Chapitre 3
Enfin, après tout, elle n’avait plus bienlongtemps à rester maintenant et puis elle s’en irait pour de bon.On ne pouvait guère ne pas tenir compte du fait qu’elle avaitadmirablement soigné papa. Vers la fin, elle ne l’avait quitté ninuit, ni jour. À vrai dire, Constance et Joséphine avaient pensétoutes deux, en leur particulier, que la garde avait un peu exagéréson dévouement au moment suprême. Car, lorsqu’elles étaient entréespour dire adieu, Nurse Andrews était restée assise tout le tempsauprès du lit, tenant le poignet de père et faisant semblant deregarder sa montre. Il n’était pas possible que ce fûtnécessaire ; et de plus, quel manque de tact ! Si papaavait voulu leur dire quelque chose… quelque chose de secret… Nonpas qu’il eût essayé. Oh ! loin de là. Il gisait, la faceviolacée d’une pourpre sombre et courroucée ; il ne leur avaitmême pas jeté un regard, quand elles étaient entrées. Puis, tandisqu’elles restaient là, debout, se demandant ce qu’il fallait faire,il avait tout à coup ouvert un œil. Oh ! quelle différencecela aurait fait, quelle différence pour le souvenir qu’ellesgardaient de lui ! et comme il eût été plus facile de raconteraux gens cet instant, si seulement il les avait ouverts tousdeux ! Mais non – rien qu’un œil. Cet œil les avait fixéesavec fureur un moment et puis… s’était éteint.