SCÈNE II
Les précédents, au bord du plateau ;le major Belinsky
et le Dr Sthal, au-dessous.
(Continuation du défilé.)
Le docteur, criant au majorqui le précède. – Hé ! major, une petite halte… Monpauvre Jacob n’en peut plus ; vous savez qu’il a quinze ans deservice.
Le major. – Je vous avais prévenude l’abattre après Novi ; c’est une vieille bête ruinée,poussive.
Le docteur. – Je le sais bien,mais quand on a passé par Ismaïlow ensemble, par Praga, on n’aimepas de se séparer. (Tapant sur le cou de son cheval.)N’est-ce pas, Jacob ?
Le major. – Il finira par vouslaisser en route, docteur.
Le docteur. – Ce ne serait pasétonnant, dans un chemin pareil. (En ce moment, il lève latête, et voit le tonneau d’eau-de-vie sur sa malle ; sautant àbas de cheval.) Oh ! mille tonnerres !
Le major. – Qu’est-ce quec’est ?
Le docteur, tirant son chevalpar la bride. – Tous mes instruments écrasés !
(Il veut rouler la tonne.)
Hattouine. – Qu’est-ce que tudemandes, coupeur de jambes ?
Le docteur, aux soldats.– Ôtez-moi cela, canailles ! (Les soldats enlèvent latonne. Le docteur ouvre sa malle et regarde.) Dieu soit loué,tout est en bon état.
(Le major, Hattouine, Ivanowna et lessoldats se penchent et regardent.)
Hattouine. – Ne regardez pas, cesont les petits couteaux !
Le docteur, riant.– Lespetits et les grands ; et nous allons en avoir besoin tout àl’heure ! (Montrant une large scie au major.) Lesgueux m’ont fait trembler ! Rien que cette scie anglaise mecoûte trois livres sterling.
(Le major, sans répondre, poursuit saroute en criant aux soldats qui continuent de défiler : Enavant !… en avant !…)