La Reine des Épées

Chapitre 3Le coup de midi.

Si le chasseur de la forêt Noire avait voulufrapper un grand coup, le succès dépassait ses espérances.L’explosion d’une mine eût fait sauter le clocher de Ramberg, quel’émotion n’aurait pas été plus vive. Un tumulte extraordinairerégnait dans la foule. Les estrades s’étaient levées enmasse ; la belle comtesse Lenor cachait son visage effrayéderrière les broderies de son mouchoir, et Chérie elle-même étaitplus pâle que les roses blanches qui couraient en guirlande dans samerveilleuse chevelure.

– Hein, monsieur le comte !hein !… murmurait l’inspecteur Muller avec triomphe àl’oreille du diplomate fort.

Celui-ci tournait ses pouces d’un airméditatif.

– Ce n’est pas mal, monsieurl’inspecteur, dit-il ; mais la diplomatie serait un jeud’enfant si l’on avait toujours affaire à des fous de cetteespèce.

En dehors des estrades, c’était un brouhahaqui allait sans cesse grandissant. Ceux qui avaient été témoins decette provocation inouïe, jetée à la face de l’université, laracontaient avec un étonnement mêlé de terreur. On sepressait ; chacun voulait voir le dénoûment de cetteredoutable aventure. L’inconnu avait pris, pour les jeunes fillessurtout, la taille d’un héros, et les plus jolis yeux de Rambergpleuraient déjà sur le sort de cet aventurier audacieux qui allaitpayer de sa vie un moment de bravade.

Car le doute n’était point permis, et pourquiconque connaissait, ne fût-ce qu’un peu, les mœursuniversitaires, le chasseur de la forêt Noire était condamné àmort.

Les étudiants faisaient maintenant le cercleautour de lui et personne ne pouvait plus entendre les paroleséchangées. Mais si l’on n’entendait pas, on voyait, et chacunconstatait, avec une sorte d’admiration, que l’inconnu ainsientouré d’ennemis ne perdait point son calme et fier sourire.

Rudolphe était à sa gauche, Arnold était à sadroite. Les pourparlers ne durèrent pas une minute.

– Je sais ce que vous êtes en droitd’exiger de moi, mes jeunes messieurs, dit le chasseur de la forêtNoire, qui entama lui-même l’explication. En cette saison, la nuittombe vers sept heures, et ma soirée est prise à dater de huitheures et demie… En conséquence, si vous voulez que nous tirionsl’épée aux flambeaux, comme c’est, dit-on, votre coutume, j’ai unegrande heure à vous donner ce soir…

– Comment vous nommez-vous ? demandaRudolphe.

– J’ai nom Albert, répliqua l’inconnudont le sourire eut une petite nuance de sarcasme.

– À huit heures, dit Arnold, nous vousattendrons à la place même où est tombée l’enseigne del’université… Si vous avez des amis, amenez-les ; si vousn’avez pas d’amis, venez seul, vous serez sous la sauvegarde denotre honneur, et je jure Dieu qu’on vous tuera loyalement !…Vous avez trêve jusqu’à ce soir, hormis le cas où vous tenteriez defuir.

– À ce soir donc, mes jeunes messieurs,dit le chasseur de la forêt Noire, qui souleva son large chapeau ettourna le dos sans autre cérémonie.

Les assistants stupéfaits le virent s’éloignerà pas lents, et plus d’un remarqua qu’il trouva le loisir de leverun regard vers le sommet de l’estrade où cette délicieuse enfantqu’on nommait la reine Chérie pâlissait et rougissait tour àtour.

Une fusée volante partit du pied du mât ;l’orchestre sonna une vive fanfare, et, du haut des gradins,l’honnête bourgmestre Mohl lança solennellement ces mots :

– Allez, les arquebusiers !

On les avait oubliés, les arquebusiers, et lesimple programme de la fête était désormais bien fade auprès de cedrame dont le prologue venait de se jouer devant tous ; maisles acteurs du drame, puisque drame il y a, étaient rentrés dans lacoulisse, et la fête pouvait au moins servir d’intermède.

Il fallait donc se résoudre à suivre la fête.L’inconnu flânait autour de la place ; messieurs les étudiantsétaient gravement assis sur leur estrade. – Allez, lesarquebuses !

Depuis un temps immémorial, les étudiants deTubingue avaient le privilége de gagner le prix aux joutes deRamberg. Ceci était de fondation. Il y avait toujours àl’université des enfants du Schwartzwald qui soutenaient l’honneurdu drapeau.

En France, les premiers tireurs du monde sontles chasseurs de Vincennes ; en Angleterre, ce sont les gardesécossais ; en Russie, ce sont les régiments du Don ; dansles Indes, ce sont les compagnies de métis ; il n’y a pasjusqu’à la Belgique qui n’ait ses premiers tireurs dumonde, habillés en vert comme des laquais de bonne maison etportant je ne sais plus quel nom troubadour.

Dans l’Allemagne du sud-ouest, les premierstireurs du monde sont les Tyroliens et les montagnards duSchwartzwald ou forêt Noire.

Les Suisses seuls ont encore plus deréputation qu’eux.

Les gens qui ont parcouru le monde prétendentque nos chasseurs de Vincennes feraient assez pauvre figure devantles montagnards du Schwartzwald ; mais les voyageurs sontsujets à mentir, et Chauvin, notre grand poète national, veut qu’onne mette rien au-dessus des chasseurs de Vincennes !

Quoi qu’il en soit, les prouesses qui se fontaux tirs d’Allemagne et de Suisse sont tellement miraculeuses, quele poète Chauvin nous taxerait de mensonge si nous tentions de lesraconter. Répondons tout de suite à Chauvin, le poète, que lesarmes dont on se sert pour ces jeux ne sont généralement point desarmes de guerre, et que s’il s’agissait de faire le coup de fusilsérieusement, nous tiendrions, comme lui, pour nos vaillantschasseurs.

Mais, en campagne, on ne peut pas se servir,comme devant la barre, d’une carabine, énervée en quelque sorte, etdevenue sensible à ce point qu’on la fait partir en soufflanttrès-doucement sur la détente. Or il faut une carabine comme celapour enfiler une aiguille à cinq cents pas.

La délicatesse de nos pistolets de tir n’estrien auprès de cette sensibilité exagérée qui distingue lescarabines suisses, par exemple. Pour toucher cette détente sans lafaire partir, le tireur suisse est obligé au préalable de se mettrele doigt à vif sur une meule, et encore si la blessure estlégèrement cicatrisée, la détente part avant que le tireur l’aitsentie.

La civilisation des carabines n’est pas tout àfait aussi avancée dans la forêt Noire et dans le Tyrol ;cependant les raffinés de l’Oberland ne sauraient point apprécierla musculation douce et ferme à la fois de ces armes héroïques quel’art sans rival de notre Devisme perfectionne d’année enannée.

La joute préliminaire était commencée ;on tirait pour être classé, c’est-à-dire pour avoir le droit deconcourir à la lutte définitive.

Pour être classé, il fallait mettre du premiercoup une balle dans le cinquième cercle, qui avait à peu près lalargeur d’un double thaler. Comme l’épreuve n’était pas des plusmalaisées, et que d’ailleurs, lorsqu’il s’agit d’un seul coup, lehasard est un peu le maître, il y eut un grand nombred’heureux.

Vingt ou trente jeunes gens, déjà bien fiersde ce premier succès, vinrent se ranger derrière la troisièmebarre. Parmi eux, chose sans exemple, il n’y avait que deuxétudiants : Arnold et Rudolphe. Les balles des Renommists etdes Maisons moussues s’étaient égarées hors du cercle central.L’université avait mal tiré. On eût dit que cet outrage, qu’elleavait subi en face de tous, lui laissait encore la maintremblante.

Niklaus, Michas et bien d’autres avaient misplus près du centre que les étudiants. Quant au chasseur de laforêt Noire, qui s’était servi de la bonne carabine avec laquelleil avait dépendu le Renard d’or, sa balle s’était enfilée surl’aiguille aux applaudissements de l’assemblée tout entière.

Il grandissait, ce chasseur de la forêtNoire : les garçons commençaient à le regarder avec respect,les femmes le trouvaient beau comme Apollon.

À la deuxième épreuve, où chaque concurrentavait deux cartouches, l’université prit un peu sa revanche. Arnoldet Rudolphe avaient visé comme si leur vie eût dépendu de leuradresse, et après tout, quoiqu’ils ne fussent pas sorciers comme cediable de Frédéric, dont la balle ne déviait jamais d’un quart deligne, c’étaient de glorieux tireurs ! Frédéric avait gagné leprix l’an passé, – où donc était Frédéric ?…

À deux lieues de Ramberg, dans un petitsentier qui suivait le cours sinueux du Necker, un jeune homme,presque un enfant, cheminait la tête nue et le dolman au vent.

Il paraissait bien las, et pourtant il neralentissait point sa marche.

Ses habits étaient couverts depoussière ; des gouttes de sueur perlaient à son front blancet pur comme celui d’une jeune fille.

Il allait sous l’ombrage des grands arbres quicroisaient leurs branches au-dessus de sa tête ; ses yeuxrêveurs et doux se perdaient au devant de lui dans le calmepaysage. Il allait, essuyant parfois la sueur de ses tempes etinterrogeant le soleil pour mesurer les heures.

Sa taille, qui était flexible et gracieuse audegré suprême, manquait encore un peu de carrure ; son pasélégant bondissait comme celui d’un enfant, et quand le sourirenaissait sur la lèvre ombragée à peine d’un duvet plus doux que lasoie, vous eussiez deviné bien vite que celui-là était encore à sonpremier rêve d’amour.

Cette poésie qui rayonnait en lui, c’était lapoésie insoucieuse et timide du premier âge ; sur cette figurecandide et charmante, il n’y avait rien de la fanfaronnade hardiequi était le masque uniforme de messieurs les étudiants deTubingue.

Il était déjà plus grand et plus fort surtoutque Chérubin, mais je crois que Chérubin lui eût rendu des pointsen espièglerie.

C’était un enfant, un doux et cher enfant quidevait rougir plus facilement qu’une jeune fille, et nous ne savonspas pourquoi nous allons à lui pour répondre à ceux qui demandaientoù était Frédéric.

Frédéric, la première Épée de l’université deTubingue ; Frédéric, le roi du scandal ;Frédéric, le crâne des Crânes.

– C’est long, dix heures demarche !… murmurait-il en suivant vaillamment son chemin.Pauvre bonne mère ! comme elle m’a embrassé, en merecommandant de prier Dieu et la Vierge chaque soir !… Chaquesoir, je prierai Dieu et la Vierge pour qu’ils me fassent grâce del’embrasser encore.

La route tourna brusquement ; la valléedu Necker s’ouvrit tout à coup devant lui en éventail, avec sesjoyeuses prairies coupées par l’or des guérets.

Au delà de la vallée, il y avait un petitcoteau, et sur le coteau, un lourd clocher perdu au lointain.

L’enfant s’arrêta et joignit ses mains sur sonbâton de voyage.

– Ramberg ! murmura-t-il…Chérie !…

Un nuage vint à son front, et sa têtegracieuse s’inclina.

Il tira de sa poche un petit portefeuille etprit dans le portefeuille un guillaume d’or tout neuf, quiscintilla aux rayons du soleil.

L’enfant regarda le guillaume avec une sortede tendresse, puis il le colla contre ses lèvres roses en riantcomme un jeune fou qu’il était.

– Tant pis !… dit-il d’un airmutin ; si j’arrive trop tard, eh bien ! j’ai monguillaume ; je ne ferai pas comme l’an passé où je n’ai puglisser qu’un tiers de thaler dans la bourse de Chérie !

Il remit son guillaume dans le portefeuille,jeta en l’air son bâton, qu’il rattrapa à la volée, et prit sacourse en criant : – Hopp ! hopp ! comme s’il avaiteu un bon cheval entre les jambes.

Tout cela ne nous dit pas où était Frédéric,l’invincible Épée, le tireur sans pareil, le bourreau desPhilistins !

 

À la seconde épreuve, Niklaus, Michas et lesautres furent écartés comme d’habitude ; il ne resta en liceque les deux étudiants et le chasseur de la forêt Noire.

Sur deux balles, Arnold et Rudolphe avaientfait chacun un maître coup ; l’inconnu en avait fait deux.

Les jeunes filles de Ramberg avaient envie decrier hourra pour le chasseur de la forêt Noire.

Mais le silence s’établissait parmi la fouleattentive ; chacun tâchait de s’approcher pour mieux voir latroisième et solennelle épreuve.

Chacun des concurrents reçut trois cartouches.Arnold mit son premier coup dans le rond, à deux lignes del’aiguille, et ses deux autres balles firent maître coup.

– Bravo !… murmura tout bas lafoule.

L’estrade des étudiants restait émue,silencieuses et sombre. La reine Chérie agita son mouchoir brodé ensouriant.

Rudolphe prit sa carabine sur la barre etregarda l’inconnu avant d’ajuster. Il y avait tant d’insouciance etde froideur sur le visage de cet homme, que Rudolphe demeura uninstant appuyé sur son arme.

– Allez !… dit l’arquebusier.

La carabine de Rudolphe se coucha ; ilfit maître coup une fois, rechargea, tira et enfila de nouveaul’aiguille.

– Bravo ! crièrent une seconde foisles garçons de Ramberg ; encore un coup pareil pour l’honneurde l’université !

L’estrade des étudiants cherchait à garder ledécorum, mais un frémissement sourd courait le long des banquettes.Quand Rudolphe mit en joue pour la dernière fois, quelques Renardsimpatients se levèrent. Rudolphe tira ; il toucha l’aiguille,mais de travers, et l’aiguille fut brisée.

– C’est égal ! c’est égal !dit-on de toutes parts ; que l’autre fasse mieux !

Le chasseur de la forêt Noire, qui s’étaitdonné le nom d’Albert, se prit à rire et vint s’accouder sur labarre.

– Je ferai mieux, répondit-il, et,croyez-moi, mes bonnes gens, vos luttes sont des jeux d’enfants…Autant de fois que vous le voudrez, j’enfilerai votreaiguille ; et si j’avais su que messieurs les étudiants deTubingue tiraient si gauchement que cela, je n’aurais pas pris lapeine d’user mes semelles sur la route de Ramberg !

Ce disant, et pendant qu’un murmured’étonnement courait dans toute la place, l’inconnu ajusta troisfois et trois fois fit maître coup.

– Il a fait mieux ! il a faitmieux !… s’écrièrent les jeunes filles, car le bel inconnus’était rendu favorable tout ce qui portait coiffes de dentelles etjupons bariolés.

– Il a fait mieux !… répétèrent lesgarçons avec une admiration chagrine.

– Et je dis, ajouta l’arquebusier ennettoyant la carabine du vainqueur, je dis que je donnerais quelquechose de ma poche pour voir une lutte entre ce grand gaillard-là etle jeune herr Frédéric !

C’était attaquer dans sa base la populariténaissante de l’inconnu. Ce nom de Frédéric, en effet, tournait latête à toutes les fillettes de Ramberg.

– Ah ! ah ! fit Luischen enrougissant et en baissant les yeux, si vous parlez du jeune herrFrédéric !…

Et Lisela, et Brigitte, et Lotte, et Félicitasde répéter d’un air souriant et sournois :

– Ah ! ah ! le jeune herrFrédéric !…

Sur les banquettes des étudiants on sedemandait à voix basse :

– Où est-il donc à cette heure ?pourquoi n’est-il pas venu ?

Où il était ? nous ne saurions le dire…Mais notre bel enfant rêveur courait comme un fou dans les sentiersde la plaine. Il n’aurait pas joué des jambes plus vaillamment s’ilse fût agi de gagner une gageure à la course. Ses cheveux blondsflottaient sous sa petite casquette, son dolman fouettait auvent ; il coupait à travers champs, il franchissait les haies,rien ne pouvait arrêter son élan.

Le coteau de Ramberg se rapprochait ; ilcommençait à distinguer le drapeau sur le clocher court et trapu del’église.

À cette vue, il jeta en l’air sa petitecasquette et fit siffler son bâton triomphalement.

– Hopp ! hopp !

Sa course prit un élan nouveau. Il nes’inquiétait plus de la sueur qui ruisselait sur ses tempes, ni dela poussière qui poudrait à blanc les longues boucles de sescheveux.

Le bourgmestre Mohl, cependant, s’était levéavec cette dignité noble qui caractérisait chacun de sesmouvements.

– Y a-t-il quelqu’un qui puissedire : Je ferai mieux ? demanda-t-il à haute etintelligible voix.

Personne ne répondit.

Le bourgmestre prononça la même formule partrois fois, puis il mit ses lunettes à cheval sur son nez charnu etdéplia une petite pancarte.

– Il est onze heures, dit-il, et lerèglement du concours de Ramberg, approuvé par le conseil privé (ils’arrêta pour saluer le comte Spurzeim, qui lui rendit un signe detête bienveillant) porte, article 5 : « La luttedemeurera ouverte jusqu’à l’heure de midi. À la dite heure, le prixsera décerné au vainqueur. – Jusqu’à l’heure de midi, toutconcurrent pourra se présenter, pourvu qu’au préalable il fasseautant de maîtres coups, se suivant les uns les autres sans lacune,que le vainqueur provisoire en a fait dans les trois épreuves.Cette condition étant remplie, le nouveau concurrent et levainqueur provisoire lutteront suivant la règle, sous la protectionde l’autorité. »

Cette lecture n’était qu’une simple formalité,car le bourgmestre et ses aides s’occupèrent immédiatement de ladistribution des prix.

Dans le village de Ramberg, il n’y avait rienau-dessus de l’université ; en conséquence, le bonbourgmestre, quittant son estrade, traversa la place tout entièreet se rendit solennellement vers cette jeune fille qu’on appelaitla reine Chérie, afin de lui remettre l’écharpe qui devait êtredécernée au vainqueur.

Loin de puiser dans cet hommage un motif deconsolation, les étudiants baissèrent la tête sur le passage dumagistrat et répondirent de mauvaise grâce à sa politesse.

Il y a du sauvage chez l’étudiantd’Allemagne ; il ne sait pas mentir à sa mauvaise humeur, etquand on le jette sur le dos dans l’arène, il ne peut pass’habituer à sourire. C’est le grand art des comédiens biendressés ; c’est aussi le bel art des gentilshommes.

En thèse générale, les étudiants d’Allemagnene sont ni gentilshommes ni comédiens.

Pendant que le bourgmestre gagnait, ensoufflant, le sommet de l’estrade où trônait la reine Chérie, lesdeux Épées de l’université, Arnold et Rudolphe, se levèrent etreprirent, à la tête de la cohorte, le chemin de la Maison del’Ami.

C’était une mauvaise journée. Ils étaientvenus le sourire fanfaron aux lèvres, en chantant leurs hymnesbachiques, et ils s’en retournaient en silence, la tête basse.

Avant de quitter la place, Arnold avait touchél’épaule du chasseur de la forêt Noire, qui se balançait à chevalsur la barre, et lui avait dit : – À ce soir !

Le chasseur sifflait une tyrolienne ; iln’interrompit point sa musique, et fit un petit signe de têteaffirmatif.

Depuis le Renard le plus rose jusqu’au plusbarbu des Maisons moussues, il n’y avait pas un étudiantqui n’eût soif du sang de cet homme.

La reine Chérie, à qui ses gardes restaientfidèles, reçut l’écharpe des mains de maître Mohl ; après quoile digne bourgmestre s’en alla porter le saphir qui formait lesecond prix à la belle comtesse Lenor. Le troisième prix, qui étaitun baril de vin du Rhin, resta en place et fut confié à la grosseLuischen.

Nous n’avons pas besoin de dire que l’intérêtde la fête était épuisé. On attendait midi avec impatience, nonmoins précisément parce que c’était l’heure de la distributionsolennelle des prix, mais bien parce qu’une table immense sedressait dans les jardins de la maison commune et que le repasdevait avoir lieu tout de suite après la cérémonie.

Or, en Allemagne, les estomacs des deux sexessont de première qualité.

Au pied du mât, sous un dais de veloursécarlate, la reine Chérie, Lenor et Luischen vinrent s’asseoir.Lenor et Chérie ne s’étaient jamais vues de si près ; Chériefit à la jeune comtesse un salut respectueux et empressé ; lajeune comtesse, qui était fort bien élevée, lui rendit son salut etdétourna la tête.

Nous savons déjà que la jeune comtesse avaitses raisons pour ne point aimer la reine Chérie.

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer