SCÈNE IX ET DERNIÈRE.
LES PRÉCÉDENTS, RITA accourant éperdue, puis FRANCESCO armé d’unefourche et d’un pieu.
RITA. Rendez-nous nos enfants, nos pauvresenfants. Nous errons depuis huit jours dans nos montagnes… Enfinnous avons découvert votre retraite… Ayez pitié d’une mère…Rendez-moi mes enfants… (Apercevant Filippo.) Mon cherfils ! (Elle le presse sur son cœur.) Mais où est tasœur, ma douce Stella, ma fille bien-aimée ?
STELLA, accourant. Ma mère ! mabonne mère !
(Elle se jette dans ses bras.)
FRANCESCO, arrivant et brandissant sonpieu. De par le ciel ! si vous ne me rendez mes enfants,je brise la tête au premier qui s’approche de moi.
BRUTACCIO, riant. Désarmez cet homme,et amenez-le-moi. (Les brigands désarment Francesco et leconduisent devant Brutaccio.) Vous ne pouvez rien pourdélivrer vos enfants ; vous êtes devenu vous-même monprisonnier ! vos troupeaux sont à moi, demain je puis dévastervotre maison et ne pas y laisser pierre sur pierre… Eh bien !Brutaccio le brigand n’en fera rien. Je vous rends la liberté, carvotre fils a payé votre rançon à tous par son génie. Emmenez vosbestiaux et prenez cette bourse, Francesco. Mais ne contraignezplus votre noble enfant à être pâtre ou laboureur : Dieu l’acréé peintre, il sera la gloire et la fortune de votre famille.Envoyez-le à Florence auprès de Masaccio ; cet or payera sesétudes.
FRANCESCO, prenant la bourse. QueDieu vous bénisse, monseigneur !
BRUTACCIO. On ne bénit pas un brigand, monami ; mais on peut lui faire une promesse en retour d’unbienfait.
FILIPPO. Laquelle ? j’y souscrisd’avance.
BRUTACCIO. Promettez-moi, lorsque vous serezun peintre célèbre, de faire un tableau de la scène que nous venonsde mettre en action.
FILIPPO. Je vous le jure !
BUONAVITA. Ce tableau s’appellera laRançon du Génie.