Le Kama Sutra

Chapitre 9De l’auparishtakai ou congrès buccal.

Il y a deux sortes d’eunuques, les uns déguisés en hommes, lesautres en femmes. Les eunuques déguisés en femmes imitent celles-cien tout : costume, parler, gestes, gentillesse, timidité,simplicité, douceur et modestie. Les actes qui s’opèrent sur lejaghana ou partie médiane des femmes se font dans la bouche de ceseunuques : c’est ce qu’on appelle Aupahshtaka. Ces eunuquestrouvent dans le congrès buccal un plaisir d’imagination, en mêmetemps qu’un gagne pain, et ils mènent la vie des courtisanes,surtout ceux qui sont déguisés en femmes.

Les eunuques déguisés en hommes tiennent leurs pratiquessecrètes, et quand ils veulent exercer une profession, ilschoisissent celle de masseur. Sous prétexte de vous masser, uneunuque de cette sorte embrasse et attire à lui les cuisses de sonclient, puis il lui touche les attaches des cuisses et le jaghana,ou les parties centrales du corps.

Si, alors, il trouve le Lingam en érection, il le presse de sesmains et le frotte pour le maintenir dans cet état. Si, après celaet connaissant son intention, le client ne dit pas à l’eunuque decontinuer, celui-ci prend sur lui de le faire et commence lecongrès. Si, au contraire, le client lui ordonne d’agir, il s’yrefuse et ne consent enfin qu’avec difficulté.

Suit alors une série de huit opérations pratiquées l’une aprèsl’autre par l’eunuque, savoir :

Cette pratique paraît avoir été usitée très anciennement danscertaines parties de l’Inde. Le Shushnata, un ouvrage de médecinequi remonte à deux mille ans, décrit, au nombre des maladies dontil traite, la blessure faite au Lingam par les dents. On trouve destraces de cette pratique jusque dans le VIIe siècle ; ilexiste, en effet, des scènes d’Aupahshtaka dans les sculptures deplusieurs temples de Shaiva à Bhuvaneshwara, près de Kattak, dansl’Orissa, qui ont été construits vers cette époque. De tellesscultures sur de tels édifices donnent à penser que cette pratiqueétait alors très populaire dans certaines régions. Il ne paraît pasqu’elle soit aussi en faveur aujourd’hui dans l’Hindoustan : elle apeut-être cédé la place à la sodomie, introduite depuis la périodemahométane.

Congrès nominal. \\ Lorsque, tenant le Lingam de l’homme avecsa main, et le plaçant entre ses lèvres, l’eunuque le frôle de sabouche, cela s’appelle congrès nominal. Mordillage des côtés. \\Lorsque, couvrant l’extrémité du Lingam avec ses doigts rassemblésen forme de bouton de fleur, l’eunuque en presse les côtés avec seslèvres, en se servant aussi des dents, cela s’appelle Mordillagedes côtés. Pression extérieure. \\ Lorsque, sollicité de continuer,l’eunuque presse le bout du Lingam avec ses lèvres serrées et lebaise comme s’il voulait le tirer, cela s’appelle pressionextérieure. Pression intérieure. \\ Lorsque, sur une nouvelleinvitation de poursuivre, il introduit le Lingam plus avant dans sabouche, le presse avec ses lèvres et ensuite le fait sortir, celas’appelle pression intérieure. Baiser. \\ Lorsque, tenant le Lingamdans sa main, l’eunuque le baise comme s’il faisait la lèvreinférieure, cela s’appelle baiser. Polissage. \\ Lorsque, aprèsl’avoir baisé, il le caresse partout avec sa langue, etparticulièrement sur l’extrémité, cela s’appelle polissage. Succionde la mangue. \\ Lorsque, continuant de la sorte, il en introduitla moitié dans sa bouche, le baise et le suce avec force, celas’appelle succion de la manque. Absorption. \\ Et enfin, lorsque,du consentement de l’homme, l’eunuque introduit le Lingam toutentier dans sa bouche et le presse jusqu’à la racine comme s’ilallait l’avaler, cela s’appelle absorption.

Chacune de ces opérations terminée, l’eunuque exprime son désird’en rester là ; malgré la première, le client veut laseconde, puis la troisième, et ainsi de suite.

On peut aussi, pendant cette espèce de congrès, frapper,égratigner, etc.

L’Auparishtaka est également pratiqué par des femmes dissolueset libertines, et par des servantes non mariées, qui vivent de laprofession de masseuse.

Les Acharyas (anciens et vénérables auteurs) sont d’avis que cetAuparishtaka est l’affaire d’un chien et non celle d’un homme,parce que c’est une pratique basse et prohibée par la SainteÉcriture, et parce que l’homme lui-même souffre en mettant sonLingam en contact avec les bouches des eunuques et des femmes. MaisVatsyayana soutient que les prohibitions de la Sainte Écriture nes’appliquent pas à ceux qui fréquentent les courtisanes, et que lapratique de l’Auparishtaka n’est défendue qu’avec les femmesmariées. Quant au mal qui peut être fait à l’homme, il est aisémentremédiable.

Les gens de l’Inde orientale ne s’adressent pas aux femmes quipratiquent l’Auparishtaka.

Les gens d’Ahichhatra s’adressent à ces femmes, maiss’abstiennent de tout commerce avec la bouche.

Les gens de Saketa ont avec ces femmes toute espèce de commercebuccal, tandis que ceux de Nagara s’en abstiennent, mais font toutle reste.

Les gens du pays de Shurasena, sur la rive méridionale duDjoumnah, font tout sans hésitation, car, disent-ils, les femmesétant malpropres de nature, personne ne peut être certain de leurcaractère, de leur pureté, de leur conduite, de leurs pratiques, deleurs confidences ou de leurs discours. Il n’y a Pas lieu, pourcela, de les délaisser ; en effet, la loi religieuse, surl’autorité de laquelle elles sont réputées pures, établit que lepis d’une vache est propre au moment où on la trait, quoique labouche d’une vache, et aussi la bouche de son veau, soientconsidérées comme malpropres par les Hindous. De même un chien estpropre lorsque à la chasse il s’empare d’une biche, quoique lanourriture touchée par un chien soit d’ailleurs considérée commetrès malpropre. Un oiseau est propre quand il fait tomber un fruitd’un arbre en le becquetant, quoique les objets mangés par descorbeaux ou autres oiseaux soient considérés comme malpropres. Labouche d’une femme, aussi, est propre pour donner ou recevoir desbaisers, et pour d’autres actes semblables au moment du commercesexuel. Vatsyayana, en fin de compte, estime que, dans toutes cesmatières d’amour, chacun doit agir conformément aux usages de sonpays et à sa propre inclination.

Il y a aussi, sur ce sujet, des versets dont voici le texte:

« Les serviteurs mâles de certains hommes pratiquent avec leursmaîtres le congrès buccal. Il y a aussi des citoyens qui, seconnaissant bien les uns les autres, le pratiquent entre eux.Certaines femmes du harem, lorsqu’elles sont amoureuses, agissentde la bouche sur les Yonis l’une de l’autre, et certains hommesfont la même chose avec les femmes. Pour faire ceci (c’est-à-direpour baiser le yoni), on imitera le baiser sur la bouche. Lorsqu’unhomme et une femme sont couchés en sens inverse, c’est-à-dire latête de l’un vers les pieds de l’autre, et se livrent à cetteespèce de congrès, cela s’appelle le congrès du corbeau. » Cessortes de choses passionnent tellement certaines courtisanes,qu’elles abandonnent des amants distingués, honnêtes et instruits,pour s’attacher à des personnes de basse condition, telles que desesclaves et des conducteurs d’éléphants. L’Auparishtaka, ou congrèsbuccal, ne doit jamais être pratiqué par un Brahmane lettré, par unministre chargé des affaires d’un État, par un homme de bonneréputation ; car, si la pratique en est permise par lesShastra, il n’y a pas de raison pour qu’on la mette en œuvre, si cen’est dans les cas particuliers. Ainsi, par exemple, on mentionnedans les livres de médecine le goût, la force et les qualitésdigestives de la viande de chien, mais il ne s’ensuit pas que lesage doive en manger. Par contre, il y a des hommes, des lieux etdes temps à l’égard desquels on peut user de ces pratiques. Unhomme doit, en conséquence, considérer le lieu, le temps et lapratique qu’il s’agit d’opérer, si elle convient à sa nature et àlui-même ; après quoi il pourra ou non s’y livrer, selon lescirconstances. Mais après tout, ces choses étant faites secrètementet l’esprit de l’homme étant variable, comment savoir ce que feraune personne dans tel ou tel temps et pour tel ou telobjet ?

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