Prime jeunesse

XXX

Les bonnes gens des villages alentour seplaignaient de vols commis dans les fermes, dans les granges, et jene cessais d’avoir peur que la gendarmerie expulsât la petite tribunomade.

Un jour en effet je ne vis plus à leur placehabituelle, au pied des vieux chênes verts, les roulottes ni leschevaux ; restaient seulement sur le lichen des tracescarbonisées indiquant les feux qu’avaient allumés les bohémiens.Ils avaient dû fuir pendant la nuit, mais par quelle route, versquel inconnu ? et, dès la première minute, je comprisl’inanité de toute poursuite ; c’était bien la séparation sansrecours. Il me sembla d’abord que mon cœur cessait de battre…

Je ramassai un des roseaux coupés par elle,qui traînait par terre, et je me mis à errer sans but, dans laforêt, choisissant les fouillis d’épines encore inexplorés,allongeant ma course pour retarder mon retour à la maison. Sur lafin de la journée, je revins malgré moi au ravin d’ombre, où, dansun silence de sanctuaire, les petites libellules, aux toujoursmêmes luxueuses parures, dansaient comme si de rien n’était.

Là, à une place qui nous avait été familière,je m’assis sur des mousses que nous avions foulées ensemble et, latête dans mes mains, je pleurai tout à coup à sanglots. – Ceslarmes, comme une pluie soudaine, ce n’était pas à sa beauté ni àsa forme qu’elles allaient, oh ! non, mais à l’expression deconfiante tendresse qui, les derniers jours, avait paru dans sesjeux…

Auteurs::

Les cookies permettent de personnaliser contenu et annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Plus d’informations

Les paramètres des cookies sur ce site sont définis sur « accepter les cookies » pour vous offrir la meilleure expérience de navigation possible. Si vous continuez à utiliser ce site sans changer vos paramètres de cookies ou si vous cliquez sur "Accepter" ci-dessous, vous consentez à cela.

Fermer