Agatha Christie La troisième fille

— Un instant, chérie… C’est le boulanger – Poirot eut un haut-le-corps offusqué. Ne quittez pas !

Elle abandonna le combiné et se précipita vers le détective qui eut un mouvement de recul instinctif.

— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda-t-elle dans un souffle.

— Un boulanger, protesta Poirot avec amertume, moi !

— Il fallait bien que je trouve une excuse rapide. Pourquoi me faisiez-vous des signes ? Vous avez compris ce qu’elle…

— Vous me raconterez tout cela. Pour l’instant, je souhaiterais que vous trouviez un prétexte qui me permette de rendre visite aux Restarick… Un de vos vieux amis qui sera prochainement de passage dans la région, peut-être ou…

— Laissez-moi faire ! Je trouverai quelque chose. Désirez-vous user d’un nom d’emprunt ?

— Certainement pas ! Essayons de rester le plus simple possible.

Mrs Oliver hocha la tête et retourna vivement au téléphone.

— Naomi ? Je ne me souviens plus de ce dont nous discutions. Pourquoi quelque chose arrive-t-il toujours au moment où l’on commence une bonne petite conversation ! Je ne me rappelle même plus pourquoi je vous avais appelée… Ah ! oui, l’adresse de cette enfant, Thora… je veux dire Norma… et vous me l’avez donnée. Mais il y avait aussi autre chose… Oh ! je me souviens. Un de mes vieux amis, un petit homme des plus fascinants. D’ailleurs, je parlais justement de lui, l’autre jour, à cette soirée. Il s’appelle Hercule Poirot. Le hasard va l’amener non loin de chez les Restarick et il est très désireux de rencontrer le vieux Sir Roderick. Il a beaucoup entendu parler de lui et l’admire profondément à cause de ses découvertes durant la guerre… ou quelque chose comme ça… enfin, bref, il serait très heureux de lui rendre visite et de lui « présenter ses respects » pour reprendre son expression. Pensez-vous que ce soit possible ?… Oui, il arrivera probablement un beau jour, sans crier gare. Priez-les de lui demander de raconter une de ses merveilleuses histoires d’espionnage. Il… quoi ?… Oh ! vos jardiniers ? Oui, bien sûr, vous devez y aller tout de suite. Au revoir.

Elle reposa le combiné et se laissa choir dans un fauteuil.

— Dieu ! Je suis épuisée ! Ai-je été bien ?

— Pas mauvaise.

— J’ai pensé que je ferais mieux de tout mettre sur le dos du vieux gentleman. Ainsi, vous pourrez les voir tous, ce que vous désiriez, n’est-ce pas ? Et une femme peut toujours paraître un peu perdue dans ses propos, lorsqu’il est question de sujets scientifiques. Je vous fais confiance pour inventer une histoire plus plausible. À présent, il faut que je vous raconte ce que Mrs Lorrimers m’a appris.

— Au sujet de la santé de Mrs Restarick ?

— Tout juste ! Figurez-vous qu’elle a souffert d’une maladie mystérieuse… maladie d’estomac à laquelle les médecins ne comprenaient rien du tout. Ils l’envoyèrent dans un hôpital où, sans aucun traitement particulier, à ce qu’il semble, elle s’est remise assez rapidement. Mais, sitôt de retour chez elle, voilà les mêmes symptômes qui réapparaissent !… Les médecins y perdaient leur latin. C’est alors qu’on a commencé à jaser. Une infirmière un peu trop bavarde en a parlé à sa sœur qui en a parlé à une voisine, qui femme de ménage, en a parlé partout où elle se rendait, en soulignant que l’affaire lui paraissait bizarre. On chuchota bien vite que le mari essayait d’empoisonner sa femme. C’est là une hypothèse qui vient naturellement à l’esprit mais, dans ce cas particulier, c’était invraisemblable. Naomi et moi, nous nous sommes demandé s’il ne s’agirait pas de la jeune fille au pair… je dis au pair, mais en fait, elle serait plutôt une sorte de secrétaire, de dame de compagnie attachée au vieux gentleman. Cependant, il n’y a aucune raison pour qu’elle ait administré de l’herbicide à Mrs Restarick.

— J’ai entendu vos suggestions.

— D’ordinaire, les meurtriers ont toujours une raison plus ou moins valable, alors qu’ici…

Poirot l’interrompit :

— On souhaite commettre un meurtre sans avoir eu le courage de le perpétrer.

CHAPITRE III

Mrs Oliver engagea sa voiture dans la cour intérieure de Borodene Mansions. L’emplacement réservé au stationnement était déjà occupé par six véhicules. La nouvelle venue hésita un moment, mais une des autos faisant marche arrière pour s’éloigner, elle se rangea vivement dans l’espace laissé vacant.

La célèbre romancière sortit, claqua la portière et leva les yeux sur la façade du bâtiment qui se dressait dans le ciel. De construction récente, il paraissait uniquement fonctionnel et dépourvu de tout ornement.

Une grande activité régnait alentour. Voitures et piétons entraient ou sortaient de la cour alors que la journée de travail touchait à sa fin.

Ariane jeta un coup d’œil à sa montre. Sept heures moins dix. Elle jugea l’heure idéale, imaginant que les jeunes filles qui travaillent devaient être rentrées chez elles pour refaire leur maquillage, troquer leurs vêtements pour des pantalons aux dessins exotiques ou autre fantaisie et ressortir plus tard, à moins qu’elles ne préfèrent passer la soirée dans leur appartement afin de s’occuper de petits lavages et de rangements. Bref, une heure assez bien choisie pour un visiteur ne voulant pas se casser le nez sur une porte close. L’est et l’ouest du bâtiment offraient la même apparence. Les deux blocs étaient creusés en leur centre de larges portes battantes. Mrs Oliver choisit l’aile gauche mais se rendit vite compte qu’elle se trompait car, là, les numéros allaient de cent à huit cents. Elle repartit donc vers la droite.

Le numéro 67 se situait au sixième étage. La visiteuse pressa le bouton de l’ascenseur dont les portes s’ouvrirent, pareilles à la bouche d’un bâilleur qui menace de se refermer d’un seul coup. L’écrivain se précipita à l’intérieur, terrorisée par cet engin moderne. Bang ! Les battants se refermèrent pour se rouvrir presque aussitôt et Mrs Oliver jaillit de la machine comme un lapin apeuré d’un taillis. Elle suivit le corridor et trouva la porte marquée 67 en chiffres métalliques fixés au centre du panneau. Le 7 tomba de lui-même au moment où elle s’apprêtait à sonner.

— Décidément, cet endroit ne me plaît pas, grogna-t-elle en se penchant avec effort pour ramasser le chiffre et le remettre à sa place.

Elle sonna. Peut-être n’y avait-il personne…

Néanmoins, la porte s’ouvrit presque aussitôt. Une grande fille la regardait. Elle portait un ensemble noir de coupe parfaite, à la jupe très courte, un chemisier de soie blanche et d’élégantes chaussures. Elle était jolie avec ses cheveux noirs coiffés en hauteur, son maquillage discret. Cependant, sans qu’elle pût s’en expliquer la raison, Mrs Oliver demeura sur ses gardes.

— Miss Restarick est-elle chez elle ?

— Non, je regrette. Puis-je lui transmettre un message ?

— Que c’est fâcheux !

La visiteuse montra un paquet mal fermé, enveloppé d’un papier brun.

— Je lui ai promis un livre… Un des miens, qu’elle n’a pas lu. J’espère que je me suis bien souvenue duquel il s’agissait. Elle ne sera pas bientôt de retour, je suppose ?

— Je ne pourrais vous le dire car j’ignore où elle est allée ce soir.

— Je comprends. Vous êtes Miss Reece-Holland ?

La jeune fille eut l’air légèrement surpris.

— En effet.

— Je connais votre père. Je suis Mrs Oliver et j’écris des romans. — Elle chuchota presque ces derniers mots sur un ton de fausse humilité.

— Voulez-vous entrer un moment ?

Mrs Oliver accepta l’invitation et Claudia Reece-Holland la conduisit au salon. Les murs de l’appartement étaient tous ornés d’un papier d’ameublement imitant la boiserie et les meubles, modernes, se composaient d’armoires aux portes à glissières, d’étagères à livres, d’un large divan et d’une table à rallonges. Une affiche représentant un arlequin géant décorait un mur et la peinture au pochoir d’un singe se balançant sur un palmier, s’étalait sur un autre.

— Je suis certaine que Norma sera heureuse d’avoir votre livre, Mrs Oliver. Voulez-vous prendre quelque chose ? Sherry ? Gin ?

La jeune fille s’exprimait avec l’aisance de la parfaite secrétaire.

Mrs Oliver refusa.

— Vous avez une vue splendide, remarqua-t-elle en jetant un coup d’œil au dehors. Le soleil couchant qui inondait la pièce, lui fit cligner des paupières.

— Oui. Ce n’est malheureusement pas aussi agréable lorsque l’ascenseur est en dérangement.

— Je n’aurais jamais pensé que ces engins refusaient parfois de fonctionner… Ils sont tellement… tellement semblables à des robots.

— L’installation, bien que moderne, n’est pas parfaite. Elle nécessite de fréquentes révisions.

Une autre jeune fille surgit dans la pièce.

— Claudia, savez-vous par hasard où j’ai pu mettre…

Elle s’interrompit à la vue de l’inconnue.

Claudia procéda aux présentations.

— Frances Cary… Mrs Oliver. Mrs Ariane Oliver.

— C’est merveilleux ! s’exclama Frances.

C’était une grande fille élancée, avec de longs cheveux noirs mais à qui un maquillage maladroit donnait un visage cadavérique. Ses yeux et ses sourcils étaient légèrement obliques… effet accentué par le mascara… Elle portait un pantalon de velours et un gros pull-over. Elle offrait un contraste frappant avec Claudia, si vive et si femme d’intérieur.

— J’ai apporté un livre que j’avais promis à Norma Restarick, expliqua Mrs Oliver.

— Quel dommage qu’elle ne soit pas encore de retour de la campagne !

— N’en est-elle pas revenue ?

Un moment de silence alourdit l’atmosphère. La romancière eut l’impression que les deux jeunes filles échangeaient un coup d’œil.

— Je pensais qu’elle occupait un emploi à Londres, ajouta Mrs Oliver, désirant paraître surprise.

— C’est exact. Elle travaille pour un décorateur d’appartements, expliqua Claudia. À l’occasion, on l’envoie montrer des échantillons hors de Londres. — Elle sourit. — Nous menons des existences assez séparées, ici. Nous allons et venons à notre guise… sans même nous soucier de laisser un message pour les autres. Mais je n’oublierai pas de lui remettre votre livre lorsqu’elle sera de retour.

Rien ne pouvait être plus naturel que cette explication banale.

Mrs Oliver se leva.

— C’est très aimable à vous.

Claudia l’accompagna à la porte.

— Je dirai à mon père que j’ai fait votre connaissance, remarqua-t-elle. Il est un lecteur assidu de romans policiers.

Refermant la porte sur la visiteuse, elle retourna au salon. Frances, accoudée à la fenêtre, se retourna.

— Désolée, Claudia. Ai-je commis une gaffe ?

— Je lui avais seulement appris que Norma était sortie.

Sa compagne haussa les épaules.

— Je ne pouvais le deviner. Où est cette fille, Claudia ? Pourquoi n’est-elle pas revenue lundi ? Où a-t-elle pu se rendre ?

— Je n’en ai pas la moindre idée.

— Elle a peut-être prolongé son séjour chez ses parents. Elle devait passer le week-end avec eux.

— Elle n’y est pas. Je leur ai téléphoné pour le leur demander.

— Je suppose que ça n’a pas grande importance ?… Cependant, elle est… il y a quelque chose d’étrange dans Norma.

— Pas plus que chez n’importe qui d’autre.

Le ton de Claudia manquait de conviction.

— Oh ! si ! Parfois, elle me donne la chair de poule. Je crains qu’elle ne soit pas très équilibrée.

Brusquement, elle éclata de rire.

— Et vous le savez parfaitement, Claudia, malgré votre entêtement à refuser de l’admettre ; par fidélité envers votre patron, je suppose ?

CHAPITRE IV

Hercule Poirot marchait dans la rue principale de Long Basing, si toutefois on peut appeler ainsi la rue unique d’une agglomération. Long Basing est un de ces villages qui ont tendance à s’allonger sans se préoccuper de s’élargir. On y voit une église impressionnante, avec un énorme clocher et près de laquelle un vieil if très digne domine le cimetière-jardin. De droite à gauche de la rue s’alignent les magasins extraordinairement variés dont ceux de deux antiquaires. L’un semblant s’intéresser exclusivement aux devants de cheminée en bois sculpté, l’autre avouant une préférence marquée pour les vieilles cartes murales, les porcelaines (la plupart ébréchées), les anciennes commodes en chêne rongées par les vers, les étagères couvertes de cristaux et l’argenterie datant de l’époque victorienne, le tout mal mis en valeur faute de place. Il y a encore deux cafés, tous deux assez mal tenus, un magasin où l’on vend des paniers, charmant avec sa grande variété d’articles façonnés à la main, un bureau de poste où l’on achète aussi des fruits, un marchand de tissus, surtout spécialisé en articles de modes avec au milieu, un immense comptoir où s’empilent les chaussures d’enfants tandis que dans un autre coin, on trouve tout ce qui relève de la mercerie. Il faut citer encore un marchand de journaux-papeterie qui s’occupe, en plus, de la vente du tabac et des bonbons. Un magasin de lainages est, sans aucun doute, l’aristocrate du coin. À l’intérieur, deux femmes distinguées, à cheveux blancs, veillent sur une quantité d’étagères bourrées de pelotes de toutes les couleurs et, sur le comptoir, des paniers pleins de patrons. On a ménagé, au fond, un espace réservé à l’art subtil du tricot. Pour ce qui est de l’épicerie, elle s’est transformée en un « supermarket » avec ses paniers métalliques et ses rangées de boîtes de conserves aux emballages agressifs. Enfin, occupant une place à part, une petite boutique offrant au centre de sa vitrine étroite – où s’inscrit en lettres ARTISTIQUES le nom de « Lillah » – un chemisier venu de France qu’une étiquette affirme être « le dernier chic ». Il voisine avec une jupe marine et un pull-over écarlate, le tout disposé en un désordre recherché.

Poirot observa l’ensemble d’un œil indifférent. Il remarqua, au cœur du village, une rangée de maisons étriquées, de style ancien, dont certaines avaient conservé la pureté de ligne datant des rois George mais la plupart révélant des signes d’amélioration qui portaient le cachet de l’époque victorienne, par exemple une véranda, une fenêtre en saillie, une petite serre… La façade d’une ou deux de ces maisons avait été surélevée et semblait donner à leur propriétaire, le droit de réclamer un respect dû à leur allure « à la page ».

Poirot marchait lentement, enregistrant au passage tout ce qu’il découvrait. Si son impétueuse amie, Mrs Oliver, l’avait accompagné, elle lui aurait tout de suite demandé pourquoi il perdait son temps à flâner alors que la maison qui l’intéressait, se situait à un quart de mile des limites du village. Poirot lui aurait alors répondu qu’il tenait à s’imprégner de l’atmosphère locale, ce qui avait parfois une grande importance. À la sortie de la petite agglomération, la transition était brutale. D’un côté, en retrait de la route, se dressaient quelques maisons récemment construites par l’État, précédées chacune d’une pelouse, égayées par leurs portes aux couleurs vives. Au-delà, la campagne s’étalait paisible, avec ses collines et ses haies de buissons et, çà et là, quelques-unes de ces demeures que les agents immobiliers appellent « belles maisons de maître » régnant sur leurs arbres et leurs jardins, empreints de cet air mystérieux particulier aux propriétés privées. Assez loin devant lui, Poirot discerna une habitation à laquelle son dernier étage, sans aucun doute rajouté depuis peu, donnait l’aspect d’une assez extraordinaire construction arrondie. Il s’agissait certainement de l’endroit qu’il désirait atteindre. Le détective arriva à une grille portant le panneau « Crosshedges » et son regard se leva sur la demeure qui datait probablement du début du siècle. Elle n’était ni jolie ni laide : tout simplement ordinaire. Le jardin, par contre, charmait le regard. On devinait qu’à l’origine, il avait été l’objet de beaucoup de soins et d’attentions. Il montrait encore des pelouses bien tondues, un grand nombre de plates-bandes fleuries, d’arbustes disséminés avec goût. Un homme de métier s’occupait sûrement de ce jardin, pensa Poirot et peut-être même les propriétaires y prenaient-ils un intérêt personnel car il venait juste de remarquer, dans un coin près de la maison, une femme penchée sur une plate-bande, occupée, semblait-il, à rattacher des dahlias. Sa tête paraissait une masse d’or éclatant. Elle devait être grande et mince, avec des épaules carrées.

Poirot poussa le portillon et s’avança.

La femme tourna la tête puis se redressa en dévisageant le nouveau venu d’un air interrogateur. Elle ne bougea pas, gardant à la main un sécateur :

— Oui ?

Poirot la salua d’un geste élégant et s’inclina. Les yeux de la femme restaient fixés sur les moustaches du petit homme, comme fascinés.

— Mrs Restarick ?

— Oui. Je…

— J’espère que je ne vous dérange pas, Madame ?

Un léger sourire effleura les lèvres de la maîtresse de maison.

— Pas du tout Êtes-vous…

— Je me suis permis de vous rendre visite. Une de mes amies, Mrs Ariane Oliver…

— Oh ! Vous devez être M. Poiret ?

— Poirot, rectifia-t-il en accentuant sur la dernière syllabe. Hercule Poirot, pour vous servir. Je passai dans la région et je me suis permis de venir avec l’espoir d’être autorisé à présenter mes respects à Sir Roderick Horsefield.

— Oui. Naomi Lorrimers nous a prévenus que vous pourriez arriver à l’improviste.

— J’espère que cela ne vous gêne pas ?

— Pas du tout Ariane Oliver se trouvait ici le dernier week-end. Elle accompagnait les Lorrimers. Ses livres sont des plus spirituels, ne trouvez-vous pas ? Mais, que je suis sotte ! Vous êtes vous-même détective… un vrai détective ?

— Je suis tout ce qu’il y a de plus réel dans le genre détective, répondit Hercule Poirot.

Il remarqua qu’elle réprimait un sourire. En l’observant avec plus d’attention, il nota qu’elle était belle, mais d’une beauté assez artificielle. Ses cheveux dorés étaient si serrés qu’ils en paraissaient empesés. Il se demanda si, au fond d’elle-même, elle possédait une grande assurance ou si elle ne s’appliquait pas plutôt à jouer le rôle de la lady anglaise absorbée dans son jardinage. Il se posa aussi la question de savoir ce qu’avait pu être le passé de cette femme :

— Vous avez là un très joli jardin, Madame.

— Vous aimez les jardins ?

— Pas autant que les Anglais. Dans ce pays, vous avez un talent spécial pour ce qui touche au jardinage. À vos yeux, il possède une valeur particulière, que chez nous, nous n’apprécions pas à ce point-là.

— Vous voulez dire, en France ?

— Je ne suis pas Français mais Belge.

— Oh ! en effet, je crois me souvenir qu’Ariane Oliver a mentionné que vous aviez appartenu à la police belge.

— C’est exact. Je suis un vieux chien policier belge – il émit un petit rire poli et reprit en agitant les mains – mais vos jardins à vous autres Anglais… je les admire. Les races latines préfèrent les architectures régulières, les jardins de Versailles en miniature, et de plus, bien sûr, ils ont inventé le potager qui est très important. Ici aussi, vous avez le potager mais il vous est venu de France et vous n’aimez pas les légumes autant que vos fleurs. Exact ?

— Oui, je crois que vous avez raison. Si vous voulez bien me suivre. Je vous conduirai auprès de mon oncle.

— Je me suis permis de vous importuner dans l’intention de rendre hommage à Sir Roderick mais je tiens à vous rendre hommage à vous aussi, Madame. Je rends toujours hommage à la beauté quand j’ai la chance de la rencontrer. Il s’inclina.

Elle rit, légèrement embarrassée.

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