La Guerre

SCÈNE VIII

 

Les précédents, le parlementaire,
Marie-Anne, hussards, etc.

 

Molitor, à l’officier dehussards. – Ôtez le bandeau du parlementaire.

(L’officier obéit.)

Popritchine, d’un tonhautain. – Le général Molitor ?

Molitor. – C’est moi.

Popritchine. – Le feld-maréchalSouworow, avant d’attaquer le défilé de Glotten (appuyant surles mots), défendu par vos trois bataillons, me charge de vousprévenir qu’il connaît vos forces et votre position entre Linken,Jellachich et lui. Il me charge de vous inviter, au nom del’humanité, à bien peser les conséquences d’une résistance inutile,et de vous faire savoir qu’il vous accorde un quart d’beure pourdéposer les armes.

Molitor. – C’est tout ?

Popritchine. – Oui, c’est tout,général.

Molitor, d’un accentironique, en regardant sa montre. – Un quart d’heure deréflexion… Le feld-maréchal Souworow est généreux ! moi, jelui donne vingt minutes, pour se rendre avec armes et bagages.C’est également au nom de l’humanité que je lui parle. Sa positionm’est parfaitement connue : il a Lecourbe en queue ; dansquelques heures il aura Soult et Masséna en flanc, et, enattendant, il a Molitor en tête. (D’un accent indigné.)Dites à Son Excellence que le temps de la jactance est passé, quede pareils moyens peuvent réussir avec des Turcs ; mais queles Français trouvent ridicule toute sommation de ce genre, quandon n’est plus en état de joindre les actes à la menace. – Dites-luique Linken et Jellachich sont battus… Que Jellachich a repassé lesmontagnes de Keresen, et que Linken est en pleine retraite sur lesGrisons. – Qu’il réfléchisse à mon invitation… Quand une porte estfermée, on est heureux quelquefois de s’échapper par lesfenêtres.

Popritchine, d’un ton sec etdur, en regardant sa montre. – Vous avez encore dixminutes.

Molitor, riant.– Dans cecas, Son Excellence le feld-maréchal n’a plus qu’un quartd’heure ! (À l’officier de hussards, – d’un tonfroid.) Reconduisez le parlementaire. (On remet sonbandeau à Popritchine, et comme on le reconduit, Molitorajoute 🙂 Ces gens-là parlent toujours comme au lendemainde Novi… Ils ne veulent pas comprendre que Masséna a gagné, il y adeux jours, la bataille de Zurich ! (Puis s’adressant àses officiers, d’un ton de bonne humeur.) Allons… messieurs…allons ! Lecourbe arrive derrière les colonnes russes… Soultet Masséna viennent par la droite… Tout ira bien !… Nous avonsbattu Linken hier, et Jellachich avant-hier… Il s’agit de battreaujourd’hui Souworow l’invincible !

(Il pique des deux et sort par la gauche.L’état-major le suit.)

Le capitaine,commandant.– Par le flanc droit… droit !… En avant…par file à gauche… pas accéléré… marche !

Marie-Anne, regardant défilerle peloton. – Rabot, tâche d’attraper un bon sac !…

Rabot, se retournant.–Soyez tranquille, citoyenne Marie-Anne, on aura ce soir des bottesen cuir de Russie !

(Marie-Anne rit. D’autres troupes arriventpar la droite, et défilent tambour en tête.)

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