La Fin de Fausta

ÉPILOGUE

Pardaillan était-il mort ?

Jehan de Pardaillan, son fils, et Valvert, accourus sitôt que lafatale nouvelle fut arrivée jusqu’à eux, firent faire, et firenteux-mêmes les recherches les plus minutieuses. Au-dehors, toutautour du lieu où s’était dressée la ferme, et jusque très loin, onramassa des débris de toute sorte. Mais, parmi ces débris, rien quiressemblât à un humain. Pas le plus petit objet ayant appartenu àcelui dont on cherchait les restes pour les faire inhumerchrétiennement.

Sous terre, ce fut une autre affaire : tout de suite, Jehanet Valvert trouvèrent le corps de Fausta. Elle n’avait pu fuir bienloin. Chose étrange, le feu et l’éboulement avaient respecté soncorps, qui était demeuré intact sans une écorchure. Seule, unepetite contusion à la tempe de laquelle quelques gouttes de sangavaient jailli, traçant sur sa joue un mince filet rouge. Étenduesur le sable blanc, au milieu d’un amas de pierres, elle semblaitdormir : Fausta, en fuyant dans le noir, avait dû faire unfaux pas, se heurter à quelque obstacle invisible. Elle étaittombée, se faisant à la tempe cette petite blessure. Était-ellemorte de ce choc ? Morte d’une commotion intérieure ouétouffée ?… Le certain est qu’elle était bien morte.

Mais, pas plus sous terre que sur terre, on ne trouva la moindretrace de Pardaillan. Vivant ou mort, Pardaillan paraissait s’êtreévanoui comme une ombre, volatilisé. Pendant des jours et desjours, Jehan, qui connaissait ces galeries souterraines, presqueaussi bien que son père, et Valvert s’obstinèrent dans leurspieuses recherches. Ils durent finir par y renoncer.

Mais, de ces recherches mêmes, ils gardèrent la ferme convictionque Pardaillan n’était pas mort.

Le roi tint la parole qu’il avait faite à Pardaillan etconfirmée à Valvert. Il fit appeler M. etMme d’Ancre et leur demanda la main de la comtessede Lésigny pour « son ami » le comte de Valvert. Cettedemande, cet ordre, formel, pour mieux dire, il le formula en destermes tels, que Concini et Léonora demeurèrent convaincus que leroi connaissait le terrible secret de la naissance de Florence etque ce mariage qu’il imposait était l’unique condition d’un pardongénéral. Ils se trompaient. Le roi répétait des paroles dictées parPardaillan, sans en saisir le sens réel. Mais ils crurent qu’ilsavait, eux. Épouvantés, ils se hâtèrent de consentir à tout ce quele roi voulut. Trop heureux d’en être quittes à si bon compte.

C’est ainsi que, trois mois après cette terrible explosion, quidemeura toujours entourée d’un mystère impénétrable pour lepopulaire, Valvert, en cette même église deSaint-Germain-l’Auxerrois où il avait dû l’arracher à Rospignac,épousa sa bien-aimée Florence, en présence du roi et de toute lacour.

Valvert se retira dans ses terres, rachetées, agrandies,embellies, et qui touchaient aux terres du fils de Pardaillan, soncousin par alliance. Les deux familles vécurent là, côte à côte,n’en faisant qu’une.

Il va sans dire que Landry Coquenard, enrichi par Valvert, nequitta pas son maître pour cela. Pour tous les trésors du monde, iln’aurait voulu se séparer de celle qu’il continuait toujours àappeler en lui-même « la petite ». Landry passait unebonne partie de son temps avec ses deux « compères »,Escargasse et Gringaille, qui avaient aussi leur petit domaine parlà.

Il va sans dire, également, que la bonne mère Perrine suivit sachère petite Loïse, laquelle, comme on pense, ne manqua pas d’êtregâtée outrageusement, ayant trois mères et quatre ou cinq pères,qui s’acquittaient à qui mieux mieux de ce soin.

Valvert et son cousin, Jehan de Pardaillan, parlent souvent dePardaillan et y pensent toujours. Et quand ils en parlent, l’un desdeux, religieusement approuvé par l’autre, ne manque jamais des’écrier :

– M. de Pardaillan n’est pas mort !… Unhomme de sa trempe demeure immortel !… La Grande Camuseelle-même n’oserait le toucher de son doigt décharné !… Non,Pardaillan le chevaleresque, le preux des preux, Pardaillan n’estpas mort !… Et, un beau jour, au moment où nous nous yattendrons le moins, nous le verrons paraître parmi nous, de retourde quelque lointaine et épique chevauchée !…

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