Joseph Balsamo – Tome III (Les Mémoires d’un médecin)

Chapitre 3Évocation

La comtesse avait complètement caché son visage sous une
mante ; comme elle avait eu le temps de passer à l’hôtel de famille, son
costume était celui d’une petite bourgeoise.

Elle était venue en fiacre avec le maréchal qui, plus timide,
s’était habillé de gris, comme un valet supérieur de bonne maison.

– Monsieur le comte, dit madame du Barry, me reconnaissez-vous ?

– Parfaitement, madame la comtesse.

Richelieu restait en arrière.

– Veuillez vous asseoir, madame, et vous aussi, monsieur.

– Monsieur est mon intendant, dit la comtesse.

– Vous faites erreur, madame, répliqua Balsamo en s’inclinant ;
monsieur est M. le duc de Richelieu, que je reconnais à merveille,et qui
serait bien ingrat s’il ne me reconnaissait pas.

– Comment cela ? demanda le duc tout déferré, comme disait
Tallemant des Réaux.

– Monsieur le duc, on doit un peu de reconnaissance à ceux
qui nous ont sauvé la vie, je pense.

– Ah ! ah ! duc, dit la comtesse en riant ;
entendez-vous, duc ?

– Eh ! vous m’avez sauvé la vie, à moi, monsieur le
comte ? fit Richelieu étonné.

– Oui, monseigneur, à Vienne, en 1725, lors de votre ambassade.

– En 1725 ! mais vous n’étiez pas né, mon cher
monsieur.

Balsamo sourit.

– Il me semble que si, monsieur le duc, dit-il, puisque je
vous ai rencontré mourant, ou plutôt mort sur une litière ;vous veniez de
recevoir un coup d’épée au beau travers de la poitrine, à telles enseignes que
je vous ai versé sur la plaie trois gouttes de mon élixir… Là,tenez, à l’endroit
où vous chiffonnez votre point d’Alençon, un peu riche pour un intendant.

– Mais, interrompit le maréchal, vous avez trente à
trente-cinq ans à peine, monsieur le comte.

– Allons donc, duc ! s’écria la comtesse en riant aux
éclats, vous voilà devant le sorcier. Y croyez-vous ?

– Je suis stupéfait, comtesse. Mais alors, continua le duc s’adressant
de nouveau à Balsamo… Mais alors, vous vous appelez…

– Oh ! nous autres sorciers, monsieur le duc, vous le
savez, nous changeons de nom à toutes les générations… et, en 1725,c’était la
mode des noms en us, en os et en as, et il ne m’étonnerait
pas quand, à cette époque, il m’aurait pris la fantaisie de troquer mon nom
contre quelque nom grec ou latin… Ceci posé, je suis à vos ordres,madame la
comtesse, à vos ordres, monsieur le duc…

– Comte, nous venons vous consulter, le maréchal et moi.

– C’est beaucoup d’honneur que vous me faites, madame, surtout
si c’est naturellement que cette idée vous est venue.

– Le plus naturellement du monde, comte ; votre
prédiction me court par la tête ; seulement, je doute qu’elle se réalise.

– Ne doutez jamais de ce que dit la science, madame.

– Oh ! oh ! fit Richelieu, c’est que notre
couronne est bien aventurée, comte… Il ne s’agit pas ici d’une blessure que l’on
guérit avec trois gouttes d’élixir.

– Non, mais d’un ministre que l’on renverse avec trois paroles…,
répliqua Balsamo. Eh bien ! ai-je deviné ? Dites,voyons.

– Parfaitement, dit la comtesse toute tremblante. En vérité,
duc, que dites vous de tout cela ?

– Oh ! ne vous étonnez pas pour si peu, madame, dit Balsamo,
qui voit madame du Barry et Richelieu inquiets doit deviner pourquoi, sans sorcellerie.

– Aussi, ajouta le maréchal, vous adorerai-je, si vous nous
indiquez le remède.

– À la maladie qui vous travaille ?

– Oui, nous avons le Choiseul.

– Et vous voudriez bien en être guéris.

– Oui, grand magicien, justement.

– Monsieur le comte, vous ne nous laisserez pas dans l’embarras,
dit la comtesse ; il y va de votre honneur.

– Je suis tout prêt à vous servir de mon mieux, madame ;
cependant, je voudrais savoir si M. le duc n’avait pas d’avance quelque idée
arrêtée en venant ici.

– Je l’avoue, monsieur le comte… Ma foi, c’est charmant d’avoir
un sorcier que l’on peut appeler M. le comte : cela ne vous change pas de
vos habitudes.

Balsamo sourit.

– Voyons, reprit-il, soyez franc.

– Sur l’honneur, je ne demande pas mieux, dit le duc.

– Vous aviez quelque consultation à me demander ?

– C’est vrai.

– Ah ! sournois, dit la comtesse ; il ne m’en
parlait pas.

– Je ne pouvais dire cela qu’à M. le comte, et dans le creux
le plus secret de l’oreille encore, répondit le maréchal.

– Pourquoi, duc ?

– Parce que vous eussiez rougi, comtesse, jusqu’au blanc des
yeux.

– Ah ! par curiosité, dites, maréchal ; j’ai du
rouge, on n’en verra rien.

– Eh bien, dit Richelieu, voici ce à quoi j’ai pensé. Prenez
garde, comtesse, je jette mon bonnet par-dessus les moulins.

– Jetez, duc, je vous le renverrai.

– Oh ! c’est que vous m’ allez battre tout à l’heure, si
je dis ce que je veux dire.

– Vous n’êtes pas accoutumé à être battu, monsieur le duc, dit
Balsamo au vieux maréchal enchanté du compliment.

– Eh bien, donc, reprit-il, voici : n’en déplaise à
madame, à Sa Majesté… Comment vais-je dire cela ?

– Qu’il est mortel de lenteurs ! s’écria la comtesse.

– Vous le voulez donc ?

– Oui.

– Absolument ?

– Mais oui, cent fois oui.

– Alors, je me risque. C’est une chose triste à dire, monsieur
le comte, mais Sa Majesté n’est plus amusable. Le mot n’est pas de moi, comtesse,
il est de madame de Maintenon.

– Il n’y a rien là qui me blesse, duc, dit madame du Barry.

– Tant mieux mille fois, alors je serai à mon aise. Eh bien,
il faudrait que M. le comte, qui trouve de si précieux élixirs…

– En trouvât un, dit Balsamo, qui rendît au roi la faculté d’être
amusé.

– Justement.

– Eh ! monsieur le duc, c’est là un enfantillage, l’a
b c du métier. Le premier charlatan trouvera un philtre.

– Dont la vertu, continua le duc, sera mise sur le compte du
mérite de madame ?

– Duc ! s’écria la comtesse.

– Eh ! je le savais bien, que vous vous fâcheriez ;
mais c’est vous qui l’avez voulu.

– Monsieur le duc, répliqua Balsamo, vous avez eu raison :
voici madame la comtesse qui rougit. Mais, tout à l’heure nous le disions, il
ne s’agit pas de blessure ici, non plus que d’amour. Ce n’est pas avec un
philtre que vous débarrasserez la France de M. de Choiseul. En effet, le roi
aimât-il madame dix fois plus qu’il ne le fait, et c’est impossible, M. de
Choiseul conserverait sur son esprit le prestige et l’influence que madame
exerce sur le cœur.

– C’est vrai, dit le maréchal. Mais c’était notre seule ressource.

– Vous croyez ?

– Dame ! trouvez-en une autre.

– Oh ! je crois la chose facile.

– Facile, entendez-vous, comtesse ? Ces sorciers ne
doutent de rien.

– Pourquoi douter, quand il s’agit tout simplement de prouver
au roi que M. de Choiseul le trahit ? –  au point de vue du roi, bien
entendu, car M. de Choiseul ne croit pas trahir en faisant ce qu’il fait.

– Et que fait-il ?

– Vous le savez aussi bien que moi, comtesse ; il
soutient la révolte du parlement contre l’autorité royale.

– Certainement ; mais il faudrait savoir par quel
moyen.

– Par le moyen d’agents qui les encouragent en leur promettant
l’impunité.

– Quels sont ces agents ? Voilà ce qu’il faudrait
savoir.

– Croyez-vous, par exemple, que madame de Grammont soit
partie pour autre chose que pour exalter les chauds et étouffer les timides ?

– Certainement qu’elle n’est point partie pour autre chose,s’écria
la comtesse.

– Oui ; mais le roi ne voit dans ce départ qu’un simple
exil.

– C’est vrai.

– Comment lui prouver qu’il y a dans ce départ autre chose
que ce qu’on veut y laisser voir ?

– En accusant madame de Grammont.

– Ah ! s’il ne s’agissait que d’accuser, comte !…
dit le maréchal.

– Il s’agit malheureusement de prouver l’accusation, dit la
comtesse.

– Et si cette accusation était prouvée, bien prouvée,croyez-vous
que M. de Choiseul resterait ministre ?

– Assurément non ! s’écria la comtesse.

– Il ne s’agit donc que de prouver une trahison de M. de
Choiseul, poursuivit Balsamo avec assurance, et de la faire surgir claire, précise
et palpable aux yeux de Sa Majesté.

Le maréchal se renversa dans son fauteuil en riant aux
éclats.

– Il est charmant ! s’écria-t-il ; il ne doute de
rien ! Trouver M. de Choiseul en flagrant délit de trahison !… voilà
tout !… pas davantage !

Balsamo demeura impassible et attendit que l’accès d’hilarité
du maréchal fût bien passé.

– Voyons, dit alors Balsamo, parlons sérieusement et récapitulons.

– Soit.

– M. de Choiseul n’est-il pas soupçonné de soutenir la rébellion
du parlement ?

– C’est convenu ; mais la preuve ?

– M. de Choiseul ne passe-t-il pas, continua Balsamo, pour
ménager une guerre avec l’Angleterre, afin de se conserver un rôle d’homme indispensable ?

– On le croit ; mais la preuve ?…

– Enfin, M. de Choiseul n’est-il pas l’ennemi déclaré de madame
la comtesse que voici et ne cherche-t-il pas par tous les moyens possibles à la
renverser du trône que je lui ai promis ?

– Ah ! pour cela, c’est bien vrai, dit la comtesse ;
mais encore faudrait-il le prouver… Oh ! si je le pouvais !

– Que faut-il pour cela ? Une misère.

Le maréchal se mit à souffler sur ses ongles.

– Oui, une misère, dit-il ironiquement.

– Une lettre confidentielle, par exemple, dit Balsamo.

– Voilà tout… peu de chose.

– Une lettre de madame de Grammont, n’est-ce pas, monsieur
le maréchal ? continua le comte.

– Sorcier, mon bon sorcier, trouvez-en donc une ! s’écria
madame du Barry. Voilà cinq ans que j’y tâche, moi ; j’y ai dépensé cent
mille livres par an, et je ne l’ai jamais pu.

– Parce que vous ne vous êtes pas adressée à moi, madame, dit
Balsamo.

– Comment cela ? fit la comtesse.

– Sans doute, si vous vous fussiez adressée à moi…

– Eh bien ?

– Je vous eusse tirée d’embarras.

– Vous ?

– Oui, moi.

– Comte, est-il trop tard ?

Le comte sourit.

– Jamais.

– Oh ! mon cher comte…, dit madame du Barry en joignant
les mains.

– Donc, vous voulez une lettre ?

– Oui.

– De madame de Grammont ?

– Si c’est possible.

– Qui compromette M. de Choiseul sur les trois points que j’ai
dits.

– C’est-à-dire que je donnerais… un de mes yeux pour l’avoir.

– Oh ! comtesse, ce serait trop cher ; d’autant
plus que cette lettre…

– Cette lettre ?

– Je vous la donnerai pour rien, moi.

Et Balsamo tira de sa poche un papier plié en quatre.

– Qu’est cela ? demanda la comtesse dévorant le papier
des yeux.

– Oui, qu’est cela ? interrogea le duc.

– La lettre que vous désirez.

Et le comte, au milieu du plus profond silence, lut aux deux
auditeurs émerveillés la lettre que nos lecteurs connaissent déjà.

Au fur et à mesure qu’il lisait, la comtesse ouvrait de
grands yeux et commençait à perdre contenance.

– C’est une calomnie, diable ! prenons garde !
murmura Richelieu, quand Balsamo eut achevé.

– C’est, monsieur le duc, la copie, pure, simple et
littérale, d’une lettre de madame la duchesse de Grammont, qu’un courrier
expédié ce matin de Rouen est en train de porter à M. le duc de Choiseul, à
Versailles.

– Oh ! mon Dieu ! s’écria le maréchal, dites-vous
vrai, monsieur Balsamo ?

– Je dis toujours vrai, monsieur le maréchal.

– La duchesse aurait écrit une semblable lettre ?

– Oui, monsieur le maréchal.

– Elle aurait eu cette imprudence ?

– C’est incroyable, je l’avoue ; mais cela est.

Le vieux duc regarda la comtesse, qui n’avait plus la force
d’articuler un seul mot.

– Eh bien, dit-elle enfin, je suis comme le duc, j’ai peine
à croire, pardonnez-moi, monsieur le comte, que madame de Grammont,une femme
de tête, ait compromis toute sa position et celle de son frère par une lettre
de cette force… D’ailleurs… pour connaître une semblable lettre, il faut l’avoir
lue.

– Et puis, se hâta de dire le maréchal, si M. le comte avait
lu cette lettre, il l’aurait gardée : c’est un trésor précieux.

Balsamo secoua doucement la tête.

– Oh ! monsieur, dit-il, ce moyen est bon pour ceux qui
décachètent les lettres afin de connaître des secrets… et non pour ceux qui, comme
moi, lisent à travers les enveloppes… Fi donc !… Quel intérêt,d’ailleurs,
aurais-je, moi, à perdre M. de Choiseul et madame de Grammont ? Vous venez
me consulter… en amis, je suppose ; je vous réponds de même.Vous désirez
que je vous rende un service, je vous le rends. Vous ne venez pas,j’imagine, me
proposer le prix de ma consultation comme aux devineurs du quai de la Ferraille ?

– Oh ! comte, fit madame du Barry.

– Eh bien, je vous donne un conseil et vous ne me paraissez
pas le comprendre. Vous m’annoncez le désir de renverser M. de Choiseul, et
vous en cherchez les moyens ; je vous en cite un, vous l’approuvez ;
je vous le mets en main, vous n’y croyez pas !

– C’est que… c’est que… comte, écoutez donc…

– La lettre existe, vous dis-je, puisque j’en ai la copie.

– Mais enfin, qui vous a averti, monsieur le comte ?s’écria
Richelieu.

– Ah ! voilà le grand mot… qui m’a averti ? En une
minute, vous voulez en savoir aussi long que moi, le travailleur,le savant, l’adepte,
qui ai vécu trois mille sept cents ans.

– Oh ! oh ! dit Richelieu avec découragement, vous
allez me gâter la bonne opinion que j’avais de vous, comte.

– Je ne vous prie pas de me croire, monsieur le duc, et ce n’est
pas moi qui ai été vous chercher à la chasse du roi.

– Duc, il a raison, dit la comtesse. Monsieur de Balsamo, je
vous en supplie, pas d’impatience.

– Jamais celui qui a le temps ne s’impatiente, madame.

– Soyez assez bon… joignez cette faveur à toutes celles que
vous m’avez faites, pour me dire comment vous avez la révélation de pareils
secrets ?

– Je n’hésiterai pas, madame, dit Balsamo aussi lentement
que s’il cherchait mot à mot sa réponse ; cette révélation m’est faite par
une voix.

– Par une voix ! s’écrièrent ensemble le duc et la
comtesse ; une voix qui vous dit tout ?

– Tout ce que je désire savoir, oui.

– C’est une voix qui vous a dit ce que madame de Grammont
avait écrit à son frère ?

– Je vous affirme, madame, que c’est une voix qui me l’a
dit.

– C’est miraculeux !

– Mais vous n’y croyez pas.

– Eh bien, non, comte, dit le duc ; comment voulez-vous
donc que l’on croie à de pareilles choses ?

– Mais y croiriez-vous, si je vous disais ce que fait à
cette heure le courrier qui porte la lettre de M. de Choiseul ?

– Dame ! répliqua la comtesse.

– Moi, s’écria le duc, j’y croirais si j’entendais la voix…
Mais MM. les nécromanciens ou les magiciens ont ce privilège que,seuls, ils
voient et entendent le surnaturel.

Balsamo attacha les yeux sur M. de Richelieu avec une expression
singulière, qui fit passer un frisson dans les veines de la comtesse et détermina,
chez le sceptique égoïste qu’on appelait le duc de Richelieu, un léger froid à
la nuque et au cœur.

– Oui, dit-il après un long silence, seul je vois et j’entends
les objets et les êtres surnaturels ; mais quand je me trouve avec des
gens de votre rang, de votre esprit, duc, et de votre beauté,comtesse, j’ouvre
mes trésors et je partage… Vous plairait-il beaucoup entendre la voix mystérieuse
qui m’avertit ?

– Oui, dit le duc en serrant les poings pour ne pas
trembler.

– Oui, balbutia la comtesse en tremblant.

– Eh bien, monsieur le duc, eh bien, madame la comtesse, vous
allez entendre. Quelle langue voulez-vous qu’elle parle ?

– Le français, s’il vous plaît, dit la comtesse. Je n’en
sais pas d’autre, et une autre me ferait trop peur.

– Et vous, monsieur le duc ?

– Comme madame… le français. Je tiens à répéter ce qu’aura
dit le diable, et à voir s’il est bien élevé et s’il parle correctement la
langue de mon ami M. de Voltaire.

Balsamo, la tête penchée sur sa poitrine, marcha vers la
porte qui donnait dans le petit salon, lequel ouvrait, on le sait,sur l’escalier.

– Permettez, dit-il, que je vous enferme, afin de ne pas
trop vous exposer.

La comtesse pâlit et se rapprocha du duc, dont elle prit le
bras.

Balsamo, touchant presque à la porte de l’escalier, allongea
le pas vers le point de la maison où se trouvait Lorenza, et, en langue arabe, il
prononça d’une voix éclatante ces mots, que nous traduirons en langue vulgaire :

– Mon amie !… m’entendez-vous ?… Si vous m’entendez,
tirez le cordon de la sonnette et sonnez deux fois.

Balsamo attendit l’effet de ces paroles en regardant le duc
et la comtesse, qui ouvraient d’autant plus les oreilles et les yeux qu’ils ne
pouvaient comprendre ce que disait le comte.

La sonnette vibra nettement à deux reprises.

La comtesse bondit sur son sofa, le duc s’essuya le front
avec son mouchoir.

– Puisque vous m’entendez, poursuivit Balsamo dans le même
idiome, poussez le bouton de marbre qui figure l’œil droit du lion sur la
sculpture de la cheminée, la plaque s’ouvrira ; passez par cette plaque, traversez
ma chambre, descendez l’escalier, et venez jusque dans la chambre attenante à
celle où je suis.

Un moment après, un bruit léger comme un souffle insaisissable,
comme un vol de fantôme, avertit Balsamo que ses ordres avaient été compris et
exécutés.

– Quelle est cette langue ? dit Richelieu jouant l’assurance ;
la langue cabalistique ?

– Oui, monsieur le duc, le dialecte usité pour l’évocation.

– Vous avez dit que nous comprendrions ?

– Ce que dirait la voix, oui ; mais non pas ce que je
dirais, moi.

– Et le diable est venu ?

– Qui vous a parlé du diable, monsieur le duc ?

– Mais il me semble qu’on n’évoque que le diable.

– Tout ce qui est esprit supérieur, être surnaturel, peut
être évoqué.

– Et l’esprit supérieur, l’être surnaturel… ?

Balsamo étendit la main vers la tapisserie qui fermait la
porte de la chambre voisine.

– Est en communication directe avec moi, monseigneur.

– J’ai peur, dit la comtesse ; et vous, duc ?

– Ma foi, comtesse, je vous avoue que j’aimerais presque autant
être à Mahon ou à Philippsburg.

– Madame la comtesse, et vous, monsieur le duc, veuillez
écouter, puisque vous voulez entendre, dit sévèrement Balsamo.

Et il se tourna vers la porte.

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