Enfances célèbres

SCÈNE PREMIÈRE.

Le théâtre représente l’intérieur de la ferme de Francesco.

FRANCESCO et RITA.

FRANCESCO, entrant tout haletant.Femme, me voici de retour de la ville. Je suis accablé defatigue.

RITA. Apportes-tu du moins quelque bonnenouvelle ?

FRANCESCO. Eh ! non ; une bonnenouvelle m’aurait fait oublier la marche, et je ne me plaindraispas.

RITA. Que t’ont dit ces messieurs dutribunal ?

FRANCESCO. Ce qu’ils disent si souvent aupauvre quand il demande justice : qu’il faut d’abord déposerde l’argent pour les premiers frais, et puis qu’on fera despoursuites.

RITA. C’est une horreur ! déposer del’argent pour qu’on arrête ces brigands qui dévastent le pays, quienlèvent nos bestiaux et nous dépouillent de tout ! Mais à quinous adresserons-nous, si l’autorité ne nous protège pas ? Ilfaudra donc fuir ce canton, abandonner l’héritage de ton père etchercher à vivre ailleurs ?

FRANCESCO. J’ai dit tout cela aux gens de lajustice. Je leur ai raconté comment l’autre jour, tandis que notrepetit Filippo gardait le troupeau au pied des Apennins, desbrigands fondirent sur la plaine et profitèrent du moment oùl’enfant s’était éloigné pour s’emparer de nos plus beaux agneauxet de nos jeunes chevreaux. Heureusement les mères étaient à labergerie, sans cela nous étions ruinés.

RITA. Plus heureusement encore, Francesco,notre fils n’était pas là ; car il serait tombé entre lesmains des brigands, et peut-être l’auraient-ils tué… La saintemadone l’a protégé.

FRANCESCO. Voilà comme tu excuses toujours saparesse, Rita. Si Filippo n’avait pas quitté le troupeau, il auraitappelé au secours en voyant venir les brigands ; je seraisaccouru, et nous n’aurions rien perdu.

RITA. Je l’ai grondé comme toi,Francesco ; je lui ai recommandé d’être plus attentif. Mais,tu le vois, notre fils ne peut se soumettre à garder les bestiaux,à labourer la terre ; il aime à être seul, et, aussitôt qu’ilpense qu’on ne le voit pas, il s’amuse à tracer sur la terre desfigures d’hommes, des arbres, des moutons. Peut-être notre enfantest-il destiné à une autre existence que la nôtre.

FRANCESCO. Tu es folle, Rita. Voilà bien lesmères ; toujours des idées d’ambition pour leurs fils… Et àquoi veux-tu que nous destinions celui-là ? Avons-nous del’argent pour lui faire donner de l’éducation ? et est-ce aumoment où nous sommes dans la misère que tu dois l’encourager à lafainéantise ? Mêle-toi de ta fille et laisse-moi faire deFilippo un bon métayer.

RITA. Calme-toi, mon ami, et confions-nous àDieu.

FRANCESCO. « Aide-toi et le cielt’aidera. » Femme, il faut que nous et nos enfants redoublionsde travail et de courage pour éloigner la misère. Mais où estFilippo ? Il est encore couché, je suis sûr.

RITA. Non, il est dans l’étable à faire lalitière des vaches.

FRANCESCO, appelant. Filippo !Filippo !

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