Cinq-Mars (Une conjuration sous Louis XIII)

Chapitre 6LE SONGE

Lebien de la fortune est un bien périssable,
Quand on bastit sur elle, on bastit sur le sable
Plus on est eslevé, plus on court de dangers.
Les grands pins sont en butte aux coups de la tempeste…

RACAN.

Lesvergers languissants, altérés de chaleurs,
Balancent des rameaux dépourvus de feuillage
Il semble que l’hiver ne quitte pas les cieux.

Maria, JULES LEFÈVRE.

Cependant Cinq-Mars, au milieu de la mêlée queson emportement avait provoquée, s’était senti saisir le brasgauche par une main aussi dure que le fer, qui, le tirant de lafoule jusqu’au bas des degrés, le jeta derrière mur de l’église, etlui fit voir la figure noire du vieux Grandchamp, qui dit d’unevoix brusque : – Monsieur, ce n’était rien que d’attaquertrente mousquetaires dans un bois à Chaumont, parce que nous étionsà quelques pas de vous sans que vous l’ayez su, que nous vousaurions aidé au besoin et que d’ailleurs vous aviez affaire à desgens d’honneur ; mais ici c’est différent. Voici vos chevauxet vos gens au bout de la rue : je vous prie de monter àcheval et de sortir de la ville, ou bien de me renvoyer chez madamela maréchale, parce que je suis responsable de vos bras et de vosjambes, que vous exposez bien lestement.

Cinq-Mars, quoique un peu étourdi de cettemanière brusque de rendre service, ne fut pas fâché de sortird’affaire ainsi, ayant eu le temps de réfléchir au désagrémentqu’il y aurait d’être reconnu pour ce qu’il était après avoirfrappé le chef de l’autorité judiciaire, et l’agent du Cardinalmême qui allait le présenter au Roi. Il remarqua aussi qu’ils’était assemblé autour de lui une foule de gens de la lie dupeuple, parmi lesquels il rougissait de se trouver. Il suivit doncsans raisonner son vieux domestique, et trouva en effet les troisautres serviteurs qui l’attendaient. Malgré la pluie et le vent, ilmonta à cheval et fut bientôt sur la grand’route avec son escorte,ayant pris le galop pour ne pas être poursuivi.

À peine sorti de Loudun, le sable du chemin,sillonné par de profondes ornières que l’eau remplissaitentièrement, le força de ralentir le pas. La pluie continuait àtomber par torrents, et son manteau était presque traversé. Il ensentit un plus épais recouvrir ses épaules ; c’était encoreson vieux valet de chambre qui l’approchait et lui donnait cessoins maternels.

– Eh bien, Grandchamp, à présent que nousvoilà hors de cette bagarre, dis-moi donc comment tu t’es trouvélà, dit Cinq-Mars, quand je t’avais ordonné de rester chez l’abbé.– Parbleu ! monsieur, répondit d’un air grondeur le vieuxserviteur, croyez-vous que je vous obéisse plus qu’à M. lemaréchal ? Quand feu mon maître me disait de rester dans satente et qu’il me voyait derrière lui dans la fumée du canon, il nese plaignait pas, parce qu’il avait un cheval de rechange quand lesien était tué, et il ne me grondait qu’à la réflexion. Il est vraique pendant quarante ans que je l’ai servi, je ne lui ai jamaisrien vu faire de semblable à ce que vous avez fait depuis quinzejours que je suis avec vous. Ah ! ajouta-t-il en soupirant,nous allons bien, et, si cela continue, je suis destiné à en voirde belles, à ce qu’il paraît.

– Mais sais-tu, Grandchamp, que cescoquins avaient fait rougir le crucifix, et qu’il n’y a pasd’honnête homme qui ne se fût mis en fureur comme moi ?

– Excepté M. le maréchal, votrepère, qui n’aurait point fait ce que vous faites, monsieur.

– Et qu’aurait-il donc fait ?

– Il aurait laissé brûlertrès-tranquillement ce curé par les autres curés, et m’auraitdit : « Grandchamp, aie soin que mes chevaux aient del’avoine, et qu’on ne la retire pas ; » ou bien :« Grandchamp, prends bien garde que la pluie ne fasse rouillermon épée dans le fourreau et ne mouille l’amorce de mespistolets ; » car M. le maréchal pensait à tout, etne se mêlait jamais de ce qui ne le regardait pas. C’était songrand principe ; et, comme il était, Dieu merci, aussi bonsoldat que général, il avait toujours soin de ses armes comme lepremier lansquenet venu, et il n’aurait pas été seul contre trentejeunes gaillards avec une petite épée de bal.

Cinq-Mars sentait fort bien les pesantesépigrammes du bonhomme, et craignait qu’il ne l’eût suivi plus loinque le bois de Chaumont ; mais il ne voulait pas l’apprendre,de peur d’avoir des explications à donner, ou un mensonge àfaire ; ou le silence à ordonner, ce qui eût été un aveu etune confidence, il prit le parti de piquer son cheval et de passerdevant son vieux domestique ; mais celui-ci n’avait pas fini,et, au lieu de marcher à la droite de son maître, il revint à sagauche et continua la conversation.

– Croyez-vous, monsieur, par exemple, queje me permette de vous laisser aller où vous voulez sans voussuivre ? Non, monsieur, j’ai trop avant dans l’âme le respectque je dois à madame la marquise pour me mettre dans le cas dem’entendre dire : « Grandchamp, mon fils a été tué d’uneballe ou d’un coup d’épée ; pourquoi n’étiez-vous pas devantlui ? » ou bien : « Il a reçu un coup de styletd’un Italien, parce qu’il allait la nuit sous la fenêtre d’unegrande princesse ; pourquoi n’avez-vous pas arrêtél’assassin ? » Cela serait fort désagréable pour moi,monsieur, et jamais on n’a rien eu de ce genre à me reprocher. Unefois M. le maréchal me prêta à son neveu, M. le comte,pour faire une campagne dans les Pays-Bas, parce que je saisl’espagnol ; eh bien, je m’en suis tiré avec honneur, comme jele fais toujours. Quand M. le comte reçut son boulet dans lebas-ventre, je ramenai moi seul ses chevaux, ses mulets, sa tenteet tout son équipage sans qu’il manquât un mouchoir,monsieur ; et je puis vous assurer que les chevaux étaientaussi bien pansés et harnachés, en rentrant à Chaumont, que siM. le comte eût été prêt à partir pour la chasse. Aussin’ai-je reçu que des compliments et des choses agréables de toutela famille, comme j’aime à m’en entendre dire.

– C’est très-bien, mon ami, dit Henryd’Effiat, je te donnerai peut-être un jour des chevaux àramener ; mais, en attendant, prends donc cette grande boursed’or que j’ai pensé perdre deux ou trois fois, et tu payeras pourmoi partout ; cela m’ennuie tant !…

– M. le maréchal ne faisait pascela, monsieur. Comme il avait été surintendant des finances, ilcomptait son argent de sa main ; et je crois que vos terres neseraient pas en si bon état et que vous n’auriez pas tant d’or àcompter vous-même s’il eût fait autrement ; ayez donc la bontéde garder votre bourse, dont vous ne savez sûrement pas le contenuexactement.

– Ma foi, non !

Grandchamp fit entendre un profond soupir àcette exclamation dédaigneuse de son maître.

– Ah ! monsieur le marquis !monsieur le marquis ! quand je pense que le grand roi Henry,devant mes yeux, mit dans sa poche ses gants de chamois parce quela pluie les gâtait ; quand je pense que M. de Rosnylui refusait de l’argent, quand il en avait trop dépensé ;quand je pense…

– Quand tu penses, tu es bien ennuyeux,mon ami, interrompit son maître, et tu ferais mieux de me dire ceque c’est que cette figure noire qui me semble marcher dans la bouederrière nous.

– Je crois que c’est quelque pauvrepaysanne qui veut demander l’aumône ; elle peut nous suivreaisément, car nous n’allons pas vite avec ce sable où s’enfoncentles chevaux jusqu’aux jarrets. Nous irons peut-être aux Landes unjour, monsieur, et vous verrez alors un pays comme celui-ci, dessables, et de grands sapins tout noirs ; c’est un cimetièrecontinuel à droite et à gauche de la route ; et en voici unpetit échantillon. Tenez, à présent que la pluie a cessé, et qu’ony voit un peu, regardez toutes ces bruyères et cette grande plainesans un village ni une maison. Je ne sais pas trop où nouspasserons la nuit ; mais, si monsieur me croit, nous couperonsdes branches d’arbres, et nous bivaquerons ; vous verrez commeje sais faire une baraque avec un peu de terre : on a chaudlà-dessous comme dans un bon lit.

– J’aime mieux continuer jusqu’à cettelumière que j’aperçois à l’horizon, dit Cinq-Mars ; car je mesens, je crois, un peu de fièvre, et j’ai soif. Mais va-t’enderrière, je veux marcher seul ; rejoins les autres, etsuis-moi.

Grandchamp obéit, et se consola en donnant àGermain, Louis et Etienne des leçons sur la manière de reconnaîtrele terrain la nuit.

Cependant son jeune maître était accablé defatigue. Les émotions violentes de la journée avaient remuéprofondément son âme ; et ce long voyage à cheval, ces deuxderniers jours presque sans nourriture, à cause des événementsprécipités, la chaleur du soleil, le froid glacial de la nuit, toutcontribuait à augmenter son malaise, à briser son corps délicat.Pendant trois heures il marcha en silence devant ses gens, sans quela lumière qu’il avait vue à l’horizon parût s’approcher ; ilfinit par ne plus la suivre des yeux, et sa tête, devenue pluspesante, tomba sur sa poitrine ; il abandonna les rênes à soncheval fatigué, qui suivit de lui-même la grand’route, et, croisantles bras, il se laissa bercer par le mouvement monotone de soncompagnon de voyage, qui buttait souvent contre de gros caillouxjetés par les chemins. La pluie avait cessé, ainsi que la voix desdomestiques, dont les chevaux suivaient à la file celui du maître.Ce jeune homme s’abandonna librement à l’amertume de sespensées ; il se demanda si le but éclatant de ses espérancesne le fuirait pas dans l’avenir et de jour en jour, comme cettelumière phosphorique le fuyait dans l’horizon de pas en pas.Était-il probable que cette jeune princesse, rappelée presque deforce à la cour galante d’Anne d’Autriche, refusât toujours lesmains, peut-être royales, qui lui seraient offertes ? Quelleapparence qu’elle se résignât à renoncer au trône pour attendrequ’un caprice de la fortune vînt réaliser des espérancesromanesques et saisir un adolescent presque dans les derniers rangsde l’armée, pour le porter à une telle élévation avant que l’âge del’amour fût passé ! Qui l’assurait que les vœux mêmes de Mariede Gonzague eussent été bien sincères ? – Hélas ! sedisait-il, peut-être est-elle parvenue à s’étourdir elle-même surses propres sentiments ; la solitude de la campagne avaitpréparé son âme à recevoir des impressions profondes. J’ai paru,elle a cru que j’étais celui qu’elle avait rêvé ; notre âge etmon amour ont fait le reste. Mais lorsqu’à la cour elle aura mieuxappris, par l’intimité de la Reine, à contempler de bien haut lesgrandeurs auxquelles j’aspire, et que je ne vois encore que de bienbas ; quand elle se verra tout à coup en possession de toutson avenir, et qu’elle mesurera d’un coup d’œil sûr le chemin qu’ilme faut faire ; quand elle entendra, autour d’elle, prononcerdes serments semblables aux miens par des voix qui n’auraient qu’unmot à dire pour me perdre et détruire celui qu’elle attend pour sonmari, pour son seigneur, ah ! insensé que j’ai été ! elleverra toute sa folie et s’irritera de la mienne.

C’était ainsi que le plus grand malheur del’amour, le doute, commençait à déchirer son cœur malade ; ilsentait son sang brûlé se porter à la tête et l’appesantir ;souvent il tombait sur le cou de son cheval ralenti, et undemi-sommeil accablait ses yeux ; les sapins noirs quibordaient la route lui paraissaient de gigantesques cadavres quipassaient à ses côtés ; il vit ou crut voir la même femmevêtue de noir qu’il avait montrée à Grandchamp s’approcher de luijusqu’à toucher les crins de son cheval, tirer son manteau ets’enfuir en ricanant ; le sable de la route lui parut unerivière qui coulait sur lui en voulant remonter vers sasource ; cette vue bizarre éblouit ses yeux affaiblis ;il les ferma et s’endormit sur son cheval.

Bientôt il se sentit arrêté, mais le froidl’avait saisi. Il entrevit des paysans, des flambeaux, une masure,une grande chambre où on le transportait, un vaste lit dontGrandchamp fermait les lourds rideaux, et se rendormit étourdi parla fièvre qui bourdonnait à ses oreilles.

Des songes plus rapides que les grains depoussière chassés par le vent tourbillonnaient sous sonfront ; il ne pouvait les arrêter et s’agitait sur sa couche.Urbain Grandier torturé, sa mère en larmes, son gouverneur armé,Bassompierre chargé de chaînes, passaient en lui faisant un signed’adieu ; il porta la main sur sa tête en dormant et fixa lerêve, qui sembla se développer sous ses yeux comme un tableau desable mouvant.

Une place publique couverte d’un peupleétranger, un peuple du Nord qui jetait des cris de joie, mais descris sauvages ; une haie de gardes, de soldatsfarouches ; ceux-ci étaient Français.

– Viens avec moi, dit d’une voix douceMarie de Gonzague en lui prenant la main. Vois-tu, j’ai undiadème ; voici ton trône, viens avec moi.

Et elle l’entraînait, et le peuple criaittoujours.

Il marcha, il marcha longtemps.

– Pourquoi donc êtes-vous triste, si vousêtes reine ? disait-il en tremblant. Mais elle était pâle, etsourit sans parler. Elle monta et s’élança sur les degrés, sur untrône, et s’assit : – Monte, disait-elle en tirant sa mainavec force.

Mais ses pieds faisaient crouler toujours delourdes solives, et il ne pouvait monter.

– Rends grâce à l’amour, reprit-elle.

Et la main, plus forte, le souleva jusqu’enhaut. Le peuple cria.

Il s’inclinait pour baiser cette mainsecourable, cette main adorée… c’était celle du bourreau !

– Ô ciel ! cria Cinq-Mars enpoussant un profond soupir.

Et il ouvrit les yeux : une lampevacillante éclairait la chambre délabrée de l’auberge ; ilreferma sa paupière, car il avait vu assise sur son lit une femme,une religieuse, si jeune, si belle ! Il crut rêver encore,mais elle serrait fortement sa main. Il rouvrit ses yeux brûlantset les fixa sur cette femme.

– Ô Jeanne de Bel fiel ! est-cevous ? La pluie a mouillé votre voile et vos cheveuxnoirs : que faites-vous ici, malheureuse femme ?

– Tais-toi, ne réveille pas monUrbain ; il est dans la chambre voisine qui dort avec moi.Oui, ma tête est mouillée, et mes pieds, regarde-les, mes piedsétaient si blancs autrefois ! Vois comme la boue les asouillés. Mais j’ai fait un vœu, je ne les laverai que chez le Roi,quand il m’aura donné la grâce d’Urbain. Je vais à l’armée pour letrouver ; je lui parlerai, comme Grandier m’a appris à luiparler, et il lui pardonnera ; mais, écoute, je lui demanderaiaussi ta grâce ; car j’ai lu sur ton visage que tu es condamnéà mort. Pauvre enfant ! tu es bien jeune pour mourir, tescheveux bouclés sont beaux ; mais cependant tu es condamné,car tu as sur le front une ligne qui ne trompe jamais. L’homme quetu as frappé te tuera. Tu t’es trop servi de la croix, c’est là cequi te porte malheur ; tu as frappé avec elle, et tu la portesau cou avec des cheveux… Ne cache pas ta tête sous tes draps !T’aurais-je dit quelque chose qui t’afflige ? ou bien est-ceque vous aimez, jeune homme ? Ah ! soyez tranquille, jene dirai pas tout cela à votre amie ; je suis folle, mais jesuis bonne, bien bonne, et il y a trois jours encore que j’étaisbien belle. Est-elle belle aussi ? Oh ! comme ellepleurera un jour ! Ah ! si elle peut pleurer, elle serabien heureuse.

Et Jeanne se mit tout à coup à réciterl’office des morts d’une voix monotone, avec une volubilitéincroyable, toujours assise sur le lit, et tournant dans ses doigtsles grains d’un long rosaire.

Tout à coup la porte s’ouvre ; elleregarde et s’enfuit par une entrée pratiquée dans une cloison.

– Que diable est-ce que ceci ?Est-ce un lutin ou un ange qui dit la messe des morts sur vous,monsieur ? vous voilà sous vos draps comme dans unlinceul.

C’était la grosse voix de Grandchamp, qui futsi étonné, qu’il laissa tomber un verre de limonade qu’ilapportait. Voyant que son maître ne lui répondait pas, il s’effrayaencore plus et souleva les couvertures. Cinq-Mars était fort rougeet semblait dormir ; mais son vieux domestique jugeait que lesang lui portant à la tête l’avait presque suffoqué, et, s’emparantd’un vase plein d’eau froide, il le lui versa tout entier sur lefront. Ce remède militaire manque rarement son effet, et Cinq-Marsrevint à lui en sautant.

– Ah ! c’est toi, Grandchamp !quels rêves affreux je viens de faire !

– Peste ! monsieur, vos rêves sontfort jolis au contraire : j’ai vu la queue du dernier, vouschoisissez très-bien.

– Qu’est-ce que tu dis, vieuxfou ?

– Je ne suis pas fou, monsieur ;j’ai de bons yeux, et j’ai vu ce que j’ai vu. Mais certainementétant malade comme vous l’êtes, monsieur le maréchal ne…

– Tu radotes, mon cher ; donne-moi àboire, car la soif me dévore. Ô ciel ! quelle nuit ! jevois encore toutes ces femmes.

– Toutes ces femmes, monsieur ? Etcombien y en a-t-il ici ?

– Je te parle d’un rêve, imbécile !Quand tu resteras là immobile au lieu de me donner àboire !

– Cela me suffit, monsieur ; je vaisdemander d’autre limonade.

Et s’avançant à la porte, il cria du haut del’escalier :

– Eh ! Germain ! Etienne !Louis !

L’aubergiste répondit d’en bas :

– On y va, monsieur, on y va ; c’estqu’ils viennent de m’aider à courir après la folle.

– Quelle folle ? dit Cinq-Marss’avançant hors de son lit.

L’aubergiste entra, et, ôtant son bonnet decoton, dit avec respect :

– Ce n’est rien, monsieur lemarquis ; c’est une folle qui est arrivée à pied ici cettenuit, et qu’on avait fait coucher près de cette chambre ; maiselle vient de s’échapper : on n’a pas pu la rattraper.

– Comment, dit Cinq-Mars, comme revenantà lui et passant la main sur ses yeux, je n’ai donc pas rêvé ?Et ma mère, où est-elle ? et le maréchal, et… Ah ! c’estun songe affreux. Sortez tous.

En même temps il se retourna du côté du mur,et ramena encore les couvertures sur sa tête.

L’aubergiste, interdit, frappa trois fois desuite sur son front avec le bout du doigt en regardant Grandchamp,comme pour lui demander si son maître était aussi en délire.

Celui-ci fit signe de sortir en silence ;et, pour veiller pendant le reste de la nuit près de Cinq-Mars,profondément endormi, il s’assit seul dans un grand fauteuil detapisserie, en exprimant des citrons dans un verre d’eau, avec unair aussi grave et aussi sévère qu’Archimède calculant les flammesde ses miroirs.

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