Amours Délices et Orgues

ABAISSEMENT DU PRIX DU GAZ

Les Parisiens sont bien bêtes de payer leurgaz six sous le mètre cube, quand ils peuvent s’en procurerd’excellent, à Londres, pour moins d’un penny.

Et le transport ? m’objecterez-vous.

Le transport, le transport, c’est là où jevous attendais ! Quand vous avez dit le transport,vous avez tout dit.

– Eh bien ! tas de serins, nonseulement le transport ne coûterait rien, mais il rapporterait.

Vous ouvrez de grands yeux, lecteurs, et denon moins grandes oreilles.

Je vous le répète : non-seulement letransport ne coûterait rien, mais il RAP-POR-TE-RAIT !

Une telle assertion mérite un brind’explique.

Les Compagnies de chemins de fer, commed’ailleurs les Messageries maritimes et autres, font payer letransport des marchandises, selon le poids desdites denrées.

Or, je vous prie, que pèse le gazd’éclairage ?

Ne se contentant pas de peser rien du tout, ilpousse la coquetterie jusqu’à peser moins que rien, en vertu duprincipe d’Archimède.

(Une courte parenthèse, si vous avez uninstant : avez-vous remarqué qu’on parle toujours du principed’Archimède et non de ses principes, dont il était, d’ailleurs,dénué à ce point, que sortant du bain il se promenait tout nu dansles plus fréquentées artères de Syracuse, pour se sécher,disait-il ?)

Il arriverait donc qu’en bonne logique, lesCompagnies devraient remettre, au lieu de les percevoir, des sommespour le transport de cette marchandise à poids négatif.

Les choses se passeraient-elles ainsi dans lapratique ? Je ne crois pas.

Les administrations feraient intervenir laquestion, peu négligeable, j’en conviens, du volume, et enprofiteraient pour exiger des argents énormes.

C’est alors que j’offre la ressource del’aérostat.

Et là, encore, c’est du gratuit trimballage,ou à peu près.

Car rien ne nous empêcherait, mes bons amis,de profiter du ballon pour rapatrier en sa nacelle le linge blanchià Londres de stupides mais rémunérateurs snobs.

Il suffirait que cinquante ou soixante millecommerçants parisiens missent mon idée à exécution, pour voir latoute-puissante Compagnie du Gaz baisser un peu ses prix.

Oui, mais voilà : en France, on est fortpour crier, mais dès qu’il s’agit d’attacher le grelot, il n’y aplus personne !

Pauvre France !

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