LXXV
C’est en Orient maintenant que viennent metrouver ces petites lettres d’Yves ; elles m’y apportent, dansleur simplicité, les senteurs déjà lointaines du pays breton.
Ils s’éloignent beaucoup, mes souvenirs deBretagne. Déjà je les revois passer comme à travers des voiles derêve ; les écueils connus de là-bas, les feux de la côte, lapointe du Finistère avec ses grandes roches sombres ; et lesapproches dangereuses d’Ouessant les soirs d’hiver, et le ventd’ouest qui courait sous le ciel morne, à la tombée des nuits dedécembre. D’ici, tout cela semble la vision d’un pays noir.
La pauvre petite chaumière de Toulven !Elle était bien humble, bien perdue au bord du sentier breton. Maisc’était la région des grands bois de hêtres, des rochers gris, deslichens et des mousses ; des vieilles chapelles de granit etdes hauts foins semés de fleurs roses. Ici, du sable et desminarets blancs sous une voûte très bleue, et puis le soleil,l’enchanteur éternel.