Les-Belles-de-nuit ou Les Anges de la famille – Tome II

XV. – LE PRISONNIER.

Madame la marquise d’Urgel habitait ledeuxième étage d’une maison de décente apparence, située rueSainte-Marguerite, juste en face de la prison militaire.

C’était, suivant l’opinion des gens duquartier, une veuve dans une position de fortune aisée, mais qui nerépondait pas tout à fait au fracas de son grand nom. Elle avaitcependant un appartement fort digne, une toilette toujoursrecherchée et une voiture.

Elle ne sortait guère, sinon pour accomplirses dévotions, comme une Castillane de bon sang, et aussi, le soir,parfois, à l’heure où s’ouvrent les salons du grand monde. Mais,comme elle ne recevait jamais personne, on ne supposait pointqu’elle pût être fort répandue.

Tout le monde s’accordait à convenir quec’était une des plus belles femmes de Paris.

Sa nièce, jolie personne de seize à dix-septans, à la figure douce et souffrante, vivait encore bien plusretirée. C’est à peine si on l’avait vue sortir deux ou trois fois,jamais à pied.

Dans les rares occasions où la marquisel’emmenait ainsi avec elle, les stores de la voiture étaientsoigneusement baissés.

Mais il n’y avait point là de mystère, c’étaittout bonnement la santé faible de la jeune fille qui nécessitaitces précautions.

On disait, en effet, que la pauvre enfant semourait d’une maladie de langueur.

C’était Blanche de Penhoël qui passait ainsipour la nièce de la marquise.

Blanche était dans cette maison depuis unmois. Avec les quelques semaines passées à l’hôtel des QuatreParties du monde, cela faisait deux grands mois depuis sondépart du manoir, et pourtant elle gardait toujours la pensée qu’onallait la rendre à sa mère. Ces caractères faibles et crédules sontlents à désespérer.

Lola, cœur froid dans un corps de feu,n’était, à proprement parler, ni méchante ni bonne. L’indifférencequ’elle apportait à tout lui avait fait commettre en sa vie biendes actions coupables, mais l’initiative du mal n’était point enelle.

Elle traitait Blanche avec assez dedouceur.

Ce n’était peut-être point pitié. Nous l’avonsvue poursuivre tranquillement la ruine d’un homme qui l’adorait,cela sans y mettre la moindre passion, et comme elle eût accomplila tâche la plus simple. Le sens moral lui manquait ; nullevoix ne parlait au fond de sa conscience.

Ces natures, en quelque sorte négatives,pullulent autour de nous. Seulement, comme un rien peut romprel’inerte équilibre qui les retient entre le bien et le mal, lemoindre enseignement suffit à les parquer dans le troupeau des gensordinaires, qui n’enfreignent aucune loi essentielle et viventsuivant l’ornière de tout le monde.

Ce sont alors d’honnêtes gens négatifs,passifs pour mieux dire, inutiles par eux-mêmes, sansindividualité, sans valeur propre, faisant uniquement nombre etconstituant partout l’immense majorité.

Mais le moindre enseignement pervers ou mêmel’absence de tout enseignement, car la faiblesse humaine a sa pentevers le mal, peut les jeter pour toujours dans une autre voie.

Ce sont alors des instruments de vice ou decrime, passifs encore, mais terribles, à cause de cela mêmesouvent.

Du reste, Blanche voyait Lola tout au plus unefois par jour. La prétendue marquise lui disait alors quelques motsde sa mère, qui était toujours sur le point d’arriver pourl’emmener avec elle en Bretagne.

Blanche n’avait pas l’idée du mensonge. Onavait beau la tromper, elle ne se fatiguait point de croire.

Il y avait chez la marquise une femme dechambre de vertu douteuse, mais bonne fille au fond, et d’uncaractère serviable, qui avait pris l’Ange en affection.

La pauvre enfant était si douce et si éloignéede la plainte. Thérèse, la femme de chambre, lui tenait compagnie,la soignait et la consolait.

Mais Thérèse avait deux ou trois soupirantsparmi la jeunesse studieuse du carrefour Bussy : Blancherestait bien souvent seule, et alors de vagues tristesses venaientl’accabler.

Elle se souvenait de Penhoël, où son enfances’était écoulée parmi les caresses. Mon Dieu ! que de bonheur,et comme on l’adorait ! Elle croyait voir la vénérable etbelle figure de l’oncle Jean qui lui souriait comme autrefois.

À son réveil, quand ses yeux s’ouvraient, ellecherchait le doux regard de sa mère.

Et Diane, et Cyprienne, ses cousines chéries,si complaisantes, si bonnes, si promptes à deviner ses moindrescaprices !

En retournant au manoir, quand on allait venirla chercher, elle retrouverait l’oncle Jean et sa mère ; maisDiane et Cyprienne étaient mortes…

Elles, si jolies, si pleines desanté, de force, de jeunesse ! Elles, dont la pauvre Blancheavait envié si souvent la gaieté insouciante et heureuse !

Elles ne seraient plus là. Dieu les avaitreprises. Et Blanche pleurait en songeant qu’elle iraits’agenouiller, entre leurs pauvres tombes, derrière l’église deGlénac…

Et Vincent, le retrouverait-elle aumanoir ? Elle ne se rendait point compte de cela, mais, parmiles souvenirs qui visitaient sa solitude, celui de Vincent était leplus assidu.

Elle songeait à lui presque autant qu’à samère.

Le malheur enseigne. Là-bas, au milieu durepos tranquille de Penhoël, l’enfant eût tardé longtemps encorepeut-être à devenir femme ; mais dans cette chambre solitaire,où ses jours s’écoulaient si tristes, son cœur travaillait à soninsu.

Elle aimait, non plus de cette amitié douce dupremier âge ; elle aimait d’amour…

Chaque fois que sa pensée se tournait versl’avenir, Vincent était là toujours, partageant la joie comme lapeine.

Il ne lui semblait pas possible que Vincentpût lui manquer jamais. À cet égard, elle ne se faisait nullequestion. Il était là, le compagnon naturel de sa destinée.

Pauvre Vincent ! Il y avait maintenanthuit grands mois que son départ de Penhoël avait arraché à la jeunefille quelques larmes distraites. Qu’était-il devenu ? Pendantce long espace de temps, point de nouvelles ! S’il lui étaitarrivé malheur !…

À cette pensée, Blanche avait froid au cœur.Tout ce qui lui restait de courage l’abandonnait. L’avenir sevoilait pour elle.

Car les choses avaient bien changé pendant ceshuit mois, et l’amour était venu durant l’absence.

Mais ce n’était pas seulement la pensée desamis dont elle était séparée qui chargeait de tristesse le pâlefront de l’Ange de Penhoël.

Il y avait en elle une inquiétude confuse quiprenait sa source dans la souffrance physique.

Le mal qui pesait sur elle n’avait point denom pour son ignorance. Elle ne savait pas ; mais elle étaitfemme, et parfois il se faisait en son esprit une vaguelumière.

Quand son flanc tressaillait, quand ellesentait au dedans d’elle un mystérieux frémissement, l’instinct queDieu met au cœur de toute mère faisait effort pour se révéler.

Parfois Blanche à genoux, brisée de douleur,priait Dieu de la débarrasser d’une pensée qui était unblasphème.

C’est qu’elle se comparait alors, la pauvrefille, malgré l’effort de son cœur pieux, à la sainte ViergeMarie…

Il va sans dire que Lola, Thérèse et même nostrois gentilshommes avaient découvert depuis longtemps son état.Madame en avait donné, du reste, la première idée à Robert, dans laconversation qu’ils avaient eue ensemble, pendant le bal de laSaint-Louis, sous la Tour du Cadet.

Robert avait été plus loin. Il savait à peuprès à quoi s’en tenir sur les étranges circonstances de cettegrossesse.

Et comme il était homme à profiter de tout, ilavait fait entrer l’ignorance de la jeune mère dans les calculs desa partie.

Ce n’était point chez lui une foi bienarrêtée, parce que cette croyance romanesque sortait tout à fait deson caractère.

Mais l’innocence de Blanche était simanifeste, si radieuse, en quelque sorte, que Robert doutait.

Cela suffisait.

Il s’était dit :

« Si véritablement la petite est viergede cœur et victime de quelque diablerie, je joue le rôle du diableet me pose en chevalier généreux qui répare noblement sa faute…Corbleu ! je reconnais mon enfant, et je deviens le modèle despères !… Si, au contraire, la petite a caché son jeu, ausortir de la coque elles sont toutes des comédiennesconsommées ! – si elle s’est passé là-bas, à Penhoël, lafantaisie d’avoir un amant… eh bien ! je suis de plus en plusgénéreux… j’endosse la faute du coupable… Je donne à la candidecréature qui va naître, n’importe lequel de mes illustres noms…j’épouse… et je reçois sur mon habit de noce les larmes de joie detoute une famille attendrie… Toujours en supposant que l’oncled’Amérique nous fasse l’amitié de revenir… car, s’il reste enchemin, il est bien entendu que ce fade roman ne me regardepas ! »

Robert avait agi en conséquence de ceraisonnement, et nous savons que Lola suivait ses ordres à lalettre.

De sorte que l’Ange gardait son ignorance.Personne ne lui avait jamais donné de leçons.

Mais, si discret que l’on puisse être, lesfaits parlent, et près de l’évidence les moindres indices ont leursignification éloquente.

Lola ne pouvait toujours retenir ses regards,et les yeux de Thérèse disaient bien des choses en se fixanttoujours sur la taille épaissie de la jeune fille.

Pour que Blanche continuât de repousser lessoupçons vagues qui l’obsédaient, il fallait l’appui de saconscience virginale et la pureté limpide de ses souvenirs.

La chambre qu’elle habitait dans la maison dela marquise donnait sur le devant, car on ne la traitait point enprisonnière, et son angélique douceur rendait toute précautionsuperflue.

Eût-on voulu prendre des précautions, sachambre n’aurait point été encore mal choisie. De l’autre côté dela rue, il n’y avait, en effet, aucune fenêtre d’où les regardsindiscrets pussent épier la solitude de la jeune fille.

Du moins, telle était l’apparence, puisque lacroisée de Blanche regardait cet espace vide qui se trouve derrièrela porte latérale de la prison militaire.

De l’intérieur de sa chambre, elle voyaitseulement les derrières de la rue de l’Abbaye et le profil de lafaçade intérieure de la prison, c’est-à-dire quelques barreaux defer, faisant saillie hors de l’épaisse muraille.

Mais, à cause de cette position même, si ellene pouvait rien voir, elle pouvait être vue.

Et, de fait, derrière une de ces croisées, quedéfendait un solide grillage, il y avait un prisonnier dont lesyeux restaient fixés sur elle durant une grande partie du jour.

Une ou deux fois, Blanche l’avait entrevu auxrares instants où le soleil, pénétrant dans la ruelle intérieure dela prison, éclairait d’aplomb son visage. Mais elle n’avait pudistinguer ses traits, parce qu’il y avait les barreaux de ferentre le prisonnier et son regard.

D’ailleurs, elle n’avait point l’esprit assezlibre pour se donner à une curiosité vaine.

Comme son âme était bonne, elle priait parfoispour le pauvre prisonnier. C’était tout.

Le prisonnier, au contraire, s’occupait d’ellesans cesse.

Il avait en sa possession la lame d’un couteauqui, ébréchée, lui servait à limer ses barreaux. Toutes les heuresde sa nuit se passaient à ce patient travail ; mais dès ques’ouvrait la croisée de Blanche, il ne travaillait plus, sa têtes’avançait, avide, et il semblait que son âme s’élançait vers lajeune fille.

Durant des heures entières, il restait encontemplation devant elle, et parfois, lorsque le front de Blanches’appuyait, plus triste, sur sa main, des larmes venaient aux yeuxdu pauvre prisonnier.

Bien souvent, il avait essayé d’attirerl’attention de la jeune fille, soit en l’appelant par son nom, caril savait son nom, soit en agitant ses mains à travers lesbarreaux.

Mais sa voix s’était perdue parmi les chantsrauques des autres captifs, et quant à ses signaux, Blanche ne lesremarquait point, ignorant qu’ils lui fussent adressés.

Le prisonnier avait nom Vincent dePenhoël.

Dans cette maison, la pauvre Blanche setrouvait, à son insu, entourée de tous ceux qu’elle aimait.

Vincent, qu’appelaient ses larmes muettes,pouvait la voir pleurer ; quelques pas, et deux ou trois mursla séparaient de sa mère qu’elle demandait à Dieu chaque jour dansson ardente prière.

……  … . .

Vincent était arrivé jusqu’à Paris, tantôt àpied, tantôt sur la charrette de quelque paysan voyageur, comme ilavait pu, enfin.

De Redon jusqu’à Rennes, les traces desravisseurs avaient été faciles à suivre. À Rennes, au bureau desdiligences, il avait acquis la preuve que Blanche était maintenantsur la route de Paris.

Ceux qui l’emmenaient avaient, dès lors,changé de noms, et Vincent ne pouvait deviner en eux les ancienshôtes de Penhoël. Mais que lui importait ?

Une fois acquise la certitude que Blancheétait à Paris, Vincent ne calcula plus ni ses moyens ni ses forces.Il s’élança sur la route, comme s’il eût espéré joindre la voiture,qui avait sur lui vingt-cinq lieues d’avance.

Il ne lui restait plus que bien peu de chosesur l’argent du nabab. Loin de pouvoir payer sa place à ladiligence, il n’avait pas même de quoi vivre durant le trajet.

Il ne songea point à cela.

Courir ! courir ! atteindre lesinfâmes qui lui enlevaient Blanche, voilà seulement ce quil’occupait. Mais l’enthousiasme se lasse, et il y a près de centlieues de Rennes jusqu’à Paris.

Plus d’une fois, pendant la route, Vincent futobligé de mendier un gîte et un morceau de pain.

Plus d’une fois, il s’arrêta, vaincu par lebesoin ou par la fatigue.

La route s’allongeait devant lui à perte devue, et des larmes lui venaient aux yeux.

Enfin il arriva ! Oh ! ce grandParis ne l’effraya point. Dès les premiers pas il pensaitrencontrer des indices. Il se disait : « Je parcourraitoutes les rues, j’entrerai dans toutes les maisons, je visiterailes moindres recoins ! Je trouverai… jetrouverai !… »

Il trouva le soir même, comme il dormait,épuisé de lassitude, sur un banc des boulevards, un fonctionnairepublic, curieux par état, lequel interrompit son somme pour luidemander son nom et son adresse.

Le pauvre Vincent avait mis six jours pourvenir de Rennes, six jours sous la pluie et la poussière. Il étaitfait à peu près comme notre Bibandier, à l’époque où ce noble baronn’était encore que général de uhlans dans les taillis del’Ille-et-Vilaine. Il sentait son vagabond d’une lieue.

À la demande du fonctionnaire, il resta fortembarrassé : d’adresse, il n’en avait point, et sa désertion,après le malheureux duel de Madère, ne lui donnait pas grandcourage à décliner ses nom et prénoms.

Comme il hésitait, le fonctionnaire public etcurieux l’engagea poliment à le suivre. Vincent voulut fuir ;ce fut sa perte. Le fonctionnaire se mit en communication avecquelques sergents de ville qui prenaient le frais là, par hasard,et le pauvre Vincent eut un gîte.

Il se trouvait que le rapport du commandant dela station de Madère était arrivé depuis peu au ministère de lamarine. Les bureaux venaient d’achever leur travail, et la policeavait des notes toutes fraîches.

Vincent essaya bien de mentir, mais c’était unmétier nouveau pour lui ; on le pressa ; il se coupa. Laprison de l’Abbaye lui ouvrit ses portes à deux battants, jusqu’aumoment où un conseil de guerre, assemblé, déciderait de sonsort.

Il était là sous les verrous depuis environsept semaines.

Pendant la première moitié de ce laps detemps, un découragement lourd et accablant s’était emparé de lui.La pensée de Blanche perdue, de Blanche qu’il ne pouvait plus mêmeessayer de secourir, le navrait. Il voulut se laisser mourir. Mais,un jour qu’il tentait d’entrevoir, à travers les barreaux de sacellule, un petit coin de cette ville immense où Blanche souffraitpeut-être abandonnée, la seule fenêtre qu’il pût apercevoir, del’autre côté de la rue, s’ouvrit tout à coup, et deux femmes s’ymontrèrent.

Il faillit tomber à la renverse, tant sasurprise fut profonde.

L’une de ces deux femmes était Lola, l’autreétait Blanche.

Il poussa un grand cri de joie, et des larmesvinrent à ses yeux. Puis ses mains, crispées convulsivement,secouèrent les barreaux solides. Il voulait s’élancer. Ilappelait : « Blanche ! Blanche !… »

La jeune fille n’entendait pas. Mais elleresta. Vincent la revit le lendemain à la même place ; lesurlendemain il la revit encore.

C’était là qu’elle demeurait.

Comme elle était changée, mais toujoursbelle ! Vincent l’aimait mille fois plus qu’au temps dubonheur.

Et toutes ses pensées se tournèrent désormaisvers un seul but : fuir pour se rapprocher d’elle, fuir pourla protéger et la sauver !

Son courage revint ; sa force doubla.

Oh ! s’il avait pu échanger avec Blancheune parole, un signe seulement, son travail eût marché bien plusvite. Mais il avait beau faire, entre lui et la jeune fille le mêmeobstacle se dressait toujours. La pauvre lame ébréchée, que lehasard avait mise entre ses mains, s’usait contre le fer àl’épreuve. La tâche allait bien lentement. Mais Vincent ne selassait point, et l’œuvre avançait un peu tous les jours.

Une fois le barreau scié, que devait-ilfaire ? Il ne savait : à la grâce de Dieu !…

Cette nuit, tandis que le prisonniertravaillait, sans bruit, et constatait que sa lame entraitmaintenant tout entière dans le fer du barreau, Blanche veillait,elle aussi, en proie à des douleurs plus vives.

Elle était seule. Madame la marquise d’Urgelavait quitté la maison dès la brune pour se rendre à la fête dunabab, et Thérèse, profitant de l’occasion, avait donné sa soirée àquelqu’un de ses studieux amants.

Blanche était tout habillée sur son lit. Ellese sentait à la fois plus souffrante d’esprit et de corps. Desourdes douleurs déchiraient son flanc, et sa bouche rendait desplaintes faibles, auxquelles nulle voix ne répondait.

Les bruits de la rue diminuaient peu à peu.Les boutiques se fermaient ; on n’entendait plus qu’à de raresintervalles le roulement des voitures attardées.

Et personne ne rentrait au logis de lamarquise.

La pauvre Blanche avait peur.

Elle sentait que la force allait lui manquerpour souffrir, et offrait son âme à Dieu, pensant que la dernièreheure allait sonner pour elle.

La fièvre venait, amenant des visionsnavrantes ou terribles. L’Ange voyait, autour de sa couche, tousceux qu’elle aimait ; mais ils étaient pâles ; ilsavaient les yeux pleins de larmes… Et Blanche se disait :

– Ils sont morts… morts comme je vaismourir…

Elle essayait de prier. Les paroles del’oraison se mêlaient dans sa bouche. Elle ne pouvait.

Dans sa frayeur, elle appelait, et sa voix,changée, tombant au milieu du silence, l’épouvantait davantage…

Vers une heure du matin, la fatigue, plusforte que la souffrance, ferma enfin ses yeux. Elle s’endormit dusommeil de l’épuisement.

Thérèse rentra, puis madame la marquiseelle-même. Blanche ne les entendit point.

Son sommeil, que rien n’avait pu troubler, futpourtant interrompu brusquement aux environs de cinq heures dumatin par un tintamarre diabolique qui se faisait à la porte de larue.

Blanche s’éveilla en sursaut.

On frappait à la porte ; on sonnait àtriple carillon, et l’on appelait le concierge à grands cris…

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