Un homme dans la nuit

IV – EN FAMILLE

 

Il pouvait être trois heures du matin. La nuitétait magnifique. Lawrence, sur le trottoir, regarda le ciel, d’unazur sombre, cloué d’étoiles.

Quelques fiacres et voitures de maîtrestationnaient en face des Variétés-Parisiennes.

– Bah ! dit-il, je vais faire unbout de route à pied.

Il releva le col de son pardessus, s’enveloppala tête d’une fourrure, car il soufflait une petite bise glacée. Ilalluma un cigare et s’en fut, claquant de la semelle, le long duboulevard désert.

Tout en marchant, il monologuait :

– Dix minutes de plus là-dedans et jedevenais amoureux. Ce n’eût pas été drôle.

Et il ajouta :

– Elle est bigrement jolie, mais ce n’estqu’une grue !

Il se remémorait les incidents de la nuit.

– « Vous êtes unchaste !… » C’est vrai que je suis un chaste. Je n’aijamais fait la noce. Le peu que j’en ai vu ne me tente point.Ah ! cette Diane, elle me prenait ! Sont-ellesdangereuses !… On ne m’y repincera plus. Je ne veux plus melaisser entraîner dans un tel milieu…

Sa pensée changea de cours, alla vers le foyeroù tendaient ses pas.

Il murmura :

– Chère Adrienne !…

Un peu plus loin, il revenait à Diane. Il neput s’empêcher de sourire à son idée.

– J’eusse été cette nuit, si j’avaisvoulu, peut-être, le beau-frère de Martinet !

Il avait prononcé ce nom tout haut :

– Martinet !

Et il s’arrêta soudain, répétamachinalement :

– Martinet !

Il ne souriait plus. Sa face était grave. Ilresta ainsi quelques minutes sur le trottoir, songeant à Martinet.La conclusion de son recueillement fut celle-ci :

– C’est un imbécile !

Et il reprit son chemin.

Un fiacre passait, Lawrence le héla.

Avenue Henri-Martin, le fiacre s’arrêta devantun hôtel dont les vastes proportions se devinaient dans la nuit. Unpetit parc entourait l’hôtel. La grille d’entrée s’ouvrit. Onattendait Lawrence. Celui-ci, descendu de voiture, n’eût pas plustôt passé le seuil qu’une forme noire se détachait des ténèbres etlui sautait au cou.

– Bonsoir, p’pa !

– Allons, Pold ! veux-tu bien tetenir tranquille, vilain diable ?

– Vous me recevez comme un chien dans unjeu de croquet, p’pa.

– Et toi, tu m’accueilles comme undogue.

– Maman et Lily vous attendent. Ellesallaient monter se coucher. Elles ne tiennent plus de fatigue.

– Et toi, tu n’as pas sommeil ?

– Oh ! moi, non. Je viens de melever.

– Comment cela ? Tu n’as pasaccompagné ta mère et ta sœur chez les de Tiercœuil ?

– Oh ! moi, vous savez, p’pa, cesaffaires-là, moi, ça m’ennuie. J’pars à bécane à six heures. Il n’yavait pas plan.

– Quelles vilaines expressions tu as,Pold !

– Ah ! pour sûr ! J’ai pas étéélevé aux Oiseaux !

Un domestique les attendait sur le perron. Ilsentrèrent dans une salle à manger.

– Le voilà, p’pa ! cria Pold.

– Enfin ! répondirent joyeusementdeux voix féminines.

Une jeune fille vint à Lawrence. Elleparaissait bien ses dix-sept printemps ; de taille moyenne etadmirablement prise en sa toilette, très simple, de mousselineblanche. Elle était blonde, d’un blond rayonnant et doré. Son teintétait d’une pâleur et d’une aristocratie sans égales, son profildroit était un peu sévère, mais cette sévérité était immédiatementrachetée par la douceur infinie du regard.

Lily tendit son front à Lawrence, qui y déposaun baiser.

– Père, père, vous arrivez bien tard. Jevais vous gronder.

– C’est moi qui te gronderai, méchanteenfant, de veiller encore. Adrienne, vous êtes coupable. Lilydevrait être au lit depuis longtemps. Et vous aussi, et Pold, etmoi-même, et tout le monde. Oui, tout le monde devrait dormir.

– Pardonnez-nous, mon ami. Vous savez queces veilles ne sont guère dans mes habitudes. Nous sommes restéspour le cotillon chez les de Tiercœuil, dans l’espoir que notrerentrée ici coïnciderait avec la vôtre. Sommes-nous sicoupables ?

Lawrence s’avança vers celle qui venait deprononcer ces paroles et déposa un baiser dans ses cheveux.

– Bonne Adrienne… dit-il.

Cette femme avait peut-être quarante ans, maiselle en accusait trente-cinq à peine, et on sentait qu’elle lesaurait longtemps encore, ces trente-cinq ans-là. On la prévoyaitd’une beauté durable.

C’était une brune aux yeux bleus, des yeuxd’une beauté rare et mystérieuse, des yeux qui attiraient, et quiavaient certainement donné le vertige d’amour aux imprudents quiles avaient trop regardés. On eût dit que les yeux bleus de la mèreavaient encore toute la pureté apparue dans les yeux bleus de safille. Ils avaient la tristesse en plus. Oui, ces yeux admirablesétaient tristes et on les devinait tristes depuis des années et desannées, et l’on se disait que cette même tristesse, on l’avait déjàvue dans d’autres yeux. Alors, on se tournait vers Lawrence et l’ontrouvait, on rencontrait la même expression vague et indéfinie deregrets lointains pour des choses accomplies et disparues depuisdes époques reculées…

Pold enlevait le pardessus de son père, quiparut dans le pourpoint noir d’Hamlet.

– Oh ! vous êtes beau ! ditLily.

Et elle pria tout de suite son père de leurraconter sa soirée.

– Il y avait des amis ? Vous avezrencontré quelqu’un de nos « connaissances »là-bas ?

– Oui. J’ai rencontré un grand ami dePold.

– Ah ! bah ! fit Pold. Et quiça, sans indiscrétion ?

– M. Martinet.

– Tiens ! Il était là-bas ! Ilne se refuse plus rien depuis qu’il a une belle-sœur qui…

– Pold ! interrompit Lawrence avecun froncement de sourcils.

– Ah ! oui, j’allais commettre unegaffe, dit-il en regardant sa sœur. Ah ! bien, les jeunesfilles pourraient aller se coucher tout de même.

Lily se leva :

– C’est ce que je fais, Pold.

Lawrence ajouta :

– Et Pold va te suivre. Allez vousreposer, mes enfants. Quant à M. Martinet, je voudrais lesavoir moins l’ami de Pold. Ce n’est pas une fréquentation, ça,Martinet. Où es-tu allé chercher Martinet ? Quel amour t’apris pour Martinet ?

– Ah ! vous savez que j’ai tapé desclous avec lui…

– Oui, je sais tout cela. Mais tu n’aspas envie de te faire tapissier : laisse donc cet hommedésormais tranquille dans sa rue du Sentier et cesse tes visites.C’est entendu, n’est-ce pas ?

– Ah ! papa, c’est un si bonzig ! Il est rigolo comme tout et pas méchant.

– Tu me promets de ne plus le revoir ou,tout au moins, de ne plus le rechercher ?

Pold se gratta le sommet de la tête.

– Je vous le promets, fit-il.

Lily vint embrasser son père.

Les jeunes gens regagnèrent leurs chambres.Lawrence et Adrienne restèrent seuls. Lawrence rapporta quelquespotins parisiens à sa femme, qui ne s’attarda pas.

Quelques minutes plus tard, Adrienne entraitdans la chambre de Lily.

La jeune fille reposait déjà. Ses paupièrescloses s’entr’ouvrirent au bruit que fit Adrienne.

– Que voulez-vous, mère ?demanda-t-elle.

La mère ne répondit point. Elle s’assit prochele lit virginal, en la chambre tendue de satinette blanchequ’éclairait une fleur électrique, perdue parmi d’autres fleursartificielles jetées en couronne autour d’une psyché.

Lily répéta :

– Que veux-tu, mère ?

Et elle sembla se rendormir.

Adrienne considéra cette tête adorable rouléedans la vague blonde des cheveux. Elle la souleva amoureusement del’oreiller de dentelles, et quand elle eut ainsi son enfant à elle,elle dit :

– Est-il vrai que tu dors,Lily ?

Lily enveloppa le cou d’Adrienne de ses brasblancs.

– Je sais que je suis ta joie, mère, tonbonheur, ton grand bonheur…

Elle fit un effort et ajouta :

– Et aussi ta consolation.

Adrienne regarda anxieusement Lily.

– Ma consolation ? Oh ! machérie, tu crois donc que j’ai besoin d’être consolée ?

– Oui. Vous avez besoin que je sois là.C’est moi qui vous fais sourire quelquefois. Sans moi, vous serieztriste, triste, triste, et papa aussi serait triste, toujours.

– Dis-moi toute ta pensée, Lily…

– Ma mère, vous avez un chagrin immenseque je ne sais pas, mais que je voudrais savoir.

– Pourquoi ?

– Pour vous en guérir. Pardonnez-moi devous dire cela, mère, mais vous êtes malheureuse. Oh !malheureuse !

– Une mère n’est point malheureuse, Lily,quand elle a une fille comme toi.

– Et un mari comme papa, je le sais. Et,cependant, vous êtes malheureuse.

– Qui t’a dit cela, Lily ?

– Personne. Je l’ai vu.

– Qu’as-tu vu, mon enfant ? C’est lapremière fois que tu me tiens un pareil langage.

– J’ai vu que vous pleuriez souvent, etque mon père essayait vainement de vous consoler.

– Je ne pleure jamais, ma fille.

– Oh ! si, vous pleurez. Vouspleurez dans votre oratoire ! Vous ne pouvez vous mettre àgenoux sans pleurer ! Je vous ai surprise sans le vouloir,mère. Pardonnez-moi. Et puis votre regard semble toujours tournévers quelque chose que vous n’oubliez jamais… Quoi ? Jevoudrais savoir quoi. Je voudrais pouvoir éloigner de vous cettechose qui vous hante.

Adrienne prit la tête de son enfant, déposades baisers sur ses paupières, la mère et la fille ne dirent plusrien. Elles restèrent longtemps ainsi. Lily s’endormit doucement,Adrienne contempla son sommeil, des larmes lourdes et silencieusestombèrent sur la tête de l’enfant.

…… … … … … … … … … …

Pold, qui s’était couché de bonne heure et quis’était relevé quand sa mère et sa sœur étaient rentrées à l’hôtel,vers trois heures du matin, Pold, remonté dans sa chambre, nedormait pas. Il arpentait la pièce à grands pas et regardait detemps en temps le cadran de la pendule, dont les aiguillesmarquaient quatre heures et demie.

– Je n’ai pas osé le demander à p’pa,disait-il tout haut. Quel prétexte pour le lui demander ? Maisje suis sûr qu’elle y était. Parbleu ! Martinet me l’a dit,qu’elle s’y trouverait. Il le sait, lui, Martinet. Il sait tout, cesacré Martinet. Et puis, est-ce qu’il y a vraiment une fêteparisienne sans Diane ?…

Il marcha quelque temps encore par la chambre,puis il s’arrêta en face d’un bureau, s’assit dans un fauteuil,ouvrit, avec une clef, un tiroir et en sortit un paquet dephotographies.

Pold, de son nom de baptême Léopold, était unbrave garçon, d’une santé prospère, très « calé » danstous les sports, d’une vigueur et d’une adresse peu ordinaires,très ignorant de tout ce qui ne touchait point au cyclisme, àl’équitation, au canotage, à la chasse, au cricket, au football etautres exercices. En revanche, il avait découragé tous sesprofesseurs et bâclé ses classes. Il donnait pour excuse à sonignorance et à sa paresse pour l’étude les déplacements continuels,les voyages sans nombre de la famille, qui n’était installée àParis que depuis trois ans. Il affectait des « airsd’homme » et prétendait que la vie n’avait plus rien à luiapprendre.

C’était surtout un impulsif. Les désirs quilui naissaient devaient être contentés sur-le-champ. Il nes’adressait point, pour atteindre son but, quel qu’il fût, à unparent ou à un ami. Il ne comptait que sur lui et agissait sansprendre conseil de personne. Il ne discutait pas avec sesfantaisies, qui lui paraissaient toujours naturelles.

Ce qu’il n’avouait point, c’était qu’il fût unsentimental. Sous ses dehors d’homme fort et que rien n’étonnaitdans la vie, sous ses extravagances et ses vantardises, il essayaitvainement de cacher une sentimentalité excessive.

Ainsi, à cette heure où nous le trouvons danssa chambre, toute sa pensée est occupée par Diane. Pold n’a pas un« béguin » platonique pour Diane. Il l’aime de loin, maisil l’aime. Il est prêt à tout pour le lui prouver. PourquoiDiane ? Parce qu’il fallait qu’il aimât quelqu’un, parce queson cœur avait besoin d’occupation.

Et il avait cherché. Un jour, il avait vuDiane, aux Folies, sur la scène. En sortant de l’établissement, ilse disait : « C’est bien simple, j’adore cettefemme. » Au fond, il n’adorait rien du tout. Mais à force dese le répéter, il le crut ; à force de se trouver sur lepassage de Diane, il en devint réellement très amoureux ; àforce de regarder, à la vitrine des papetiers de la rue de Rivoli,les photographies de Diane, de les acheter et de se perdre dans unenouvelle contemplation à domicile, il en devint fou.

Il la contempla prenant son bain, sortant deson tub, se mettant au lit. Il la vit en toilette de soirée, entoilette de ville, en peignoir et sans peignoir. Il la considéradans ses poses les plus plastiques.

Finalement, il se leva après avoir déposé unbaiser chaleureux sur l’un des portraits et s’en fut vers lapendule.

– Zut ! dit-il, je ne vais pas merecoucher. Je n’ai plus qu’une heure et demie à attendre pour allerau rendez-vous des copains. Mais je n’attendrai pas. Je sors toutde suite. En route !

Il alla à la fenêtre, souleva le rideau etdéclara que « c’était dégoûtant, que le jour ne se lèveraitjamais ».

– Et puis, de la nuit, je m’enfiche ! affirma-t-il.

Il passa un costume de cycliste, mais ne sechaussa point. Il marcha « sur ses chaussettes », lessouliers dans les mains. Il ouvrit la porte de sa chambre avecprécaution, arriva sur un palier, descendit des marches, tout celadans la plus grande obscurité. Pold ne devait pas en être à sapremière expédition nocturne.

Il arriva dans le vestibule, tâta le mur de lamain, prit des clefs à un clou. Il ouvrit la porte du perron quidonnait sur le parc. Là, sur les marches du perron, il se chaussa.Puis il fut dans le parc ; il arriva à la grille. Avec sontrousseau de clefs, il ouvrit cette grille. Quand elle fut ouverte,il s’en alla vers une maisonnette, qui était celle du concierge. Ilfrappa à la fenêtre. Il refrappa. La fenêtre s’ouvrit.

Une voix enrouée dit :

– C’est encore vous, monsieur Pold. Vousn’êtes vraiment pas raisonnable. Votre papa finira par tout savoir,et il me mettra à la porte…

– P’pa ne saura rien, si vous ne luidites rien, père Jules.

– Qu’est-ce que vous voulezencore ?

– Parbleu ! ma bicyclette !

Par la porte de la maison, le père Jules passala bicyclette.

– Prenez vite. Il fait un froid de loup.Je vais attraper des rhumatismes…

– Et voilà les clefs. Vous les remettrezdans le vestibule. Bonne nuit, père Jules. Mes amitiés à votrechaste épouse.

Le clair de lune illuminait ces quartiersdéserts. Pold se mit à pédaler avec ardeur. Pas un passant, pas unevoiture. Il s’amusait. Il s’offrait une course de vitesse. Iln’était point pressé, cependant. Il avait rendez-vous à six heuresavec des camarades à l’autre bout de Paris, place d’Italie.

Il avait dépassé la place Victor-Hugo etapprochait de la rue de Villejust, quand il aperçut, au loin, ducôté de la place de l’Étoile, une lumière qui approchait. Ilentendit le trot des chevaux. Il ralentit son allure. La voiturepassa.

Pold ne put retenir une exclamation :

– Tiens ! le cocher deDiane !

Et il continua sa route plus lentement.

– Elle vient des Variétés-Parisiennes, sedit-il. C’est Diane qui rentre chez elle…

Et, tout d’un coup, d’un mouvement presqueinstinctif, il fit demi-tour, suivit la voiture à quelquesmètres.

Il considérait le coupé :

– Elle est là-dedans ! Elle estpeut-être seule là-dedans !

Des idées saugrenues lui montaient au cerveau.Il songeait à des déclarations possibles, à des surprises. Si cettefemme était bien seule dans cette voiture, est-ce que l’occasion delui parler ne s’offrait pas d’elle-même ? Laisserait-iléchapper cette occasion ?

Il était plein d’audace et de timidité. Il nesavait à quoi se résoudre. Cependant, il continuait à pédaler quandmême.

La voiture remontait l’avenue Victor Hugo.Elle la remonta jusqu’aux fortifications.

Soudain, au moment où le coupé approchait dela Muette, Pold, sur sa bicyclette, le dépassa en pédalant detoutes ses forces. Il prit ainsi une grande avance, déboucha sur leboulevard Suchet et redescendit, entra de la même allure dansl’avenue Raphaël.

Le jeune homme n’hésitait plus. Il avait unbut. Il s’était décidé à quelque chose.

Vers la bifurcation de cette avenue Raphaël etde l’avenue Prudhon, il s’arrêta. Il descendit de machine etlongea, sur la gauche, un mur. Le mur était haut, et la crête enétait garnie de tessons de bouteille. Il fit le tour par l’avenuePrudhon.

Là, le mur devenait grille : de hautesbarres de fer terminées en pointe de lance et qui semblaientimpossibles à franchir.

Pold regarda à travers cette grille. La luneéclairait un vaste jardin où apparaissaient, ombres compactes,quelques bouquets d’arbres. Derrière ces arbres, on distinguait lesmurs blancs d’une villa.

Pold marchait toujours, tenant à la main sabicyclette. Il dépassa les murs blancs de la villa, derrièrelaquelle se trouvait un autre jardin. Là, plus de grille, mais unnouveau mur. Celui-ci était beaucoup moins haut que le mur quis’étendait sur l’avenue Raphaël. Au sommet, on distinguait encoredes tessons de bouteille.

Pold passa devant une petite porte ets’arrêta. Il tâta le mur.

– Ce doit être ici, dit-il.

Sa main se promenait sur le mur. Pold ne putretenir une exclamation :

– Ah ! je l’ai !

Et sa main tira du mur une brique.

Rien ne faisait prévoir que Pold connût lejardin et la villa, mais il était évident qu’il connaissait lemur.

Le jeune homme n’avait peut-être pas encorepénétré dans la propriété, mais certainement il avait dû envisagerla possibilité de sauter par-dessus le mur, et il avait étudié cemur. Il posa la brique par terre, mit sa bicyclette au coin de lapetite porte, plaça un pied dans l’excavation qu’il avait faite enretirant la brique, l’enleva, posa l’autre pied sur la selle de sabicyclette. Sa tête dépassa ainsi la crête du mur.

Au-dessus de la porte, il y avait une largecorniche. Les coudes du jeune homme s’appuyaient sur cettecorniche. Il se souleva sur les coudes, se maintint sur un seul etsa main alla chercher la crête. Il tâtonna, puis secoua un tesson,qui céda. Il avait deux points d’appui suffisants : lacorniche et la crête. Il était debout sur le mur quelques secondesplus tard. Sa silhouette se dressa dans la nuit claire, puis Poldplia sur les jarrets et sauta.

Il s’étala assez brutalement. Il fut presqueaussitôt relevé, mais ne put retenir un cri de douleur. Il sepencha et constata qu’un tesson de bouteille lui avait déchiré unmollet, qu’il saignait abondamment et que son bas et sa culotteétaient en lambeaux.

Il banda le mollet blessé avec son mouchoir,puis il s’orienta.

Il avait devant lui deux arbres, deuxmarronniers superbes, dont les hautes branches atteignaient à lahauteur des fenêtres du deuxième étage de la villa. Les arbresétaient à quelques mètres de la maison.

Pold se dirigea vers les arbres, s’approcha dela villa et regarda deux fenêtres restées ouvertes au premierétage.

– C’est ici sa chambre et son cabinet detoilette, se dit-il.

Il était, en effet, suffisamment renseigné parun reporter qui, huit jours auparavant, dans une interview, avaitdécrit le home de Diane, interview qui avait fait le tour de lapresse demi-mondaine.

Pold regarda encore les fenêtres et lesarbres. Puis il se décida, enveloppa un tronc de ses bras vigoureuxet grimpa.

Il atteignit la première branche, puis sehissa jusqu’à une fourche d’où il pouvait plonger son regard dansles deux trous noirs des fenêtres restées ouvertes.

Il s’installa et attendit. L’ombre desbranches le cachait. La clarté de la lune ne venait pas jusqu’àlui.

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