SCÈNE VIII
Les précédents, Souworow, l’état-major
Souworow, d’une voixvibrante. – Hettmann !
Le hettmann. –Feld-maréchal ?
Souworow. – D’oùviens-tu ?
Le hettmann. – J’arrive delà-haut… en reconnaissance.
Souworow. – Pourquoi l’attaquen’est-elle pas commencée ?
Le hettmann. – La route estdifficile, feld-maréchal ; elle devient toujours plus roide,et puis les trous…
Souworow. – Il n’y a pas de routedifficile. (Avec violence.) Qu’on attaque… qu’onattaque !… Va dire que Souworow arrive ! (Le hettmannpart au galop, avec ses cosaques. – Souworow regardant samontre.) Il est midi… le colonel royal-impérial de Strauchdevrait avoir ouvert son feu depuis vingt minutes… C’estinconcevable.
Le colonel d’état-majorMandrikine. – Si les routes sont coupées,feld-maréchal !…
Souworow,l’interrompant.– À la guerre, toutes les raisons bonnes oumauvaises ne signifient rien. Quand on est convenu d’un mouvement,il doit s’exécuter à la minute, pour ne pas rendre l’attaqueinsuffisante. À quoi me sert-il d’avoir de bonnes raisons, si jesuis battu ?
(En ce moment, le canon tonne et lafusillade s’engage.)
Souworow, remettant sa montreen poche. – Enfin ! (Regardant autour de lui, etvoyant des canonniers au repos.) – Qu’est-ce que ces hommesfont là ?
Mandrikine. – Ils escortent leconvoi.
Souworow. – Eh bien, le convoiest passé. (Aux soldats.) Allez… allez… vivement !…(Se retournant vers Mandrikine.) Tous ces détachements àdroite et à gauche sont des pertes ! (Les soldatsmontent. – À ses officiers.) Il est midi juste, àdeux heures nous serons sur le plateau. Mais il faut allerbrusquement… il faut déconcerter l’ennemi par l’impétuosité del’attaque… Plus la position est désavantageuse pour nous, plus ilfaut en brusquer la fin. En avant, messieurs, en avant !
(Ils partent.)