3.
Je revins à Lowchester dans un état lamentable, épuisé par mesvains désirs de Nettie, sans me demander même ce que l’avenir meréservait.
Une fascination curieuse m’attira vers la grande maison, pour ycontempler la quiétude silencieuse qui avait été la figure de mamère. À mon entrée dans la chambre, Anna, qui était assise devantla fenêtre ouverte, s’avança à ma rencontre. Elle avait l’air dequelqu’un qui attend ; elle aussi était pâle, d’avoir veillétoute la nuit, souhaitant ma venue, veillé entre la morte reposantdans la pièce et les grands feux de Beltaine au-dehors.
Je restai muet entre elle et le lit mortuaire.
– Willie, – dit-elle, à voix basse, semblant, dans ses regardset son attitude, incarner la pitié.
Une présence invisible nous poussa l’un vers l’autre. Le visagede ma mère me parut prendre une expression résolue, impérieuse.
Je me tournai vers Anna, comme un enfant se tourne vers sanourrice. Je posai mes mains sur ses fortes épaules ; ellem’entoura de ses bras, et mon cœur céda. Je cachai ma figure surson sein et, défaillant, j’éclatai en sanglots passionnés.
Elle me serra dans ses bras avides.
– Allons ! Allons ! – murmura-t-elle, comme pourconsoler un enfant.
Et bientôt, telle une mère compatissante, elle m’embrassa avecune passion anxieuse et profonde, couvrant de baisers mes joues etmes lèvres. Et sa bouche sur la mienne était amère du sel de seslarmes.
Je lui rendis ses baisers, puis, cessant soudain ces caresses,nous nous écartâmes, nous observant l’un l’autre, en silence.