L’Espion X. 323 – Volume III – Du sang sur le Nil

Chapitre 19ÉPILOGUE

Le gouvernement russe a tenu sespromesses.

Le chevalier Ivan de Tresca de Spérat a étérétabli dans ses titres, ses dignités et ses biens. La barre dehonte qui avait été tirée sur son blason a été effacée par uneéclatante réhabilitation, que les mérites de X. 323 avaientgagnée cent fois.

L’homme supérieur, qu’un devoir filial avaittransformé en espion, le plus loyal, le plus habile qui ait jamaisété, doit être connu des lecteurs du Times, qui, faute dece renseignement, garderaient rancune à mon cher journal.

Riche propriétaire de la Pologne russe, nonloin de la frontière autrichienne, Stanislas de Spérat, pèred’Ivan, de Tanagra, d’Ellen, avait été accusé de complot contre letsar, par un parent avide de s’approprier son bien.

L’accusation de complot c’est l’exil enSibérie, le travail dans les mines, l’agonie atroce en un paysinclément.

Stanislas prit la fuite, avec son épouseArrina et ses enfants. Il se réfugia sur le territoire autrichien.La haine l’y poursuivit. L’héritier avide, qui avait hérité desvastes domaines en Pologne russe, réussit à gagner des serviteurs,à empoisonner ses victimes, dont les dépouilles furent consuméesdans un lit de chaux vive.

Et devant les morts, X. 323, âgé de seizeans, sa sœur Tanagra, plus jeune de quelques années, avaient faitle serment de vengeance et de réhabilitation.

Deux ans après, révélant un courage inouï, uneprodigieuse aptitude à la lutte, X. 323 avait démasqué lecalomniateur, l’avait fait accrocher à la potence descriminels.

On eût dû réhabiliter le père de cet enfanthéroïque.

Le gouvernement recula le paiement de cettedette sacrée. Il voulait s’assurer le concours de l’intelligenced’élite du jeune homme.

Il l’astreignit durant dix ans à se dévouersans cesse.

Il avait fallu qu’avant de s’engager dans laterrible aventure des Dix Yeux d’Or, Ivan eût une entrevue avec lechef suprême de la police russe et lui fît cettedéclaration :

– Ceci est ma dernière expédition. Sil’on refuse ensuite ce qui m’est dû, je me tuerai et le tsar, quiest un honnête homme, se sentira frappé au cœur par l’abominableégoïsme de son administration.

Un ambassadeur avait rapporté ces paroles àl’empereur, et celui-ci avait engagé sa parole souveraine qu’iltint religieusement, en dépit des manœuvres de fonctionnairesaffolés par la pensée de perdre un allié comme X. 323.

Voici un an que ces choses sont passées.

X. 323 a épousé Aldine. Ils vivent dansle domaine de Spérat, parmi cette population polonaise, éprise deson passé, espéreuse en son avenir.

Tanagra et moi avons été unis à Saint-Paul’sChurch, à Londres, où nous résidons tous deux, car notre petiteEllen a été transportée dans le caveau funéraire où ma mère, monpère reposaient déjà, et chaque semaine nous allons sur cessouvenirs chéris semer des fleurs.

Nous sommes heureux, nous aimant au delà detout, et cependant il reste une ombre sur nous.

J’ai beau me veiller, je ne puis séparerl’idée de Tanagra de l’idée d’Ellen.

Et parfois je m’adresse à ma bien-aiméevivante, en lui donnant le nom de ma bien-aimée morte.

« Tanagra !

« Ellen ! »

Elle répond aux deux noms, avec une petitetristesse que je voudrais au prix de ma vie lui épargner.

Mais l’unité dans la dualité s’est empreintedans mon cerveau. Je retombe sans cesse dans la même faute. Etquand je m’accuse, ma compagne chérie m’apaise doucement.

– Il faudrait une nouvelle Ellen pourvous guérir, cher Max. Je sais bien qu’il n’y a pas de votrefaute.

Une dépêche nous arrive de Ragztiz, labourgade où est le bureau de poste le plus proche du château deSpérat.

Nous l’ouvrons, inquiets. Les télégrammes deceux que l’on aime apportent toujours un peu d’anxiété. Nous lisonsensemble :

« Aldine mère d’une petite fille. Tout lemonde va bien. Nous appelons l’enfant Ellen. Tout cœur.

« SPÉRAT.

Et Tanagra, une douceur infinie dans leregard, murmure :

– L’autre Ellen ! Max, Max, l’espriterrant ne sera plus entre nous ; car maintenant il est encelle qui vient de naître.

Désormais, toute une vie de bonheur s’ouvre ànous ; confiants dans un avenir rempli de promesses nousrestons silencieux, n’ayant qu’une même pensée, qu’une seuleâme.

FIN

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