Le Roman d’un spahi

XI

Fatou ne pouvait apercevoir un ngabou(un hippopotame) sans courir les risques de tomber raidemorte ; – c’était un sort jeté jadis sur sa famille par unsorcier du pays de Galam ; – on avait essayé de tous lesmoyens pour le conjurer. Elle avait dans ses ascendants de nombreuxexemples de personnes ainsi tombées raides, au seul aspect de cesgrosses bêtes, et ce maléfice les poursuivait sans merci depuisplusieurs générations.

C’est, du reste, un genre de sortassez fréquent dans le Soudan certaines famille ne peuventvoir le lion ; d’autres, le lamantin ; d’autres, – lesplus malheureuses, celles-là, – le caïman.

Et c’est une affliction d’autant plus grande,que les amulettes mêmes n’y peuvent rien.

On s’imagine les précautions auxquellesétaient astreints les ancêtres de Fatou dans le pays deGalam : éviter de se promener dans la campagne aux heures queles hippopotames affectionnent, et surtout n’approcher jamais desgrands marais d’herbages où ils aiment à prendre leurs ébats.

Quant à Fatou, ayant appris que, dans certainemaison de Saint-Louis, vivait un jeune hippopotame apprivoisé, ellefaisait toujours un détour enorme pour ne pas passer dans cequartier, de peur de succomber à une terrible démangeaison decuriosité qu’elle avait d’aller voir le visage de cette bête, dontelle se faisait faire tous les jours par ses amies des descriptionsminutieuses : – curiosité, comme on le devine sans peine, quitenait, elle aussi, du maléfice.

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