Le Mystérieux Docteur Cornélius – Tome III

CHAPITRE II – Le pied nu

M. Bondonnat déjeuna ce jour-là dans sonjardin, au milieu de ces fleurs et de ces plantes exotiques quiétaient pour lui comme des amies et dont il connaissait, à pointnommé, toutes les espèces et toutes les variétés.

– Ma foi, se dit-il philosophiquement,après avoir pris son café, je ne veux pas me faire de bile au sujetde ce vol ! Ceux qui l’ont commis doivent se tenir poursatisfaits et ne reviendront sans doute plus. D’ailleurs, il fautqu’ils soient relativement honnêtes ! Ils auraient pu toutprendre. Ne pensons plus à cela et allons faire une promenade.

Le savant mit aussitôt ce projet à exécution.Il se coiffa d’un léger chapeau de rotin, se munit d’un grandparasol en papier et descendit jusqu’au rivage, s’arrêtant de tempsen temps pour contempler les jeux des mouettes et des cormorans, oupour examiner quelque fleur ou quelque pierre.

Il allait lentement, en flâneur, côtoyant lerivage, à l’ombre de superbes cocotiers où s’ébattaient desécureuils et des rats palmistes.

Puis il suivit un sentier qui le mena sur laplage même, et il marcha sur le sable couvert d’une profusion decoquillages nacrés.

Jamais il n’avait senti avec autant de bonheurles charmes de la promenade et de la méditation. Comme il lui étaitdoux de flâner ainsi, au milieu d’un des plus beaux paysages dumonde, après tant de mois d’une si dure captivité !

Bercé par sa rêverie, M. Bondonnat nes’apercevait pas qu’il avait fait beaucoup de chemin ; enfinil se trouva au milieu d’un site véritablement grandiose, mais quilui était tout à fait inconnu ; il ne s’était pas encoreaventuré si loin de sa maison.

Au-dessus d’une forêt où se mélangeaienttoutes les essences propres aux contrées tropicales, il apercevaitdes coupoles dorées, de sveltes tourelles ; toute unearchitecture compliquée et élégante, qui le fit songer à ceschâteaux habités par des génies que l’on trouve à chaque page descontes arabes.

Il eût bien voulu visiter ce magnifiqueédifice ; mais il en était séparé par d’inextricables fourrésde plantes épineuses, au milieu desquels il n’eût été ni facile niprudent de se risquer, car ils devaient servir d’asile à tout unmonde de reptiles.

Le naturaliste se résigna donc à continuer àsuivre le rivage, et il déboucha bientôt dans une baie profonde,une sorte de fjord qui s’avançait jusqu’au milieu de la forêt.

Au fond de cette baie, que bordait une falaiseabrupte, se trouvaient de nombreuses cavernes produites parl’incessant et patient travail des flots.

Il marcha de ce côté, mais il poussa tout àcoup un cri de surprise en se trouvant inopinément en présence d’unhomme misérablement vêtu, à la barbe hirsute, qui, assis sur lesable, à l’ombre de la falaise, déjeunait de quelques coquillesbivalves, dans le genre de nos clovisses, les ouvrant avec uncouteau et en rejetant ensuite au loin les coquilles.

En s’approchant, M. Bondonnat remarquaavec surprise que cet homme à la mine égarée était un Blanc, sansdoute un Européen, peut-être même un Français comme lui, car sescheveux et sa barbe en désordre étaient d’un blond ardent.

Le savant pensa tout de suite qu’il setrouvait en présence de quelque matelot déserteur, et ils’approcha, mû par la curiosité et aussi par la pitié, car cepauvre être paraissait dans un état lamentable.

À la vue de M. Bondonnat, le solitairefit un geste pour s’enfuir ; mais, en reconnaissant qu’ilavait affaire à un homme de sa race, il demeura et une sorte desourire se dessina sur sa face chagrine.

M. Bondonnat crut utile d’engager laconversation en demandant quelques renseignements sur la route àsuivre pour regagner le port de Basan.

Sans y songer, M. Bondonnat s’étaitexprimé en français. Ce fut avec un plaisir inexprimable qu’ilentendit l’inconnu lui répondre dans la même langue :

– Monsieur, vous n’avez qu’à suivre lerivage. Il est impossible que vous vous égariez. Il y a bien unsentier plus court qui coupe à travers le bois, en passant devantle temple bouddhiste, mais vous pourriez vous perdre ; il estplus prudent de longer la mer.

– Je vois avec plaisir que je me trouveen présence d’un compatriote. Vous êtes français ?

– Oui, répondit l’homme d’un airsombre.

– Y a-t-il longtemps que vous êtesici ?

– Je ne sais plus au juste… un mois…peut-être plus !

M. Bondonnat s’aperçut que ses questionsdéplaisaient à l’homme, dont les traits avaient repris leurexpression farouche.

– Si je vous interroge ainsi, reprit-il,ce n’est pas, croyez-le, pour satisfaire une vaine curiosité. C’estpour savoir si je ne pourrais pas vous être utile de quelquemanière !

– Je n’ai besoin de rien.

– Pourtant, vous ne me semblez pas trèsheureux. Si une somme d’argent quelconque…

– Je ne veux rien, répliqua l’homme avecune sourde colère. Je me trouve bien comme je suis. Je ne veux pasqu’on s’intéresse à moi ni qu’on s’occupe de moi !

M. Bondonnat était profondément ému.

– Vous devez avoir éprouvé de bien grandsmalheurs, dit-il ; mais il y en a bien peu qui soientcomplètement irréparables !

Comme l’homme gardait le silence, lessuppositions du naturaliste prirent une autre orientation.

– Auriez-vous été victime de quelqueentraînement ? Auriez-vous commis quelque faute, quelquecrime ? demanda-t-il.

Cette hypothèse eut pour résultat de tirerl’inconnu de son apathie.

– Monsieur, répondit-il, je ne vousconnais pas, mais vous me paraissez rempli de bienveillance à monégard et je ne voudrais pas que vous me preniez pour unmalfaiteur…

– Je me nomme Prosper Bondonnat.

– Le célèbre naturaliste ?

– Lui-même.

– Mon cher compatriote, je vais vousraconter mon histoire en deux mots. Mais vous verrez que lacatastrophe dont j’ai été victime est irréparable, et qu’il vautmieux que vous me laissiez à mon chagrin et à ma tristesse.

– Je vous écoute, dit le savant ens’asseyant sur le sable.

– Je me nomme Louis Grivard, reprit lejeune homme, et mon nom ne vous est peut-être pas tout à faitinconnu, car j’ai, à plusieurs reprises, organisé, en France et enAmérique, des expositions de peinture qui ont eu un certainsuccès !… C’est à New York que j’ai connu celle qui devaitdevenir ma femme, ma chère Lorenza…

À ce nom, l’artiste fondit en larmes, et ce nefut qu’au bout de quelques minutes qu’il put continuer sonrécit.

– Nous étions parfaitement heureux. Nousnous étions aimés dès le premier jour que nous nous vîmes. Il yavait entre nous deux une si merveilleuse union, une harmonie siparfaite, que jamais, même sans nous être donné le mot, nousn’avons été d’un avis différent sur aucune question ! D’unseul regard, nous nous comprenions. C’était un bonheur au-dessus decelui de la simple humanité, et il n’est pas extraordinaire qu’iln’ait pas duré et qu’il ait fini de façon aussi tragique.

« Nous étions mariés depuis quelquessemaines à peine lorsqu’on nous fit une proposition trèsavantageuse. Il faut vous dire que ma chère Lorenza possédaitl’étrange pouvoir de rendre aux perles mortes tout leur éclat ettout leur orient. Plusieurs fois même, des souverains la firentappeler pour lui confier leurs joyaux.

– En effet, j’ai entendu parler de cela,dit M. Bondonnat.

– C’est vous dire que la pauvre Lorenzase connaissait admirablement en perles. Un marchand de pierres,dont nous avions fait la connaissance, cherchait une personne deconfiance pour aller à Ceylan, à Timor, en Océanie, acheter desquantités considérables de perles. Il pensa que Lorenza était toutedésignée pour cette délicate mission ; et il nous proposad’entreprendre, à ses frais, dans les conditions les plusagréables, un voyage autour du monde. Comme j’hésitais, il fitvaloir à mes yeux les facilités que j’aurais, en contemplant despaysages exotiques, de trouver dans mon art une note nouvelle etpuissamment originale ; Paul Gauguin n’est-il pas allé àTahiti, et Besnard aux Indes ? Puis n’était-ce pas le plusmerveilleux des voyages de noces ?

« Nous nous laissâmes convaincre et nouspartîmes. Les premières semaines de notre excursion furent idéales.Je puis presque mourir après avoir été aussi heureux que je le fuspendant ces quelques jours.

« D’ailleurs, nos affaires marchaient àsouhait. À Ceylan, à Timor nous conclûmes, pour le compte de notremandataire, des marchés très avantageux. C’est alors que j’eus lafatale idée de passer quelque temps dans cette île de Basan, dontle charme perfide m’avait séduit, et qui est le rendez-vous d’ungrand nombre de pêcheurs et de trafiquants de nacre.

« Nous louâmes une maisonnette dans labanlieue de la ville et, sans négliger le côté sérieux de notremission, nous commençâmes nos excursions à travers ces paysagesmerveilleux.

« C’est alors qu’une première catastrophevint s’abattre sur nous, au milieu de cette tranquillité et de cebonheur, comme la foudre éclatant dans un ciel serein.

« Un matin, nous nous aperçûmes quetoutes nos perles, qui étaient la propriété de notre mandataire etqui représentaient une somme énorme, avaient disparu ; lecoffret de fer qui les renfermait n’avait même pas été forcé ;c’était pour nous la ruine et même le déshonneur, car personne necroirait jamais que nous nous soyons laissé voler aussinaïvement.

« Je me plaignis à Noghi, le gouverneur.Avec beaucoup de zèle, du moins en apparence, il commença uneenquête ; cette enquête ne donna aucun résultat, et, quoiqueje n’en sois pas sûr, j’ai toujours pensé que ce rusé Japonaisétait complice de mes voleurs.

« Pourtant, nous ne perdîmes pas courage.Je passe pour avoir du talent ; Lorenza, de son côté, gagnaitbeaucoup d’argent, grâce à la merveilleuse faculté qu’ellepossède ; nous résolûmes de nous mettre au travail etd’amasser une somme suffisante pour rembourser le prix des perles.Notre amour nous tenait lieu de tout ; nous nous aimionstellement qu’aucun malheur n’était capable de nous abattre.

« Est-il besoin de vous dire que nousavions résolu de quitter le plus tôt possible cette île demalédiction… c’est alors qu’éclata la suprêmecatastrophe !…

Ici l’artiste se mit à trembler, un sanglotl’étreignit à la gorge.

– Deux jours avant notre départ,bégaya-t-il, Lorenza disparut de la même façon mystérieuse que lesperles !… Oui, monsieur, c’est épouvantable, mais c’est ainsi.Un matin, en me réveillant, je ne la trouvai plus à mes côtés. Et,ce qu’il y a de plus désespérant, nulle trace d’effraction, nulvestige, nul indice !… J’étais désespéré !…

« Je retournai chez le gouverneur, jepriai, je suppliai, je menaçai. Comme la première fois il feignitde se rendre à mes instances ; il fit même arrêter quelqueshabitants sur lesquels pesaient des soupçons ; mais,finalement, il n’obtint aucun résultat, et, petit à petit, nes’occupa plus de l’affaire.

M. Bondonnat était profondément troublé.En songeant au vol dont il avait été victime la veille, il sedemandait à quels malfaiteurs mystérieux il pouvait avoir affaire.C’étaient les mêmes, sans nul doute, qui s’étaient emparés desperles et qui avaient enlevé Lorenza.

– Continuez, dit-il à l’artiste, qui,maintenant, semblait retomber dans son abattement. Il estnécessaire que je connaisse cette aventure dans les moindresdétails.

– Je vous ai raconté l’essentiel, repritl’artiste. J’ai été fou pendant plusieurs jours, errant dans lesbois et le long de la mer sans vouloir prendre aucune nourriture.Je cherchais Lorenza ; c’était mon idée fixe. Je la cherchetoujours, j’ai la conviction qu’elle est encore vivante. Pourquoil’aurait-on tuée ? Si j’avais la certitude qu’elle fût morte,je ne lui survivrais pas d’une minute. L’espoir de la retrouver estla seule chose qui me donne le courage de ne pas mourir…

– Voilà, certes, une étrange histoire,murmura M. Bondonnat sincèrement apitoyé. Mais pourquoin’avez-vous pas regagné le Japon, adressé une plainte en règle auconsulat de France ? Il me semble qu’à votre place c’est ceque j’aurais fait.

Louis Grivard eut un rire amer.

– Vous oubliez, mon cher compatriote, quej’étais sans argent, complètement ruiné, mes bagages vendus pourpayer le loyer de notre maison et les frais des premières etinutiles recherches !… Mais ce n’est pas encore la vraieraison. J’aurais peut-être pu, en m’engageant comme matelot,regagner Yokohama, mais la seule pensée de quitter le pays où setrouve encore certainement ma Lorenza me bouleversait. D’ailleurs,ne suis-je pas mieux ici ? Aux yeux de mon mandataire, auxyeux de la loi française ne suis-je pas un voleur ?… Peut-êtrequ’en mettant le pied sur le quai de quelque port civilisé, despolicemen me prendraient au collet ! mon signalement doitavoir été envoyé partout…

M. Bondonnat prit la main du malheureuxartiste et l’étreignit avec effusion.

– Mon pauvre ami, lui dit-il, ce n’estpas en vain que vous m’avez raconté votre histoire. Je vous lepromets, je ferai tout ce qui est humainement possible pouréclaircir cet affreux mystère et pour retrouver votre femme. Maisj’ai, moi aussi, bien des choses à vous raconter.

M. Bondonnat narra son séjour à l’île despendus, sa captivité chez les bandits de la Main Rouge et la façonextraordinaire dont il s’en était évadé. Il termina son récit enexpliquant de quelle façon lui-même, la nuit précédente, avait étévictime d’un vol dont les circonstances rappelaient exactementcelui grâce auquel l’artiste avait été dépouillé.

– Ce sont, évidemment, les mêmes bandits,répondit Louis Grivard, et je tremble qu’il ne vous arrive à vousaussi quelque malheur.

– Soyez tranquille, réponditM. Bondonnat avec énergie, je vais prendre desprécautions ; puis je ne vous cacherai pas que ce mystère mepassionne ! J’y mets, mon amour-propre de savant.

L’artiste hocha la tête avec tristesse.

– Je doute fort que vousréussissiez ! fit-il.

– J’ai cependant découvert des chosesplus difficiles, que diable ! Laissez-moi réfléchir, trouverun plan, un stratagème, et vous verrez… Mais quittons cela pourl’instant ; vous n’allez pas, je suppose, continuer à vivre enlycanthrope, sous ces haillons. Je vous emmène avec moi, il y a uneplace pour vous dans ma maisonnette.

– Je suis sincèrement touché de votrebonté, mais je refuse… Je ne pourrais dormir sous un toit, dans unepièce close de tous côtés. Je me réveillerais en sursaut toutes lescinq minutes, en croyant sentir près de moi les invisiblesmalfaiteurs. Venez avec moi, je vais vous montrer où je loge.

Louis Grivard alla jusqu’à l’entrée d’une descavernes, au fond de la baie, sous la haute voûte d’originemadréporique. M. Bondonnat aperçut un lit de feuilles depalmier et de grands coquillages qui servaient de vases à boire ausolitaire, une petite source tombait de la falaise et allait seperdre dans les sables.

Au-dessus du roc c’était la forêt avec seslianes inextricables et ses verdures majestueuses.

– Voilà mon antre, dit Louis Grivard avecun mélancolique sourire. C’est là que je dors pendant une grandepartie de la journée, ne sortant que pour me procurer des fruits etdes coquillages ; mais, la nuit, je la passe tout entière àerrer dans l’île, je rôde par les rues de la ville, écoutant lesconversations, regardant et observant tout.

Le malheureux ajouta avec un regardmorne :

– Qui sait ? Il suffira peut-êtred’un mot pour me mettre sur la bonne piste !… Au matin, jerentre brisé de fatigue, et je dors : voilà ma vie !

Malgré toute l’insistance deM. Bondonnat, Louis Grivard refusa énergiquement d’allerhabiter la villa ; mais il fut convenu que le savant levisiterait fréquemment et le tiendrait au courant de tout ce quipourrait arriver d’intéressant.

Au moment de se retirer, le naturalisteremarqua que les parois de la grotte étaient sculptées d’idolesmonstrueuses, aux longs yeux en amande, aux grosses lèvressouriantes ; et il pensa que cet endroit avait peut-être été,avant l’apparition du bouddhisme dans cette île, un temple consacréaux idoles, à ces mauvais génies à l’existence desquels croienttous les sauvages océaniens.

Ce qui le fortifia dans son opinion, c’estqu’à cinq ou six mètres de l’entrée la caverne était barrée par deséboulements, et il se rappela avoir vu autrefois dans l’Inde descryptes pareillement ornées de statues gigantesques.

M. Bondonnat revint lentement chez lui,en proie à une vive préoccupation. La confidence de Louis Grivardle forçait de s’occuper de nouveau du vol de la nuit précédente. Ils’était juré qu’il arracherait ce malheureux à sa triste situation.Mais il avait beau chercher, se creuser la tête, il n’arrivait pasà découvrir la ruse victorieuse, la bonne idée qui lui permettraitde mettre la main sur les invisibles malfaiteurs.

Ce soir-là, il ne mangea que du bout desdents. Il avait le cœur serré et le cosaque Rapopoff lui-même futfrappé de sa tristesse. Il regagna sa chambre tout soucieux. Mais,avant de se coucher, il ordonna à Rapopoff d’étendre, depuis laporte de la pièce jusqu’au petit meuble de camphrier qui setrouvait à l’autre extrémité, une longue natte de rotin ; ilse fit apporter de la farine de riz et, à l’aide d’un tamis, il enrépandit une couche parfaitement égale sur toute la surface de lanatte.

– Comme cela, fit-il, si mes dévaliseursne sont pas tout à fait de purs esprits, ils seront forcés delaisser quelques traces de leur passage, en admettant qu’ilsreviennent. Ce que je ne crois guère.

Il prit encore une autre précaution, ce fut deplacer sous son chevet le portefeuille qui contenait le reste deses bank-notes. Puis, satisfait de cette idée, il se mit aulit.

Fatigué par sa longue excursion,M. Bondonnat, presque aussitôt couché, tomba dans un profondsommeil et dormit tout d’une traite jusqu’au matin.

En sautant à bas de son lit, son premier soinfut de regarder la natte ; la farine de riz portait les tracesparfaitement nettes d’un tout petit pied nu, un pied de femme oud’enfant.

M. Bondonnat regarda autour de lui. Demême que la première fois, tous les meubles avaient étébouleversés, les papiers demeuraient en désordre dans les tiroirsentrouverts.

– Cette fois, par exemple, s’écria lesavant, c’est trop fort !

Il glissa la main sous son oreiller. Leportefeuille s’y trouvait bien, mais il avait encore diminué devolume. Les voleurs, enhardis par un premier succès, avaient enlevévingt bank-notes de mille dollars chacune.

Jamais – même lorsqu’un hasard l’avait mis surla voie de découvertes étonnantes – M. Bondonnat n’avait étéaussi stupéfié. Il tiraillait ses favoris blancs pour bien seconstater à lui-même qu’il ne dormait pas.

– Voyons, répétait-il, mais c’estinsensé ! Ces indigènes ne sont pourtant pas sorciers, quediable nous ne sommes plus au Moyen Âge !

Il ouvrit la porte de sa chambre, qu’il trouvafermée à clé comme la veille, et il réveilla Rapopoff, qui, étendusur sa natte en travers du seuil, dormait encore, en ronflant commeun tuyau d’orgue.

De même que son maître, le cosaque avait dormitout d’une traite et n’avait été réveillé par aucun bruitsuspect.

L’énigme demeurait insoluble.

– Pourtant, se répétait M. Bondonnatprofondément intrigué, je voudrais bien savoir à qui appartient cejoli pied nu !

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