Georges

Chapitre 6Transfiguration

Et maintenant il faut que nos lecteurs nouspermettent d’abandonner ce père et ce fils à la joie du retour, et,revenant avec nous sur le passé, consentent à suivre avec nous latransfiguration physique et morale qui s’était opérée pendantl’espace de ces quatorze ans dans le héros de cette histoire, quenous lui avons fait entrevoir enfant et que nous venons de luimontrer jeune homme.

Nous avions d’abord eu l’idée de mettrepurement et simplement sous les yeux du lecteur le récit que fitGeorges à son père des événements de ces quatorze années :mais nous avons réfléchi que, ce récit étant une histoire toute depensées intimes et de sensations secrètes, on pourrait se défieravec raison de la véracité d’un homme du caractère de Georges,surtout lorsque cet homme parle de lui-même. Nous avons donc résolude conter, personnellement et à notre guise, cette histoire, dontnous connaissons chaque détail, promettant d’avance, vu que notreamour-propre n’est point engagé dans l’affaire, de ne cacher aucunesensation bonne ou mauvaise, aucune pensée honorable ouhonteuse.

Partons donc du même point d’où Georges étaitparti lui-même.

Pierre Munier, dont nous avons essayé detracer le caractère, avait, dès qu’il était entré dans la vieactive, c’est-à-dire dès que d’enfant, il était devenu homme,adopté vis-à-vis des blancs un système de conduite dont il nes’écarta jamais ; ne se sentant ni la force ni la volonté decombattre en duelliste un accablant préjugé, il avait pris larésolution de désarmer ses adversaires par une soumissioninaltérable et par une inépuisable humilité ; sa vie fut toutentière occupée à excuser sa naissance. Loin de briguer, malgré sesrichesses et son intelligence, aucune fonction administrative,aucun emploi politique, il avait constamment cherché à se faireoublier en se perdant dans la foule ; la même qui l’avaitécarté de la vie publique le guidait dans la vie privée. Généreuxet magnifique par nature, il tenait sa maison avec une simplicitétoute monastique. Chez lui l’abondance était partout, le luxe nullepart, quoiqu’il eût près de deux cents esclaves, ce qui constitueaux colonies une fortune de plus de deux cent mille livres derente. Il voyagea toujours à cheval, jusqu’à ce que, forcé par sonâge, ou plutôt par les chagrins qui l’avaient brisé avant l’époqueoù l’homme est vieux, de changer sa modeste habitude en unehabitude plus aristocratique, il acheta un palanquin aussisimplement modeste que celui du plus pauvre habitant de l’île.Toujours soigneux d’éviter la moindre querelle, toujours poli,complaisant, serviable pour tout le monde, même pour ceux qui, aufond du cœur, lui étaient antipathiques, il eut mieux aimé perdredix arpents de terre que d’élever ou même de soutenir un procès quilui en eût fait gagner vingt. Quelque habitant avait-il besoin d’unplant de café, de manioc ou de canne à sucre il était sûr de lestrouver chez Pierre Munier, qui le remerciait encore de lui avoirdonné la préférence. Or, tous ces bons procédés, qui étaient aufond l’instinct de son excellent cœur, mais qui pouvaient paraîtrele résultat de son caractère timide, lui avaient valu l’amitié deses voisins sans doute, mais une amitié toute passive, qui, n’ayantjamais eu même l’idée de lui faire du bien, se bornait purement etsimplement à ne pas lui faire de mal. Encore, parmi ceux-ci, y enavait-il quelques-uns qui, ne pouvant pardonner à Pierre Munier safortune immense, ses nombreux esclaves et sa réputation sans tache,s’acharnaient à l’écraser constamment sous le préjugé de lacouleur. M. de Malmédie et son fils Henri étaient de cenombre.

Georges, né dans les mêmes conditions que sonpère, mais que la faiblesse de sa constitution avait éloigné desexercices physiques, avait tourné vers les réflexions toutes sesfacultés internes, et, mûr avant l’âge, comme le sont en généraltous les enfants maladifs, il avait observé d’instinct la conduitede son père, dont il avait, tout jeune encore, pénétré lesmotifs ; or, l’orgueil viril qui bouillonnait dans la poitrinede cet enfant lui avait fait prendre en haine les blancs qui leméprisaient, et, en dédain, les mulâtres qui se laissaientmépriser. Aussi se résolut-il bien à suivre une conduite toutopposée à celle qu’avait tenue son père, et à marcher, quand laforce lui serait venue, d’un pas ferme et hardi au-devant de cesabsurdes oppressions de l’opinion, et si elles ne lui faisaientpoint place, à les prendre corps à corps comme Hercule Antée, et àles étouffer entre ses bras. Le jeune Annibal, excité par son père,avait juré haine éternelle à une nation ; le jeune Georges,malgré son père, jura guerre à mort à un préjugé.

Georges quitta la colonie après la scène quenous avons racontée, arriva en France avec son frère, et entra aucollège Napoléon. À peine assis sur les bancs de la dernièreclasse, il comprit la différence des rangs, et voulut arriver aupremier : pour lui, la supériorité était une nécessitéd’organisation ; il apprit vite et bien. Un premier succèsaffermit sa volonté en lui donnant la mesure de sa puissance. Savolonté en devint plus forte et ses succès en devinrent plusgrands. Il est vrai de dire que ce travail de l’esprit, que cedéveloppement de la pensée, laissaient le corps dans son état dechétivité primitive : le moral absorbait le physique, la lamebrûlait le fourreau ; mais Dieu avait donné un appui au pauvrearbrisseau. Georges reposait en paix sous la protection de Jacques,qui était le plus robuste et le plus paresseux de sa classe, commeGeorges en était le plus travailleur et le plus faible.

Malheureusement, cet état de choses dura peu.Deux ans après leur arrivée, comme Jacques et Georges étaient alléspasser leurs vacances à Brest, chez un correspondant de leur pèreauquel ils étaient recommandés, Jacques, qui avait toujours eu ungoût décidé pour la marine, profita de l’occasion qui s’offrait,et, ennuyé de sa prison, comme il appelait le collège, s’embarquasur un corsaire, qu’il donna à son père, dans une lettre qu’il luiécrivit, pour un bâtiment de l’État. De retour au collège, Georgessentit alors cruellement l’absence de son frère. Sans défensecontre les jalousies qu’avaient suscitées ses triomphes d’écolier,et qui, du moment qu’elles pouvaient être assouvies, devenaient devéritables haines, il fut honni par les uns, battu par les autres,maltraité par tous ; chacun avait pour lui son injurefavorite. Ce fut une rude épreuve ; Georges la supportacourageusement.

Seulement, il réfléchit plus profondément quejamais sur sa position et comprit que la supériorité morale n’étaitrien sans la supériorité physique ; qu’il fallait l’une pourfaire respecter l’autre, et que la réunion de ces deux qualitésfaisait seule un homme complet. À partir de cette heure, il changeacomplètement de manière de vivre ; de timide, retiré, inactifqu’il était, il devint joueur, turbulent, tapageur. Il travaillaitbien encore, mais seulement assez pour conserver cette prééminenceintellectuelle qu’il avait acquise dans les années précédentes.Dans les commencements, il fut maladroit, et l’on se moqua de lui.Georges reçut mal la plaisanterie, et cela à dessein. Georgesn’avait pas naturellement le courage sanguin, mais le couragebilieux, c’est-à-dire que son premier mouvement, au lieu de lejeter dans le danger, était de lui faire faire un pas en arrièrepour l’éviter. Il lui fallait la réflexion pour être brave, et,quoique cette bravoure soit la plus réelle, puisqu’elle est labravoure morale, il s’en effraya comme d’une lâcheté.

Il se battit donc à chaque querelle, ou plutôtil fut battu ; mais, vaincu une fois, il recommença tous lesjours jusqu’à ce qu’il fut vainqueur, non pas parce qu’il était leplus fort, mais parce qu’il était plus aguerri, parce qu’au milieudu combat le plus acharné, il conservait un admirable sang-froid,et que, grâce à ce sang-froid, il profitait de la moindre faute deson adversaire. Cela le fit respecter, et dès lors on commença àregarder à deux fois pour l’insulter ; car, si faible que soitun ennemi, on hésite à engager la lutte avec lui quand on le saitdéterminé ; d’ailleurs, cette prodigieuse ardeur avec laquelleil embrassait cette nouvelle vie portait ses fruits : la forcelui venait peu à peu ; aussi, encouragé par ses premiersessais, tant que durèrent les vacances suivantes, Georges n’ouvritpas un livre ; il commença à apprendre à nager, à faire desarmes, à monter à cheval, s’imposant une fatigue continuelle,fatigue qui, plus d’une fois, lui donna la fièvre, mais à laquelleil finit cependant par s’habituer. Alors aux exercices d’adresse ilajouta des travaux de force : pendant des heures entières, ilbêchait la terre comme un laboureur ; pendant des joursentiers, il portait des fardeaux comme un manœuvre ; puis, lesoir venu, au lieu de se coucher dans un lit chaud et doux, ils’enveloppait dans son manteau, se jetait sur une peau d’ours etdormait là toute la nuit. Un instant, la nature surprise hésita, nesachant si elle devait rompre ou triompher. Georges sentait qu’iljouait sa vie, mais que lui importait sa vie ; si sa vien’était pas pour lui la domination de la force et la supériorité del’adresse ? La nature fut la plus puissante ; lafaiblesse physique, vaincue devant l’énergie de la volonté,disparut comme un serviteur infidèle chassé par un maîtreinflexible. Enfin, trois mois d’un pareil régime fortifièrenttellement le pauvre chétif, qu’à son retour ses camaradeshésitaient à le reconnaître. Alors ce fut lui qui chercha querelleaux autres et qui battit, à son tour, ceux qui l’avaient tant defois battu. Alors ce fut lui qui fut craint et qui, étant craint,fut respecté.

Au reste, par une harmonie toute naturelle, àmesure que la force se répandait dans le corps, la beautés’épanouissait sur le visage ; Georges avait toujours eu desyeux superbes et des dents magnifiques ; il laissa pousser seslongs cheveux noirs dont à force de soins il corrigea la rudessenative et qui s’assouplirent sous le fer. Sa pâleur maladivedisparut pour faire place à un teint mat plein de mélancolie et dedistinction : enfin, le jeune homme s’étudia à être beau,comme l’enfant s’étudiait à être fort et adroit.

Aussi, lorsque Georges, après avoir fait saphilosophie, sortit du collège, c’était un gracieux cavalier decinq pieds quatre pouces, et, comme nous l’avons dit, quoiqu’un peumince, admirablement pris dans sa taille. Il savait à peu près toutce qu’un jeune homme du monde doit savoir. Mais il comprit que cen’était pas assez que d’être, en toutes choses, de la force ducommun des hommes ; il décida qu’en toutes choses il leurserait supérieur.

Au reste, les études qu’il avait résolu des’imposer lui devenaient faciles, débarrassé qu’il était de sestravaux scolastiques, et maître désormais de tout son temps. Ilfixa à l’emploi de sa journée des règles dont il résolut de ne passe départir : le matin, à six heures, il montait àcheval ; à huit heures, il allait au tir au pistolet ; dedix heures à midi, il faisait des armes ; de midi à deuxheures, il suivait les cours de la Sorbonne ; de trois à cinqheures, il dessinait tantôt dans un atelier, tantôt dans unautre ; enfin, le soir, il allait ou au spectacle ou dans lemonde, dont son élégante courtoisie, bien plus encore que safortune, lui ouvrait toutes les portes.

Aussi Georges se lia-t-il avec tout ce queParis avait de mieux en artistes, en savants et en grandsseigneurs ; aussi Georges, également familier avec les arts,la science et la fashion, fut-il bientôt cité comme un des espritsles plus intelligents, comme un des penseurs les plus logiques, etcomme un des cavaliers les plus distingués de la capitale. Georgesavait donc à peu près atteint son but.

Cependant, il lui restait une dernière épreuveà faire : certain d’être maître des autres, il ignorait encores’il était maître de lui-même ; or, Georges n’était pas hommeà conserver un doute sur quelque chose que ce fût ; il résolutde s’éclairer sur son propre compte.

Georges avait souvent craint de devenirjoueur.

Un jour, il sortit les poches pleines d’or, ets’achemina vers Frascati. Georges s’était dit : « Jejouerai trois fois ; à chaque fois, je jouerai trois heures,et, pendant ces trois heures, je risquerai dix mille francs :puis, passé ces trois heures, que j’aie perdu ou gagné, je nejouerai plus. »

Le premier jour, Georges perdit ses dix millefrancs en moins d’une heure et demie. Il n’en resta pas moins sestrois heures à regarder jouer les autres, et, quoiqu’il eût dans unportefeuille et en billets de banque les vingt mille francs qu’ilétait décidé à hasarder dans les deux essais qui lui restaient àfaire, il ne jeta pas sur le tapis un louis de plus qu’il nes’était proposé.

Le second jour, Georges gagna d’abordvingt-cinq mille francs ; puis, comme il s’était imposé àlui-même de jouer trois heures, il continua de jouer, et reperdittout son gain, plus deux mille francs de son argent ; en cemoment il s’aperçut qu’il jouait depuis trois heures et cessa avecla même ponctualité que la veille.

Le troisième jour, Georges commença parperdre ; mais, sur son dernier billet de banque, la fortunechangea, et la chance lui redevint favorable ; il lui restaittrois quarts d’heure à jouer ; pendant ces trois quartsd’heure, Georges joua avec un de ces bonheurs étranges, dont leshabitués des tripots perpétuent le souvenir par des traditionsorales : pendant ces trois quarts d’heure, Georges eut l’aird’avoir fait un pacte avec le diable, à l’aide duquel un démoninvisible lui soufflait d’avance à l’oreille la couleur qui allaitsortir et la carte qui allait gagner. L’or et les billets de banques’entassaient devant lui, à la grande stupéfaction des assistants.Georges ne pensait plus lui-même ; il jetait son argent sur latable et disait au banquier : « Où vous voudrez. »Le banquier plaçait l’argent au hasard, et Georges gagnait. Deuxjoueurs de profession, qui avaient suivi sa veine et qui avaientgagné des sommes énormes, crurent que le moment était arrivéd’adopter une marche contraire, ils parièrent alors contrelui ; mais la fortune resta fidèle à Georges. Ils reperdirenttout ce qu’ils avaient gagné, puis tout ce qu’ils avaient sureux ; puis, comme ils étaient connus pour des gens sûrs, ilsempruntèrent au banquier cinquante mille francs qu’ils reperdirentencore. Quant à Georges, impassible, sans qu’une seule émotiontranspirât sur son visage, il voyait s’augmenter cette masse d’oret de billets, regardant de temps en temps la pendule qui devaitsonner l’heure de sa retraite. Enfin cette heure sonna. Georgess’arrêta à l’instant, chargea son domestique de l’or et des billetsgagnés, et, avec le même calme, la même impassibilité qu’il avaitjoué, qu’il avait perdu et qu’il avait gagné, il sortit, envié partous ceux qui avaient assisté à la scène qui venait de se passer,et qui s’attendaient à le revoir le lendemain.

Mais, contre l’attente de tout le monde,Georges ne reparut pas. Il fit plus : il mit l’or et lesbillets, pêle-mêle, dans un tiroir de son secrétaire, se promettantde ne rouvrir le tiroir que huit jours après. Ce jour arrivé,Georges rouvrit le tiroir, et fit la vérification de son trésor. Ilavait gagné deux cent mille francs.

Georges était content de lui ; il avaitvaincu une passion.

Georges avait les sens ardents d’un homme destropiques.

À la suite d’une orgie, plusieurs de ses amisle conduisirent chez une courtisane, célèbre par sa beauté et parsa capricieuse fantaisie. Ce soir-là, il avait pris à la moderneLaïs une recrudescence de vertu. La soirée se passa donc à parlermorale ; on eût cru que la maîtresse de la maison aspirait auprix Montyon. Cependant, on avait pu voir que les yeux de la belleprêcheuse se fixaient de temps en temps sur Georges avec uneexpression d’ardent désir qui démentait la froideur de ses paroles.Georges de son côté, trouva cette femme plus désirable encore qu’onne lui avait dit. Et, pendant trois jours, le souvenir de cetteséduisante Astarté poursuivit la virginale imagination du jeunehomme. Le quatrième jour, Georges reprit le chemin de la maisonqu’elle habitait, monta l’escalier avec un effroyable battement decœur, tira la sonnette avec un mouvement si convulsif, que lecordon faillit lui rester dans la main ; puis, sentant les pasde la femme de chambre qui s’approchaient, il commanda à son cœurde cesser de battre, à son visage d’être calme, et, d’une voix danslaquelle il était impossible de reconnaître la moindre traced’émotion, il demanda à la femme de chambre de le conduire à samaîtresse. Celle-ci avait entendu sa voix. Elle accourut, joyeuseet bondissante ; car l’image de Georges, dont la vue lui avaitfait, au moment où elle l’avait aperçu, une profonde impression, nel’avait pas quittée depuis ; elle espérait donc que l’amour,ou du moins le désir, ramenait près d’elle le beau jeune homme quiavait produit sur elle une si profonde impression.

Elle se trompait : c’était encore uneépreuve sur lui-même que Georges avait résolu de faire : ilétait venu là pour mettre aux prises une volonté de fer et des sensde feu. Il resta deux heures près de cette femme, donnant un paripour prétexte à son impassibilité, et luttant à la fois contre letorrent de ses désirs et les caresses de la débauche ; puis,au bout de deux heures, vainqueur dans cette seconde épreuve, commeil l’avait été dans la première, il sortit.

Georges était content de lui, il avait domptéses sens.

Nous avons dit que Georges n’avait pas lecourage physique qui se jette au milieu du danger, mais seulementle courage bilieux qui l’attend lorsqu’il ne peut l’éviter. Georgescraignait réellement de n’être pas brave, et souvent il avaittressailli à cette idée que, dans un péril imminent, peut-être neserait-il pas sûr de lui ; peut-être enfin se conduirait-il enlâche. Cette idée tourmentait étrangement Georges ; aussirésolut-il de saisir la première occasion qui s’offrirait de mettreson âme aux prises avec le danger. Cette occasion se présenta d’unefaçon assez étrange.

Un jour, Georges était chez Lepage avec un deses amis et, en attendant que la place fût libre, il regardaitfaire un des habitués de l’établissement, connu comme il l’étaitlui-même pour un des meilleurs tireurs de Paris. Celui quis’exerçait à cette heure exécutait à peu près tous ces toursd’incroyable adresse que la tradition attribue à Saint-Georges etqui font le désespoir des néophytes, c’est-à-dire qu’il faisaitmouche à chaque fois, doublait ses coups de manière que la secondeempreinte couvrît exactement la première, coupait une balle sur uncouteau, et tentait, enfin, avec une constante réussite, milleautres expériences pareilles. L’amour-propre du tireur, il faut ledire, était encore excité par la présence de Georges, que legarçon, en lui présentant son pistolet, lui avait dit tout bas êtreau moins d’une force égale à la sienne, de sorte qu’à chaque coupil se surpassait ; mais, à chaque coup au lieu de recevoir deson voisin le tribut d’éloges qu’il méritait, il entendait, aucontraire, Georges répondre aux exclamations de lagalerie :

– Oui, sans doute, c’est bien tiré, mais ceserait autre chose, si monsieur tirait sur un homme.

Cette éternelle négation de son adresse, commeduelliste, commença par étonner le tireur, et finit par le blesser.Il se retourna donc vers Georges au moment où celui-ci venait, pourla troisième fois, d’émettre l’opinion dubitative que nous avonsrapportée, et, le regardant d’un air moitié railleur, moitiémenaçant :

– Pardon, Monsieur, lui dit-il, mais il mesemble que voilà deux ou trois fois que vous émettez un douteinsultant pour mon courage ; voudriez-vous avoir la bonté deme donner une explication claire et précise des paroles que vousavez dites ?

– Mes paroles n’ont pas besoin de commentaire,Monsieur, répondit Georges, et s’expliquent, ce me semble,suffisamment par elles-mêmes.

– Alors, Monsieur, reprit le tireur, ayez labonté de les répéter encore une fois, afin que j’apprécie à la foiset la portée qu’elles ont et l’intention qui les a dictées.

– J’ai dit, répondit Georges avec la plusparfaite tranquillité, j’ai dit, en vous voyant faire mouche à touscoups, que vous ne seriez pas si sûr de votre main ni de votre œil,si l’un et l’autre, au lieu d’avoir à diriger une balle contre laplaque, devaient la diriger contre la poitrine d’un homme.

– Et pourquoi cela, je vous prie ?demanda le tireur.

– Parce qu’il me semble qu’il doit toujours yavoir, au moment où l’on fait feu sur son semblable, une certaineémotion qui peut déranger le coup.

– Vous êtes-vous souvent battu en duel,Monsieur ? demanda le tireur.

– Jamais, répondit Georges.

– Alors, il ne m’étonne pas que vous supposiezqu’en pareille circonstance on puisse avoir peur, reprit l’étrangeravec un sourire où perçait une légère teinte d’ironie.

– Excusez-moi, Monsieur répondit Georges, maisvous m’avez mal compris, je crois : il me semble qu’au momentde tuer un homme, on peut trembler d’autre chose que de peur.

– Je ne tremble jamais, Monsieur, dit letireur.

– C’est possible, répondit Georges avec lemême flegme, mais je n’en suis pas moins convaincu qu’à vingt-cinqpas, c’est-à-dire, qu’à la même distance où vous faites mouche àtous coups…

– Eh bien, qu’à vingt-cinq pas ?… ditl’étranger.

– À vingt-cinq pas, vous manqueriez un homme,reprit Georges.

– Et moi, je suis sûr du contraire,Monsieur.

– Permettez-moi de ne pas vous croire surparole.

– Alors, c’est un démenti que vous medonnez ?

– Non, c’est un fait que j’établis.

– Mais dont, je suppose, vous hésiteriez àfaire l’expérience, reprit en ricanant le tireur.

– Pourquoi cela ? répondit Georges en leregardant fixement.

– Mais sur un autre que sur vous, jeprésume.

– Sur un autre ou sur moi-même, peuimporte.

– Ce serait téméraire à vous, Monsieur, derisquer une pareille épreuve, je vous en préviens.

– Non, car j’ai dit ce que je pensais, et, parconséquent, ma conviction est que je ne risquerais pasgrand-chose.

– Ainsi, Monsieur, vous me répétez pour laseconde fois qu’à vingt-cinq pas, je manquerais monhomme ?

– Vous vous trompez, Monsieur, ce n’est paspour la seconde fois que je vous le répète ; c’est, si je mele rappelle bien, pour la cinquième.

– Ah ! c’est trop fort, Monsieur, et vousvoulez m’insulter.

– Libre à vous de croire que c’est monintention.

– C’est bien, Monsieur. Votre heure ?

– À l’instant même, si vous voulez.

– Le lieu ?

– Nous sommes à cinq cents pas du bois deBoulogne.

– Vos armes ?

– Mes armes ? Mais le pistolet. Ce n’estpas d’un duel qu’il s’agit, c’est une expérience que nousfaisons.

– À vos ordres, Monsieur.

– C’est moi qui suis aux vôtres.

Les deux jeunes gens montèrent chacun dans soncabriolet, accompagnés chacun d’un ami.

Arrivés sur le terrain, les deux témoinsvoulurent arranger l’affaire, mais c’était chose difficile.L’adversaire de Georges exigeait des excuses, et Georges prétendaitqu’il ne devait ces excuses que dans le cas où il serait blessé outué, puisque, dans ce cas seulement, il aurait tort.

Les deux témoins perdirent un quart d’heure ennégociations qui n’amenèrent aucun résultat.

On voulut alors placer les adversaires àtrente pas l’un de l’autre ; mais Georges fit observer qu’iln’y avait plus d’expérience réelle si on n’adoptait point ladistance à laquelle on tire d’habitude sur la plaque c’est-à-direvingt cinq pas. En conséquence, on mesura vingt-cinq pas.

Alors on voulut jeter un louis en l’air pourdécider à qui tirerait le premier ; mais Georges déclara qu’ilregardait ce préliminaire comme inutile attendu que le droit deprimauté appartenait tout naturellement à son adversaire.L’adversaire de Georges de son côté, se piqua d’honneur, et insistapour que le sort décidât d’un avantage qui, entre deux hommes d’uneforce si grande, donnait toute chance à celui qui tirerait lepremier. Mais Georges tint bon, et son adversaire fut obligé decéder.

Le garçon du tir avait suivi les combattants.Il chargea les pistolets avec la même mesure, la même poudre et lesmêmes balles que celles avec lesquelles les expériences précédentesavaient été faites. C’étaient aussi les mêmes pistolets. Georgesavait imposé ce point comme une condition sine quanon.

Les adversaires se placèrent à vingt-cinq pas,et chacun d’eux reçut des mains de son témoin un pistolet toutchargé. Puis les témoins s’éloignèrent, laissant aux combattants lafaculté de tirer l’un sur l’autre dans l’ordre convenu.

Georges ne prit aucune des précautions usitéesen pareille circonstance, il n’essaya de garantir avec son pistoletaucune partie de son corps. Il laissa pendre son bras le long de sacuisse et présenta, dans toute sa largeur, sa poitrine entièrementdésarmée.

Son adversaire ne savait ce que voulait direune telle conduite ; il s’était trouvé plusieurs fois encirconstance pareille : jamais il n’avait vu un semblablesang-froid. Aussi cette conviction profonde de Georgescommença-t-elle à produire son effet. Ce tireur si habile, quin’avait jamais manqué son coup, douta de lui-même.

Deux fois il leva le pistolet sur Georges, etdeux fois il le baissa. C’était contre toutes les règles duduel ; mais à chaque fois, Georges se contenta de luidire :

– Prenez votre temps, Monsieur ; prenezvotre temps.

À la troisième, il eut honte de lui-même etfit feu.

Il y eut un moment d’angoisse terrible parmiles témoins. Mais, aussitôt le coup parti, Georges se tournasuccessivement à gauche et à droite, et, saluant ces deuxmessieurs, pour leur indiquer qu’il n’était pas blessé :

– Eh bien, Monsieur, dit-il à son adversaire,vous voyez bien que j’avais raison, et que, quand on tire sur unhomme, on est moins sûr de son coup que lorsqu’on tire sur uneplaque.

– C’est bien, Monsieur, j’avais tort, réponditl’adversaire de Georges. Tirez à votre tour.

– Moi, dit Georges en ramassant son chapeauqu’il avait posé à terre, et en tendant son pistolet au garçon dutir, moi, tirer sur vous ? Pourquoi faire ?

– Mais c’est votre droit, Monsieur, s’écriason adversaire et je ne souffrirai pas qu’il en soit autrement.D’ailleurs, je suis curieux de voir comment vous tirezvous-même.

– Pardon, Monsieur, dit Georges avec sonimperturbable sang-froid, entendons-nous, s’il vous plaît. Je n’aipas dit que je vous toucherais, moi. J’ai dit que vous ne metoucheriez pas ; vous ne m’avez pas touché. J’avaisraison ; voilà tout.

Et, quelque prétexte que pût lui donner sonadversaire, quelques instances qu’il fît pour qu’il tirât à sontour, Georges remonta dans son cabriolet et reprit le chemin de labarrière de l’Étoile en répétant à son ami :

– Eh bien, ne te l’avais-je pas dit, que celafaisait une différence de tirer sur une poupée ou de tirer sur unhomme ?

Georges était content de lui, car il était sûrde son courage.

Ces trois aventures firent du bruit etposèrent admirablement Georges dans le monde. Deux ou troiscoquettes se firent un point d’honneur de subjuguer le moderneCaton ; et, comme il n’avait aucun motif pour leur résister,il fut bientôt un jeune homme à la mode. Mais, au moment où on lecroyait le plus enchaîné par ses bonnes fortunes, comme le momentqu’il s’était fixé lui-même pour ses voyages était arrivé, un beaumatin Georges prit congé de ses maîtresses en leur envoyant àchacune un cadeau royal, et partit pour Londres.

À Londres, Georges se fit présenter partout etfut partout bien reçu. Il eut des chevaux, des chiens et descoqs ; il fit battre les uns et courir les autres, tint tousles paris offerts, gagna et perdit des sommes folles avec unsang-froid tout aristocratique ; bref, au bout d’un an, ilquitta Londres avec le renom d’un parfait gentleman, comme il avaitquitté Paris avec la réputation d’un charmant cavalier ; cefut pendant ce séjour dans la capitale de la Grande-Bretagne qu’ilrencontra lord Murrey, mais, comme nous l’avons dit, sans lierautrement connaissance avec lui.

C’était l’époque où les voyages en Orientcommençaient à devenir à la mode. Georges visita successivement laGrèce, la Turquie, l’Asie Mineure, la Syrie et l’Égypte. Il futprésenté à Méhemet-Ali, au moment où Ibrahim-Pacha allait faire sonexpédition du Saïd. Il accompagna le fils du vice-roi, combattitsous ses yeux et reçut de lui un sabre d’honneur et deux chevauxarabes, choisis parmi les plus beaux de son haras.

Georges revint en France par l’Italie.L’expédition d’Espagne se préparait. Georges accourut à Paris etdemanda à servir comme volontaire : sa demande lui futaccordée. Georges prit place dans les rangs du premier bataillon demarche et se trouva constamment à l’avant-garde.

Malheureusement, contre toute attente, lesEspagnols ne tenaient pas, et cette campagne, qu’on avait crud’abord devoir être si acharnée, n’était guère autre chose, ensomme, qu’une promenade militaire. Au Trocadéro, cependant, leschoses changèrent de face, et l’on vit qu’il faudrait enlever deforce ce dernier boulevard de la révolution péninsulaire.

Le régiment auquel Georges s’était jointn’était pas désigné pour l’assaut ; Georges changea derégiment et passa aux grenadiers. La brèche pratiquée et le signalde l’escalade donné, Georges s’élança à la tête de la colonned’attaque et entra le troisième dans le fort.

Son nom fut cité à l’ordre de l’armée, et ilreçut, des mains du duc d’Angoulême, la croix de la Légiond’honneur, et, de la main de Ferdinand VII, la croix deCharles III. Georges n’avait pour but que d’obtenir unedistinction. Georges en avait obtenu deux. L’orgueilleux jeunehomme fut au comble de la joie.

Il pensa alors que le moment était venu deretourner à l’île de France : tout ce qu’il avait espéré enrêve s’était accompli, tout ce qu’il avait désiré atteindre étaitdépassé : il n’avait plus rien à faire en Europe. Sa lutteavec la civilisation était finie, sa lutte avec la barbarie allaitcommencer. C’était une âme pleine d’orgueil qui ne se serait pasconsolée de dépenser dans un bonheur européen les forcesprécieusement amassées pour un combat interne : tout ce qu’ilavait fait depuis dix ans, c’était pour dépasser ses compatriotesmulâtres et blancs, et pouvoir tuer à lui seul le préjugé qu’aucunhomme de couleur n’avait encore osé combattre. Peu lui importait, àlui, l’Europe et ses cent cinquante millions d’habitants ; peului importait la France et ses trente-trois millionsd’hommes ; peu lui importait députation ou ministère,république ou royauté. Ce qu’il préférait au reste du monde, ce quile préoccupait avant toute chose, c’était son petit coin de terre,perdu sur la carte comme un grain de sable au fond de la mer. C’estqu’il y avait pour lui, sur ce petit coin de terre, un grand tourde force à exécuter, un grand problème à résoudre. Il n’avait qu’unsouvenir : celui d’avoir subi ; il n’avait qu’uneespérance : celle de s’imposer.

Sur ces entrefaites, le Leycesterrelâcha à Cadix. Le Leycester allait à l’île de France, oùil devait rester en station. Georges demanda son admission à bordde ce noble bâtiment, et, recommandé qu’il était au capitaine parles autorités françaises et espagnoles, il l’obtint. Puis lavéritable cause de cette faveur fut, disons-le, que lord Murreyapprit que celui qui sollicitait ce passage était un indigène del’île de France : or, lord Murrey n’était pas fâché d’avoirquelqu’un qui, pendant une traversée de quatre mille lieues, pûtlui donner d’avance ces mille petits renseignements politiques etmoraux qu’il est si important qu’un gouverneur aitprécautionneusement amassés avant de mettre le pied dans songouvernement.

On a vu comment Georges et lord Murreys’étaient peu à peu rapprochés l’un de l’autre et comment ils enétaient arrivés à un certain point de liaison en abordant àPort-Louis.

On a vu encore comment Georges, tout filspieux et dévoué qu’il était pour son père, n’était arrivé qu’aprèsune de ces longues épreuves qui lui étaient familières à se fairereconnaître de lui. La joie du vieillard fut d’autant plus grandequ’il comptait moins sur ce retour : puis l’homme qui étaitrevenu différait tellement de l’homme attendu, que, tout encheminant vers Moka, le père ne pouvait se lasser de regarder lefils, s’arrêtant de temps en temps devant lui comme encontemplation, et, à chaque fois, le vieillard serrait le jeunehomme sur son cœur avec tant d’effusion, qu’à chaque fois Georges,malgré cette puissance sur lui-même qu’il affectait, sentait leslarmes lui venir aux yeux.

Après trois heures de marche, on arriva à laplantation ; à un quart d’heure de la maison, Télémaque avaitpris les devants, de sorte qu’en arrivant, Georges et son pèretrouvèrent tous les nègres qui les attendaient avec une joie mêléede crainte : car ce jeune homme qu’ils n’avaient vu qu’enfant,c’était un nouveau maître qui leur arrivait, et ce maître, queserait-il ?

Ce retour était donc une question capitale debonheur ou de malheur à venir pour toute cette pauvre population.Les augures furent favorables. Georges commença par leur donnercongé pour ce jour et pour le lendemain. Or, comme le surlendemainétait un dimanche, cette vacance leur faisait de bon compte troisjours de repos.

Puis Georges, impatient de juger par lui-mêmede l’importance que sa fortune territoriale pouvait lui donner dansl’île, prit à peine le temps de dîner, et, suivi de son père,visita toute l’habitation. D’heureuses spéculations et un travailassidu et bien dirigé en avaient fait une des plus bellespropriétés de la colonie. Au centre de la propriété était lamaison, bâtiment simple et spacieux, entouré d’un triple ombrage debananiers, de manguiers et de tamariniers s’ouvrant par devant, surune longue allée d’arbres conduisant jusqu’à la route, et, parderrière, sur des vergers parfumés où la grenade à fleurs doublesmollement balancée par le vent, allait tour à tour caresser unbouquet d’oranges purpurines ou un régime de bananes jaunes,montant et descendant toujours, indécise et pareille à une abeillequi voltige entre deux fleurs, à une âme qui flotte entre deuxdésirs ; puis tout alentour, et à perte de vue, s’étendaientdes champs immenses de cannes et de maïs qui semblaient, fatiguésde leur charge nourricière, implorer la main des moissonneurs.

Puis enfin on arriva à ce qu’on appelle, danschaque plantation, le camp des noirs.

Au milieu du camp s’élevait un grand bâtimentqui servait de grange l’hiver, et de salle de danse l’été ; degrands cris de joie en sortaient, mêlés au son du tambourin, dutam-tam et de la harpe malgache. Les nègres, profitant des vacancesdonnées, s’étaient aussitôt joyeusement mis en fête ; car,dans ces natures primitives, il n’y a pas de nuances ; dutravail, elles passent au plaisir, et se reposent de la fatigue parla danse. Georges et son père ouvrirent la porte et parurent tout àcoup au milieu d’eux.

Aussitôt le bal fut interrompu ; chacunse rangea contre son voisin, cherchant à prendre son rang, commefont des soldats surpris par leur colonel. Puis, après un moment desilence agité, une triple acclamation salua les maîtres. Cettefois, c’était bien l’expression franche et entière de leurssentiments. Bien nourris, bien vêtus, rarement punis, parce querarement ils manquaient à leur devoir, ils adoraient Pierre Munier,le seul peut-être des mulâtres de la colonie qui, humble avec lesblancs, ne fût pas cruel avec les noirs. Quant à Georges, dont leretour, comme nous l’avons dit, avait inspiré de graves craintesdans la pauvre population, comme s’il eût deviné l’effet que saprésence avait produit, il éleva la main en signe qu’il voulaitparler. Aussitôt, le plus profond silence se fit, et les nègresrecueillirent avidement les paroles suivantes, qui tombèrent de sabouche, lentes comme une promesse, solennelles comme unengagement :

– Mes amis, je suis touché de la bienvenue quevous me faites, et plus encore du bonheur qui brille ici sur tousles visages : mon père vous rend heureux, je le sais, et jel’en remercie ; car c’est mon devoir comme le sien de faire lebonheur de ceux qui m’obéiront, je l’espère, aussi religieusementqu’ils lui obéissent. Vous êtes trois cents ici, et vous n’avez quequatre-vingt-dix cases ; mon père désire que vous en bâtissiezsoixante autres, une pour deux ; chaque case aura un petitjardin, il sera permis à chacun d’y planter du tabac, des giromons,des patates, et d’y élever un cochon avec des poules ; ceuxqui voudront faire argent de tout cela l’iront vendre le dimanche àPort-Louis, et disposeront à leur volonté du produit de la vente.Si un vol est commis, il y aura une sévère punition pour celui quiaura volé son frère ; si quelqu’un est injustement battu parle commandeur, qu’il prouve que le châtiment n’était pas mérité, etil lui sera fait justice : je ne prévois pas le cas où vousvous ferez marrons, car vous êtes et vous serez, je l’espère, tropheureux pour songer à nous quitter.

De nouveaux cris de joie accueillirent cepetit discours, qui paraîtra sans doute bien minutieux et bienfutile aux soixante millions d’Européens qui ont le bonheur devivre sous le régime constitutionnel, mais qui, là-bas, fut reçuavec d’autant plus d’enthousiasme, que c’était la première chartede ce genre qui eût été octroyée dans la colonie.

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