Contes et Nouvelles en vers – Livre I

Autre Imitation d’Anacréon

 

J’étais couché mollement,

Et contre mon ordinaire

Je dormais tranquillement ;

Quand un enfant s’en vint faire

À ma porte quelque bruit.

Il pleuvait fort cette nuit :

Le vent, le froid, et l’orage

Contre l’enfant faisaient rage.

« Ouvrez ; dit-il, je suisnu. »

Moi charitable et bon homme

J’ouvre au pauvre morfondu ;

Et m’enquiers comme il se nomme.

« Je te le dirai tantôt,

Repartit-il ; car il faut

Qu’auparavant je m’essuie. »

J’allume aussitôt du feu.

Il regarde si la pluie

N’a point gâté quelque peu

Un arc dont je me méfie.

Je m’approche toutefois

Et de l’enfant prends les doigts ;

Les réchauffe ; et dans moi-même

Je dis : « Pourquoi craindretant ?

Que peut-il ? c’est un enfant :

Ma couardise est extrême

D’avoir eu le moindre effroi

Que serait-ce si chez moi

J’avais reçu Polyphème ? »

L’enfant, d’un air enjoué,

Ayant un peu secoué

Les pièces de son armure ;.

Et sa blonde chevelure,

Prend un trait, un trait vainqueur,

Qu’il me lance au fond du cœur.

« Voilà, dit-il, pour ta peine.

Souviens-toi bien de Clymène,

Et de l’Amour ; c’est mon nom.

– Ah ! je vous connais, lui dis-je,

Ingrat et cruel garçon ;

Faut-il que qui vous oblige

Soit traité de la façon ? »

Amour fit une gambade,

Et le petit scélérat

Me dit ; « Pauvre camarade,

Mon arc est en bon état ;

Mais ton cœur est bien malade. »

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