CONCLUSION
Que dirai-je encore ?M. Saint-Émilion réclama à la chancellerie, et on lui renditson nom avec éclat. Le château de Montdidier lui fut adjugé pour unprix bien au-dessous de sa valeur ; et il devint un séjourdélicieux où nous passâmes l’été, en compagnie de l’abbé Raymond,qui consentit enfin à quitter sa cure pour prendre celle deMontdidier. Mademoiselle Saint-Émilion, ou plutôt mademoiselle deMontdidier, passionnée pour les fleurs, s’était fait faire uneadmirable terrasse, toute garnie de plantes rares et odorantes.C’était là qu’elle se plaisait à s’asseoir chaque jour ;c’était là que nous aimions à venir pendant les vacances, Oscar etmoi, car j’étais entré à la pension du jeune de Montdidier, et mesprogrès étaient si rapides que je l’eus bientôt rattrapé.
Quand j’eus fini mes études,M. de Montdidier, toujours reconnaissant, me réservaitune surprise qui me fut bien agréable, plus encore parce quec’était une grande preuve d’affection que parce que ma fortune setrouvait par là fixée désormais. Ma mère était morte… pauvremère !… morte dans nos bras, entourée d’amis, et après m’avoirdonné sa bénédiction.
– Te voilà orphelin, me ditM. de Montdidier… tu n’as plus de famille… je veux que lanôtre soit tout à fait la tienne.
Et il courut chez son notaire où il fit unacte d’adoption en ma faveur. Depuis ce moment, je suis le plusheureux des jeunes gens. Mes études sont finies, et je vaiscommencer mon droit. Au milieu des jouissances du luxe, entouré deparents que j’aime, – car je peux les appeler ainsi, – jamais jen’oublierai d’où je suis parti, et jamais je ne cesserai deremercier Dieu qui, pouvant me punir, a donné une fin aussiheureuse à mes escapades.
NOTE
Au moment où je termine ces Mémoires, jereçois une lettre de mon oncle qui m’apprend que mon cousin Labicheest mort d’indigestion. Il devait un jour ou l’autre finir par là.Comme il s’est souvent trouvé mêlé à cette histoire, j’ai crudevoir consigner ici la fin malheureuse de mon cousin Labiche.
FIN