Précaution

Chapitre 50

 

Ledénouement doit être un mariage.

THOMAS BROWN.

Les riantes et fertiles vallées de Pendennyssétaient couvertes des plus belles moissons, et le laboureurcontent, après avoir contemplé les richesses que lui prodiguait lanature, jetait un regard satisfait sur le château qui avait été silongtemps inhabité, et qui était redevenu l’asile du bonheur et dela joie. Toutes les croisées étaient ouvertes pour recevoir lesrayons du soleil ; et les vassaux du comte, heureux etsurpris, ouvraient de grands yeux en voyant les nombreuxdomestiques en riches livrées qui allaient et venaient dans lesvastes appartements, les chevaux magnifiques que promenaient lespalefreniers, et les voitures portant différentes armoiries quiremplissaient les cours.

Pendennyss avait voulu montrer à Émilie larésidence de ses ancêtres, et il avait facilement décidé toute lafamille et leurs meilleurs amis à les accompagner.

Dans une longue file de riches et vastesappartements, les maîtres et les hôtes de cette magnifique demeureétaient occupés à admirer toutes les beautés antiques qu’ellerenfermait, et à arranger les parties de plaisir qui devaientemployer leur journée.

John Moseley examinait avec soin quelquespierres à fusil que venait de lui apporter son domestique, tandisque Grace, assise près de lui, tâchait en plaisantant de les luiprendre l’une après l’autre, en lui disant du ton d’un tendrereproche :

– Vous ne devriez pas vous occuper siexclusivement de la chasse, Moseley ; il est cruel de tuertant de pauvres oiseaux, pour votre seul plaisir.

– Demandez au cuisinier d’Émilie et àl’appétit de M. Haughton, dit John en étendant la main pourreprendre les pierres qu’elle lui avait escamotées, si je ne chasseque pour mon seul plaisir. Je vous l’ai déjà dit, Grace, il estbien rare que je manque mon coup.

– Jolie excuse, en vérité ! ditGrace en riant et en s’efforçant de garder sa prise ;savez-vous, John, que c’est fort mal ? Le massacre que vousfaites tous les jours est vraiment affreux.

– Je vois, dit John, que votre cœursensible aimerait mieux un chasseur comme le ci-devant ex-capitaineJarvis, qui tirait un mois entier sans même toucher la plume d’unoiseau. Puis, jetant un regard malin sur Jane, qui, étendue sur unsofa, parcourait un volume de poésies nouvelles, ilajouta :

– Jane pouvait être bien tranquille aveclui ; la douce fauvette, le tendre rossignol, cette voix del’amour qui, pendant la nuit sombre, charme les échos de la vallée,tous ces chanteurs emplumés n’avaient rien à craindre de lui.

– Moseley, dit Grace en lui laissantreprendre les pierres, mais en retenant doucement sa main,Pendennyss et Chatterton, comme de bons maris, conduisent leursfemmes voir la belle chute d’eau qu’on trouve dans les montagnes, àquelques milles d’ici. Que deviendrai-je seule pendant cette longueet ennuyeuse matinée ?

John jeta sur sa femme un regard pénétrantpour voir si elle avait un grand désir d’accompagner ses amies, et,remettant dans sa poche avec regret une excellente pierre qu’ilvenait de choisir, il lui dit :

– Mais vous n’aimez pas beaucoup lapromenade, Mrs Moseley ?

– Je préférerais ce plaisir à tous lesautres, dit Grace vivement, si…

– Eh bien ! si… ?

– Si nous nous promenions ensemble,dit-elle en rougissant.

– Eh bien ! dit John en la regardantavec tendresse, je veux bien être de la partie projetée, mais à unecondition.

– Dites-la bien vite, Moseley, s’écriaGrace les yeux brillants de plaisir au seul espoir de faire unelongue promenade avec son mari.

– À condition que vous n’exposerez plusvotre santé en allant à l’église le dimanche lorsqu’il pleuvra.

– Notre voiture est si bien fermée,Moseley, répondit Grace en baissant tristement les yeux sur letapis ; il n’y a pas le moindre danger, je vous assure ;vous voyez que Pendennyss, Émilie et ma tante Wilson, ne manquentjamais au service divin, à moins qu’il ne leur soit impossible d’yassister.

– Le comte accompagne sa femme ;mais que voulez-vous que je devienne pendant vos longuesabsences ? dit John en lui pressant tendrement la main. J’aimeà entendre un bon sermon, mais non lorsqu’il faut braver un mauvaistemps pour l’aller chercher. Vous devez consentir à me faire ceplaisir, Grace ; vous savez que je ne suis heureux qu’auprèsde vous.

Grace fit un léger sourire, et John, la voyantébranlée, ajouta :

– Eh bien ! que dites-vous de macondition ?

– Il faut bien l’accepter puisque vous ledésirez, répondit Grace d’un air mélancolique, je n’irai pluslorsqu’il pleuvra. John demanda son phaéton, et Grace se renditdans sa chambre pour s’habiller, en regrettant d’avoir si peu decaractère et de ne pouvoir rien refuser à son mari.

Dans l’embrasure d’une fenêtre sur laquelleétaient posés de grands vases renfermant des plantes exotiques,lady Marianne jouait avec une rose à peine éclose, et son cousin leduc de Derwent était devant elle, se demandant laquelle était laplus fraîche et la plus jolie.

– Vous avez entendu, lui dit-il, leprojet que l’on a fait pendant le déjeuner d’aller voir la chuted’eau des montagnes. Mais je suppose que vous l’avez vue tropsouvent pour être du nombre des curieux.

– Pardonnez-moi, répondit Marianne ensouriant, j’ai toujours aimé beaucoup cette cascade, et je me faisun vrai plaisir d’être témoin de l’effet qu’elle produira surÉmilie ; je comptais même lui demander une place dans sonphaéton.

– Que je serais heureux, s’écria le ducavec vivacité, si lady Marianne voulait en accepter une dans montilbury, et me permettre d’être son chevalier !

Marianne consentit à cet arrangement avec unplaisir qu’elle ne chercha point à cacher, et Derwentcontinua :

– Mais si vous voulez bien me prendrepour chevalier, il est juste que je porte vos couleurs, et sa mainse dirigeait vers le bouton de rose. Marianne hésita un moment,jeta les yeux sur le beau point de vue dont on jouissait de lafenêtre, regarda autour de la chambré en demandant où pouvait êtreson frère ; mais pendant qu’elle cherchait ainsi à dissimulerson trouble, elle rencontra les yeux du duc fixés sur elle avecardeur ; sa main suppliante était encore étendue vers elle, etelle lui abandonna la rose, dont ses joues éclipsaient en ce momentles plus riches couleurs. Ils se séparèrent pour se préparer à lapromenade, et en revenant de cette petite excursion, le ducparaissait plus gai et plus heureux que jamais ; il ne ditrien qui pût en faire deviner la cause, mais ses yeux brillants dejoie tournaient toujours vers sa cousine.

– En vérité, ma chère lady Moseley, ditla douairière en s’asseyant auprès d’elle, après avoir jeté lesyeux sur les magnifiques domaines qu’on apercevait de la croisée,et sur le superbe salon où elles se trouvaient, Émilie est vraimenttrès bien établie, mais très bien, mieux même que ma Grace.

– Grace a un bon mari, qui l’aimetendrement et qui la rendra heureuse, je l’espère, répondit ladyMoseley d’un air sérieux.

– Oh ! pour heureuse, je n’en doutepas, se hâta de dire la douairière ; mais j’ai entendu direqu’Émilie a une pension de douze mille livres sterling. À propos,ajouta-t-elle en baissant la voix, quoique personne ne fût à portéede les entendre, dites-moi donc pourquoi le comte ne lui a pasassigné en douaire Lumley-Castle au lieu du Doyenné.

– Les douaires rappellent toujours desidées de veuvage : ne nous occupons pas d’un si triste sujet,dit lady Moseley ; puis elle ajouta d’un air plusgai :

– Mais vous avez été àAnnerdale-House ; n’est-il pas vrai que c’est une maisonmagnifique ?

– Magnifique, en vérité, répondit ladouairière en soupirant. Le comte n’a-t-il pas dessein d’augmenterle fermage des domaines de Pendennyss ? On m’a dit que lesbaux étaient près d’expirer et qu’ils avaient été passés à très basprix.

– Je ne le crois pas, répondit ladyMoseley ; le comte a assez de fortune pour ne pas désirer del’augmenter, et il veut par-dessus tout le bonheur et la prospéritéde ses vassaux. Mais voici Clara et son petit garçon ;n’est-ce pas un charmant enfant ? s’écria la grand-maman en leregardant avec admiration et en le prenant dans les bras.

– Oh ! oui, il est charmant, dit ladouairière en promenant autour du salon ses regardsdistraits ; mais, voyant que Catherine changeait de place pourse rapprocher de sir Henry Stapleton, elle se hâta del’appeler :

– Lady Herriefield, venez ici, ma chère,je désire vous voir près de moi.

Catherine obéit en faisant la moue : elleentra avec sa mère dans une longue discussion sur la couleur et laforme d’un chapeau ; mais ses yeux, errant dans tous les coinsdu salon, prouvaient qu’elle n’apportait pas toute l’attentionnécessaire à un sujet si important.

La douairière avait à combattre les maximesfrivoles qu’elle avait données à sa fille, et elle avait plus depeine maintenant à la retenir dans les bornes de la réserve et dela prudence, qu’elle n’en avait eu jadis à lui inspirer le goût dela coquetterie.

– Cher oncle Benfield, dit Émilie ens’approchant de lui un verre à la main, voici le negus[7] que vous désiriez ; je l’ai apprêtémoi-même, et j’espère que vous le trouverez bon.

– Ô chère lady Pendennyss ! dit levieux gentilhomme en se levant avec l’ancienne courtoisie pourprendre le verre qu’elle lui offrait, vous vous donnez trop depeine pour un vieux garçon comme moi, beaucoup trop, en vérité,beaucoup trop.

– Les vieux garçons sont quelquefois plusrecherchés que les jeunes, s’écria gaiement Pendennyss qui l’avaitentendu. Voilà mon ami, M. Peter Johnson ; qui sait sinous ne danserons pas bientôt à ses noces ?

– Milord, milady et mon honorable maître,dit Peter gravement et avec un salut respectueux, sans bouger de laplace où il attendait, un plateau à la main, que M. Benfieldeût fini de boire, pour emporter son verre, j’ai passé l’âge depenser aux femmes ; j’aurai soixante-treize ans, vienne le1er du mois d’août.

– Que pouvez-vous mieux faire de vostrois cents livres de rente, dit Émilie en souriant, que de lespartager avec une bonne femme, qui embellisse le soir de vosjours ?

– Milady… hem… milady, dit l’intendant enrougissant, si votre bonté daignait y consentir, j’ai formé, pouren disposer, un petit plan qui me tient fort à cœur, car je n’aidans le monde ni enfants ni parents pour recueillir masuccession.

– Je serais charmée de connaître ce plan,dit Émilie voyant que Peter brûlait de s’expliquer.

– Si milord, milady et mon honorablemaître, l’avaient pour agréable, j’ajouterais un dernier codicilleau testament de mon maître, pour disposer des dons qu’il m’afaits.

– Au testament de votre maître ! ditle comte en riant ; et pourquoi pas au vôtre, mon bonPeter ?

– Honorable lord, dit l’intendant avecune grande humilité, ce n’est pas à un pauvre serviteur comme moiqu’il appartient de faire un testament.

– Vous vous trompez, Peter, dit le comteavec bonté : d’ailleurs un testament n’est valable qu’après lamort du testateur, et deux personnes ne peuvent en faire en commun,puisqu’il est probable qu’elles ne mourront pas le même jour.

– Nos testaments seront cependant ouvertsle même jour, dit Peter avec émotion. M. Benfield le regardad’un air attendri, et le comte et Émilie furent si touchés de sonattachement pour son maître, qu’il leur fut impossible de prononcerun mot.

Comme Peter l’avait dit, il avait son plantrop à cœur pour abandonner ce sujet au moment où il venait derompre la glace. Il désirait vivement que la comtesse agréât sonprojet, car il n’eût point voulu lui désobéir, même après samort.

– Milady, se hâta de dire Peter, mon planest, si mon honorable maître veut bien me le permettre, d’ajouterun codicille à mon testament, et de léguer ma petite fortune à unepetite… lady Émilie Denbigh.

– Ô Peter ! vous et mon oncleBenfield, vous êtes cent fois trop bons, dit Émilie en riant et enrougissant à la fois, tandis qu’elle se tournait vers sa mère etClara.

– Je vous remercie, je vous remercie,s’écria le comte touché en suivant des yeux sa chère Émilie, et enpressant cordialement la main de Peter. Puissiez-vous jouirlongtemps de la petite fortune que vous destinez à notrepetite ! et le comte alla rejoindre ses hôtes.

– Peter, lui dit son maître à voix basse,on ne doit jamais parler prématurément de ces choses-là ; nevoyez-vous pas comme elle rougit ?

– Ah ! chère Emmy, s’écria-t-il enprenant une des belles pêches qu’elle lui présentait, que vous êtesbonne de penser à votre vieil oncle !

– Milord, dit M. Haughton au comte,Mrs Francis Yves et moi nous avons eu une petite querelle ausujet du bonheur domestique. Elle prétend qu’elle est aussiheureuse au presbytère de Bolton que dans ce superbe château.

– J’espère, dit Francis, que vousn’employez pas votre éloquence à la faire changer d’opinion. Ce neserait pas lui rendre un grand service.

– Laissez-le faire, mon ami, dit Clara enriant, il aura beau s’évertuer à me convaincre, je connais tropbien mes véritables intérêts pour qu’il puisse jamais yréussir.

– Vous avez raison, dit Pendennyss. Notrebonheur dépend-il donc de la place que nous occupons dans lasociété ? Lorsque je suis ici, entouré de mes vassaux, il est,je l’avoue, des moments de faiblesse dans lesquels la perte de monrang et de ma fortune pourrait m’être sensible ; il est sidoux de pouvoir faire le bien et d’avoir sous les yeux l’image dubonheur ! Et pourtant, quand je suis à l’armée, soumis à degrandes privations, forcé d’obéir à des hommes qui ont un gradesupérieur au mien, entravé dans mes moindres actions, dirigé danstous mes mouvements, il me semble qu’au fond mes jouissances sontencore les mêmes.

– C’est, dit Francis, que VotreSeigneurie a toujours été habituée à chercher hors des limites dece monde ses consolations et ses espérances.

– Croyez-vous qu’il soit impossible d’entrouver même ici-bas ? reprit le comte en regardant tendrementÉmilie ; chacun peut rencontrer le bonheur dans sacondition ; bien fou qui désire en changer !

– Et croyez-vous que j’aie cettefolie ? s’écria M. Haughton ; savez-vous bien quemoi qui parle, je ne voudrais pas changer même avec vous… à moins,pourtant, ajouta-t-il en saluant respectueusement la comtesse, quele désir d’avoir une aussi jolie femme…

– Vous êtes bien aimable, dit Émilie enriant ; mais je ne voudrais pas priver Mrs Haughton d’unmari dont elle se trouve si bien depuis vingt ans.

– Depuis trente, Milady, s’il vousplait.

– Et qui fera son bonheur pendant plus detrente ans encore, je l’espère, dit Émilie au moment où undomestique annonçait que les voitures étaient prêtes. Les jeunesgens se disposèrent à partir pour la promenade projetée.Pendennyss, John et Chatterton conduisirent chacun leur femme dansleur phaéton ; le duc et Marianne partirent les derniers, eteurent soin de rester toujours à quelque distance du reste ducortège.

Comme ils sortaient des cours du château, lacomtesse leva les yeux, et vit à une croisée du salon sa tante etle docteur Yves ; elle leur envoya un baiser, et tourna verseux, aussi longtemps qu’elle put les apercevoir, des yeux oùbrillaient à la fois l’innocence, la joie et l’amour.

Avant de quitter le parc, la petite caravanerencontra sir Edward, qui se promenait avec sa femme et sa fille.Le baronnet suivit des yeux les voitures, après avoir échangé desregards d’affection avec ses enfants ; et si celui qu’il jetaensuite sur Jane était moins joyeux, il n’en exprimait que plus desollicitude et d’amour paternel.

– Vous devez bien vous applaudir del’heureux fruit de vos soins, dit le docteur Yves àMrs Wilson. Autant que la prudence humaine peut en juger,Émilie est dans la situation la plus heureuse qu’une femme puissedésirer. Épouse d’un mari pieux, aimé de tous, et méritant del’être.

– Oui, répondit Mrs Wilson ;ils sont aussi heureux qu’il est possible de l’être dans ce monde,et de plus ils sont préparés à supporter avec courage les reversqui pourraient leur arriver, et à s’acquitter chrétiennement desdevoirs que leur nouvel état leur impose. Je ne crois pas,ajouta-t-elle d’un air pensif, que Pendennyss puisse jamais douterdes affections d’une femme telle qu’Émilie.

– Et moi, dit le docteur en souriant, jene conçois pas ce qui peut vous inspirer une pensée si injurieuseau caractère connu de George.

– La seule chose qui m’ait jamais dépluen lui, c’est la défiance qui l’a porté à adopter un faux nom pours’introduire dans notre famille.

– Il ne l’a pas adopté, Madame ; lehasard et les circonstances accidentelles l’y ont entraîné, et enréfléchissant à l’impression profonde qu’avait faite sur son espritla conduite de sa mère, à sa grande richesse et à son rang élevé,vous ne vous étonnerez plus qu’il ait cédé à la tentation de seservir d’une supercherie plus innocente qu’injurieuse.

– Docteur Yves, dit Mrs Wilson, jene m’attendais pas à vous entendre défendre l’imposture.

– Je ne la défends pas, Madame, réponditle docteur Yves en souriant ; j’avoue la faute deGeorge ; ma femme, mon fils et moi nous nous sommes réunispour lui faire dans le temps des remontrances à ce sujet. Je disque la réussite même ne justifierait pas les moyens illégitimesqu’on avait employés pour y arriver, et qu’il était toujoursdangereux de se départir des règles ordinaires.

– Et vous n’avez pu convaincre votreauditoire, dit Mrs Wilson avec gaieté ; c’était donc lapremière fois, mon cher docteur ?

– De la flatterie, Mrs Wilson ?Est-ce donc pour me prouver qu’il n’y a personne sans défaut ?Je le convainquis de la vérité du principe ; mais le comteprétendit que le cas où il se trouvait faisait une exceptioninnocente : il avait, je crois, la vanité de penser qu’encachant son véritable nom il se faisait plus de tort qu’à aucunautre ; enfin il m’exposa tant de raisons différentes, quej’en fus presque étourdi, et il fallut bien capituler. Au reste, ila été assez puni de sa ruse ; il a souffert plus qu’il n’oseen convenir lui-même, et rien de tout cela ne serait arrivé s’il sefût présenté sous son véritable nom.

– S’ils étudient l’histoire de dona Juliaet la leur, dit la bonne veuve, ils auront toujours sous les yeuxdes exemples salutaires qui leur rappelleront l’importance de deuxvertus cardinales, l’obéissance et la véracité.

– Julia a beaucoup souffert, reprit ledocteur, et, quoiqu’elle soit retournée auprès de son père, lessuites de son imprudence subsisteront encore longtemps. Lorsqu’unefois les liens de la confiance et de l’estime ont été brisés, ilest bien difficile qu’ils se rétablissent jamais avec la mêmeforce. Mais, pour en venir à un sujet qui vous intéresse plusparticulièrement, combien ne devez vous pas vous applaudir del’heureux succès de vos soins pour l’éducation d’Émilie ! Sonbonheur est votre ouvrage.

– Il est certainement bien doux de penserque nous avons rempli notre devoir, dit Mrs Wilson ; etce devoir est moins difficile à accomplir que nous ne sommes portésà le supposer. Il suffit de poser des bases qui soient capables desoutenir l’édifice. Dans l’âge où l’âme est encore flexible, je mesuis appliquée à former celle d’Émilie, et à lui donner desprincipes qui pussent lui servir de guide dans toute sa vie. Cesprincipes se sont développés avec les années ; j’en observaisles progrès avec une constante sollicitude, prête à lui tendre lamain pour la soutenir dès que j’apercevrais la moindre faiblesse.Le ciel a béni mes efforts, et il m’en a bien récompensée en laguidant dans le choix d’un mari.

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