La Quittance de minuit – Tome II – La Galerie du géant

XII – VEILLÉE DE MORT

La nuit était sombre ; depuis plusieursheures on n’entendait plus les échos lointains de la fusillade dansla direction du bog de Clare-Galway. Quelques barques, venant de larive orientale du lac, avaient abordé déjà au pied des Mamturks.Les équipages de ces barques, silencieux et tristes, avaient pristerre et s’étaient dirigés, soit vers le village de Corrib, soitvers Knockderry, soit enfin vers les hameaux dispersés de loin enloin sur la montagne.

La plupart du temps, les groupes qu’avaitrassemblés le commun désir de passer le lac se divisaient entouchant la rive ; chacun regagnait sa demeure, et l’on seséparait en murmurant tout bas un morne : au revoir !

Quelques groupes cependant ne se séparèrentpoint. Ceux-là, en quittant le bateau qui les avait apportés,tiraient après eux un fardeau ; les plus robustes chargeaientce faix sur leurs épaules et les autres suivaient à pas lents, latête découverte. C’étaient les Molly-Maguires qui revenaient desbords du Doon et qui rapportaient leurs morts, car il y avait eucombat aux environs de la chaussée de planches.

Tandis que les ribbonmen s’acharnaient autourde leurs victimes, les secours étaient venus à la fois de Tuam etde Galway. L’enseigne Brown et le cornette qui étaient parvenus àse sauver avaient fait leur devoir. Tuam envoyait toute sa petitegarnison, conduite par le lieutenant Peters. Galway fournissait sesgens de police et les quelques dragons du colonel Brazer.

Il n’est pas dans les mœurs des whiteboys derésister à la force armée, si inférieure en nombre qu’elle puisseêtre. D’ordinaire la vue seule d’un habit rouge on d’une masse deconstable suffit à les mettre en déroute ; mais, en cettecirconstance, il n’était pas en leur pouvoir de refuser labataille. Ils étaient pris entre deux feux, et les dragons quis’étaient accrochés aux débris de la chaussée de planches, étantparvenus enfin à se dégager avec l’aide des nouveaux arrivants,augmentèrent le nombre de leurs adversaires.

Les bateaux chargés de femmes que nous avonsvus traverser le Corrib pendant qu’Ellen s’était mise à l’abri sousles saules de Ballilough, allaient chercher de l’aide à Knockderryet dans les villages environnants, pour dégager leurs maris etleurs frères, qui se trouvaient pris à leur tour comme en unpiège.

Une moitié des ribbonmen en effet avait pugagner au large, lors de l’arrivée des dragons de Tuam et despolicemen de Galway ; mais une cinquantaine d’hommes s’étaienttrouvés cernés. Il ne fallait rien moins que cette circonstancepour amener des Molly-Maguires à tenir pied, en plein jour, contredes dragons de la Reine.

Le désavantage était maintenant tout entier deleur côté. Ils étaient mal armés, et le cours du Doon leur opposaitun obstacle infranchissable. Si les policemen eussent été plushardis, et si les dragons ne se fussent point obstinés à rester enselle sur leurs pesants chevaux, il ne serait pas resté un seul desouvriers de destruction qui avaient coupé la chaussée deplanches.

Mais, soldats de la Reine et hommes de police,intimidés par les périls que présentait le marais autour deswhiteboys, laissèrent le combat traîner en longueur, et sebornèrent à décimer de loin, à coups de fusil, les rangs de leursadversaires.

Pendant cela les femmes revinrent, apportantdes mousquets et des munitions. Quelques renforts lesaccompagnaient, la bataille s’engagea, plus vive, et, vers le soir,ce qui restait de ribbonmen parvint à regagner le lac.

Les Saxons n’osèrent pas prolonger la lutte audelà du coucher du soleil, et firent retraite vers Galway.

Pour quelques cadavres de dragons ensevelisdans la fange du Doon, il y avait plus de trente Irlandais couchésmorts sur le gazon du bog. Mais les dragons n’emmenaient point deprisonniers avec eux, et, en se retirant, ils savaient bien quetous ces cadavres étendus dans les diverses places où avait erré labataille auraient disparu le lendemain.

Si les ribbonmen avaient manqué, en effet, àune de leurs coutumes en combattant sous la lumière du soleil, iln’était pas probable qu’ils pussent déroger à cet autre usageconsistant à faire disparaître les cadavres de leurs morts.

C’est là, parmi eux, une loi constante et quiarrête la plupart du temps les investigations de la justice.Molly-Maguire enterre toujours avant le lever du soleil ceux de sesenfants qui ont succombé en payant la Dette de Minuit.

Les dragons de la Reine ne s’étaient pointtrompés, les barques irlandaises, après s’être mises hors de portéedes carabines, demeurèrent stationnaires ; ellesattendirent ; et, quand la nuit fut venue, elles serapprochèrent de la rive. Des éclaireurs furent envoyés pours’assurer de la retraite des dragons, puis tout le monde sedispersa sur le vaste champ de bataille qui s’étendait depuis lalisière des terrains cultivés jusqu’à la chaussée de planches.

Chacun savait où était tombé l’ami qu’il avaitperdu ; les femmes allaient en pleurant chercher le cadavre deleur mari ou de leur frère. La lune éclairait cette scène funèbre àtravers le voile diaphane des brumes d’été. On entendait çà et làdes sanglots et des plaintes.

Quelques cris de joie s’élevaient au milieu ducommun désespoir, lorsqu’une main de sœur ou d’épouse sentait uncœur battre sous une chemise sanglante.

On s’appelait tout bas ; un groupe serassemblait autour de chaque corps étendu sur le gazon du bog.Morts et blessés étaient chargés sur les épaules et dirigés vers lelac.

Ce fut une lugubre traversée. Les barquespartaient l’une après l’autre à mesure qu’elles recevaient leurcharge mortuaire. Au milieu du brouillard qui recouvrait l’eautranquille du Corrib, on entendait le bruit mesuré des rames. Dansla plupart des bateaux ; la douleur était muette. Dansquelques-uns les femmes essayaient en vain d’étouffer leursdéchirants sanglots. Dans d’autres on priait à voix haute, et lesversets funèbres du De profundis s’entendaient, prononcéspar des voix invisibles dans le vaste silence de la nuit.

Deux ou trois heures après le coucher dusoleil, il ne restait plus personne sur le bord oriental du Corrib,ni vivant, ni mort.

À mesure qu’une barque abordait de l’autrecôté du lac, les rameurs jetaient leurs avirons. S’il n’y avaitpoint de cadavre dans le bateau, chacun s’en allait triste et muet.S’il y avait un cadavre, on l’étendait sur les bras croisés de sixhommes, et on le portait ainsi à la maison qui avait été lasienne.

Les bords du lac se faisaient déserts :il y avait quelque temps déjà que le dernier bateau avait touché larive, lorsqu’un bruit de rames retentit encore dans lebrouillard.

Une barque approchait, muette et rapide,poussée par quatre vigoureux rameurs. Elle aborda ; quatrehommes de grande taille quittèrent les bancs où ils étaient assis,et se penchèrent à la fois pour soulever un objet étendu sur lesplanches de la cale. C’était encore un cadavre.

Les quatre hommes le placèrent sur leurs brasentrelacés, et commencèrent à gravir un des sentiers de lamontagne. Le sentier conduisait à la ferme de Mac-Diarmid. Ce futau seuil de la demeure du vieux Miles qu’ils s’arrêtèrent.

Les quatre hommes étaient Mickey, Sam, Larryet Jermyn ; ils portaient le corps de leur frère Dan, tué parles dragons de la Reine.

Mickey frappa à la porte ; la petitePeggy vint ouvrir et se recula en poussant un cri d’épouvante.

– Taisez-vous, enfant, lui dit Mickey. Oùest Mac-Diarmid ?

Les fils du vieux Miles appelaient ainsiMorris en l’absence de leur père, parce qu’ils l’avaient choisipour chef.

– Mac-Diarmid est venu, réponditl’enfant, qui tremblait, et dont le regard se détournait du cadavreavec horreur ; je lui ai dit que vous étiez à vous battre dansles bogs… Seigneur ! Seigneur ! sais-je ce qu’il y a danscette maison depuis, deux jours ! Morris était aussi pâle quecet homme mort.

Son doigt étendu montrait le pauvre Dan, dontle visage était couvert du masque de toile et qui montraitseulement sa bouche et son menton livides. L’enfant ne lereconnaissait point.

– Et Mac-Diarmid est reparti ?demanda Mickey.

– Il s’est assis là sur la paille,répondit Peggy. Ses jambes ne pouvaient plus le soutenir ; jelui ai donné un morceau de pain d’avoine et un verre de poteen. Ilest sorti sans me parler et a descendu la montagne dans ladirection de Kilkerran.

Mickey secoua la tête.

– Notre frère Morris ne nous doit pascompte de ses actions, murmura-t-il.

Puis il ajouta tout haut :

– La noble Héritière est ici ?

Le visage de la petite Peggy se couvrit derougeur, mais nul n’y prit garde.

– Elle est ici, répondit-elle.

– Allez, enfant, reprit l’aîné desMac-Diarmid, allez réveiller la noble Ellen. Dan était son parentet le fils de l’homme qui lui a servi de père. Il faut qu’elle priecomme nous pour le repos de Dan.

Peggy eut des larmes dans les yeux.

– Ah ! Jésus ! Jésus !murmura-t-elle, encore un que nous ne verrons plus ! Quand levieux Mac-Diarmid reviendra, il trouvera bien des places videsautour de la table !

Elle entra chez l’Héritière. Les quatre frèresdemeuraient debout au milieu de la salle commune et portaienttoujours le cadavre de Dan. Les deux grands chiens de montagne,qui, lors de leur entrée, étaient assis dans une attitude menaçanteaux deux côtés de la porte d’Ellen, rôdaient autour d’euxmaintenant et dressaient leurs grosses têtes en hurlantplaintivement.

– La noble Ellen va venir, dit Peggy enrentrant dans la salle.

– Maintenant, reprit Mickey, allezéveiller Owen et Kate ; dites-leur de se lever. Les vivantspeuvent s’étendre sur la paille, mais il faut un lit à ceux quisont morts.

Peggy obéit. L’instant d’après, Owen et Katese précipitaient dans la salle ; Ellen les suivit de près. Detoute la famille, il ne manquait là maintenant que le vieux Mileset Morris.

Dan fut étendu sur le lit d’Owen ; lesdeux jeunes femmes et Peggy s’agenouillèrent à l’entour. Mickeytrempa le rameau de buis, suspendu au-dessus de la couche, dansl’eau sainte du bénitier. Il aspergea le visage découvert du mort.Puis il se mit à genoux comme les autres et ouvrit un livred’heures pour réciter ces belles prières dont la piété catholiqueentoure ceux qui ne sont plus.

Les cinq frères répondaient amend’une voix triste et grave ; Peggy pleurait ; Ellen étaitbien pâle, mais sa tête se tournait parfois du côté de la porte, etune pensée étrangère semblait venir trop souvent à travers sadouleur.

Kate aimait chèrement tous les Mac-Diarmid,parce qu’ils étaient les frères d’Owen et les fils du vieux Milesqui l’avait accueillie, orpheline, après la mort de Lake Neale.Elle regrettait le pauvre Dan comme un bon frère et comme un ami.Au premier moment son chagrin avait dominé toute autrepensée ; mais maintenant, tandis que la prière se prolongeaitautour de la couche funèbre, des souvenirs cruels envahissaientl’âme de Kate, et, reportaient son esprit vers un autre lit demort.

C’était comme une fatalité ! Chaque foisque la confiance renaissait en elle, un événement survenait quiranimait ses doutes et la faisait plus malheureuse. Owen l’avait-iltrompée ? Elle eût voulu dire non à sa conscience, mais cecadavre qu’on rapportait de nuit était une accusation terrible.

Kate essayait de prier ; mais toujours,au travers de son oraison, se jetait une sombre pensée. Son regardinterrogeait alors les cinq frères. Elle cherchait à lire sur leursvisages, et n’y voyait que tristesse et regrets.

Owen ne la regardait point : il étaitabsorbé comme les autres dans son devoir pieux. Le seul Jermyntournait les yeux quelquefois pour lancer à la dérobée un regard ducôté d’Ellen.

Mais Kate n’avait point l’esprit assez librepour observer le trouble du dernier des Mac-Diarmid ou pour enrechercher l’origine. L’attention qu’elle volait à l’oraisonmortuaire se portait, sans partage, sur ses propres terreurs. Elleétait la fille d’un homme assassiné, et tout cœur irlandais regardela vengeance comme une loi.

Jermyn n’aurait point pu donner à sapréoccupation un motif si légitime. Il ne songeait qu’à Ellenauprès du lit de mort de son frère. Ses lèvres seules murmuraientla prière latine ; son cœur ne savait point ce que faisaientses lèvres.

Depuis le commencement de la prière, Ellensemblait distraite, et le remords de sa distraction se peignait surla noble beauté de son visage. Jermyn épiait avidement les effortsqu’elle faisait pour se donner tout entière à l’oraison.

Il cherchait un sens à ses regards quisoulevaient de temps à autre sa paupière dévotement baissée, et quise tournaient vers la porte close.

Qu’y avait-il derrière cette porte ?

Dans la salle commune les bestiaux ronflaient,et les deux chiens de montagne continuaient leurs hurlementsplaintifs. Jermyn sentait naître en lui un soupçon ; quelquechose, tout au fond de son cœur blessé, lui révélait la présenced’un ennemi. Il devinait peut-être en ce moment que sa ballen’avait point tué Percy Mortimer ; il supposait que le majorétait caché quelque part aux environs, sans doute dans une despauvres cabanes dispersées sur le flanc du Mamturk.

C’était cette retraite mystérieuse quecherchait involontairement le regard d’Ellen. Une haine jalouse etfurieuse faisait bondir le cœur de Jermyn.

Ses mains serrées contre sa poitrine secrispaient et déchiraient la peau de son sein. Son visage étaitpourpre et livide tour à tour. Il souffrait, et il avait soif desang. Il eût tué son ennemi à genoux, il l’eût tué couché sur unlit d’agonie.

Ce soir, en voyant Ellen sans blessure, ilavait remercié Dieu ; mais maintenant il maudissait laProvidence, parce que la balle qui avait épargné l’Héritière avaitmanqué le cœur de Percy Mortimer.

Ces sanglantes pensées étaient sous un frontd’enfant, couronné de blonds cheveux doux et flexibles comme lasoie. Il restait de la douceur dans cet œil menaçant ; cettebouche convulsivement froncée était faite pour les sourires.

La prière se continuait, longue et triste.Quatre chandelles de jonc étaient allumées aux quatre coins dulit ; leur lumière vacillante tombait sur le visage dumort.

Quand Mickey avait fini un psaume, ils’arrêtait ; le silence régnait dans la salle, troubléseulement par les sanglots de la petite Peggy et par la plainte deschiens qui hurlaient. Puis la voix de l’aîné des Mac-Diarmids’élevait de nouveau, monotone et grave ; l’assistance sereprenait à répondre les versets sacrés.

En un de ces moments où Mickey venait dereprendre les litanies catholiques, le valet de ferme Joyceentra.

Il arrivait du dehors. Il s’approcha deMickey, qui interrompit la prière.

– Si le prêtre vient, dit Joyce à voixbasse, ce ne sera que demain matin, car il y a bien des morts surla paroisse, et votre demande est venue la dernière.

La rude figure de Mickey se couvrit d’un nuageplus épais.

– Il était bon chrétien, dit-il en jetantun regard triste vers le corps de Dan. Mais quelle âme n’a besoinde prières ? Il faut la voix d’un prêtre pour ouvrir la portedu ciel.

– J’ai fait ce que j’ai pu, ditJoyce.

– As-tu vu les deux vicaires et lediacre ?

– Je les ai tous vus.

– As-tu dit que la maison de Diarmidrenfermait encore deux vaches et six moutons ?

– J’ai dit que mes maîtres donneraientleur dernier schelling pour une bonne prière. Mais ce sont deshommes de Dieu, vous savez Mac-Diarmid ; ils n’aiment l’argentque pour le rendre aux pauvres, et les morts qu’ils vont aidercette nuit n’ont pas de quoi payer leur peine.

Mickey secoua sa tête chevelue et fronça sesgros sourcils.

– Ce sont de saintes gens,murmura-t-il : mais il faut que mon frère Dan ait une prière.Il nous aimait bien durant sa vie, nous lui devons une bonne mort.Venez avec moi, Sam et Larry ; le prêtre viendra de gré ou deforce !

Les deux jeunes gens hésitèrent ; maisils songèrent à l’âme de leur frère qui errait, en peine, entre laterre et le ciel ; et, malgré, le respect profond et pleind’amour que les populations catholiques gardent à leurs pauvresprêtres, Sam et Larry suivirent Mickey sur la route de Knockderry.Il ne restait auprès du mort qu’Owen, Kate, le valet Joyce et lapetite Peggy.

Ellen en effet avait profité de l’entrée duvalet pour s’échapper sans bruit. Personne ne s’était aperçu de sonabsence, excepté Jermyn, qui l’avait suivie.

Joyce et Peggy étaient toujours à genoux. Kates’était rapproché d’Owen.

– Notre frère est mort les armes à lamain ? dit-elle tout bas.

– Oui, répondit Owen.

– Les Molly-Maguires se sont battusaujourd’hui dans le bog de Clare-Galway ?

– Les Repealers se sont battus dans lesrues de la ville. Priez pour notre frère, Kate ! c’était undigne cœur, et, auprès de son lit de mort, je n’aurais point laforce de me défendre contre vos soupçons.

Owen s’agenouilla. Kate l’imita, convaincueune fois encore et repentante.

Le silence régna dans la chambre funèbre.

Dans la salle commune où il n’y avait point delumière, Jermyn était aux écoutes, l’oreille collée à la ported’Ellen. Auprès de lui les deux chiens de montagne essayaient defourrer leur museau sous la porte et grondaient sourdement.

Jermyn, l’œil attentif et les sourcilsfroncés, suivait tous leurs mouvements. Une faible lueur passaitpar la serrure. – Jermyn s’était déjà penché plus d’une fois, afind’introduire son regard par le trou et de voir ce qui se passaitdans la chambre de l’Héritière.

Mais il s’était relevé toujours avantd’exécuter son dessein. Son front était rouge de honte et à la foisde désir. Il n’osait pas. Le respect religieux que les Mac-Diarmidgardaient à leur noble parente l’arrêtait toujours.

Jermyn avait conservé ce respect au milieu desa passion. Une sorte de muraille sacrée était entre l’Héritière etlui. Il l’aimait jusqu’à la fureur, mais aussi jusqu’à l’adoration,et l’adoration implique la crainte.

Un quart d’heure s’écoula. Jermyn restait à lamême place, couvrant de l’œil cette lueur faible qui sortait par laserrure d’Ellen, et n’osant point y mettre son regard. Pourtant lafièvre le poignait, et il eût donné des années de sa vie poursavoir ce qui se passait, à quelques pieds de lui, derrière cetteplanche.

Il n’y pouvait plus tenir. Il allait seretirer, pour ne point céder à la tentation qui devenaitirrésistible, lorsqu’il entendit comme une plainte étouffée dans lachambre d’Ellen. En même temps les deux chiens s’élancèrent contrela porte et hurlèrent avec menace.

Un soupir rauque s’échappa de la poitrine deJermyn, dont les yeux se troublèrent et qui vit passer dans la nuitle pâle visage du major Mortimer. Il se baissa par un mouvementrapide et impossible à réprimer. Son œil se plaça devant le trou dela serrure. Il ne vit rien, parce qu’au même instant un objetopaque se posa de l’autre côté de l’ouverture.

Les chiens, en se jetant contre la porte,avaient éveillé les craintes d’Ellen, qui, elle aussi, devinait etredoutait.

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer