La Loi de Lynch

Chapitre 9Le rendez-vous.

L’explication qui précède donnée, nousreprendrons notre récit au point où nous l’avons laissé enterminant le septième chapitre.

Le Rayon-de-Soleil sans parler présenta àl’Espagnole une feuille de papier, une espèce de poinçon en bois etune coquille remplie de peinture bleue.

La Gazelle fit un mouvement de joie.

– Oh ! je comprends, dit-elle.

Le chef sourit.

– Les blancs ont beaucoup de science,fit-il, rien ne leur échappe ; ma fille dessinera un collierpour le chef pâle.

– Oui, murmura-t-elle, mais voudra-t-ilme croire ?

– Que ma fille mette son cœur sur cepapier, le chasseur blanc le reconnaîtra.

La jeune fille poussa un soupir.

– Essayons, dit-elle.

Par un mouvement fébrile elle prit le papierdes mains du Rayon-de-Soleil, écrivit quelques mots à la hâte et lerendit à la jeune Indienne, toujours immobile et impassible devantelle.

Le Rayon-de-Soleil roula le papier, l’attachaavec soin autour du bois d’une flèche.

– Dans une heure il sera à son adresse,dit-elle.

Et elle disparut dans le bois avec la légèretéd’une biche effarouchée.

Ce petit manège avait duré moins de tempsqu’il ne nous en a fallu pour le rapporter.

Dès que l’Indienne avertie de longue main parle Chat-Noir du rôle qu’elle devait jouer fut partie pours’acquitter de son message :

– Voyons, dit le chef, nous ne pouvonsles sauver tous, mais au moins j’espère que ceux qui nous sontchers échapperont.

– Dieu veuille que vous ne vous trompiezpas, mon père ! répondit la jeune fille.

– Wacondah est grand ! Sa puissanceest sans bornes, il peut tout ; que ma fille espère !

Alors il y eut entre les deux interlocuteursune longue conversation à la suite de laquelle la Gazelle glissainaperçue entre les arbres et se rendit à une colline peu distantedu poste occupé par les blancs, nommée la colline del’Elk, où elle avait donné rendez-vous à don Pablo.

À la pensée de se retrouver en présence duMexicain, la jeune fille était, malgré elle, en proie à une émotionindéfinissable.

Elle sentait son cœur se serrer ; tousses membres étaient agités de mouvements convulsifs.

Le souvenir de ce qui s’était passé entre elleet lui, il y avait si peu de temps, jetait encore le trouble dansses idées et lui rendait plus difficile la tâche qu’elle s’étaitimposée.

En ce moment ce n’était plus la rude amazoneque nous avons représentée à nos lecteurs, qui, aguerrie depuis sonenfance aux scènes terribles de la vie des prairies, bravait en sejouant les plus grands périls.

Elle se sentait femme ; tout ce qu’il yavait de viril en elle avait disparu pour ne plus laisser qu’unejeune fille, timide et craintive, qui tremblait de se retrouverface à face avec l’homme qu’elle se reprochait d’avoir sicruellement outragé et qui, peut-être, en la voyant ne voudrait pascondescendre à entrer en explication avec elle et lui tournerait ledos sans lui répondre.

Toutes ces pensées et bien d’autres encoretourbillonnaient dans son cerveau, tandis que d’un pas furtif ellese dirigeait vers le lieu du rendez-vous.

Plus elle approchait, plus ses craintesétaient vives, car son esprit frappé lui retraçait avec plus deforce l’indignité de sa conduite antérieure.

Enfin elle arriva.

Le sommet de la colline était encoredésert.

Un soupir de soulagement s’échappa de sapoitrine oppressée, et elle rendit grâce à Dieu qui lui accordaitquelques minutes de répit pour se préparer à l’entretien solennelqu’elle avait elle-même demandé.

Mais le premier moment passé, une autreinquiétude la tourmenta : elle craignit que don Pablo nevoulût pas se rendre à son invitation et méprisât la chance desalut qu’elle lui offrait.

Alors, la tête penchée en avant, les yeuxfixés dans l’espace et cherchant à sonder la profondeur desténèbres, elle attendit en comptant avec anxiété les secondes.

Nul n’a pu calculer encore de combien desiècles se compose une minute pour celui qui attend.

Cependant le temps s’écoulait avec rapidité,la lune avait presque disparu à l’horizon ; une heure encoreet le soleil se lèverait.

La jeune fille commençait à douter del’arrivée de don Pablo ; un sourd désespoir s’emparait d’elle,et elle maudissait l’impossibilité matérielle qui l’obligeait àrester inactive à cette place et la réduisait à l’impuissance.

Disons en quelques mots ce qui se passait ence moment sur la colline du Bison-Fou.

Valentin, Curumilla et don Pablo, assis ausommet de la colline, fumaient silencieusement leur calumet, chacunsongeant à part soi au moyen à employer pour sortir de la positionfâcheuse dans laquelle la petite troupe se trouvait, lorsqu’unsifflement aigu se fit entendre, et une longue flèche passantrapide entre les trois hommes vint profondément s’enfoncer dans letertre de gazon au pied duquel ils se tenaient.

– Qu’est-ce-là ? s’écria Valentinqui, le premier, reprit son sang-froid ; vive Dieu ! lesPeaux Rouges commenceraient-ils déjà l’attaque !

– Réveillons nos amis, dit don Pablo.

– Ami ! fit Curumilla qui avaitarraché la flèche du tertre où elle tremblait et la considéraitattentivement.

– Que voulez-vous dire, chef ?demanda le chasseur.

– Voyez ! répondit laconiquementl’Indien en lui remettant la flèche et lui montrant d’un geste unpapier roulé autour du bois un peu au-dessus des plumes dont lesApaches garnissent cette arme.

– En effet, reprit Valentin en détachantle papier pendant que Curumilla prenait un tison allumé pour luiservir de fanal et le levait à la hauteur des yeux.

– Hum ! murmura don Pablo, cettefaçon de correspondre me semble assez louche.

– Nous allons savoir à quoi nous entenir, répondit le chasseur.

Il déplia le papier sur lequel quelques lignesétaient écrites en espagnol avec une substance bleuâtre.

Voilà ce que contenait cette lettre :

« Les Faces Pâles sont perdues ; lestribus indiennes levées en masse, aidées par les pirates desprairies, les cernent de tous les côtés. Les blancs n’ont desecours à attendre de personne. L’Unicorne est trop loin et leBlood’s Son trop occupé à se défendre lui-même pour avoir le tempsde songer à eux. Don Pablo de Zarate peut, s’il le veut, échapper àla mort qui le menace et sauver ceux qui lui sont chers. Son sortest entre ses mains. Aussitôt après la réception de cet avis, qu’ilquitte son campement et se rende seul à la colline de l’Elk, il yrencontrera une personne qui lui fournira les moyens qu’ilchercherait en vain autre part ; cette personne attendra donPablo de Zarate jusqu’au lever du soleil. Elle le supplie de ne pasnégliger cet avertissement ; demain il serait trop tard pourle sauver, il succomberait infailliblement dans une lutteinsensée.

« Un ami. »

À la lecture de cette étrange missive, lejeune homme laissa tomber sa tête sur sa poitrine et resta quelquetemps plongé dans de profondes réflexions.

– Que faire ? murmura-t-il.

– Y aller, pardieu ! réponditValentin. Qui sait ? peut-être ce chiffon de papiercontient-il notre salut à tous.

– Mais si c’est une trahison.

– Une trahison ! Allons donc, monami, vous voulez rire ! Les Indiens sont traîtres et fourbes àl’excès, je vous l’accorde ; mais ils ont une frayeurépouvantable de tout ce qui est écriture, qu’ils tiennent pour ungrimoire émanant du génie du mal. Non, cette lettre ne vient pasdes Indiens. Quant aux pirates des prairies, ils savent fort biense servir d’un rifle, mais ils ignorent complètement l’art de seservir d’une plume d’oie, et je vous affirme que d’ici à Montereyd’un côté, et à New York de l’autre, vous n’en trouveriez pas unqui sût écrire. Cet avis émane donc, sans aucun doute, d’un ami.Quel est cet ami ? voilà ce qui est plus difficile àdeviner.

– Votre opinion serait donc d’accepter lerendez-vous ?

– Pourquoi pas ? en prenant, bienentendu, toutes les précautions usitées en pareil cas.

– Je dois m’y rendre seul ?

– Canarios ! on se rendtoujours seul à ces sortes d’entrevues ; c’est convenu cela,dit Valentin en ricanant, seulement on se fait accompagner, et bienfou celui qui négligerait cette précaution.

– En admettant que je sois disposé àsuivre votre conseil, je ne puis abandonner mon père seul ici.

– Votre père est en sûreté quant àprésent. D’ailleurs il a avec lui le général et Curumilla, qui, jevous en réponds, ne se laissera pas surprendre pendant notreabsence. Du reste, réfléchissez, cela vous regarde ; seulementje vous ferai observer que nous sommes dans des circonstances assezcritiques pour que toutes considérations secondaires soient misesde côté. Canarios ! ami ! songez qu’il y vapeut-être du salut de tous !

– Vous avez raison, frère, dit résolumentle jeune homme ; qui sait si je n’aurais pas à me reprochervotre mort et celle de nos compagnons si je négligeais cetavis ? Je pars.

– Bon ! fit le chasseur,partez ; pour moi, je sais ce qui me reste à faire. Soyeztranquille, ajouta-t-il avec son rire sardonique, vous irez seul aurendez-vous ; mais si vous aviez besoin d’aide, je ne seraispas long à paraître.

– Fort bien ! mais il s’agit desortir d’ici sans être vu et de gagner la colline de l’Elk enéchappant aux milliers de regards de chats-tigres que les Apachesfixent probablement sur nous en ce moment.

– Fiez-vous à moi pour cela, dit lechasseur.

En effet, quelques minutes plus tard donPablo, guidé par Valentin, gravissait la colline de l’Elk sansavoir été dépisté par les Apaches.

Cependant la Gazelle blanche attendaittoujours, le corps penché en avant et l’oreille tendue, un bruitquelconque qui lui révélât la présence de celui qu’elle avait siinstamment prié de venir.

Tout à coup une rude main s’appesantit sur sonépaule et une voix moqueuse murmura à son oreille :

– Hé ! niña, que faites-vous donc siloin du campement ? est-ce que vous avez peur que vos ennemisne s’échappent ?

L’Espagnole se retourna avec un mouvement dedégoût mal dissimulé et reconnut Nathan, le fils aîné duCèdre-Rouge.

– Oui, by God ! c’est moi,reprit le bandit, cela vous étonne, niña ? Oh ! oh !nous sommes arrivés depuis une heure déjà avec la plus bellecollection de vautours qui se puisse imaginer.

– Mais vous-même que faites-vousici ? dit-elle sans même savoir pourquoi elle lui adressaitcette question.

– Oh ! reprit-il, c’est que moiaussi je veux me venger ; j’ai laissé mon père et les autreslà-bas, et je suis venu explorer un peu les lieux. Mais,ajouta-t-il avec un rire sinistre, il ne s’agit pas de cela dans cemoment ; avez-vous donc le diable au corps, que vous courezainsi la nuit, au risque de faire une mauvaise rencontre ?

– Que puis-je craindre ? Ne suis-jepas armée ?

– C’est vrai, répondit le pirate enricanant ; mais vous êtes jolie, et Dieu me damne si je neconnais pas des gens qui, à ma place, se moqueraient des joujouxque vous avez à votre ceinture ! Oui, vous êtes jolie, niña,ne le savez-vous pas ? Le diable m’emporte, puisque personnene vous en a encore fait la confidence, j’ai bien envie de vous ledire, moi ; qu’en pensez-vous, hein ?

– Le malheureux est ivre ! murmurala jeune fille en voyant la face hébétée du brigand et leflageolement de ses jambes. Laissez-moi, lui dit-elle, l’heure estmal choisie pour plaisanter, nous avons à nous occuper de chosesplus importantes.

– Bah ! après nous la fin dumonde ! nous sommes tous mortels, et du diable si je me souciede ce qui m’arrivera demain ! Je trouve, au contraire, l’heuresupérieurement choisie : nous sommes seuls, nul ne peut nousentendre ; qu’est-ce qui nous empêche de nous avouerfranchement que nous nous adorons ?

– Personne, si cela était vrai, réponditrésolument la jeune fille ; mais je ne suis pas d’humeur àécouter plus longtemps vos sornettes ; ainsi faites-moi leplaisir de vous retirer. J’attends ici le détachement de guerre desBisons apaches qui ne tardera pas à arriver et à prendre positionsur cette colline ; au lieu de perdre un temps précieux, vousferiez mieux de rejoindre le Cèdre-Rouge et Stanapat, avec lesquelsvous devez arrêter tous les détails de l’attaque de demain.

– C’est vrai, répondit le bandit que cesparoles avaient un peu dégrisé ; vous avez raison, niña, jem’en vais ; mais ce qui est différé n’est pas perdu :j’espère, un autre jour, vous retrouver moins farouche, ma colombe.Au revoir !

Et, tournant insoucieusement sur lui-même, lebandit jeta son rifle sur l’épaule et descendit la colline dans ladirection du camp des Apaches.

La jeune Espagnole, demeurée seule, sefélicita d’avoir échappé au danger qui l’avait un instant menacée,car elle avait tremblé que don Pablo n’arrivât pendant que Nathanétait avec elle.

Cependant la nouvelle de la jonction duCèdre-Rouge avec sa bande augmentait encore les appréhensions de laGazelle blanche et redoublait ses inquiétudes pour ceux qu’elleavait résolu de sauver coûte que coûte.

Au moment où elle n’espérait plus voir lejeune homme et où elle ne regardait plus que par acquit deconscience plutôt que dans la persuasion que celui qu’elleattendait vainement depuis si longtemps allait paraître, elleaperçut, à une portée de flèche à peu près, un homme qui s’avançaità grands pas de son côté.

Elle devina plutôt qu’elle ne reconnut donPablo de Zarate.

– Enfin ! s’écria-t-elle avecbonheur en se précipitant à sa rencontre.

Le jeune homme fut bientôt auprès d’elle.

En la reconnaissant il fit un pas enarrière.

– Vous, madame ! lui dit-il ;c’est vous qui m’avez écrit de me rendre ici ?

– Oui, répondit-elle d’une voixtremblante, oui, c’est moi.

– Que peut-il y avoir de commun entrenous ? reprit dédaigneusement don Pablo.

– Oh ! ne m’accablez pas, jecomprends à présent seulement tout ce que ma conduite a eu decoupable et d’indigne ; pardonnez un égarement que je déplore.Écoutez-moi, au nom du ciel ne méprisez pas les avis que je veuxvous donner, il s’agit de votre salut et de celui de ceux que vousaimez !

– Grâce à Dieu, madame, réponditfroidement le jeune homme, pendant les quelques heures que nousavons été réunis, j’ai assez appris à vous connaître pour ne plusajouter foi à aucune de vos protestations ; je n’ai qu’unregret en ce moment, c’est celui de m’être laissé entraîner dans lepiège que vous m’avez tendu.

– Moi, vous tendre un piège !s’écria-t-elle avec indignation, lorsque je verserais avec joie ladernière goutte de mon sang pour vous sauver !

– Me sauver ? moi ! Allonsdonc, madame ! me perdre, vous voulez dire, reprit don Pabloavec un sourire de mépris, me croyez-vous si niais ? Allons,soyez franche au moins, votre projet a réussi, je suis entre vosmains ; faites paraître vos complices qui sont sans doutecachés derrière ces massifs de broussailles, je ne leur ferai pasl’honneur de leur disputer ma vie !

– Mon Dieu, mon Dieu ! s’écria lajeune fille en se tordant les mains avec désespoir, suis-je assezpunie ? Don Pablo, au nom du ciel, écoutez-moi ! Dansquelques instants il sera trop tard ; je veux vous sauver,vous dis-je !

– Vous mentez impudemment, madame,s’écria Valentin qui apparut en s’élançant d’un buisson ; iln’y a qu’un instant, à cette place même où vous êtes, vousannonciez à Nathan, le digne fils de votre complice le Cèdre-Rouge,l’arrivée d’un détachement de guerre apache ; osez dire que cen’est pas vrai !

Cette révélation fut un coup de foudre pour lajeune fille. Elle comprit qu’il lui serait impossible de désabusercelui qu’elle aimait et de le convaincre de son innocence devantcette preuve en apparence si évidente de sa trahison.

Elle se laissa tomber accablée sur le sol auxpieds du jeune homme.

– Oh ! dit celui-ci avec dégoût,cette misérable est mon mauvais génie.

Il fit un mouvement pour se retirer.

– Un instant, s’écria Valentin enl’arrêtant, cela ne peut finir ainsi ; terminons-en une bonnefois avec cette créature avant qu’elle ne nous fasse massacrer.

Après avoir armé un pistolet, il en appuyafroidement le canon sur la tempe de la jeune femme, qui ne fit pasun geste pour se soustraire au sort qui la menaçait.

Don Pablo lui saisit vivement le bras.

– Valentin, lui dit-il, qu’allez-vousfaire, ami ?

– C’est juste, répondît lechasseur ; si près de la mort, je ne me déshonorerai pas entuant cette malheureuse.

– Bien, frère ! fit don Pablo enlançant un regard de mépris à la Gazelle qui l’implorait envain ; des hommes comme nous n’assassinent pas les femmes.Laissons cette misérable et vendons chèrement notre vie.

– Bah ! bah ! la mort n’estpeut-être pas aussi proche que vous le supposez ; pour mapart, je ne désespère pas de nous sortir de ce guêpier.

Ils jetèrent un regard anxieux dans la valléepour reconnaître leur position.

L’obscurité était presque dissipée ; lesoleil, encore invisible, teintait le ciel de ces lueurs rougeâtresqui précèdent de peu d’instants son apparition.

Aussi loin que la vue pouvait s’étendre, laplaine était envahie par de forts détachements indiens.

Les deux hommes reconnurent qu’il leur restaitde bien faibles chances de regagner leur forteresse.

Pourtant ces hommes, accoutumés à tenterjournellement l’impossible, ne se découragèrent pas en présence dudanger imminent qui les menaçait.

Après s’être silencieusement serré la maindans une étreinte suprême, ces deux natures d’élite relevèrentfièrement la tête, et le front calme, l’œil étincelant, ils sepréparèrent à braver la mort horrible qui les attendait s’ilsétaient découverts.

– Arrêtez, au nom du ciel ! s’écriala jeune fille en se traînant sur les genoux jusqu’aux pieds de donPablo.

– Arrière, madame ! réponditcelui-ci ; laissez-nous mourir bravement.

– Mais je ne veux pas que vous mouriez,moi, reprit-elle avec un cri déchirant ; je vous répète que jevous sauverai si vous y consentez.

– Nous sauver ! Dieu seul peut lefaire, dit tristement le jeune homme ; réjouissez-vous quenous ne veuillions pas rougir nos mains de votre sang perfide, etne nous importunez pas davantage.

– Oh ! rien ne pourra donc vousconvaincre ! fit-elle avec désespoir.

– Rien ! dit froidement leMexicain.

– Ah ! s’écria-t-elle l’œilrayonnant de joie, j’ai trouvé !… Suivez-moi et vousrejoindrez vos compagnons !

Don Pablo, qui déjà s’était éloigné dequelques pas, se retourna en hésitant.

– Que craignez-vous ? reprit-elle,vous serez toujours à même de me tuer si je vous trompe. Oh !fit-elle avec exaltation, que m’importe de mourir si je voussauve !

– Au fait, observa Valentin, elle araison ; et puis dans notre position nous n’avons plus rien àménager. Qui sait ? elle dit peut-être la vérité !

– Oui ! oui ! s’écria la jeunefille avec prière, fiez-vous à moi !

– Bah ! essayons, dit Valentin.

– Marchez, répondit laconiquement donPablo, nous vous suivons.

– Oh ! merci ! merci !dit-elle avec effusion en couvrant de baisers et de larmes la maindu jeune homme, dont elle s’était emparée malgré lui ; vousverrez que je vous sauverai !

– Étrange créature ! murmura lechasseur en s’essuyant les yeux avec le dos de sa maincalleuse ; elle a le diable au corps, elle est capable de lefaire comme elle le dit.

– Peut-être ! répondit don Pablo enhochant tristement la tête ; mais notre position est biendésespérée, mon ami.

– On ne meurt qu’une fois, aprèstout ! dit philosophiquement le chasseur en jetant son riflesur l’épaule ; je suis on ne peut plus curieux de savoircomment tout cela finira.

– Venez ! dit l’Espagnole.

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