Chapitre 1
Il avait vingt-cinq ans. André était son nom. Fils d’uncultivateur aisé, et bien que n’ayant jamais foulé l’asphalte desvilles, il y avait en lui quelque chose du citadin : aisancedans les mouvements, souplesse du corps, manières distinguées.
Ses mains, habituées à manier les instruments aratoires, étaientpetites néanmoins. Il avait la taille élancée et bienproportionnée ; ses épaules, que des fardeaux trop pesantsn’avaient jamais fatiguées, ne montraient point cette carrure,souvent exagérée de la plupart de nos paysans-laboureurs.
Son teint rose et frais avait résisté au soleil qui bronze lesvisages et au hâle qui les ride. Une forêt de cheveux châtain claircouronnait son front élevé, uni comme un marbre poli. Ses grandsyeux bleus, rêveurs et pleins de pensées, étonnaient par leuréclat, attiraient par leur douceur. Sa physionomie était grave,réfléchie, mais en même temps sympathique et bienveillante.
S’il ne riait pas à propos de tout, et même à propos de rien, sabouche, peu habituée au pli du sourire, n’avait jamais connu celuidu dédain.
Pour tout le monde André se montrait bon, affectueux, serviable,dévoué. Toujours disposé à venir en aide aux autres, il s’oubliaitsouvent lui-même. Se rendre utile et agréable au plus grand nombreétait considéré par lui comme un devoir dans l’accomplissementduquel il trouvait son plus grand plaisir.