La mort dans les nuages Agatha Christie

Cette Gladys, une blonde éthérée, affectait des manières hautaines et une voix distante dans l’exercice de sa profession, alors que, dans le privé, elle parlait d’un ton blagueur et enjoué.

— T’en fais pas, ma petite, tout se tassera ! Le singe ne sait sur quel pied danser pour l’instant. Il se demande si cette publicité que tu lui fais tournera à son avantage ou à son détriment. Moi, je crois qu’il ne tardera pas à s’en frotter les mains. A tout à l’heure, chérie. Voici ma vieille rombière qui arrive avec ses yeux de merlan frit. Je parie qu’elle est encore dans une de ces humeurs… Pourvu qu’elle n’ait pas amené son maudit cabot avec elle !

L’instant d’après, Gladys abordait la cliente d’une voix aimable et distinguée :

— Bonjour, madame. Vous n’avez pas votre mignon pékinois aujourd’hui ? Voulez-vous que nous commencions pour le shampooing ? Vous serez ainsi toute prête pour Mr. Henri.

Jane venait d’entrer dans le petit salon voisin où une femme à la chevelure teinte au henné attendait en étudiant son visage dans la glace.

— Mon chéri, ce matin j’ai la figure ravagée, disait-elle à son compagnon.

Celui-ci, d’un air las, tournait les pages d’un magazine vieux de trois semaines. Il répondit, d’un air détaché :

— Tu crois, ma chérie ? Moi, je te trouve comme d’habitude.

Lorsque Jane entra, l’homme cessa de feuilleter le Sketch et dévisagea la jeune fille d’un regard inquisiteur.

— Bonjour, madame, dit Jane avec une amabilité souriante qui, chez elle, était devenue machinale, et ne lui demandait aucun effort. Voilà bien longtemps qu’on ne vous a vue. Sans doute étiez-vous en voyage ?

— Je reviens d’Antibes, répondit la dame aux cheveux teints, qui, à son tour, considéra Jane avec curiosité.

— Quel beau pays ! s’exclama Jane. (Son enthousiasme sonnait faux.) Voyons un peu, madame. Pour cette fois, ce sera un shampooing et une mise en plis, ou bien ferons-nous la teinture ?

Momentanément distraite, la dame se pencha en avant et examina attentivement sa chevelure.

— Oh ! j’attendrai encore une semaine. Mon Dieu ! Quelle tête affreuse j’ai ce matin !

— Chérie, tu ne saurais espérer mieux à cette heure, observa l’ami.

— Attendez que Mr. Georges y ait mis la main, dit Jane.

A nouveau, la dame regarda Jane :

— Dites-moi, mademoiselle, n’étiez-vous pas hier au tribunal d’enquête, appelée comme témoin dans cette affaire de l’avion ?

— Oui, madame.

— Quelle émotion vous avez dû éprouver ! Racontez-moi cela.

— En effet, madame, ce sont des souvenirs désagréables.

Jane s’efforça de satisfaire sa cliente.

Elle entra au cœur du récit, répondant à toutes les questions qu’on lui posait. Comment était la vieille femme ? Y avait-il réellement deux détectives français à bord et cette histoire se rattachait-elle aux scandales du gouvernement français ? Lady Horbury se trouvait-elle dans l’avion ? Etait-elle aussi jolie qu’on le prétendait ? Qui, selon Jane, avait commis le meurtre ? Il paraîtrait que cette affaire serait étouffée pour des raisons politiques, et ainsi de suite. Cette première épreuve fut suivie de nombreux interrogatoires du même genre. Chaque cliente désirait se faire coiffer par la « jeune fille qui se trouvait dans l’avion ». Chacune voulait pouvoir dire à ses amies : « Oh ! ma chère ! Vous savez, la jeune fille chez mon coiffeur, eh bien, c’est la personne qui… ! Parfaitement ! A votre place, j’irais dans cette maison. On y coiffe divinement bien. La petite s’appelle Jane… Elle n’est pas très grande et elle a des yeux magnifiques. Si vous le lui demandez gentiment, elle vous racontera tout ce qu’elle sait de l’histoire. ?

Vers la fin de la semaine, Jane se sentait à bout de nerfs. A la perspective de débiter une fois de plus son récit, elle se sentait prête à crier ou à frapper son interlocutrice à coups de séchoir électrique. Cependant, elle finit par découvrir une façon plus pratique de se calmer. Elle alla trouver M. Antoine et hardiment lui demanda une augmentation de salaire.

— Vous osez me réclamer une augmentation ! Ignorez-vous donc que je vous garde ici par pure bonté d’âme, après ce crime où votre nom s’est trouvé mêlé ? A ma place bien des patrons vous auraient flanquée à la porte séance tenante !

— Je n’en crois pas un mot ! prononça Jane sans se démonter. Vous savez pertinemment que j’attire la clientèle ici. Si vous préférez que je m’en aille, très bien ! J’obtiendrai facilement satisfaction chez Henri ou chez Richet.

— Qui saura que vous travaillez chez eux ? Vous vous donnez, mademoiselle, une importance ridicule !

— J’ai vu quelques journalistes à l’enquête. L’un d’eux se chargera d’annoncer mon changement de maison et fera toute la publicité nécessaire.

Craignant qu’elle n’exécutât vraiment sa menace, M. Antoine céda à contrecœur. Gladys applaudit au succès de son amie.

— Mes compliments, ma chère Jane. Tu t’es admirablement débrouillée. Cette fois, le singe a trouvé à qui parler. Tu as du cran, ma chère, je t’admire !

— Je sais me défendre toute seule, dit Jane avec un coup de menton plein de crânerie. Toute ma vie, j’ai lutté pour ma croûte.

— Pauvre petite ! Je comprends. Mais ne te laisse pas exploiter par Andrew ; il ne t’en estimera que davantage. Dans ce monde, la timidité ne rapporte rien. Par bonheur, ni toi ni moi n’avons froid aux yeux.

Les jours suivants, Jane dévida son petit boniment avec de légères variantes, et s’en tira comme une actrice consommée.

La date du dîner suivi du théâtre, promis par Norman Gaile arriva enfin. Cette soirée fut pour les jeunes gens un enchantement, où toutes les confidences échangées semblaient révéler des sympathies et des goûts communs.

Tous deux raffolaient des chiens et exécraient les chats. Ils détestaient les huîtres et adoraient le saumon fumé. Ils aimaient Greta Garbo et critiquaient Katherine Hepburn. Ils abhorraient les grosses femmes et admiraient les cheveux noirs. Ils ne pouvaient sentir les ongles trop rouges, les voix criardes, les restaurants bruyants et les nègres. Tous deux préféraient l’autobus au métro.

Que deux êtres humains partageassent à ce point les mêmes goûts, cela tenait du miracle !

Un jour, chez Antoine, Jane, en ouvrant son sac, laissa échapper une lettre de Norman. Comme elle la ramassait, ses joues s’empourprèrent. Aussitôt, Gladys lui demanda :

— Comment s’appelle ton bon ami ?

— Je ne sais pas ce que tu veux dire, répondit Jane, en rougissant davantage.

— A d’autres ! Je devine que ce n’est pas une lettre du grand-oncle de ta maman. Je ne suis pas née d’hier. Allons, qui est-ce ?

— C’est… un jeune homme… que j’ai rencontré au Pinet… un dentiste.

— Un dentiste ! s’écria Gladys, suffoquée. Il doit exhiber de superbes dents blanches quand il sourit.

Jane dut admettre que telle était la vérité.

— Il a le teint bronzé et les yeux très bleus, ajouta-t-elle.

— Tout le monde peut avoir la peau bronzée, observa Gladys. Cela peut venir du hâle de la mer, ou d’un flacon à deux shillings onze de chez le pharmacien. Un homme légèrement bronzé, aux yeux bleus, à la bonne heure ! mais un dentiste ! Lorsqu’il voudrait m’embrasser, je m’attendrais toujours à ce qu’il me dise : « Veuillez m’indiquer laquelle de vos dents vous fait souffrir, je vous prie. »

— Tu es sotte, Gladys.

— Oh ! inutile de faire des simagrées. On voit que tu es pincée ! Oui, j’arrive, monsieur Henry… À la façon dont il nous commande, ne dirait-on pas que celui-là sort de la cuisse de Jupiter !

Dans sa lettre, Norman invitait Jane à dîner pour le samedi soir. Ce jour-là, avant d’aller déjeuner, lorsqu’elle reçut son salaire, avec l’augmentation accordée, Jane débordait de joie.

Elle songeait en elle-même :

« Dire que je me suis tracassée pour rien ! Tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes ! »

Décidée à faire une extravagance, elle se rendit au Corner House, où l’orchestre accompagnait le déjeuner de midi. Elle prit place à une table où se trouvaient déjà une femme âgée et un jeune homme. La vieille dame achevait son repas et réclamait l’addition. Elle réunit ses paquets et s’en alla.

Selon son habitude, Jane lisait un livre en mangeant. Levant la tête au moment de tourner une page, elle remarqua le jeune homme assis devant elle. Il l’observait avec insistance, et en cet instant même Jane songea que son visage ne lui était pas tout à fait inconnu.

Leurs regards se croisèrent et le jeune homme s’inclina en disant :

— Veuillez m’excuser, mademoiselle. Ne me reconnaissez-vous pas ?

Jane l’examina plus attentivement. Il avait un visage très juvénile, séduisant plutôt par son expression que par la régularité de ses traits.

— Nous n’avons pas été présentés l’un à l’autre, poursuivit le jeune homme, à moins que l’on puisse appeler une présentation le fait d’avoir tous les deux témoigné au tribunal d’enquête au sujet d’un meurtre.

— Mais oui ! Que je suis donc sotte ! Il me semblait bien vous avoir déjà vu. Vous êtes ?…

— Jean Dupont, répondit le jeune homme avec un aimable salut.

Jane se souvint alors d’une des maximes familières de Gladys :

« Si un homme vous fait la cour, il s’en présente toujours un autre… quelquefois trois ou quatre. C’est la loi de la nature. »

Jusqu’ici, Jane avait mené une vie austère d’employée. Gaie et enjouée, elle n’avait néanmoins pas d’amis du sexe masculin. A présent, elle n’avait qu’à choisir, semblait-il. Le visage de Jean Dupont, lorsqu’il se pencha vers elle, exprimait plus qu’une simple politesse. Le jeune Français paraissait ravi d’être assis en face de la jolie Anglaise.

Cependant, Jane songeait avec défiance :

« C’est un Français. On dit qu’une femme doit sans cesse se méfier d’un Français. »

— Vous êtes toujours en Angleterre ? demanda Jane, tout en se reprochant, en son for ultérieur, l’extrême stupidité de cette remarque.

— Oui, mon père est allé à Edimbourg faire une conférence et nous sommes restés chez des amis. Mais demain nous retournons en France.

— Ah ! je comprends.

— La police a-t-elle procédé à une arrestation ? s’enquit Jean Dupont.

— Non ; depuis quelque temps on ne parle même plus du crime dans les journaux. Sans doute a-t-on abandonné les recherches ?

— Non, non, les policiers ne jettent pas ainsi le manche après la cognée. Ils travaillent en silence… dans l’ombre.

Le jeune homme parlait avec des gestes expressifs.

— Taisez-vous ! lui dit Jane. Vous me glacez le sang !

— Le fait de s’être trouvé à l’endroit où un crime a eu lieu ne procure pas une sensation particulièrement agréable. J’étais encore plus près que vous de la victime, mademoiselle. Je vous avoue que souvent j’éloigne cette pensée…

— A votre avis, qui a tué Mme Giselle ? Je me le suis demandé plus d’une fois.

Jean Dupont haussa les épaules.

— En tout cas, ce n’est pas moi. Elle était vraiment trop laide !

— Vous préféreriez donc tuer une femme jolie ?

— Ce n’est pas cela ! Si une femme est jolie, vous l’aimez… Elle se moque de vous et vous rend fou de jalousie. Alors, par vengeance, vous la tuez !

— Et vous voilà satisfait ?

— Cela, mademoiselle, je ne saurais vous le dire, vu que je ne l’ai jamais essayé.

Il éclata de rire :

— Une vieille guenon comme Giselle, qui prendrait la peine de la supprimer ?

— C’est un point de vue tout personnel, dit Jane, le sourcil froncé. Il est triste de penser, cependant, qu’elle a été jeune autrefois, et jolie peut-être.

— Je sais, je sais. Voilà le grand drame de l’existence, fit-il, soudain grave et songeur.

— On dirait que vous attachez une importance capitale à la beauté féminine.

Le jeune homme s’anima :

— Existe-t-il au monde un plus bel idéal ? Ma façon de voir vous paraît extraordinaire parce que vous êtes anglaise et que dans votre pays les hommes songent d’abord à leur travail, ensuite au sport, et enfin… bien après… à leur femme. Si, si, c’est la vérité. Tenez, un jour dans un petit hôtel, en Syrie, la femme d’un Anglais tomba malade. Le mari devait se trouver à une certaine date dans un coin reculé de l’Irak. Eh bien, croyez-moi si vous voulez, il est parti, abandonnant sa compagne en danger de mort, pour répondre à l’appel du devoir. Tous deux, lui et sa femme, jugeaient cette conduite noble et généreuse. Mais le médecin, qui n’était pas un Anglais, le tenait pour un barbare. Une épouse, un être humain… doit passer avant tout… même avant le travail.

— Je ne suis pas de cet avis, dit Jane. Pour moi, le devoir vient en première ligne.

— Pourquoi ? Voyez, vous aussi partagez ce point de vue. En accomplissant une tâche imposée, on gagne de l’argent… tandis qu’en s’occupant d’une femme et en satisfaisant ses caprices, on en dépense… ce qui est bien plus noble et plus élevé à mon sens.

Jane éclata de rire.

— Après tout, j’aime mieux être considérée comme un luxe et un caprice dans la vie d’un homme que comme un devoir. Je préfère qu’un homme prenne plaisir à m’entourer d’attentions, sans aucune contrainte de sa part.

— Avec vous, mademoiselle, personne, j’en suis sûr, ne saurait agir d’autre façon.

Jane rougit légèrement en écoutant ces compliments proférés d’une voix sincère. Le jeune homme poursuivit :

— C’est seulement mon second voyage en Angleterre. L’autre jour, au tribunal d’enquête, j’ai pris un vif intérêt à étudier l’attitude de trois jeunes et charmantes femmes si différentes l’une de l’autre.

— Comment nous avez-vous jugées ? demanda Jane, amusée.

— Des femmes du genre de lady Horbury ne me disent rien de bon. Elles sont dépensières, extravagantes. On les rencontre souvent autour des tables de baccara… de jolis visages… avec des expressions dures… On ne peut s’empêcher de présumer ce qu’elles deviendront dans… mettons quinze ans… Celle-là vit uniquement pour satisfaire ses passions… elle s’adonne au jeu… et peut-être aux stupéfiants… Au fond, elle ne m’intéresse pas.

— Et miss Kerr ?

— Elle a bien le type anglais ! Les commerçants de la côte d’Azur lui feraient tous crédit sans hésiter, car ils ont du flair. Elle porte des vêtements de bonne coupe, mais un peu trop masculins. Elle marche crânement comme si l’univers lui appartenait…mais sans affectation… C’est tout simplement la vraie Anglaise ; elle sait d’emblée de quelle partie de l’Angleterre viennent ses compatriotes. Je vous l’assure ; j’ai vu tant de ses pareilles en Egypte. « Ah ! les Untel sont ici ? Les Untel du Yorkshire ? ou ceux du Shropshire ? »

Sa mimique était parfaite. Jane riait aux éclats.

— Et moi ? demanda-t-elle enfin.

— Vous ? Je me suis dit : « Que je serais heureux de la revoir un jour ! » Et nous voici assis l’un en face de l’autre.

— Vous êtes archéologue. Vous faites des fouilles, n’est-ce pas ?

Tandis qu’il lui parlait de ses travaux, Jane l’écoutait avec une profonde attention. Enfin, elle poussa un léger soupir.

— Comme vous avez voyagé et que de pays vous connaissez ! Quelle vie fascinante ! Dire que je n’irai nulle part et ne verrai rien de tout cela !

— Vous aimeriez vraiment partir au loin, visiter les contrées sauvages ? Mais, attention ! Il vous serait impossible de vous faire onduler les cheveux.

— Ils frisent naturellement, expliqua Jane.

Ayant consulté la pendule, elle demanda son addition à la serveuse.

Embarrassé, Jean Dupont lui dit :

— Mademoiselle, voulez-vous me permettre… comme je vous l’ai dit, je rentre en France demain. Accepteriez-vous de dîner avec moi, ce soir ?

— Je regrette infiniment, mais c’est impossible. Je dîne en compagnie.

— Ah ! c’est dommage ! Viendrez-vous à Paris bientôt ?

— Je ne crois pas.

— Et moi, je ne sais quand je reviendrai à Londres. C’est triste !

Un moment, il retint dans la sienne la main de la jeune fille.

— J’espère vous revoir tout de même, dit-il. Et ses paroles avaient l’accent de la sincérité.

CHAPITRE XIV : Chez Norman Gaile

Au moment où Jane quittait le salon de coiffure de M. Antoine, Norman Gaile disait, avec une amabilité toute commerciale :

— Votre dent est sensible. Prévenez-moi quand je vous ferai mal.

Sa main experte manipulait le tour électrique.

— Voilà, c’est fini. Miss Ross !

Aussitôt, miss Ross accourut, portant un alliage blanc sur une plaque de verre.

Norman Gaile termina le plombage de la dent, puis il ajouta :

— Voyons : vous devez revenir mardi pour les autres dents, n’est-ce pas ?

La cliente se rinça énergiquement la bouche, puis se répandit en une longue explication. Elle allait en voyage et regrettait de ne pouvoir prendre de rendez-vous. Mais elle lui annoncerait son retour.

Et elle s’enfuit précipitamment de la pièce.

— C’est tout pour aujourd’hui, dit Gaile.

Miss Ross prit la parole.

— Lady Higginson a téléphoné pour annuler son rendez-vous de la semaine prochaine. Elle n’a pas voulu en fixer un autre. Oh ! Et le colonel Blunt ne peut non plus venir mardi.

Les traits de Norman Gaile se rembrunirent. Chaque jour se reproduisaient les mêmes scènes et il recevait les mêmes coups de téléphone. Toutes les excuses s’avéraient bonnes pour annuler les rendez-vous déjà convenus avec le dentiste : un voyage… un rhume… une absence probable.

Norman venait de découvrir la véritable raison de toutes ces défections dans les yeux de sa dernière cliente, au moment où il prenait le tour électrique.

Une frayeur soudaine avait agrandi les prunelles de la femme et Gaile avait lu dans ses pensées. Il aurait pu les traduire ainsi :

« Mais oui, ma chère, il voyageait dans l’avion lors de l’assassinat de cette malheureuse femme. Je me demande… On entend chaque jour parler de gens qui, brusquement, deviennent fous et commettent des crimes les plus horribles. Ce n’est guère rassurant. Si cet homme était un manique de l’homicide ? On dit qu’ils ressemblent à tout le monde… Pour moi, je lui ai toujours trouvé quelque chose de spécial dans le regard. »

— Miss Ross, la semaine s’annonce particulièrement calme, à ce que je vois.

— En effet, pas mal de clientes ont remis leur rendez-vous à plus tard. Cela vous permettra de prendre un peu de repos, monsieur Gaile. Vous avez tant travaillé au commencement de l’été !

— Je crois bien que cet automne je ne me surmènerai pas autant. Qu’en dites-vous, miss Ross ?

L’employée ne répondit pas tout de suite. Elle en fut dispensée par la sonnerie du téléphone et quitta la pièce pour aller y répondre.

Norman jeta quelques instruments dans le stérilisateur et s’abandonna à ses sombres pensées.

— Examinons froidement la situation. Inutile de me leurrer. Ma carrière est fichue. Le plus drôle, c’est que Jane ait bénéficié professionnellement de ce crime. Les clientes affluent dans le salon de coiffure d’Antoine pour la regarder, bouche bée, comme une bête curieuse. Or, je demande à mes clientes d’ouvrir la bouche, ce qui les épouvante. Dans ce fauteuil, on est à la merci de l’homme qui vous soigne. Si le dentiste, atteint de la folie de la persécution, allait brusquement perdre la tête ?

« On se figure d’ordinaire que le meurtre commis, tout rentre dans l’ordre. Rien n’est plus faux ! Un meurtre entraîne maintes complications inattendues… Revenons à la réalité. En tant que dentiste, je n’ai plus qu’à fermer boutique. Que se passerait-il si on arrêtait lady Horbury ? Mes clients reviendraient-ils ? J’en doute fort. Une fois la dent cariée… Bah ! Que m’importe ? Mais si, je tiens à réussir dans ma profession… à cause de Jane. Elle est adorable et je l’aime. Malheureusement, il faut attendre… »

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