Conversation d’une petite fille avec sa poupée

Maria, troisième maîtresse de Zozo.

La jeune cousine de Coralie se nommoitMaria. Son père et sa mère qui connoissoient le prix del’éducation, lui donnèrent de bonne heure les meilleurs maîtres.Elle apprit à lire sans dégoût et sans ennui, avec des caractèresde l’alphabet tracés séparément sur autant de petits morceaux decarton qu’il y a de lettres. Par ce moyen facile et ingénieux,Maria, à trois ans, lisoit très-bien, et savoit orthographier tousles mots qui sont d’un usage commun. À quatre ans, cette charmantepetite savoit passablement la langue française, la mythologie, lagéographie et les principaux traits de l’histoire générale. Samodestie, sa douceur égaloient ses heureuses dispositions ;elle parloit peu, et attendoit toujours qu’on l’interrogeât, sansfaire parade de son savoir, quoiqu’elle eût la mémoire ornée dequantité de morceaux choisis en vers et en prose.

Malgré son goût pour l’étude, elle avoit lagaieté qui convenoit à son âge : ses réparties étoient vives,spirituelles, mais la qualité qui la faisoit le plus chérir,c’étoit son extrême sensibilité, fort au-dessus de son âge. Cettequalité du cœur qu’elle possédoit dans un degré, éminent, faisoitdire à sa mère, que sa fille seroit bien malheureuse !…

Ce fut l’éloge soutenu que M. de ***entendit faire de cette aimable enfant, qui la lui fit choisir pourlui envoyer la belle poupée de sa fille.

Le présent de M.*** fut accueilli comme il leméritoit. La poupée plut beaucoup à l’enfant, mais elle n’y touchapas ; car à peine l’eut-elle reçue, qu’elle fut attaquée d’unemaladie longue et douloureuse.

Maria souffroit des douleurs aiguës ;mais elle dévoroit ses larmes, pour ne pas affliger les femmes quila servoient ; et cette aimable petite créature consoloitencore sa mère : « Ne pleurez pas, ma chère maman, luidisoit-elle, j’irai prier pour vous. Dans le ciel, ma petite maman,je ne souffrirai plus. » Heureusement cette charmante petitefille revint à la vie, pour faire le bonheur de sa tendre mère, parsa douceur et sa sagesse. Afin de hâter son rétablissement, on lamena à la campagne. C’étoit au commencement de l’été. La petiten’emporta aucun joujou ; sa mère vouloit qu’elle fût sanscesse dans les champs, pour respirer un air pur qui fortifiât sontempérament. Maria, qui passa plusieurs années à la campagne, étoittrop âgée, lorsqu’elle revint à la ville pour jouer à lapoupée ; sa maman la donna à une riche marchande de saconnoissance, dont la fille, appelée Fortunée, n’avoit que cinqans.

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