L’Italien – Le Confessionnal des pénitents noirs

Chapitre 5

 

Après s’être livré à un mouvement de regretgénéreux pour la manière dont il avait traité un homme respectable,par son âge et par son habit, Vivaldi, en revenant sur quelquesparticularités de la conduite du moine, sentit malgré lui renaîtresa première défiance ; mais il se la reprocha encore comme uneinjustice.

Le soir venu, il s’échappa secrètement dupalais et se rendit en hâte à la villa Altieri, accompagné d’unmédecin qui offrait toutes les garanties possibles de mérite etd’honnêteté. Béatrice, qui avait veillé pour les attendre, lesintroduisit près du corps. Vivaldi, malgré l’émotion douloureusequi l’avait saisi à son entrée, reprit assez d’empire sur lui-mêmepour assister l’homme de l’art près du lit mortuaire. Voulants’expliquer librement avec lui, il prit la lampe des mains deBéatrice et la renvoya. À l’aspect du visage livide de lamalheureuse signora Bianchi, Vivaldi eut besoin de toute sa raisonpour s’assurer que c’était bien là les mêmes traits qui la veilleencore étaient si animés, les mêmes yeux qui l’avaient regardé avectant d’affection lorsque la brave dame confiait Elena à sa tendresollicitude. Ces souvenirs le touchèrent vivement et, penché sur lecorps de l’infortunée, il renouvela le vœu solennel de remplirenvers l’orpheline tous les devoirs qu’elle lui avait imposés.

Avant qu’il eût le courage de demander aumédecin son opinion, certaines taches noirâtres qui s’étendaientsur le visage de la morte, et quelques autres symptômes encore, luifirent supposer qu’elle avait été empoisonnée. Il craignait derompre le silence et fixait sur le médecin un regardinterrogateur.

– Je devine, dit celui-ci, quelle estvotre pensée. Il y a certes des apparences qui la justifient ;cependant, les mêmes symptômes peuvent se retrouver dans d’autrescirconstances.

Il ajouta quelques explications qui parurentassez plausibles à Vivaldi, puis il demanda à parler à Béatriceafin de savoir dans quel état se trouvait la défunte quelquesheures avant la catastrophe.

Après un assez long entretien avec laservante, il s’en tint à sa première opinion, et conclut deplusieurs accidents contradictoires qu’on ne pouvait trancheraffirmativement la question d’empoisonnement. Soit qu’il craignîtd’émettre un avis qui aurait pu faire planer sur quelqu’un uneaccusation d’homicide, soit qu’il voulût épargner à Vivaldil’horreur d’une pareille découverte, il s’appliqua à tranquilliserle jeune homme et à lui persuader que la mort de la signora Bianchiavait pu être naturelle.

Vivaldi s’arracha enfin à ce triste spectacleet sortit de la maison sans avoir été vu de personne, à ce qu’ilcrut du moins. Le jour commençait à poindre. Déjà l’on voyait surle rivage quelques pêcheurs mettre leurs petits bateaux à la mer.Il n’était plus temps de faire des recherches dans les ruines dePaluzzi. Il retourna donc à Naples, un peu calmé par le résultat desa démarche. Il se sépara du médecin, et rentra au palais avec lesmêmes précautions qu’il avait prises pour en sortir.

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