Nouveaux Mystères et aventures

Chapitre 10

 

Mais cette fois, Abe ne tint pas parole.

Sa robuste constitution intervint, et iltriompha d’une blessure qui eût été mortelle pour un homme plusfaible.

Faut-il l’attribuer à l’air balsamique desbois que la brise amenait par dessus des milliers de milles deforêt jusque dans la chambre du malade ; ou à la petitegarde-malade qui le soignait avec une telle douceur ?

En tout cas nous savons qu’en moins de deuxmois il avait vendu ses actions du Conemara et quitté pour toujoursla petite cabane de la côte.

Peu de temps après, j’eus le plaisir de lirel’extrait d’une lettre écrite par une jeune personne du nomd’Amélie, à laquelle nous avons fait une allusion passagère aucours de notre récit.

Nous avons déjà enfreint le secret d’uneépître féminine : aussi ne nous ferons-nous guère de scrupulede jeter un coup d’œil sur une autre épître :

« J’ai été l’une des demoisellesd’honneur, dit-elle, et Carrie paraissait charmante (motsouligné) sous le voile et les fleurs d’oranger.

« Quel homme ! Il est deux fois plusgros que votre Jack ! Il était bien amusant avec sarougeur ; il a lâché le livre de prières. Et quand on lui aposé la question, il a répondu oui, d’une voix telle, quevous l’auriez entendu d’un bout à l’autre de George Street.

« Son témoin était charmant (motsouligné de deux traits), avec sa figure douce. Il était bien beau,bien gentil. Trop doux pour se défendre parmi ces rudes gaillards,j’en suis sûre. »

Il est, selon moi, parfaitement possible quequand les temps furent accomplis, miss Amélie se soit chargée deveiller elle-même sur notre ancien ami M. Jack Morgan,généralement connu sous le nom de patron.

Il y a près du coude de la rivière un arbrequ’on montre en disant : c’est le gommier de Ferguson.

Il est inutile d’entrer dans des détails quiseraient répugnants.

La justice est brève et sévère dans lescolonies qui débutent et les habitants de l’Écluse de Harveyétaient gens sérieux et pratiques.

L’élite de la société continue à se donnerrendez-vous le samedi soir dans la chambre réservée du BarColonial.

En de telles circonstances, si l’on a unétranger ou un invité à régaler, on observe constamment le mêmecérémonial, qui consiste à remplir les verres en silence, à lesfrapper sur la table, puis, après avoir toussé, comme pours’excuser, Jim Struggles s’avance et fait la narration du poissond’avril et de la façon dont l’aventure se termina.

On est d’accord pour reconnaître qu’il s’entire en véritable artiste, lorsque, parvenu au terme de son récit,il le conclut en balançant son verre en l’air, et disant :

– Maintenant, à la santé de Monsieur etMadame « Les Os ».

Manifestation sentimentale à laquellel’étranger ne manquera pas d’applaudir, s’il est un hommeavisé.

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