Envers et contre tous

Chapitre 22CE QUE FEMME VEUT

Unesorte d’intimité s’était établie entre le château, où gouvernait leseigneur Mathéus, et le bois, où campaient les dragons. Magnus enprofitait pour rendre visite aux murailles de Drachenfeld, donttous les recoins lui furent bientôt familiers. Il changeaitd’apparence plus aisément et plus promptement qu’un caméléon.Tantôt charbonnier, tantôt colporteur, il échappait à tous lessoupçons. Il céda une fois aux instances de M. de laGuerche et franchit la herse du château en compagnie de son maîtredéguisé en pèlerin.

Sur le coup d’une heure, ils virent une portes’ouvrir au fond d’une galerie, et un cortège parut, se dirigeantvers la chapelle.

Il pleuvait ce jour-là, etMme d’Igomer éprouvait le besoin de faire sesdévotions.

DerrièreMme de Liffenbach, roide et gourmée,marchaient deux jeunes femmes ; de longs voiles de dentellepailletés d’or les enveloppaient jusqu’aux pieds et dissimulaientmal la richesse de leurs vêtements. Mais, quelle pâleur sur leursfronts ! On aurait dit deux statues arrachées au marbre dutombeau. Que devint Armand-Louis en reconnaissant Adrienne et toutprès d’elle Mlle de Pardaillan ! Un crifaillit partir de ses lèvres ; Magnus, qui s’était mis àgenoux près de lui, saisit son bras et le serrant :

– Pas un mot, pas un geste, ou vous lesperdrez avec nous ! murmura-t-il.

M. de la Guerche se contint, mais onle voyait trembler comme un arbre secoué par le vent.

– Tendez la main…, reprit Magnus,n’êtes-vous pas un pèlerin et ne devez-vous pas demanderl’aumône ?

Le cortège passa près d’eux ; le pan dela robe d’Adrienne frôla le vêtement du pèlerin. Incapable de semaîtriser, Armand-Louis porta le bout flottant de cette robe à seslèvres.

Mlle de Souvigny ralentitsa marche, et, laissant tomber une aumône aux mains de cetinconnu :

– Priez pour moi, dit-elle.

Sa voix était si triste, que les yeux deM. de la Guerche se remplirent de larmes.

– Baissez la tête, voici le seigneurMathéus, reprit son inflexible gardien.

Les genoux d’Armand-Louis restèrent cloués ausol ; mais, quand il se releva, le feu de la colère et del’exaltation enflammait son visage.

– J’y laisserai mes entrailles ou je lasauverai ! dit-il.

Un matin, c’était le quatrième depuisl’arrivée des dragons, la trompette retentit de nouveau dans lesbois. C’était un escadron de Croates qui venait de traverser toutel’Autriche pour se rendre sur le théâtre de la guerre. Un peuharassé de son long voyage, il faisait halte. Quelquesgentilshommes huguenots lui rendirent visite.

M. de Collonges rentra dans lasoirée, enchanté de sa promenade.

– Réjouissez-vous, messieurs, dit-il,nous allons peloter en attendant partie. Les choses ont tourné sibien dans notre visite, que nous avons eu cette bonne fortuned’attraper quatre ou cinq duels pour demain… c’est de la graine… onpeut semer.

– Nous ferons lever la moisson, ditM. d’Aigrefeuille, alléché.

Les duels promis eurent lieu au soleil levant,dans une clairière qui se trouvait à égale distance des deuxbivacs. On tua deux Croates et on en blessa trois grièvement.

M. de Voiras eut une égratignure aubras.

Bien ménagé, l’escadron de Croates pouvaitdurer quinze jours.

– Après quoi nous ferons maigre, ditM. de Saint-Paer.

Mais tandis que les dragons ne trouvaient plussi maussade le séjour des bois, Magnus avait remarqué unebohémienne jeune et jolie qui avait ses libres entrées au château.Cette bohémienne appartenait à une tribu dont les tentes sefaisaient voir à une petite distance de Drachenfeld, au pied d’unecolline. Elle paraissait avoir de seize à dix-sept ans. On larencontrait à toute heure sur le chemin de la poterne, armée de sontambour de basque, et il était rare qu’un officier de la garnisonne la guettât pas à la sortie.

Magnus fit causer deux ou trois femmes etquelques laquais. Il apprit que la bohémienne voyait fréquemmentMlle de Souvigny etMlle de Pardaillan, qui semblaient l’avoirprise en amitié. Elle dansait et disait la bonne aventure. Un deslieutenants du gouverneur, Patricio Bempo, la trouvait fort de songoût. Magnus se gratta l’oreille.

– Là est peut-être le chemin du château,se dit-il : si on avait la bohémienne, on aurait PatricioBempo ; et si on avait Patricio, on aurait Drachenfeld.

À son tour, et sans en avoir l’air, il rôdaautour de la petite sauvage, qui riait et montrait trente-deuxdents blanches chaque fois que Patricio Bempo lui parlait.

Ce qui surprenait le plus Magnus, c’est que labohémienne, quand elle attachait sur lui ses yeux plus noirs que lecharbon, avait dans son regard quelque chose de particulier dont lasignification lui échappait. Il lui semblait aussi qu’il avait vuce visage brun quelque part. Mais il avait beau chercher, il netrouvait rien.

– J’ai tant vu de visages jeunes etvieux, joyeux ou tristes, charmants ou laids !… c’est unocéan ! se disait-il.

Un soir, la trouvant seule sur la lisière dubois trottant comme un chevreau, et par aventure privée de lacompagnie de Patricio Bempo, il l’aborda résolument.

La bohémienne s’arrêta.

– Vous plairait-il, mon enfant, de rendreservice à un gentilhomme qui serait heureux de passer à votre couun collier fait de cent ducats d’or fin, dit-il, et pareil à cettebague, qui va si bien à votre doigt ?

La bohémienne ne regarda même pas la bague queMagnus venait de tirer de sa poche.

– Vous plairait-il, à votre tour, de meconduire à ce gentilhomme ?… répondit-elle ; quand jel’aurai vu, peut-être serai-je plus disposée à lui rendre leservice pour lequel il a besoin de moi.

Magnus hésita.

– Le camp des Espagnols n’est pas siloin, reprit-elle avec un sourire ; marchez, je vous suis.

Mais la bohémienne ne suivait pas son guide,déjà elle le précédait.

Magnus fit route à côté d’elle ; du coinde l’œil il l’observait ; il voyait au fond de sa mémoireconfusément un visage à peu près pareil à celui qu’il avait sousles yeux, comme on voit sans en bien saisir les traits une imageréfléchie par l’eau d’une fontaine. La bohémienne pressait le pas.Elle bondissait comme un jeune chevreuil au travers de la forêt. Aubout d’un quart d’heure, et sans avoir retourné la tête, ellearriva au camp, et, montant sur un tertre, chercha partout duregard.

– Pourquoi cherchez-vous un cavalier quevous ne connaissez pas ? lui dit Magnus.

– Et que savez-vous si je ne le connaispas ? D’ailleurs, ignorez-vous que j’appartiens à une race quia le don de seconde vue ?

Un groupe de dragons se tenait sur la lisièredu camp. La bohémienne se dirigea rapidement de ce côté ets’approchant d’un cavalier assis sur le tronc d’un bouleaurenversé :

– Monsieur de la Guerche, reprit-elletranquillement, que puis-je faire pour vous ?

Armand-Louis tressaillit. Magnus saisit labohémienne par le bras.

– Eh ! eh ! dit-il, tu sais deschoses qu’il ne fait pas bon de savoir !

La bohémienne ne chercha pas à se dégager del’étreinte du vieux soldat, et regardant toujoursM. de la Guerche.

– S’il ne vous souvient plus de Yerta,reprit-elle, Yerta n’a rien oublié.

– Yerta ! c’est toi la petiteYerta !… s’écria Armand-Louis.

– Moi-même… et si vous avez passé près demoi sans me reconnaître, mes yeux et mon cœur vous ont deviné dupremier instant que je vous ai vu !…

– C’est donc pour cela que je voyaistoujours en esprit ce regard noir ?… s’écria Magnus, qui lâchala bohémienne. Mais, si tu savais si bien qui nous sommes, pourquoine t’es-tu pas nommée ?

– M. de la Guerche portait unhabit et des couleurs qui ne lui appartiennent pas… son déguisementet le vôtre pouvaient tromper tous les yeux, excepté ceux d’unebohémienne… J’ai pensé que vous ne vouliez pas être reconnus, etj’ai fait comme si je ne vous voyais pas.

– Voilà une enfant qui a le cœur d’unhomme ! murmura Magnus.

– J’ai le cœur d’une femme qui sesouvient. Si maintenant vous avez besoin de Yerta, Yerta est àvous.

Elle croisa les bras sur sa poitrine etattendit.

– Eh bien ! Yerta, tu peux en unjour payer au centuple ce que j’ai fait pour toi !… s’écriaM. de la Guerche.

– Ordonnez, j’obéis.

– Tu entres au château de Drachenfeld ettu en sors librement ?

– Aussi librement que l’oiseau vole dansles forêts.

– Tu as dû y voir deux jeunes filles,deux prisonnières.

– Je les ai vues… l’une qui ritquelquefois ; l’autre qui prie… toutes deux belles comme lematin.

– Yerta, il faut m’aider à lessauver.

– La langue parle de deux jeunes filles,mais le cœur ne pense qu’à une : celle-là est blonde, avec desyeux bleus plus doux que le ciel, plus tristes que la nuit ;elle prie bien souvent et s’appelle Adrienne.

– Quoi ! tu sais… ?

– Il y avait dans votre tente, sur lechamp de bataille de Leipzig, un médaillon entre deux épées ;quand j’ai vu au château de Drachenfeld une femme dont les traitsressemblaient au visage peint sur le médaillon, j’ai pensé qu’unjour vous viendriez, c’est pour cela que j’ai attendu.

– Bonne Yerta !

– Elle n’est pas ingrate, celle pour quivous vous êtes exposé à mille morts ! Ne l’eussé-je pasreconnue, je l’aurais devinée à sa tristesse. Hélas ! cellesdont le cœur est pris ne sont pas gaies !

Un soupir souleva la poitrine de Yerta ;promenant alors son regard sur la forêt :

– À présent que vous êtes venu,poursuivit-elle, indiquez-moi ce qu’il faut que je fasse, je leferai.

– Peux-tu, ne fût-ce que pendant uneheure, nous introduire dans le château ? Peux-tu faire ensorte que la poterne soit ouverte un soir ? dit Magnus ;il me semble qu’elle n’est pas toujours fermée.

Yerta rougit.

– Oui, dit-elle, un homme en sortquelquefois sur les pas d’une zingara dont la pensée estailleurs ; il est amoureux, donc il est aveugle ; si jele veux, la poterne sera ouverte.

– Alors Adrienne est sauvée !s’écria M. de la Guerche.

On vit comme une ombre passer sur le visage deYerta.

– Il y a un homme que je tromperai…,reprit-elle avec effort.

– Patricio Bempo ? dit Magnus.

– Oui, Patricio Bempo : si le sangdoit couler, vous lui laisserez la vie sauve ?

– Je te le jure, réponditArmand-Louis.

Yerta ôta la bague que Magnus avait passée àson doigt.

– Reprenez ce bijou : il ne doit yavoir entre nous ni or ni argent, reprit-elle ; ce soir jeverrai Patricio Bempo.

– Un mot encore ! s’écriaM. de la Guerche, qui retint Yerta au moment où elles’éloignait. Si par toi, et ma vie ne sera pas assez longue pour tebénir, je dois sauver Adrienne, essaye de la voir, dis-lui que desamis veillent autour d’elle, qu’elle soit prête à nous suivrelorsque sonnera l’heure de la délivrance.

Yerta parut réfléchir un instant. Ce n’étaitplus la jeune fille que M. de la Guerche avait vue levisage souillé de sang et noir de poudre, hâve et meurtri ;c’était une femme dans tout l’éclat d’une beauté sauvage, fière ettriste, le front tout rayonnant d’intelligence, le regardlumineux.

– Trouvez-vous demain, à la premièreheure du soir, devant la poterne du château, derrière cet épaisrideau de chênes qu’on voit d’ici, reprit-elle ; j’en aurai laclé, et une lumière qui brillera à la plus haute fenêtre de la tourlà-bas, du côté du couchant, vous dira que celle que vous aimez nedort pas et qu’elle attend.

Yerta s’enfonça lentement dans les bois, où leregard de M. de la Guerche la suivait ; bientôt lasilhouette légère de la bohémienne disparut, et l’on n’entenditplus sur les feuilles sèches le bruit de sa marche. Deux larmescoulaient silencieusement le long de ses joues.

– Sait-elle seulement combien elle estheureuse, cette captive ? dit-elle, comme si la voix se fûtéchappée de ses lèvres à son insu.

Baissant alors la tête, elle gravit la pentequi conduisait au château.

Un moment après, on pouvait la voir dans lagalerie où Mme d’Igomer aimait à réunir lespersonnes du voisinage auxquelles son hospitalité offrait ledivertissement de quelque fête. Yerta faisait résonner son tambourde basque et s’arrêtait auprès de chaque groupe ; mais sonregard, vif comme celui des oiseaux, cherchait partout un visagequ’elle ne voyait pas. Une porte s’ouvrit enfin, et Adrienneparut.

– Toujours la dernière, et la dernièrepour être mieux admirée ! dit la baronne s’avançant versMlle de Souvigny.

Mais Yerta l’avait précédée, et posant l’indexsur le bras de la jeune fille :

– L’aurore suit les ténèbres… lerossignol chante après l’orage, dit-elle ; je lis dans vostraits qu’avant que l’année entière soit écoulée, vous serez mariéeà un jeune et puissant seigneur qui vous aime…

– Et qui bientôt sera ici, n’est-cepas ? ajouta Mme d’Igomer, qui pensait à Jeande Werth.

– Oui, bientôt il sera ici !… Commevous je le sais, comme vous je le vois.

Adrienne retira son bras vivement.

– Ne voulez-vous pas que je vous dise sonnom ? poursuivit Yerta.

– Puisque le sort vous protège, laissezparler le sort, mignonne, dit la baronne, qui s’éloigna après avoiréchangé un regard d’intelligence avec la bohémienne.

Déjà Yerta s’était emparée de la main qu’onlui refusait.

– Armand-Louis, murmura-t-elle toutbas.

Adrienne trembla de la tête aux pieds.

Mais la bohémienne, qui feignait d’examinerattentivement les lignes tracées dans la main d’Adrienne,continua :

– On nous observe : ne tremblez pas,essayez même de sourire ; je l’ai vu, il est près d’ici, ilvous délivrera… Mais, tenez-vous prête au premier signal ;vous laisserez votre lampe allumée… Et si vous m’entendez chanterla nuit, que votre porte alors reste ouverte, quelqu’un ne seraplus loin… À présent, laissez croire à Mme d’Igomerque vous êtes résignée. On peut souffrir un peu pour qui vous aimebeaucoup !

Yerta laissa tomber la main d’Adrienne, et,passant le pouce sur la peau sonore du tambourin, elle chantadoucement :

J’aime ! dit la lune blonde,

Qui dans l’onde

Baigne son disque d’argent.

J’aime ! dit la fleur fanée,

Entraînée

Par le ruisseau négligent.

Le tambour ronfla, tandis qu’elle en agitaitles anneaux de cuivre, et Yerta poursuivit, en jetant un regardfurtif sur Patricio Bempo, qui la dévorait des yeux :

J’aime ! dit l’onde à la lune

Sous la dune

Où monte son flot puissant.

J’aime ! dit l’oiseau qui glousse

Sous la mousse

Parmi les blés jaunissant.

– Eh bien ? demandaMme d’Igomer, qui laissa tomber une pièce d’or dansla main de Yerta.

– Eh bien ! répondit Adrienne, ilfaut se résigner à vouloir ce que veut le sort !

Mme d’Igomer l’embrassa sur lefront.

Yerta venait de disparaître, mais elle n’avaitpas quitté seule la galerie. Patricio la suivait ; il la vits’arrêter au bord d’un fossé et y jeter la pièce d’or que labaronne lui avait donnée, et tandis que la pièce brillantes’enfonçait dans l’eau verdâtre, Yerta se frottait les mains par unmouvement convulsif de colère et de dégoût.

– Ah ! ce mot que je viensd’entendre, ce mot que répète votre chanson, serez-vous seule à nele dire jamais ? s’écria Patricio Bempo.

Yerta le regarda fixement.

– Et pourquoi le dirais-je à qui neferait rien pour le mériter ? répondit-elle.

– Et que m’avez-vous demandé qui vousautorise à parler ainsi ? Ne vous ai-je pas toutoffert ?

– Oui, tout ce que je ne voulais pasaccepter !

Elle quitta les remparts ; Patriciomarchait à côté d’elle, ébloui par sa beauté.

– Commandez, ordonnez !s’écria-t-il.

– Paroles que tout cela ! repritYerta en l’interrompant. D’autres m’ont offert de l’or, des bijoux,des parures à rendre jalouses des duchesses, toutes les chosesenfin que le sabre d’un soldat peut conquérir. Aucun ne m’adit : « Voilà mon cœur, voilà ma vie ; que toutpérisse, je suis à vous ! »

– Et ne savez-vous pas que je vousappartiens ? Ne savez-vous pas… ?

Yerta posa sa petite main sur la bouche dePatricio, et, attachant sur lui ses yeux pleins des plus doucesflammes :

– Plus de promesses !murmura-t-elle. Si je vous demandais deux choses, je gage que vousme refuseriez.

– Moi ? Parlez, dit le lieutenant deMathéus, les lèvres collées sur la main de Yerta.

– Deux choses, rien que deux : laclé de cette petite porte percée aux pieds des remparts…

– De cette porte dont la garde m’estconfiée ?

– Et, de plus, le mot d’ordre qui enpermet la libre entrée, dix sentinelles fussent-elles le mousquetau poing le long du mur.

– Le mot d’ordre aussi ? Mais c’estma vie que vous me demandez, et avec ma vie mon honneur desoldat !

Yerta ferma les yeux à demi, puis lesrouvrant :

– Craignez-vous de me lesconfier ?

– Yerta, tout, excepté cela.

– Que vous ai-je dit ? N’en parlonsplus, vous êtes comme les autres ! Triste amour que cela quine sait rien donner ! Adieu, Patricio.

Yerta fit quelques pas du côté de la forêt.Patricio la suivait toujours. Elle ne le regardait plus.

– Mais cette clé et ce mot d’ordre, pourquoi faire ? reprit-il.

– Pourquoi ? dit Yerta, qui marchaitlentement. J’avais fait un rêve, il me semblait qu’avec cette cléon pouvait entrer à Drachenfeld, sans être vue, à l’heure où lanuit vient. La porte ouverte, avec le mot d’ordre on passaitinconnue et rapide devant les sentinelles. Le matin, on s’échappaitcomme un oiseau qui part du nid, et mes frères de la tribu nesavaient pas qu’une bohémienne avait déserté sa tente.

– Yerta ! est-ce vrai ? mepromettez-vous ?

– Moi, je ne promets rien. Mais, commel’hirondelle, je vais et je viens. Un hasard peut me conduire aupied de ces murailles, un hasard peut m’en faire chercher la porte.Mais, pourquoi l’ouvrir, lorsque derrière ce fer et ce boisimpénétrables se cache un capitaine prudent comme un lièvre etsoupçonneux comme une anguille ? Ah ! Patricio Bempo,vous êtes comme ces incendies qui de loin brillent et sont tout enflammes. On accourt, et quand on arrive ce ne sont plus que descendres.

– Yerta, voici la clé ! s’écriaPatricio Bempo vaincu.

– La clé, c’est bien ; mais ce n’estpas tout. Il y a le mot d’ordre.

Patricio soupira comme un homme auquel uneforce supérieure fait violence :

– Dux et imperator ! dit-il.

Et, tombant aux genoux de Yerta, il cacha satête entre ses mains.

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