LA NUIT QUI NE FINIT PAS

J’eus peur, soudain. Sans doute, il ne pouvait soupçonner que j’avais tué Ellie, mais il flairait sûrement quelque chose.

— Greta, Lippincott a toujours su que nous nous connaissions. J’ai détesté ce vieux renard du premier moment où je l’ai vu et il vous hait. Lorsqu’il apprendra que nous nous marions, il comprendra la vérité.

— Connaissant cette photo, il devait bien se douter, Mike que nous étions déjà amants, et qu’à présent nous nous marierions. Cessez de réagir comme un lâche. Jusqu’ici, j’ai eu de l’admiration pour vous, mais à présent, vous perdez votre sang-froid. Vous avez peur de tout le monde.

— Ne me parlez pas ainsi !

— C’est la vérité !

— Une nuit qui ne finit pas…

Je ne pensais à rien d’autre. L’obscurité complète, totale, toujours. Je n’étais pas visible, j’avais la faculté de voir les morts mais eux ne pouvaient me voir. L’homme qui avait aimé Ellie n’existait pas vraiment. Il s’était enfoncé volontairement dans la nuit. Je baissais la tête vers le sol.

— Une nuit qui ne finit pas… redis-je encore.

— Cessez de répéter ça ! cria Greta. Redressez-vous ! Soyez un homme et ne vous laissez pas impressionner par ces superstitions ridicules.

— Comment l’éviter ? J’ai vendu mon âme au « Champ du Gitan ». Le « Champ du Gitan » n’est pas un lieu où l’on puisse se sentir en sécurité. Il ne l’était pas pour Ellie, il ne l’est pas davantage pour moi. Peut-être qu’il en va de même pour vous ?

— Qu’entendez-vous par là ?

Je me levai lentement et m’avançai vers elle. Je l’aimais. Je l’aimais encore et j’éprouvais le désir de la prendre dans mes bras. Mais l’amour, la haine, le désir… n’est-ce pas la même chose ? Je n’aurais jamais pu haïr Ellie, alors que j’éprouvais une haine farouche pour Greta, et cette haine me procurait une volupté profonde. Je ne pouvais attendre…

— Belle garce ! Haïssable beauté blonde ! Vous n’êtes pas en sécurité, Greta ! Pas avec moi ! Comprenez-vous ? J’ai appris à savourer le plaisir… le plaisir de tuer. J’ai éprouvé une joie indicible, le jour où Ellie chevauchait vers la mort sur son cheval. J’ai été heureux toute la matinée parce que je savais qu’elle allait mourir. Aujourd’hui, je veux plus, que la certitude que quelqu’un va mourir d’avoir avalé une petite pilule avant le déjeuner. Je veux plus, que de pousser une vieille femme dans une carrière. Je veux me servir de mes mains.

La peur s’empara d’elle, elle que j’avais aimée dès notre première rencontre à Hambourg, pour laquelle j’avais laissé tomber mon travail du moment, en prétextant une maladie. Oui, je lui fus dévoué corps et âme. Maintenant, c’était fini, je redevenais moi-même. Je pénétrais dans un royaume différent de celui auquel j’avais toujours aspiré.

Son visage contracté par la peur m’excitait. Je serrai doucement mes mains autour de son joli cou. J’étais merveilleusement heureux tandis que j’étranglais Greta…

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