XV
L’EMPEREUR tient la tête baissée. Il lisse sabarbe, arrange sa moustache, ne fait à son neveu, bonne oumauvaise, nulle réponse. Les Français se taisent, hormis Ganelon.Il se dresse droit sur ses pieds, vient devant Charles. Trèsfièrement il commence. Il dit au roi : « Malheur, si vousen croyez le truand, moi ou tout autre, qui ne parlerait pas pourvotre bien ! Quand le roi Marsile vous mande que, mainsjointes, il deviendra votre homme, et qu’il tiendra toute l’Espagnecomme un don de votre grâce, et qu’il recevra la loi que nousgardons, celui-là qui vous conseille que nous rejetions un telaccord, peu lui chaut, sire, de quelle mort nous mourrons. Unconseil d’orgueil ne doit pas prévaloir. Laissons les fous,tenons-nous aux sages ! »