Le Maître de la Terre

II

Il ne fallut pas moins de trois heures, aujeune prêtre, pour se frayer un passage jusqu’à Westminster, parmila foule énorme qui encombrait les rues et les places. L’aube,maintenant, se levait dans le ciel, avec une lueur pâle que faisaitparaître plus pâle encore l’illumination brillante des globesélectriques.

Percy voyait, en face de lui, le clocher de lacathédrale ; mais il se demandait s’il réussirait jamais àfranchir les quelques mètres qui lui restaient à franchir. Et iltravaillait patiemment, des coudes, à se pousser de proche enproche, lorsqu’un mouvement subit de la foule l’obligea, lui aussi,à lever la tête ; et alors un spectacle lui apparut que,jusqu’à son dernier jour, il ne devait pas oublier.

Un objet mince, frêle, ayant un peu la formed’un poisson, blanc comme le lait, fantastique comme une ombre, etbeau comme le jour, glissait légèrement dans l’air, au-dessus duclocher de la cathédrale, tournait, et puis se dirigeait versl’endroit où se trouvait Percy, semblant flotter sur les vaguesmêmes du silence que créait sa vue ; et l’objet allait,allait, les ailes déployées, à une hauteur d’environ dix mètresau-dessus des têtes.

Lorsque Percy put retrouver sa force deréflexion, – car il avait été, d’abord, absolument ébloui par cespectacle imprévu, – l’étrange chose blanche s’était encorerapprochée de lui. Et toujours elle se rapprochait, flottantlentement, doucement, comme une mouette au-dessus de la mer. Percypouvait apercevoir, à présent, tous les détails du vaisseau aérien,la proue ornée, le parapet bas, la tête du pilote ; ildistinguait même tous les mouvements des quatre hommes del’équipage. Et puis, derrière eux, il découvrit et put considérerce que toute cette foule, et lui-même, aspiraient à voir.

Sur le pont central du vaisseau blanc, sedressait, très haut, un siège drapé de blanc, orné d’insignesmaçonniques ; et, sur ce siège, une figure d’homme trônait,seule et immobile. L’homme ne faisait aucun signe, ne semblait passe rendre compte de la présence du monstrueux troupeau humainaccumulé au-dessous de lui. Son vêtement sombre contrastaitviolemment avec la blancheur qui l’environnait. Il avait un visagepâle, très jeune encore, mais fortement accentué, avec des sourcilsnoirs très arqués, de grands yeux sombres d’un éclat de glace, deslèvres minces, et des cheveux blancs.

Puis le visage fit un mouvement ; et levaisseau, poursuivant sa route, se dirigea vers le palais.

On entendit quelque part un cri d’angoisse, ungémissement hystérique ; puis, de nouveau, le mugissementtempétueux des voix se déchaîna parmi la foule.

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer