SCÈNE II
LES MÊMES, FILIPPO, entrant avec un morceau de charbon à la main,puis STELLA.
FILIPPO. Mon père…
FRANCESCO. Que faisais-tu dansl’étable ?
FILIPPO, rougissant et baissant latête… Mon père, je… je…
FRANCESCO. Ah ! tu vas mentir !… Quefaisais-tu ?
FILIPPO. Eh bien ! je cherchais àdessiner sur le mur la grande vache noire.
FRANCESCO. Et à quoi cela te mènera-t-il,fainéant ?
(Filippo baisse la tête et ne répond rien.)
STELLA, accourant. Ma mère, ma mère,venez voir ; nous avons deux vaches noires maintenant ;Filippo en a fait une seconde, elle marche près du mur de l’étable,elle mange au ratelier… Venez ! venez !
FRANCESCO. Allons, taisez-vous ; c’estassez de folie ! Femme, sers-nous à déjeuner, puis nous ironstous au travail.
(Ils se mettent à table.)
STELLA. Elle est bien belle, la vache deFilippo. Mon père, pourquoi ne voulez-vous pas la voir ?
RITA. Chut ! mange tes confitures ettais-toi.
STELLA. Qu’il est bon, ce raisiné !Pourquoi ne fais-tu pas comme moi, Filippo ? Vois, je nettoiemon assiette avec de la mie de pain. Il n’en reste pas detrace.
FILIPPO, dessinant sur son assiette avecla pointe de son couteau. Regarde cela, Stella.
STELLA. Oh ! c’est notre petit chat roux.Le voilà sur le buffet. (Filippo continue à dessiner.) Ilse gratte l’oreille avec sa patte.
RITA. Je n’oserai jamais laver cette assiette.C’est tout à fait le portrait de notre chat ; vois,Francesco.
FRANCESCO, regardant et riant.Oh ! c’est bien ça ; je te permets cet amusement pendantles repas, Filippo ; mais je ne veux pas que tu y songes engardant les troupeaux.
FILIPPO. C’est malgré moi, mon père.
FRANCESCO. Tout cela est bel et bon,enfant ; mais il faut penser à gagner ton pain. Allons, parsavec ta sœur, et ne vous éloignez pas trop de la ferme. Vousmènerez paître les vaches et les chèvres là-bas dans cette prairiequi est auprès du bois, et si vous voyez venir quelqu’un, vousm’appellerez tout de suite ; je vais au labour.
(Les enfants sortent.)