe Anthonovna ne s’était pas couchée. Ellene pouvait plus vivre dans ce pays. Elle avait résolu de le fuir.Seulement, elle n’avait pas d’argent et elle ne connaissaitpersonne en qui elle pût avoir une assez grande confiance pour luidemander conseil et, à plus forte raison, pour la protéger.

Le miracle était qu’en cette minute où tousl’avaient abandonnée au hideux Raspoutine, elle eût trouvé pour lasauver une danseuse, la Kouliguine !

Agathe lui en avait une reconnaissanceinfinie. Toute frémissante encore des dangers courus, elle voyaitentre elle et Raspoutine se dresser cette belle et héroïque figure.La danseuse n’avait eu que quelques mots à prononcer pour quel’affreux cauchemar s’évanouît.

Alors, pourquoi chercher ailleurs une plusutile protectrice ? Il n’y en avait pas ! Elle irait sejeter aux pieds de la Kouliguine, cette nuit même, lui dirait sestranses, ses terreurs et la supplierait de la cacher, de l’aider àfuir, à quitter la Russie qui maintenant lui faisait horreur.Ah ! retourner en France !… revoir des pays desoleil ! le Midi calme, les jardins embaumés, les jours et lesnuits sans angoisse et sans horreur !…

La Kouliguine, si puissante et si riche, luiprocurerait des passeports et lui prêterait de l’argent.

Son plan arrêté, Agathe consentit à écouter sagniagnia, qui la suppliait de prendre un peu de repos. Elle selaissa coucher et renvoya la bonne vieille.

Puis elle se releva, s’habilla vivement,s’enveloppa d’un sombre manteau et écouta les bruits de lamaison.

Elle savait que sa mère n’était pas encorecouchée ; s’il en avait été autrement, elle aurait dû remettrela réalisation de son projet à plus tard, car elle était dans lanécessité de traverser l’appartement de sa mère pour se rendre aupetit escalier privé qui faisait communiquer directement cetappartement avec la rue.

Sa mère seule en avait la clef, et Agathen’ignorait point où elle se trouvait : dans le tiroir de latable de nuit de la princesse, si les habitudes de la maisonn’avaient pas changé. La princesse se servait souvent de cetescalier pour ne pas passer par le grand padiès quand elle voulaitfuir les importuns ou courir quelque aventure.

Gniagnia avait dit à Agathe que Raspoutineétait parti depuis longtemps et que sa mère et la Wyronzew et laprincesse Karamachef avaient entrepris une partie de poker quidurerait, suivant l’habitude, jusqu’au matin.

Tranquille de ce côté, Agathe pénétra dans lachambre de sa mère, alla à la table de nuit, ouvrit le tiroir,trouva la clef, qui était une forte clef, ce qui expliquait que laprincesse ne l’avait point toujours sur elle.

À côté de la clef et de quelques breloques, ily avait un revolver. Agathe s’en empara.

Elle quitta la chambre, traversa un cabinet dedébarras, descendit l’escalier, ouvrit la porte de la rue, lapoussa avec précaution et jeta un regard sur la place desGrandes-Écuries.

Cette place était entièrement déserte. Ellereferma vivement la porte et s’enfonça dans l’ombre, du côté ducanal Catherine. Elle traversa un pont, erra quelque temps,s’éloigna du palais d’hiver, aborda les quais de la Néva ettraversa le fleuve sur le pont Troïtsky.

Elle n’ignorait pas où se trouvait la datchade la Kouliguine ; plus d’une fois, au cours de ses promenadesaux îles, elle avait remarqué cette somptueuse maison de campagne,isolée dans un coin désert des rives du golfe de Finlande, etchacun savait, à Pétersbourg, que c’était la propriété de ladanseuse.

Agathe marcha longtemps. Elle aperçut enfinles toits de la datcha au-dessus d’un gros bouquet d’arbres.

Elle n’eut point besoin d’aller jusqu’à lagrande grille. Une petite porte du côté de la Néva étaitentrouverte. Elle pénétra dans les jardins. Elle se trouva derrièreun bâtiment dont une porte était, là encore, entr’ouverte.

Alors elle pénétra dans une vaste pièce oùrégnait un désordre indescriptible. Elle s’aperçut bientôt qu’iln’y avait pas seulement là du désordre, des tables renversées, dela vaisselle brisée ; il y avait encore du sang et ellerecula.

Il y avait du sang partout, sur les murs etsur le parquet et sur la nappe maculée qui traînait par terre.

Dans quelle horreur nouvelle Agathe était-elletombée ?

Elle voulut fuir, mais elle s’aperçut que,pour gagner la petite porte par laquelle elle était entrée, il luifallait marcher dans du sang, et comme il y avait une autre porteen face, elle alla vers cette seconde porte.

Avant de l’atteindre, il lui sembla quequelque chose remuait à une fenêtre ouverte sur le jardin. C’étaitun coin de vêtement que soulevait la brise du matin. Alors, commesa marche la rapprochait de cette fenêtre, elle crut distinguerquelque chose qui ressemblait vaguement à un corps renversé.

Elle détourna la tête et s’élança pourfranchir plus tôt la porte et échapper à ce nouveau cauchemar.Mais, quand elle fut dans le jardin, ce fut plus fort qu’elle, elledut tourner la tête du côté de la fenêtre où elle avait cru voir uncadavre. Et, cette fois, elle distingua la tête du cadavre etreconnut son père, le malheureux Khirkof.

Elle eut un sourd gémissement et se traînajusque-là pour être sûre qu’elle avait bien vu cette choseaffreuse. Elle n’osa pas toucher cette chose morte. À la vérité,c’était son père ! Il était couvert de sang et il avait encoreles yeux grands ouverts dans sa face rouge renversée.

Agathe étendit les bras et tourna surelle-même, éperdue, la bouche ouverte et, cependant, ne pouvantcrier, n’en ayant pas la force.

Autour d’elle, partout, sur le sable desallées, dans les sentiers, sur l’herbe des pelouses, il y avait dusang.

Un homme là-bas, dans un massif d’hortensias,était étendu et c’était peut-être, lui aussi, un cadavre.

Est-ce qu’elle voyait vraiment toutcela ? Est-ce qu’elle ne rêvait pas ?… Est-ce qu’elleavait bien quitté l’hôtel des Grandes-Écuries ?…

Tout à coup, parmi toutes ces choses quiappartenaient à la mort, elle vit une ombre, vivante, une ombrevivante qui traversait le jardin et qui l’épouvanta plus que toutle reste.

Dans cette ombre-là elle avait reconnuRaspoutine !…

Raspoutine qui se dirigeait vers le perron dela datcha. C’était bien lui ! ah ! c’était bienlui ! Non ! non ! elle ne rêvait pas !… elle leconnaissait bien !… elle l’avait vu d’assez près ce soir-là,la pauvre chère enfant !…

Alors voilà que toute sa peur disparut.

Elle n’eut plus en elle qu’une colère terriblecontre le monstre !… Elle ne douta point que tout ce sang,c’était lui qui l’eût répandu !… C’était lui qui avait tué sonpère !… Raspoutine ne l’avait laissée, elle, que parce que laKouliguine s’était promise !… Et il était venu réclamer leprix du marché !… Et il avait trouvé là son père qui était(elle savait cela depuis longtemps) l’ami de la Kouliguine, et lemonstre, dans un accès de fureur jalouse, avait tué sonpère !

Il était capable de tous les crimes !…Partout où il y avait du drame et du sang, on devait rencontrer cethomme-là !…

Et ce monstre l’avait tenue dans ses bras,elle, elle, la pauvre Agathe !… Toute sa chair révoltée entressaillait encore !… mais elle n’avait plus peur delui ! elle n’avait plus peur !… Elle avait unrevolver !… c’était le ciel qui lui envoyait le damné… Ilallait payer ses infamies… Elle allait abattre comme un chienenragé cette bête puante !… avec quelle joie !… avecquels transports !…

Elle courut derrière lui, elle franchit leperron, elle traversa le vestibule.

Il devait être monté dans les chambres. Ellegravit l’escalier. Elle tenait son revolver à la main et elle avaitune envie délirante de le tuer, de le voir culbuter devant elle, dele voir se tordre et souffrir et écumer dans une agonie quiviendrait d’elle, d’elle qu’il avait outragée !

Comme elle arrivait sur le palier, elle setrouva tout à coup en face d’Hélène qui étouffa un cri en la voyantet tenta de l’entraîner avec elle immédiatement. Mais Agathehésitait :

– Raspoutine ! je vais le tuer ! Oùest-il ?

La Kouliguine avait bien de la peine à luifaire entendre raison :

– Tais-toi et viens ! Si j’ai faitquelque chose pour toi, fais cela pour moi !suppliait-elle.

– Tout ce que tu voudras ! tu m’assauvée ! mais laisse-moi tuer Raspoutine !

C’était son idée fixe, et comme l’autre larepoussait, elle répétait, comme une enfant rageuse :

– Pourquoi ? pourquoi ?

– Viens ! viens ! laisse-toiconduire ! il le faut !

Hélène finit par venir à bout de cetentêtement forcené et par arracher le revolver des mains de lafille de Khirkof. Elle poussa Agathe dans l’escalier et les deuxjeunes femmes se retrouvèrent dans le vestibule accrochées l’une àl’autre. Elles entendirent des portes claquer à l’étage supérieur,puis des pas au-dessus de leur tête. Hélène jeta Agathe sousl’escalier.

Raspoutine descendait.

– Il me cherche, tais-toi ! disait à voixbasse la danseuse qui avait sa main sur la bouche d’Agathe.

L’homme s’arrêta dans le vestibule, ouvritencore des portes, puis s’arrêta pour appeler, d’une voixféroce :

– Kouliguine ! Kouliguine !

Aucun bruit ne lui répondait, il dit touthaut :

– Est-ce qu’on l’a assassinée, elleaussi !… Il n’y a que des morts et du sang ici !…

Il ferma encore une porte avec un éclatfurieux et s’en alla rapidement, traversant le parc à grande allureet en appelant Spriatchef, son garde du corps, qu’il avait laissé àla porte et sans lequel il ne se risquait à courir aucuneaventure.

Hélène et Agathe s’étaient précipitées à unefenêtre et, derrière un rideau, elles le virent se jeter avecSpriatchef dans un isvô qui attendait sur la route et qui partitcomme une flèche.

Alors Hélène rendit son revolver à la fille duprince Khirkof.

Agathe tremblait encore de sa résolution detuer et de l’impuissance où Hélène l’avait mise de remplir sonardent dessein.

– Pourquoi as-tu fait cela, toi qui es sibonne pour moi ?… J’aurais tant voulu le tuer !… Il tefait donc peur ?…

Hélène, à cette parole, sourit.

– Oui ! je sais, tu n’as peur de rien…mais tout de même tu t’es cachée de lui !… Pourquoi ?…pourquoi ?… Ça aurait été si bon de l’abattre à tespieds !… et c’en était fini avec cet homme qui fait le malheurdu monde et a assassiné mon père !…

– Ce n’est pas lui qui a tué ton père, ditHélène. Ton père a été tué dans un duel loyal par son vieil amiSchomberg… Il n’y a rien à dire à cela !… Tu vois donc que tun’as pas à venger ton père !…

– Mais moi, moi, qui me vengera ? s’écriaAgathe en se tordant les mains… Tu crois donc que ce n’est rien, mapudeur offensée ? et les mains de cet homme sur moncorps ? et ma robe de vierge déchirée ?… Ah !pourquoi m’as-tu ôté cette joie de le voit mourir de ma main ?Cela, je ne peux pas te le pardonner !… Non, non ! je nepeux pas !… je ne peux pas !…

Et la jeune fille eut une grande crise delarmes.

– Écoute, Agathe Anthonovna, fit Hélène en luiessuyant le visage et en la caressant. Je vais te faire un serment,mais un vrai serment, non point sur des images de premièrecommunion, mais sur le sang qui bat dans mon cœur ! Je te jurequ’une occasion pareille se retrouvera et que je te laisserai letuer comme tu voudras !

– Tu ne trouves donc pas qu’il en a assezfait, là-bas ! non, je ne te comprends pas !… Il n’y aplus que de la pourriture et du sang sur cette terre !… Il n’ya plus aucun espoir à caresser dans nos cœurs ! J’étais venuepour que tu me caches, pour que tu m’aides à fuir !… Mais àquoi bon ? De quelque côté que je me tourne, je ne vois quedes crimes !… Et chez toi, on marche sur des cadavres !…Mon père se bat avec son meilleur ami pour un sourire de toi, et ilmeurt, et tu trouves cela très bien !… Je ne puis même paspleurer mon père qui m’a livrée à Raspoutine !… Et tu n’as pasvoulu que je tue cet homme, toi qui as regardé mourir mon père ensouriant… Je voudrais être morte ! Tout estfini !…

Hélène embrassa Agathe et, la berçant dans sesbras, lui dit :

– Non ! tout n’est pasfini ! ma chère petite âme !

Elle l’entraîna encore, et, cette fois, Agathese laissa conduire. Une drochka attendait la danseuse à la porte dela datcha. Elle y fit monter Mlle Khirkof, qui, tout àfait passive maintenant, et très abattue, semblait au bout de sesforces. Cependant, elle demanda qui allait s’occuper du corps deson père.

– La police ! répondit Hélène. Je l’aienvoyé chercher !… La police étouffera le scandale et fera àton père une sépulture pleine d’honneur.

Alors Agathe ne dit plus rien… Elle ne savaitpas où la Kouliguine l’emmenait et elle ne le lui demandait pas.Tout lui était devenu indifférent.

La voiture les conduisait rapidement vers lenord, le long du golfe aux flots pâles. Puis elles traversèrent lesmarais, sur une route en remblai, à droite et à gauche de laquelleelles découvraient des eaux stagnantes envahies par les herbes etles roseaux.

Elles s’enfoncèrent ainsi, pendant des heures,au cœur de ces lugubres solitudes.

Et puis, à la lisière des forêts du nord,elles s’arrêtèrent devant une grande fabrique entourée de hautsmurs. Quelques petits bâtiments, portes closes, s’élevaient àdroite et à gauche. Une haute cheminée, à moitié démolie, sedressait dans un coin. Tout ceci paraissait plutôt un fantôme defabrique qu’une fabrique même, quelque chose comme une anciennescierie mécanique abandonnée.

Agathe aurait pu se demander pourquoi Hélènela faisait pénétrer dans cette désolation, mais elle ne sedemandait plus rien, elle ne pensait plus… Elle ne voulait pluspenser à rien…

Les deux jeunes femmes entrèrent dans uneimmense cour.

Cette cour était pleine d’une foulesilencieuse. Il y avait bien là deux cents hommes dont beaucoupétaient très jeunes, avec des yeux bleus candides et un teint pâle.Les plus âgés avaient des types de Christ, tels qu’ils sont peintssur les panneaux de l’école byzantine et qu’on les trouve dans lesbazars, enchaînés d’argent et d’or. Il y avait des paysans assispar terre, les jambes croisées. Ces hommes de la campagne étaientvêtus de peaux de bêtes, de sayons, de touloupes. Ils avaient àleurs pieds de pauvres souliers d’osier et un lacis de cordelettesqui montait jusqu’à mi-jambes.

Il y avait aussi des femmes, de pauvres femmesaux figures graves et attentives, avec des fichus éclatants sur latête.

Agathe se rappela avoir lu, quelques annéesauparavant, une relation qui l’avait frappée, d’une réunion de cegenre à laquelle avait assisté dans des circonstancesexceptionnelles un reporter célèbre d’Occident, venu en Russie aumoment de la première révolution russe. Ces paysans, ces ouvriersétaient donc des révolutionnaires !

Comme elle l’avait dit à Hélène :tout était fini ! Alors ?

Alors, quelqu’un monta sur un banc et parla.Celui-ci était un jeune homme. Il n’appartenait ni à la classeouvrière ni à la paysanne. Il avait plutôt l’allure d’un étudiantinspiré.

Son regard donnait de la force à tous lesregards. Et sa parole faisait battre tous les cœurs.

– Qu’est-ce donc que cette Russie immense dontparle le monde entier sans la connaître ? disait-il ; oùva-t-elle ? Au premier abord, rien ne l’indique. Elleressemble à ces steppes arides et sans fin, dont l’œil ne peutembrasser l’horizon ni sonder les profondeurs !

« Le flatteur lui dit :

« – Sois fier, ô peuple au frontcouronné, au glaive terrible. Toi qui disposes de la moitié del’univers. Pas de frontière à ton empire. Le monde t’appartient etplie en esclave devant ta majesté. Le steppe s’épanouit en champsféconds, tes montagnes élèvent dans les airs leurs têtes boisées,et tes rivières ressemblent à l’Océan.

« Ô mon pays ! dépose tafierté !… N’écoute pas les flatteurs !… Et quand même tesrivières rouleraient des ondes comme l’Océan, et quand bien mêmetes montagnes ruisselleraient de rubis et d’émeraudes, et quandbien même tes mers t’apporteraient leurs tributs… et quand bienmême des pays entiers baisseraient les yeux devant l’éclat de tatoute-puissance, dépose ta fierté, n’écoute pas lesflatteurs ! travaille, prépare la route de l’avenir ! cartu n’es encore qu’un peuple esclave à l’aurore du monde, et il tefaudra des forces pour supporter le poids sacré de laliberté !

« Ta mission est haute et sainte :c’est le sacrifice et l’amour ! c’est la foi et lafraternité !… »

Ainsi parlait ce jeune homme ; et chacun,en l’écoutant, se sentait des flammes au cerveau. C’est que nonseulement il trouvait le chemin des cœurs, mais encore il savaitparler à la raison. Son rêve d’avenir, dont il prédisait laprochaine réalisation, n’était point seulement celui d’un poète,mais, à la vérité, celui d’un homme de génie qui possède d’instinctle sens de conduire et d’instruire les peuples.

À ces êtres frustes qui soupiraient après laliberté, il ne cachait aucun des lourds devoirs qu’elle impose.

– Notre but, disait-il, doit êtred’établir un ordre stable, qui puisse garantir le bonheurde tous et les intérêts de chacun !

L’extase qui le transportait s’étaitcommuniquée à tous ceux qui étaient là.

Hélène regardait Agathe.

La morne jeune fille de tout à l’heure n’étaitpas reconnaissable. De nouvelles et brûlantes couleurs rosissaientses joues. Son sein s’agitait. Son regard, attaché sur ce jeunehomme, beau comme l’archange de la liberté, s’allumait d’un feuinconnu.

Et quand il eut fini de parler, ellel’écoutait encore… Ses paroles continuaient en elle-même leur chantde triomphe et d’amour et accéléraient le battement de ses artères…et quand il passa près d’elle, dans l’adoration de tous, elle aussil’adora, mais pas seulement comme une esclave que l’ondélivre ; elle l’adora avec son petit cœur tout neuf de jeunefille qui, tout à l’heure, voulait mourir sans avoir aimé…

La foule le suivait…

Les deux jeunes femmes restèrent seules.Hélène dit à Agathe :

– Eh bien ! tu vois que j’avais raison,ma chère petite âme, de te dire que tout n’était pasfini !…

– Non ! non ! soupira Agathe enrougissant jusqu’aux yeux… Non, tout n’est pas fini !…

Et, après un silence :

– Quel est donc ce jeune homme qui parle sibien ? Tu le connais ?

– Je ne lui ai jamais parlé, répondit ladanseuse… et je n’ai jamais voulu lui être présentée… Il y a,ici-bas, continua-t-elle, pendant que ses yeux se remplissaientd’ombre, il y a des êtres qui ne doivent pas se connaître, bienqu’ils aspirent au même but, mais par des chemins sidifférents…

Et tout bas, elle acheva sa pensée… pourelle-même :

– Lui, il travaille avec son âme ! etmoi !… moi !…

Agathe, qui pensait toujours à ce jeune homme,ne s’aperçut même pas que les yeux d’Hélène étaient pleins delarmes…

– Comment s’appelle-t-il ?demanda-t-elle… Tu le sais ?

– Tu le lui demanderas toi-même…

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