Le Mystérieux Docteur Cornélius – Tome II

CHAPITRE III – Pour une femme

Le milliardaire Fred Jorgell avait pourprincipe que, si l’on veut être bien servi, il faut payer largementses serviteurs ; aussi tous ceux qui l’approchaient, depuisles ingénieurs de la Compagnie des paquebots Éclair jusqu’auxmoindres domestiques, étaient-ils magnifiquement appointés. Leconcierge même du palais était un véritable personnage et lessommes qu’il touchait chaque année, en y comprenant des bénéficesde divers genres, égalaient les appointements d’un général ou d’undirecteur de ministère de notre vieille Europe.

Ce concierge se nommait Edward Edmond et étaitd’origine irlandaise. Il y avait près de dix ans qu’il était auservice de Fred Jorgell, qui n’avait jamais eu contre lui lemoindre sujet de plainte et qui le tenait en grande estime. C’étaità Edward Edmond qu’était dévolue l’importante fonction de recevoirle nombreux courrier du milliardaire et de trier les lettres. Et ils’en acquittait à la satisfaction générale.

Au physique, Edward Edmond était un gaillardde belle prestance et de mine joviale, ses traits réguliers étaientencadrés de favoris blonds et il y avait dans l’ensemble de saphysionomie une expression de franchise, de santé heureuse et debonne humeur qui le rendait de prime abord sympathique à tout lemonde.

Edward Edmond déclarait lui-même qu’il étaitle plus heureux des hommes. Il n’avait pas de soucis, son travailn’avait rien d’absorbant, et il plaçait chaque année des sommesassez importantes. Il attendait patiemment que ses économieseussent atteint un certain chiffre qu’il s’était fixé pour seretirer dans son pays et y mener l’existence paisible durentier.

Brusquement, le caractère de ce serviteurmodèle se modifia du tout au tout. Edward Edmond devintmélancolique, distrait. Il ne s’occupa plus de ses fonctions qued’une façon machinale et il cessa de parler du projet d’allerhabiter l’Irlande qui faisait autrefois le fond de sesconversations. Il avait suffi d’un événement presque insignifiantpour troubler la béatitude de cette sereine existence.

Un soir, poussé par le désœuvrement, EdwardEdmond était entré dans un music-hall presque exclusivementfréquenté par des matelots de toutes les nations ; il sedivertit extraordinairement aux grimaces de comiques irlandaisvêtus de complets en toile à matelas et grotesquement coiffés dechapeaux hauts de forme en paille. Puis ce fut un chœur demusiciens noirs en habit rouge et vert qui jouèrent du banjo etexécutèrent des danses excentriques. Il y eut encore unhomme-serpent qui, à force de s’amincir par des déhanchementsgradués, arrivait à entrer dans une énorme carafe de cristal où saface maquillée apparaissait hideuse comme celle d’un pitre fœtusdans son bocal. Il y eut un tireur canadien au coup d’œilinfaillible qui, d’une balle de sa carabine, cassait, à trentemètres, au ras des lèvres, la pipe que fumait paisiblement sonassocié.

Mais l’assistance réclamait à grand tumulte lacélèbre Dorypha, la danseuse espagnole, dont le nom s’étalait enmajuscules énormes sur l’affiche. Elle parut : un tonnerre debravos salua son entrée, puis tout le monde redevint silencieux.Edward Edmond lui-même, à la vue de cette créature, se sentit agitéd’un étrange frisson.

Dorypha n’avait pas plus de vingt ans. C’étaitune gitane blonde aux grands yeux noirs dévorateurs sous le veloursde leurs longs cils. Décolletée jusqu’aux pointes roses de sesseins menus, elle portait un corsage très long qui dessinait sataille de guêpe et faisait valoir les rondeurs de sa croupe presquetangible aux regards sous une courte jupe de soie noire pailletéed’or.

Elle dansa le tango, accompagnée de deuxguitares et d’une mandoline qui semblaient gémir d’amour pendantque la jeune femme, voluptueusement renversée, faisant rouler seshanches, suggérait, par une série de mimiques passionnées, toutesles tortures et tous les délices des étreintes voluptueuses. Tantôtelle feignait de tomber comme une femme qui s’abandonne aux bras deson amant, puis elle se raidissait toute, la chair vibrante, à demipâmée.

Edward Edmond n’avait jamais éprouvé sifoudroyante sensation. Ses yeux ne quittaient pas la grosse roserouge piquée dans cette chevelure d’un blond roussi par les feux del’enfer. Sa langue se collait à son palais, ses regards brillaientde luxure. Il pensait qu’un seul baiser de cette femme seraitcapable de rajeunir les vieillards et de réveiller les mortsendormis dans leurs tombeaux.

D’ailleurs, dans toute la salle, lesspectateurs haletants déliraient, le cœur bondissant, la cervellechavirée par la vue de cette sorcière blonde qui semblait résumeren elle tous les piments sucrés de la féminité, toute la douceur ettoute la fougue brutale des caresses.

La danse finit au milieu du vacarme desovations et la señora Dorypha, les seins moites de la fatigue de ladanse, descendit rose et souriante pour faire la quête. Elle sefaufilait comme une couleuvre entre les groupes, et de son corpsardent s’échappait un affolant parfum d’œillet, de poivre et depraline. Les sous, les piastres, les dollars tombaient dru commegrêle dans le tambour de basque qu’elle tendait avec un sourireingénu, et elle remerciait gracieusement, presque timidement, seslongs cils noirs pudiquement baissés, tandis que les coins deslèvres rouges, grasses et arquées, se relevaient dans uneexpression d’une canaillerie décevante qui démentait la faussecandeur du regard.

Edward Edmond donna pour sa part un aigle d’oret il en fut remercié par la plus coquine des œillades. Il sentit àcette minute que cette femme ferait de lui ce qu’elle voudrait,qu’il était à elle tout entier et que rien ne pourrait arracher deson cœur cette passion qui y avait grandi avec une foudroyanterapidité et qui maintenant y était enracinée pour toujours.

Dès lors, il ne quitta plus le music-hall. Ilaccabla la belle Dorypha de cadeaux, de bouquets, de bijoux, mais,toujours provocante, elle se refusait, non sans un sourireaguicheur, qui, mieux que des paroles, promettait que sa résistancene serait pas éternelle.

Au bout d’un mois, les économies d’EdwardEdmond étaient profondément entamées, mais il avait triomphé. LaDorypha était à lui et quand, un matin, il sortit de la chambre dela danseuse, les reins cassés par une fatigue à la fois douloureuseet voluptueuse, il se regardait comme le plus heureux deshommes.

Quelques semaines passèrent encore.L’Irlandais menait une existence ardente, fiévreuse, qui ne luilaissait ni le temps de penser ni celui de réfléchir, et il futtout surpris lorsque, à la banque où il avait déposé son avoir, onlui dit un jour qu’il ne restait plus à son actif qu’une sommeinsignifiante. Il alla conter ce malheur à Dorypha, mais ladanseuse l’accueillit avec un éclat de rire gouailleur.

– J’en suis bien fâchée pour toi, luidit-elle, mais si tu es pauvre, tu ne peux continuer à rester monamant. J’ai toutes sortes de désirs et toutes sortes de besoins,moi. Il me faut de l’argent, beaucoup d’argent. Ne t’ai-je pas étéfidèle jusqu’ici ?… Trouve de l’argent et je continuerai àêtre pour toi ce que j’étais par le passé… Mais un homme qui n’apas le pouvoir de satisfaire mes caprices n’est pas digne dem’avoir pour maîtresse.

– C’est bon, murmura l’Irlandais d’un airsombre, j’en aurai, de ce maudit argent !

Ce jour-là il emprunta une centaine de dollarsà des amis, se rendit dans un tripot qu’il connaissait, joua etgagna ; mais cette ressource était précaire. Huit jours nes’étaient pas écoulés que les grecs du tripot, qui d’abordl’avaient laissé faire quelques gains pour l’amorcer, avaiententièrement raflé le peu qu’il possédait encore.

Dorypha ne tenait aucun compte de sessacrifices. Cet argent, qui coûtait si cher, elle le dépensait enfantaisies, en objets inutiles que très souvent elle jetait dans uncoin sans même les avoir regardés. Et elle lui disait de sa voixtranquille :

– Que veux-tu, ce n’est pas de ma faute,à moi, si je suis ainsi faite. Si tu ne peux pas y parvenir,laisse-moi, il ne manque pas d’adorateurs qui voudraient bien êtreà ta place !

Littéralement ensorcelé, Edward Edmond enétait arrivé aux pires expédients. Un jour, ayant affaire dans lesappartements de miss Isidora, il vola une bague en diamants oubliéepar la jeune fille dans une coupe. Quelques heures après, ilvendait le bijou à un receleur pour cinq cents dollars, le quart desa valeur. Muni de cet argent, il se rendit au tripot, sepersuadant à lui-même qu’il gagnerait la forte somme et qu’ilpourrait racheter la bague.

Mais en franchissant le seuil de la longuesalle où des aigrefins de toutes les nations jouaient au baccara,au bridge et à l’écarté dans un tumulte de vociférations, d’éclatsde rire et d’injures, il se sentit atteint d’un funestepressentiment. Il s’assit néanmoins à une table de jeu et toutaussitôt les grecs ou, comme on dit en Amérique, les« gamblers » papillonnèrent autour de ses bank-notes.Deux heures ne s’étaient pas écoulées qu’il avait perdu nonseulement ses cinq cents dollars, mais encore cent dollars surparole. Il était désespéré.

– Je suis fini, songea-t-il, déshonoré,il ne me reste plus qu’à me faire sauter la cervelle.

Il prit dans sa poche la photographie deDorypha pour la regarder encore une fois, furtivement, dans uncoin, puis s’assurant que son browning était bien dans la poche deson pardessus, il se faufila dans les couloirs qui aboutissaient àun morne petit jardin situé derrière la salle de jeu. Il étaitcalme maintenant comme un homme dont la résolution est prise. L’airglacé de la nuit rafraîchit délicieusement son front brûlant, et ilécoutait comme dans un rêve la voix lointaine des joueurs, qui luisemblait venir comme d’un autre monde.

– Allons, murmura-t-il avec effort, toutest dit, il faut en finir ! Adieu, Dorypha !

Et il prit son arme dans sa poche et s’assurade son bon fonctionnement.

Mais à ce moment une ombre bondit de derrièreun massif. Edward Edmond se sentit le poignet broyé par une main defer. Il lâcha le browning sans même avoir la pensée de résister,tant il avait été pris à l’improviste. Son agresseur, le laissantpresque aussi brusquement qu’il l’avait empoigné, ramassa lerevolver qui était tombé dans l’herbe, le mit dans sa poche, puisdit d’un ton très calme :

– J’ai à vous parler et je vous défendsde vous tuer avant d’avoir entendu ce que j’ai à vousdire !

– Que me voulez-vous ! murmuraEdward Edmond d’une voix étranglée. Rien maintenant ne peutm’intéresser.

– Eh ! eh ! cela dépend, ricanal’inconnu. Master Edward Edmond, sachez que je connais votresituation. Vous vous êtes endetté à cause d’une femme. Vous avezvolé une bague à votre maîtresse, miss Isidora.

– Qu’est-ce que cela peut vousfaire ? Et puis d’abord, ce n’est pas vrai…

– C’est très vrai.

– Mêlez-vous donc de vos affaires !Je ne vous connais pas, moi, je ne vous demande rien !

– Eh bien, moi, je vous connais et jevous offre quelque chose. Que diriez-vous si, à l’instant même, jevous mettais dans la main un beau billet de milledollars ?

Comme Edward Edmond demeurait silencieux,l’inconnu continua d’un ton plus pressant :

– Que diriez-vous encore si je vousmettais à même de gagner chaque mois une pareille somme ?Auriez-vous encore l’idée de vous suicider comme un imbécile ?La belle Dorypha se moquerait de vous et elle aurait, certes, bienraison.

– Ne vous raillez pas de monmalheur ! Mais si vous avez une proposition sérieuse à mefaire, faites-la vite.

L’inconnu avait tiré d’un portefeuille unebank-note qu’il s’amusait à froisser entre ses doigts.

– La preuve, reprit-il, que maproposition est très sérieuse, c’est qu’il dépend d’un mot de vousde toucher immédiatement les mille dollars que voici.

– Que faudra-t-il faire pourcela ?

– Peu de chose, dit l’inconnu en baissantla voix. Vous êtes au service de Fred Jorgell. Il faudra simplementme permettre d’examiner les lettres qui lui parviennent et medonner certaines d’entre elles.

– C’est impossible, s’écria Edward Edmonddans une dernière révolte de sa probité à demi vaincue,demandez-moi autre chose, mais je ne veux pas trahir mon maître.Fred Jorgell a été très bon pour moi…

– Ce n’est pas si grave que vousl’imaginez, fit le tentateur qui continuait à froisser la bank-noteavec un crissement de soie énervant, vous ne causerez aucun tort àFred Jorgell, je suis tout simplement un détective privé au serviced’une agence. J’ai besoin de certains renseignements. Si vous nevoulez pas me les procurer, je les aurai d’une autre façon, voilàtout.

Edward Edmond était plus qu’à demipersuadé.

– Si je croyais, murmura-t-il avechésitation, que cela ne dût pas causer préjudice…

– Mais aucun. Vous avez vraiment uneconscience trop timorée. Tout le monde fait cela. Fred Jorgelllui-même sait fort bien que toutes ses démarches sont épiées, quetoutes ses lettres sont lues par des agents au service de sesadversaires financiers ; mais il s’en moque, personne ne peutfaire sérieusement de tort à un homme comme lui…

Cet argument fut décisif. L’Irlandais avaitsouvent entendu Fred Jorgell lui-même tenir un pareil raisonnementen sa présence.

– Eh bien, soit ! s’écriabrusquement l’amant de la Dorypha, j’accepte aux conditions quevous m’avez proposées. Mille dollars maintenant et autant chaquemois.

– C’est convenu. Voici votre premièrebank-note. Vous aurez désormais ma visite régulière aux heures ducourrier, et si par hasard on remarquait mon assiduité, vous diriezque je suis un beau-frère ou un cousin venu d’Irlande, qui chercheà se placer. Ah ! encore une recommandation : du momentoù vous entrez dans ma combinaison, je vous défends de remettre lespieds dans ce tripot. Il n’y vient que des filous… Avant huit joursvous vous retrouveriez dans la même situation et c’est ce que je neveux pas !

L’Irlandais ne fit plus aucune objection. Surl’invitation de l’inconnu il quitta le tripot, et les deux hommes,pour sceller leur entente, ne se séparèrent qu’après avoir bu unwhisky au comptoir d’un bar du voisinage.

– Quel est votre nom ? dit EdwardEdmond, au moment où ils allaient se séparer. Je tiens à leconnaître pour vous recevoir quand vous viendrez me demander.

– Slugh ! répondit brièvementl’inconnu.

Et il s’éloigna d’un pas rapide.

Dès le lendemain, le concierge deMr. Fred Jorgell reçut, chaque jour régulièrement et auxheures d’arrivée des courriers, le mystérieux Mr. Slugh, quine faisait dans la loge qu’un très rapide séjour. Il examinaitméticuleusement la suscription et les divers cachets de chacune desmissives qui lui étaient remises ; mais il n’emportait quecertains plis et, de préférence, ceux qu’on avait expédiés duCanada, qui étaient généralement adressés à Agénor Marmousier.

Aussi le poète, qui attendait avec impatiencedes nouvelles de lord Burydan et d’Oscar, éprouva-t-il une vivesurprise, bientôt changée en inquiétude, en voyant qu’ils nedonnaient pas signe de vie. Il fit part de cette situation à Andréede Maubreuil et à Frédérique. Les deux jeunes filles furentsérieusement alarmées. Pour que le bossu ne donnât pas de sesnouvelles, il fallait qu’il eût été victime de quelque catastrophe.Sans oser se l’avouer, elles tremblaient que les bandits de la MainRouge n’eussent fait disparaître le courageux gavroche.

Leur crainte, d’ailleurs, était en partie bienfondée, car toutes les lettres volées par Slugh étaient aussitôttransmises au Dr Cornélius, qui se trouvait aussi admirablementinformé des faits et gestes et même des intentions de sesadversaires.

Pourtant ces précautions faillirent être misesen défaut. Un jour que Slugh se trouvait dans le bureau duconcierge, la sonnerie du téléphone retentit. C’était Agénor quel’on demandait à l’appareil.

Edward Edmond allait mettre le Français encommunication avec son correspondant inconnu lorsque Slugh sesaisit brutalement du récepteur de l’appareil et le porta à sonoreille.

– M. Agénor Marmousier ? répétaune voix lointaine.

– Qui est-ce qui le demande ? fitSlugh.

– Ses amis Oscar Tournesol et lordBurydan.

– C’est que M. Agénor n’est plusici, il a quitté l’Amérique depuis quelques jours et il estretourné en France.

– Voilà qui est singulier, reprit la voixd’un air mécontent. Puisqu’il en est ainsi, mettez-moi encommunication avec Mr. Fred Jorgell, lui-même, vous lui direzque c’est son ancien protégé, Oscar Tournesol, qui le demande.

Slugh laissa s’écouler un certain temps pourfaire croire qu’il avait prévenu le milliardaire, puis il reprit laconversation commencée dans l’appareil.

– Mr. Fred Jorgell est trèsmécontent. Il ne désire avoir désormais aucune relation avec vous.Il est très irrité que vous l’ayez quitté sans le prévenir.Écrivez-lui ou venez le trouver, si vous désirez avoir de plusamples renseignements !

Puis Slugh, pour couper court à de nouvellesquestions, raccrocha le récepteur. Se tournant ensuite vers EdwardEdmond, auquel maintenant il commandait en maître :

– Faites bien attention à ceci, luidit-il, c’est que du jour où un de ces deux individus, lord Burydanou Oscar Tournesol, réussirait à entrer en communicationtéléphonique avec Mr. Fred Jorgell ou son secrétaire Agénor,votre pension de mille dollars par mois serait radicalementsupprimée. Vous voilà prévenu. Il en serait de même, bien entendu,si vous laissiez passer sans me la remettre une des lettres que jevous ai signalées.

L’amant de la belle Dorypha s’inclinaobséquieusement. Il comprenait, mais un peu tard, qu’en la personnede Slugh il s’était donné un maître impérieux et tyrannique à ladiscrétion duquel il se trouvait entièrement.

Slugh se retira après cet avertissement,laissant Edward Edmond livré à ses réflexions. L’affilié de la MainRouge avait à peine tourné les talons qu’Agénor entra dans lebureau.

– Il n’y a rien pour moi, aujourd’hui,monsieur Edward ? demanda-t-il.

– Rien, monsieur, répondit Edward d’unevoix morne.

– Tant pis ! S’il y avait une lettrepour moi, vous me la monteriez immédiatement.

Agénor regagna sa chambre très soucieux. Lepoète avait des remords. Lors de sa visite à la buvette duGrand Wigwam, il n’avait songé qu’au salut de ses amistraqués par la police et avait complètement oublié la mission dontmiss Isidora l’avait chargé au sujet de son frère Baruch ;mais il avait bien vite réfléchi que, placé sous la protection delord Burydan, l’aliéné ne pouvait être tombé en de meilleuresmains. Et comme il comptait avoir le lendemain même une lettred’Oscar, il s’était contenté de dire à miss Isidora qu’on ignoraitce que son frère était devenu, se réservant de dire la vérité à lajeune fille dès qu’il pourrait lui apporter une certitude.

L’absence de lettres et de nouvelles d’Oscaret de lord Burydan le mettait dans le plus cruel embarras. Il sereprochait d’avoir peut-être causé la mort du dément par sanégligence et, lorsque miss Isidora le chargeait d’ordonner desrecherches au sujet de l’aliéné, il ne savait quelle contenancetenir et baissait la tête, tout honteux.

Depuis le drame dont avait été le théâtre leLunatic-Asylum, Agénor avait complètement perdu le sommeil etl’appétit.

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